Récit de la course : La Barjo - 50 km 2021, par Le Lutin d'Ecouves

L'auteur : Le Lutin d'Ecouves

La course : La Barjo - 50 km

Date : 19/9/2021

Lieu : Urville Nacqueville (Manche)

Affichage : 1349 vues

Distance : 52km

Objectif : Pas d'objectif

19 commentaires

Partager :

9 autres récits :

Vieux et puéril


Trop bien, j'ai réussi à convaincre plusieurs membres des Trailers d'Ecouves à s'entraîner pour les 100 km de Millau ; j'ai même réservé un gîte sur place pour passer des vacances dans les Causses et les séances coachées par votre serviteur se passent à merveille et puis... Boum ! je dirai même plus : Krabardaf ! Le coronamachin a tellement escagacé l'épiderme de l'organisation de la course qu'ils ont plié les gaules jusqu'en 2022. Adieu Millau ! Je me retrouve avec un plan niveau commando et une bande d'excités sur les bras. Enfin, le noyau dur des excités composé de deux Road Runners Mag et Béa accompagnée de son mari Fab. "On continue le plan, c'est trop bien les fractionnés et les entraînements longs en côte à se faire péter les poumons !" Mais... que faire de toute cette énergie ?

C'est Katia qui est en train de tranquillement préparer le 120 km du Grand Raid des Pyrénées qui me donne la solution : "Tes Bip-Bip tu les emmènes à la Barjo, ça va peut-être les calmer." Je connais la région, le 100 km de la Barjo, ça ne serait pas raisonnable mais le 50 km de la Demi-Barjo avec un dénivelé acceptable de 1500 m, ça devrait le faire. Banco ! On sera quatre à courir accompagnés de ma Josette et Patricia qui devaient faire le marathon de Millau et qui se rabattront sur le trail de 15 km bien raide avec ses presque 700 m de D+.

 

Nez de Jobourg

Ah ouais c'est connu, la Normandie c'est plat comme le Nez de Jobourg situé sur le trajet de la course avec ses 130 mètres au-dessus du niveau de la mer. Nous sommes à l'extrémité nord-ouest du Cotentin, une région tellement belle qu'on se garde bien d'en parler aux Parisiens de peur d'être envahis. 

Goury

Logés à Beaumont-Hague à 500 m du départ, nous profitons du samedi veille de la course pour faire un peu de tourisme, outre Goury et le Nez de gneiss icartiens que nous moucherons le lendemain, nous allons nous baigner à Vauville...



... puis randonner sur les immenses dunes de Biville.


 

Croyez-moi si vous voulez, le soir on n'a même pas picolé... ou très peu.

 

La course
19 septembre 2021

 

 
Les gars de la Manche sont civilisés et nous ont concocté un départ à 10h du matin, ça c'est sympa pour les croulants comme moi. Le temps est gris mais plutôt doux, le soleil se pointera plus tard mais on n'est pas pressé. 

 

 

Les huit premiers kilomètres se font dans une campagne similaire à notre pays ornais avec ses chemins creux et parfois boueux malgré le temps sec de ce début septembre. N'y tenant plus, Béa s'envole accompagnée de son Fab. Je reste un moment avec Mag pour la coacher car elle est plutôt nouvelle sur longue distance. Au bout d'un tombereau de conseils et autres injonctions, je sens que je deviens un peu lourdingue et que seul le respect dû à mon grand âge l'empêche de me pousser dans le fossé pour que je cesse de l'abreuver de mes pontifiantes calembredaines. Je la laisse s'envoler dès que nous arrivons en vue de la côte. Mes compagnons ont vingt ans de moins que moi je n'ai plus les moyens de les suivre. Je vais en profiter pour gérer mon trail à la Lutin : pas trop vite mais pratiquement sans marcher. 

