Récit de la course : SaintéLyon 2022, par Khioube

L'auteur : Khioube

La course : SaintéLyon

Date : 3/12/2022

Lieu : St étienne (Loire)

Affichage : 875 vues

Distance : 78km

Objectif : Pas d'objectif

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Boue, Boue, on n'a pas tenu le coup (Souchon ou presque)

Il paraît que la nuit porte conseil. Moi je crois qu’elle porte bonheur. 

Ah non, merde, ça c’est du Baptiste Chassagne. Bon, je me concentre. Alors…

Fidèle lecteur, tu sais que je vais commencer par un mot sur la préparation. En revanche, ne compte pas sur moi pour te jouer une énième variation sur le thème de je n’ai pas travaillé comme il faut, j’arrive à l’arrache, j’aurais pu, j’aurais dû. Ah non, pardi ! J’ai couru, environ 150 kilomètres par mois depuis septembre, après un été plein de belles randonnées. J’ai progressé dans les montées, battu plein de records personnels dans les côtelettes de Fourvière, j’ai essayé de me refaire une santé grâce à l’endurance fondamentale, et je peux même affirmer que j’ai été assez régulier – toutes proportions gardées. Plutôt pas mal, donc, pour une fois – toutes proportions gardées, toujours. La seule ombre au tableau (et elle n’est pas négligeable), c’est que je n’ai pas fait de sorties longues. Rien au-dessus de 20 bornes ! Pas envie, c’est comme ça. Certes, j’ai cumulé 70 kilomètres en cinq ou six jours à environ un mois de l’épreuve, mais ce n’est pas la même chose. Cela suffira-t-il ? Rien n’est moins sûr.

Prêt ou pas prêt, j’arrive ! Je brûle d’impatience de prendre le départ de ma troisième Saintélyon. Je reste sur une prestation moyenne lors de la Saintexpress 2021 (Tom, si tu nous regardes...) et j’ai très envie de prendre une revanche. Et puis mon copain Robin, coach sportif du côté de Versailles (keepfitadomicile dans le business), sera également sur la ligne de départ. Nous décidons de partir ensemble et de voir où cela nous mène (n’est-ce pas une belle métaphore de la relation amoureuse ? Mais je m’égare…). Avoir de la bonne compagnie dans cette froide nuit de décembre, c’est un luxe !

Retrait du dossard avec Rob et l’inévitable Tom, qui prendra quant à lui le départ de la Saintexpress. Un petit tour dans la Halle Tony Garnier, nous goûtons les fameuses gaufres de chez Näak (excellentes), discutons boxers Saxx, croisons pas mal de copains, reconnaissons quelques célébrités (Oh my god, Casquette veeeeeeerte !). Soirée apéro-film avec Maya, ma préparatrice mentale (et surtout ma peintre sur dossard). Nuit assez médiocre, heureusement que je m’étais couché assez tôt le reste de la semaine. Je ne suis pas inquiet pour autant.

Robin et moi prenons le train à la Part-Dieu. Aller à Saint-Étienne en TER est toujours aussi commode, nous pouvons papoter tranquillement et au chaud. J’explique à Rob que j’ai entré le parcours dans ma Garmin Fenix 6 et que j’ai établi une stratégie PacePro qui doit nous ramener à la Halle Tony Garnier en 9h.  Attention les yeux, j'ai mis le paquet côté technologie. 9h, c'est très ambitieux, du reste ; mais on a bien le droit de rêver. J’avais mis 8h43 en 2017, mais le parcours était plus court et puis ma vitesse de croisière était nettement supérieure à ce qu’elle est aujourd’hui. Ne pas comparer. Ne pas comparer.

À Saint-Étienne l’ambiance est joviale, nous trouvons un tout petit coin où nous poser et nous papotons en faisant les derniers préparatifs. Je crois que je ne me suis jamais senti aussi détendu au départ d’un ultra ! J’ai essayé de faire mienne la philosophie de Kilian Jornet (à défaut de pouvoir faire mien son talent) : se rappeler que la course n’est que la consécration du travail, et que l’important est le chemin qui conduit jusqu’à la ligne de départ. Amen. J’ai pris du plaisir à courir ces dernières semaines, alors si la course se passe mal, il n’y a pas mort d’homme.

