Récit de la course : Restonica Trail - 110 km 2022, par gpreveraud

L'auteur : gpreveraud

La course : Restonica Trail - 110 km

Date : 7/7/2022

Lieu : Corte (Haute-Corse)

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Distance : 110km

Objectif : Terminer

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UTC 2022

Amateur des trails de la Restonica (deux participations au 33 et deux participations au 70) je regardais avec envie l'UTC et ses 110 kms de périple à travers la montagne Corse, mais doutais de mes capacités à en venir à bout. L'enchaînement de deux nuits à courir me paraissait difficile à surmonter. Parvenu l'an dernier à bout du 110 des Templiers sans trop de difficultés, je me suis dit que l'UTC était peut être jouable.

Je me suis donc inscrit sur l'épreuve cette année, et me suis rendu à Corte pour prendre le départ de la course, le jeudi soir à 23h. L'animation battait son plein en ville, et près de 250 participants étaient engagés.

Le rythme est assez soutenu sur la première montée. Parti en queue de peloton, je double quelques coureurs dans les premiers hectomètres, mais m'en tiens ensuite à ma position dans la file. Je pourrais progresser plus vite, mais suis conscient de ce qui nous attend ensuite. La température se fait de plus en plus agréable au fur et à mesure de l'ascension, alors que la nuit s'installe. Les frontales révèlent un épais nuage de poussière.
l’Arcu di u Scandulaghju apparaît généreusement éclairée dans la nuit, puis nous atteignons Padule où est proposé un ravitaillement léger. Les autres coureurs s'attardent peu et j'en fais de même. Ils s'engagent avec vigueur dans la montée finale vers Bocca Canaglia et je me laisse doubler par de nombreux concurrents. Je trouve que cela part quand même vite pour un trail aussi long.
La courte descente vers Cogna n'est pas évidente dans la nuit, mais la piste qui suit est comme toujours reposante, permettant de se dégourdir les jambes. Le ravitaillement de Boniacce arrive vite, alors que j'en suis à un peu moins de 3H30 de course. Là aussi, les coureurs ne s'éternisent pas. Je prends davantage mon temps, mais repars après une dizaine de minutes en regrettant de n'avoir pris un peu plus de repos.

Je descends seul jusqu'à Séga, vaquant à mes pensées avec une lassitude croissante. J'y vais assez doucement, alors que le terrain devient délicat et que la nuit n'arrange rien.
La remontée le long du Tavigagnu dans la nuit est assez agréable. Je progresse sans forcer, courant le moins possible. Le chemin s'élève ensuite sur la droite, quittant l'itinéraire du 80. S'en suis une montée assez longue vers le plateau puis une redescente tout aussi longue vers Calacuccia alors que le jour se lève, et que le lac se profile en contrebas.
Cela fait 7h30 que je cours quand j'arrive à Calacuccia. Je prends le temps de me bien manger, de changer de chaussettes, de me masser, et reste quasiment une demi-heure sur place. Il n'y a plus beaucoup de coureurs quand je repars et cela me donne l'impression d'avoir traîné.