 


Comme je suis parti à une allure modérée, il faut pour le moment que je double tous ces 💀💀💀 de coureurs qui ne savent pas descendre et qui marchent pour un oui, pour un non. Je me fais bien engueuler par un mauvais coucheur qui trouve que je saute trop près de lui mais dans l'ensemble, les concurrents sont Normands donc placides et courtois. 

 


Jusqu'à Omonville la Rogue, le dénivelé est négociable et le terrain aisé. Premier ravito au Port du Hable, je remplis une flasque et marche une minute. Le circuit nous fait quitter la côte durant plus de sept kilomètres histoire de grimper un peu...

 


Ça m'arrange ! Je vais pouvoir commencer à faire le Pacman. A 65 berges, c'est un plaisir de gourmet de doubler des quadras ou même des trentenaires même si je ne cours parfois qu'à cinq ou six à l'heure. Voir un vioque te passer alors que tu commences à chauffer du joint de culasse, ça te coupe les pattes. Bien sûr, un bon nombre me repasse dès que le terrain est plat mais je les reprends dès que ça remonte. Et ça, ça les énerve ! J'aime cela car je suis méchant. La preuve, je fais aussi du cross...

 


Au milieu du parcours après avoir rejoint la mer, nous arrivons sur de longues lignes de galets impossibles à courir pour les humains mais galopables à souhait pour un lutin. Je cours en faisant un bruit d'enfer et ça énerve le monde. Je pacmanise et je jouis !

 

 

En arrivant à Port Racine, je cause un moment avec Véronique qui est de mon pays de l'Orne. Elle a un bon niveau et va finir deuxième M5F. Elle vient de perdre sa camarade qui chauffe du carbu et me résiste un bon moment avant de lâcher après Goury.

 


Nous passons les trente bornes, jusqu'ici je me suis bien amusé. J'ai remonté tout un groupe de coureurs d'Alençon-Trail, des gars de cheu nous. Je suis à la poursuite de Michel leur entraîneur qui a à peine 60 ans et qui a fini par lâcher ses ouailles qui se sont mis à pleurer leur mère. Depuis un moment, je fais le yoyo avec deux jeunes filles qui vont plus vite que moi sur le plat et que je poutre dès que les choses se corsent. Nous arrivons dans la petite Irlande parmi les prés clôturés de pierres sèches. Le terrain est facile mais les passages de clôtures me font grincer les cuisses. Avec le temps, mes raideurs se sont déplacées aux mauvais endroits. 

 


Bis repetita lutino placent ! Nous arrivons à Goury et tout le monde marche sauf le Lutin qui galope sur les caillasses sous l’œil effaré des autres participants. Je rattrape ainsi Michel le coach d'Alençon Trail ainsi que moult autres concurrents effrayés par le bruit. Et s'ils ne sont pas contents, qu'ils se tirent ailleurs, c'est mes galets ! Cela dit, Michel me repasse aussitôt après le ravito ainsi que les deux charmantes jeunettes avec lesquelles je yoyotte depuis un bon moment. Je ne m'affole pas car voici le dessert.

 

 

Environ 60% du dénivelé se trouve dans les 12 derniers kilomètres, je me mets en mode trottinette et grimpe tranquillement. Parfois je ne suis même pas à cinq à l'heure mais les autres marchent à trois ! Seules les deux gamines en short me résistent, me passant dans les descentes alors que je les dépasse lors des montées, ce qui m'agrée et pas que de canard car j'admire à chaque fois sans vergogne leur joli physique de traileuses en devenir.

 


Je dois avouer que courir sur ce genre de terrain n'est pas raisonnable et je dois bien marcher à certains moments. On a passé la distance marathon et je commence à chauffer un peu d'autant qu'il commence à faire plus que tiède.