Vers 23h, nous faisons la queue pour déposer nos sacs à la consigne. C’est un bazar monstre, nous sommes vraiment ravis d’avoir pu bénéficier d’un bracelet  élites – merci, Christophe de Coachingatwork (décidément, j’en connais des coachs !) – qui nous permet d’accéder à la deuxième vague sans attendre des heures dehors.

Le départ étant décalé pour des raisons inintéressantes au possible, il se trouve que nous devons tout de même patienter une bonne demi-heure avant de nous élancer. Heureusement, il ne fait pas très froid ce soir. On annonce des précipitations, elles ne sont encore qu’une menace. Les conditions sont idéales à première vue, mais je garde à l’esprit l’avertissement de Tom, l’homme qui a toujours raison : cette nuit, le sentier sera gras ou ne sera pas. Je lance le GPS, et constate que ma montre ne contient ni la trace du parcours, ni la stratégie PacePro. Bien joué, Jérôme Bonaldi, cela valait le coup d’en faire tout un fromage dans le TER ! Bon, ce sera au feeling. C’est bien aussi, le feeling… 

C’est parti, nous voilà lancés. 12km/h à peu près, ce n’est vraiment pas rapide par rapport à l’allure que j’avais adoptée cinq ans plus tôt, mais j’ai dit qu’il ne fallait pas comparer. Mais j’y pense quand-même. Je m’oblige à beaucoup manger, cette année. J’ai déjà enfourné ma gaufre au caramel de chez Näak, je passe à la barre chocolat blanc / noix de macadamia de Clif Bar. Un vrai gueuleton !

Fidèle lecteur, à supposer que tu sois toujours là, sache que je vais passer assez rapidement sur les kilomètres à venir, pour la simple raison que je n’en ai pratiquement aucun souvenir. Tout ce que je sais, c’est que Robin et moi nous sommes efforcés d’avancer régulièrement, en ne cessant jamais de relancer lorsque c’était faisable, sans prendre de risque inconsidéré non plus. Je me rappelle que la pluie s’est rapidement intensifiée, qu’elle était fine mais constante, et que le brouillard rendait la visibilité très faible – à tel point qu’il était souvent plus confortable d’éteindre la frontale. 

Au premier ravito, nous faisons rapidement le plein d’eau, attrapons une petite soupe au passage et repartons avant d’avoir froid. Direction Sainte-Catherine, maintenant. Cela ne fait pas si longtemps que nous sommes partis, mais je peine déjà. Baisse de forme, jambes lourdes, que sais-je encore ; toujours est-il que je commence à me dire que je risque fort d’être un poids pour Rob. Je n’hésite donc pas à le lui faire savoir : si tu ne me vois plus, pas de problème, fais ta vie. Je lève donc un peu le pied, le temps de re-manger, de re-boire, et de retrouver la forme, si possible. Naturellement, ce coup de moins bien physique atteint également le moral, j’en viens à remettre en cause mes ambitions sportives – pourquoi est-ce que tu t’obstines à t’engager sur des distances pareilles, comment est-ce que tu pourrais finir une course comme l’UTMB alors que tu cales au bout d’un semi-marathon, la totale.

Je rumine, mais j’avance. Après une alternance de longues montées et descentes, me voici enfin à Sainte-Catherine. J’imagine que mes chances de revoir Rob sont faibles, mais un ami commun, qui gère l’assistance de sa copine, m’informe qu’il est arrivé une vingtaine de secondes avant moi. Dire que je suis surpris est un euphémisme, je me dis qu’il a dû souffrir aussi. Quand je le retrouve, je lui demande s’il a souffert un peu, lui aussi, mais pas particulièrement. Bon, peut-être que je n’étais pas si à la ramasse, finalement.

Mon partenaire et moi longeons les navettes dans lesquelles ceux qui ont abandonné attendent d’être rapatriés à la Halle Tony Garnier. Ce dont je suis sûr, c’est que c’est une machine qui me ramènera à Lyon ; pour ce qui est de savoir si ce sera Rob ou le car, en revanche, la question reste entière. Une minute après avoir quitté le ravitaillement, je me rends compte que je n’arrive plus à allumer ma frontale. J’ai les doigts gelés, je n’arrive plus à enfoncer le bouton. Obligé de m’arrêter, je perds à nouveau Rob. Je repense aux navettes, j’entends le chant des sirènes, mais je repars et rattrape Rob assez facilement, cette fois.