J'aborde la montée suivante avec une forme physique assez correcte, mais le moral n'est pas terrible. J'ai couru seul depuis le début de la course et ressens l'impression de m'ennuyer et de ne pas prendre tellement de plaisir. Il n'y a plus beaucoup de coureurs autour de moi et le sentiment d'être attardé n'arrange rien.
Le début de l'ascension vers Bocca Crucetta, point culminant du parcours à 2450m, se fait sur une large piste, permettant de souffler un peu. Elle se poursuit sur un sentier d'alpage un peu plus pentu. Le soleil s'élève dans le ciel et il commence à faire chaud. Les derniers hectomètres d'ascension sont plus complexes et nous conduisent à évoluer dans des éboulis rocheux. La fin de la montée est exténuante et périlleuse. Meilleur grimpeur que descendeur, je double quelques coureurs mais y laisse certainement pas mal d'énergie, ne prenant pas suffisamment de temps pour m'alimenter.
Je parviens assez exténué au Col. Nous ne sommes pas au bout de nos peines, alors que la descente qui suit, vers le refuge de Tighettu est encore plus harassante que la montée. Elle commence sur des pentes de poussière extrêmement raides et glissantes, puis se poursuit par de longs passage de désescalade. Il n'y a pas un instant de répit. Le ravito suivant se fait longtemps attendre, d'autant qu'il convient de dépasser Tighettu pour descendre jusqu'à Ballone.
J'atteins les bergeries après 14h d'effort et le précédent ravitaillement est déjà loin. Je me sens épuisé et pense sérieusement à l'abandon, ne me voyant pas continuer encore 20h dans ces conditions. Ma lucidité commence à faiblir et je peine à envisager une deuxième nuit sur le chemin, sachant ce qui nous attend ensuite.

Je repars cependant vers Vergio, avec le peu d'énergie qui me reste. Le sentier reste compliqué au sortir de Ballone et mon pas n'est plus très sûr. La remontée vers Bocca Foggiale n'est pas très longue (500m à remonter) mais est assez exténuante et mon projet d'abandon se précise. Je croise quelques coureurs au col avec lesquels je redescends vers le refuge de Ciottulu di i Mori. Ils me confient avoir le même sentiment que moi, ne plus prendre de plaisir et ne se sentant pas capables de continuer.
Parvenir à Vergio devient mon seul objectif et tout le reste finit par me lasser, les cailloux qui n'en finissent pas, les randonneurs du GR20 que nous croisons par dizaines, les refuges bardés de tentes aux allures de camps de réfugiés, le soleil qui brûle.
Je descends seul, tel un pantin, sur ce sentier toujours aussi pénible où il est impossible de dérouler son pas. Je regrette un peu de ne pas avoir pris de bâtons cette fois, alors que cela m'aurait sans doute aidé à m'équilibrer dans ces descentes périlleuses.
Ma progression est lente et Vergio finit par m'apparaître inatteignable. J'arrive au col à 18h36 et cela fait quasiment 20h que nous sommes partis de Corte. Je fais part de ma volonté d'abandonner. On me reprend mon dossard et je récupère mon sac de délestage. Les organisateurs me trouvent un conducteur qui redescend, et je suis en voiture quelques minutes plus tard. La course est finie pour moi et tout est déjà loin.

Je n'ai pas vraiment de regret d'avoir arrêté. Mon corps n'aurait pas tenu jusqu'au bout dans ces conditions et il fallait mieux arrêter avant que l'affaire ne tourne vraiment au vinaigre.

Je suis en revanche très déçu de n'avoir pu prendre le dessus sur l'épreuve et d'avoir autant subi. J'ai clairement sous-estimé la difficulté d'ensemble, n'ayant pas non plus l'expérience de ces trails nécessitant d'enchaîner plusieurs nuits blanches.

L'écart de difficulté avec le 70 paraît en tous les cas considérable, et les 40 kms qui viennent se rajouter sont à considérer avec vigilance. 12h me suffisent à venir à bout du 70, quand 20h ne m'auront même pas permis de réaliser la même distance sur le 110.

Je ne dispose pas à ce stade d'une compréhension suffisante des facteurs clés de succès sur le 110 pour un traileur moyen. Il me semble en tous cas en avoir identifié quelques uns:
- Importance de bien s'arrêter aux ravitos et de prévoir des pauses intermédiaires suffisamment longues pour s'alimenter en suffisance.
- Importance de maîtriser le rythme et de ne pas chercher à aller vite en début d'épreuve, compte tenu de l'extrême difficulté de certains passages situés au milieu de la course.
- Réel intérêt des bâtons entre Calaccucia et Vergio, quitte à les larguer à Vergio pour continuer sans ensuite.
- Prévoir deux nuits blanches et se préparer en conséquence.

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