 


Pour le coup, je fais moins le pitre et gère au mieux mon rythme. Je ne suis pas loin de faire une ânerie en négligeant de m'hydrater un moment par pure flemme, ma dernière réserve d'eau se trouvant à l'arrière de mon sac. C'est seulement à quatre kilomètres de l'arrivée que je réalise mon erreur, j'avise un spectateur et je lui demande de me filer ma dernière flasque. Il s'exécute gracieusement et je le remercie grandement. Vertudieu, j'engloutis un demi-litre en deux km ! Bien m'en a pris, je repars comme en quarante dans la dernière difficulté qui est un monstre goudronné d'un bon kilomètre de long. Têtu comme un âne qui recule, j'entreprends de tout courir alors que les autres rampent presque. Je finis par me dire que je suis cinglé comme une huître qui baille et, après avoir parcouru les trois quarts du mur, je me mets enfin à marcher.

 


C'est à ce moment que je relève la tête et que je vois une de mes deux fillettes avec qui j'ai joué à l'élastique. Elle tente d'apercevoir sa copine qui doit agoniser en bas de la côte. Faute de copine, elle engage la conversation avec moi. Elle a 29 ans et c'est son premier trail. La vache, elle ne se mouche pas du pied la gamine ! Je comprends mieux quand elle me dit qu'elle fait de l'athlétisme mais que ce n'est que très récemment qu'elle se met aux longues distances. Elle doit courir un marathon cet automne et j'en profite pour lui faire un résumé de ce que peut être un plan d'entraînement. La jaugeant de mon œil de spécialiste (Mama mia, les belles quilles !) je lui annonce que pour commencer, elle peut tenter les 3h45 sur marathon. Le terrain s'aplanissant, j'accélère et elle me laisse partir, préférant attendre sa copine plutôt que de finir avec un lutin libidineux. A quinze cents mètres de l'arrivée, alors que nous progressons dans une sorte de soue à cochon, j'ai la surprise de doubler Michel qui est tellement poutré que je vais lui mettre trois minutes dans le côlon sur cette courte distance. Y'a pas de petit plaisir...

 


J'arrive finalement en 7h01 pour 52 km, 1er M6 à 43 min du deuxième. Oui, je sais c'est mesquin car il n'y avait que quatre M6 sur cette épreuve et se battre ainsi entre plus de 65 berges, c'est puéril. Eh bien, je m'en fiche nananère car en plus j'ai niqué douze des quinze M5 de plus de 60 ans dont Michel qui est de chez moi et dont j'ai eu les fils en classe. On ne se refait pas, je suis mauvais comme un blaireau acariâtre et j'aime ça.

 

 

Et qui c'est qui arrive peu après de son 15 km ? C'est ma Josette en pleine forme qui termine première M5F sur cinq. C'est la cerise sur les gâteux !

Patricia, en pleine forme, a bouclé le même trail en 2h03 onze minutes devant Josette. Quant aux deux Road Runners, elles ont fini ensemble 4ème et 5ème M2F du 50 bornes mais surtout 14 et 15ème féminines 28 minutes devant leur coach, ce qui n'est pas de la gnognotte. Fab, prudent, s'est tenu à distance sept minutes derrière les filles et finit en 6h40.

Le soir, l'alcool coule à flots, surtout pour moi car les jeunes reprennent le boulot le lendemain. Quant aux deux retraités, ils profitent encore quelques jours de cette région magnifique qu'est le Cotentin.

 


 

 





 


19 commentaires

Commentaire de centori posté le 05-10-2021 à 10:30:32

poutrer les jeunettes, ben dit donc le lutin est en forme. chouette récit en tout cas, et belle course. je l'ai fait en OFF en mai dernier et qu'est-ce que j'en ai bavé dans ces passages en galet. pfff

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 05-10-2021 à 10:59:05

Ah, un connaisseur de la Normandie ! Les galets, j'ai adoré mais je ne suis pas normal.
Merci pour ton commentaire.

Commentaire de Françoise 84 posté le 05-10-2021 à 11:34:03

Super, ton récit, merci Thierry!!! Ça fait plaisir de vous voir de retour sur les chemins et quelle réussite!! Un grand bravo à Josette et toi!

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 05-10-2021 à 20:04:08

Merci pour ton commentaire, la méchanceté, c'est ce qui me tient en forme...