Les kilomètres défilent, nous alternons le bitume et les rivières de boue, les passages où le buff et les gants s’imposent et les portions abritées où j’ai envie d’ôter mon coupe-vent. Comme c’est souvent le cas, la dynamique entre Rob et moi s’inverse : à son tour de souffrir, notamment du ventre. De mon côté, je me sens mieux. Les descentes passent facilement, même quand elles sont glissantes (est-ce grâce à mes chaussures ou à mon pied d’ancien petit rat de l’opéra, sans doute un peu les deux), je double plus que je ne me fais doubler dans les montées franches. Je mange bien (vive les compotes Mule Bar !), je bois convenablement – un bon élève, en somme.

Assez vite, Rob et moi comprenons que nous ne serons jamais de retour à Lyon à 9 heures – nous n’avançons pas assez vite sur le plat pour tenir les délais. Le parcours et la nuit nous ont broyé les cuisses, nous ne manquons ni d’énergie, ni de volonté mais les muscles sont raides comme des piquets. Alors que le jour et la brume se lèvent, nous continuons d’appliquer la même méthode : soupe et remplissage des flasques, et c’est reparti. Pas de perte de temps inutile.

Tandis que nous approchons de Lyon, je fais remarquer à Rob que nous pouvons au moins nous enorgueillir de toujours courir. Pas vite, certes, impossible de dépasser les 10 km/h à ce stade, mais au moins nous ne cédons pas à la tentation de marcher. Finalement, après 10h20, nous franchissons la ligne d’arrivée, ravis d’avoir passé presque l’intégralité de la nuit ensemble.

Je dois admettre que je prends un petit coup quand je vois notre position au classement général : 1500es, environ, alors que j’avais terminé à la 700e position cinq ans plus tôt, sans pour autant avoir fait la course du siècle ! Peu importe, j’ai passé un excellent moment, je n’ai rien à regretter. 

Et puis il y a des enseignements à tirer de cette Saintélyon 2022 ! Le premier, c’est qu’il ne m’est pas très facile d’être prêt pour un ultra, aussi abordable soit-il, au début du mois de décembre – au niveau du calendrier, ce n’est pas ce qui m’arrange le plus. Aussi, j’annonce que l’année prochaine, je ferai la Saintésprint, et que je serai prêt ! L’autre leçon que je retiens de cette course, c’est que je me suis trompé dans ma préparation. J’ai voulu travailler les montées, mais en réalité cela n’est d’aucune utilité à la Saintélyon. Il n’y en a pas beaucoup, elles passent facilement, et à moins de jouer la gagne il n’est pas très utile de les monter à vive allure. Quitte à travailler le dénivelé, j’aurais dû tout miser sur la casse de fibres en descente. La Saintélyon, ce n’est pas un trail, c’est un exercice de résistance à la douleur ! Et, de toute évidence, mon corps n’était pas prêt à encaisser les milliers de chocs que le parcours lui réservait. Je tâcherai de garder cela à l’esprit lorsque viendra l’automne 2023.

Place au repos, maintenant ! J’ai hâte de me remettre au travail à la rentrée, même si je n’ai pas encore d’objectif précis – à part l’ultra de Saint-Jacques en juin. Continuons sur la même lancée, en prenant du plaisir à l’entraînement et en partageant de bons moments en course ! Cela tombe plutôt bien, d’ailleurs : il se murmure que Rob pourrait prendre un dossard pour le Puy-en-Velay…
Une bise à toutes celles et ceux qui ont participé de près ou de loin à ce beau weekend sportif, en particulier à ma maman qui s’est déplacée pour garder Maya pendant que je gambadais. Vous vous reconnaîtrez !

1 commentaire

Commentaire de Arclusaz posté le 10-12-2022 à 18:35:37

bravo Guillaume d'avoir enfin pris du plaisir dans une prépa. J'ai toujours considéré que la STL était la cerise sur le gâteau de la "prépa" que je faisais à grand coup de off. Et quooooooooooooooi ? j'apprends que tu as été "petit rat de l'opéra" : quel homme complet !

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