Commentaire de L'Dingo posté le 05-10-2021 à 12:20:29



Bien sûr, la Barjo se court sur du gneiss icartien et non pas sur du gabbro sélénien, on n'est pas des jobards :-)

entre calembours africain ou anatidé, un récit d'un pur régal à lire et à relire.
l'attente pour le retour du Lutin, épisode 69, en valait la peine.


enfin je rappellerai non sans perversité moi aussi, (me too), que le yoyo est bien mouvement alternatif de bas en haut , et non d'avant en arrière , et que faire la trottinette se distingue de faire la brouette. :-))

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 05-10-2021 à 20:06:55

Merci pour le com, en ce qui concerne les gneiss, après la course nous sommes allés faire des photos de terrains qui avaient 2 milliards d'années... très impressionnant.

Commentaire de Pegase posté le 05-10-2021 à 14:46:17

Salaud de vieux, aucun respect pour la jeunesse. Toujours autant en forme.
Bise du vieux Pégase devenu fantôme.

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 05-10-2021 à 20:12:10

Ça fait plaisir d'avoir des nouvelles du Pégase. Les Terrils, c'est bien loin (on s'est aussi vus à Condé) mais le Lutin n'oublie jamais les camarades.

Commentaire de L'Dingo posté le 05-10-2021 à 20:22:25

Les Terrils pour un Lutin , c'est les Alpes pour un kikou-trailer ;-)

Commentaire de Shoto posté le 05-10-2021 à 21:03:23

Excellent récit. Je me suis bien amusé à te lire. Merci à toi 😁 et Bravo pour ta première place de Master 6 👏

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 10-10-2021 à 18:37:55

Merci beaucoup !

Commentaire de philkikou posté le 06-10-2021 à 12:33:40

Super de voir le Lutin en grande forme de la tête (pour le récit) aux pieds (pour la belle course menée de main de Lutin) ! 2 perles parmi tant d'autres qui m'ont bien fait rire :« qu'ils se tirent ailleurs, c'est mes galets » ….. « ce qui m'agrée et pas que de canard » ! Bravo à tous les Ecouviens, et notamment à Josette !

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 10-10-2021 à 18:38:55

Merci Phil... et il y a aussi la cerise sur les gâteux ;)

Commentaire de benoitb posté le 06-10-2021 à 19:04:39

"qu'ils se tirent ailleurs, c'est mes galets !" : posé comme ça, tranquille, débarquant d'on ne sait où en plein récit, et repartant sans tambour ni trompette... Formidable ! Quand j'ai vu que le Lutin avait commis un nouveau récit, je savais que je devais le lire, je ne suis pas déçu. Merci pour cette prose toujours aussi agréable.

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 10-10-2021 à 18:40:19

C'est gentil Benoît. Peu de courses donc peu de récits... Je suis content que cela te plaise.

Commentaire de jpoggio posté le 09-10-2021 à 19:37:27

Du pur concentré de petit vieux indigne (indigné?). Une merveille !
Du coup, je vais m'en aller faire une petite séance de fractionné, tiens, pour dans huit ans.

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 10-10-2021 à 18:41:35

Merci. Les lutins ne s'améliorent pas en vieillissant. Il paraît qu'après cent ans, ils sont encore pires.

Commentaire de Twi posté le 11-10-2021 à 12:27:44

Joli récit, ça donne trop envie d'aller courir cette partie de la Normandie occidentale. Reste à savoir si l'origine géologique des galets cotentins fait qu'ils requièrent la même technique que nos silex seinomarins ?

Bon, j'ai pas bien compris si le "voici le dessert" faisait référence aux 2 jeunettes ou aux courbes du parcours, mais l’ambiguïté est bienvenue.

Bravo pour la perf en tout cas, ...

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 13-10-2021 à 15:32:52

Merci Twi. Mine de rien, dans l'anse du cul rond, j'ai photographié des gneiss ayant 2 milliards d'années. Le coin est bien connu des géologues.

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.07 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !