Récit de la course : La Piste des Seigneurs 2009, par arthurbaldur

L'auteur : arthurbaldur

La course : La Piste des Seigneurs

Date : 21/2/2009

Lieu : Rodez (Aveyron)

Affichage : 1329 vues

Distance : 65km

Objectif : Pas d'objectif

2 commentaires

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La Piste des Seigneurs, le 21 février 2009

Ou la balade d'un Seigneur du GCO en Aveyron.

Le CR en image : La piste des Seigneurs, le 21 février 2009

Il y a dans le sport des instants de grâce, des moments où toutes les conditions sont réunies pour vous faire vivre des moments très forts. Des instants magiques dans l'effort qui vous transcendent et vous élèvent mentalement. Vous êtes victorieux, vous avez relevé avec succès le défi que vous vous étiez imposé, pas un regret, aucune ombre pour ternir « votre exploit ». Vous avez franchi une nouvelle marche pour aller toujours plus loin, plus haut, plus longtemps. Que du bonheur … et un peu de souffrance quand même.

Un instant de grâce, j'en ai connu un sur la deuxième partie de cette course. L'entraînement est bien sûr pour beaucoup dans cet état de fait, les grosses séances de fractionnés, les sorties longues. Les courses de préparation y ont contribué également. Les 5 heures d'effort au Raidlight Trail Trophy ont certainement été bénéfiques dans ma préparation. J'ai bien assimilé cette compétition en tout cas.

Mais avec l'ultra, c'est avant tout dans la tête que tout se joue. Si la tête va, le corps va suivre, mais si le mental plonge …  Et il suffit d'un rien pour passer d'un état à l'autre. J'ai subi le rythme de Biscotte pendant toute la première partie du parcours … J'avais du mal à le suivre dans les montées car je manque de puissance par rapport à lui. Purée, il fait de ces enjambées le gaillard ! Bref j'étais au mieux à ses côtés et au pire à quelques mètres derrière à  faire l'effort pour me maintenir.

Et puis, je me suis senti progressivement en forme, assez subitement en fait. J'ai accéléré une première fois dans la longue descente qui nous emmenait au Cloître de Comberoumal pour me faire plaisir en déroulant les jambes mais sans aucune arrière pensée. Biscotte m'a demandé si j'avais mangé du lion. Il n'aurait peut-être pas dû me demander à quel moment j'allais lancer le sprint final en rigolant … Je lui ai répondu : « maintenant ».

En fait, c'est après le ravitaillement de Saint Beauzély, que ma forme sera à son maximum. Je me suis vite aperçu que Biscotte n'arrivait pas à suivre et j'avoue que ça m'a donné un sacré coup de fouet. Je suis heureux d'être là. Bien dans mon corps, bien dans ma tête avec une grosse envie de confronter ma niaque aux autres et de profiter au maximum de ces bonnes sensations. J'aurais bien prévenu Biscotte mais je le connais, il se serait méfié et je n'aurais jamais pu le lâcher. Il s'était déjà suffisamment aperçu de ma forme montante.

Faut-il que je culpabilise pour autant ? Non, car je ne suis pas sûr qu'il soit beaucoup plus tendre de sortir un « bon, c'est pas le tout mais faut que j'y aille » à son compère de chemin. Mes oreilles avaient eu le droit à ce refrain en 2006 pour la Foulée des Monts d'Or avant qu'il n'accélère brutalement. Tout cela pour suivre la première féminine !

Bon, je vais quand même me chercher une excuse pour la forme. Ah oui, tiens un truc de ce genre devrait convenir : « je ne savais pas que j'allais te lâcher, je ne m'étais pas aperçu que je courais trop vite pour toi ». :mrgreen:
Allez, je te pardonne pour la Foulée des Monts d'Or, le Trail des Cabornis, Le Grand Duc … purée la liste des courses où tu m'as lâchement abandonné est décidément bien trop longue !

Je sens que la vengeance va être terrible au Trail des 3 Châteaux. :?

La préparation :

J'avais prévu de commencer l'année en faisant quelques cross et en préparant un 10 bornes de manière à travailler ma vitesse de base mise à mal par les longues séances de préparation aux trails long de 2008. En guise de cross, mon agenda s'est rempli avec une course nature : l'Hivernale des Coursières, un trail blanc : le Raidlight Trail Trophy (grand format) et un trail sacrément long en Aveyron !
Le genre de course où il faut avoir engrangé quelques séances longues pour finir dans de bonnes conditions. J'ai concilié l'ensemble en m'inspirant d'un plan foncier du site Athlète Endurance que j'ai grandement vitaminé en volume. Un peu bancal, peut-être pas optimal, mais j'ai pu accumuler les tours de piste tout en rentrant « vivant » de l'Aveyron. Je n'en demandais pas plus.

Bon, il faut commencer par aller à Millau, puis à Rodez :

Et ce n'est pas tout près pour un lyonnais. 316 bornes par la N88. J'appréhende un peu de faire tant de kilomètres le jour même d'une course. Ce n'est pas dans mes habitudes et généralement, mes guiboles n'aiment pas les longs trajets surtout la jambe droite. C'est le jour J. Nous avons rendez-vous avec Jeanmik au pied de son immeuble vers 8h00. Cela nous donne le temps de voyager tranquillement. Nous ne risquons pas d'arriver en retard pour les navettes. Pas de stress inutile. Le voyage se déroule paisiblement sous la grisaille et avec des paysages enneigés pendant une bonne partie du trajet. Je peux vous dire que ça caille en Haute Loire … Nous nous sommes arrêtés vers 10h00 pour une petite pause technique et avaler une tasse de notre thermos de café. Je peux vous assurer que nous n'avons pas trainé … Monsieur météo a dû faire un blocage sur l'ère glaciaire dans ce département. Nous avons même rencontré plusieurs chasse-neige qui enlevaient la neige soufflée sur la route par le vent. Du vent il y en a eu et pas qu'en Haute Loire.
Nous avons pique-niqué sur l'aire d'autoroute de la Garrigue sur l'A75. Ce lieu nous a semblé préférable au parking de la Sernam à Millau (départ des navettes). Encore et toujours du vent ! Bon il faisait quand même un peu moins froid et à défaut d'une température estivale le ciel était plus avenant. J'ai quand même bien apprécié le thermos de thé de Jeanmik pour me réchauffer.

Nous avions suffisamment d'avance pour faire un petit crochet vers l'aire du Viaduc. Elle offre un point de vue remarquable sur cet ouvrage d'art. Impressionnant. Impressionnant également la découverte de la vallée du Tarn … la pile P1, c'est bien beau, mais Millau semble surtout bien loin et le terrain est du genre tourmenté. Ce n'est guère rassurant …

Il est temps de reprendre la route. Nous arrivons à Millau vers 13h30. Je gare la voiture sur le Parking de la Sernam comme prévu. Première phase terminée. Il faut maintenant rejoindre Rodez en car. Nous n'avons pas attendu les navettes très longtemps. Le départ a été avancé et c'est très bien comme cela. Nous découvrons notre futur lieu de balade pendant le trajet. Le relief n'est pas prononcé mais ce n'est jamais plat. Ca me semble bien casse-pattes.

L'amphithéâtre de Rodez :

Nous sommes arrivés à Rodez. Le lieu de départ est situé au pied de la Cathédrale mais l'amphithéâtre est à notre disposition comme base de vie en attendant le départ. C'est plus sympa que le hall d'exposition de Saint-Etienne. Il y a des gradins à loisirs pour les adeptes de la position assise et de la moquette pour se laisser tenter par les bras de Morphée. « Vous pouvez baisser un peu la sono pendant ma sieste ? Non ? » Bon tant pis.
Retrait des dossards, visite des stands des sponsors et des toilettes, petite sieste et dernier repas ponctuent la lente métamorphose de votre serviteur en ultrafondeur. Entre les bouts de sparadrap protège téton, la crème Nok et la tenue de warrior, il faut bien une fin d'après-midi pour me préparer …

Ce ne sera pas le cas de Biscotte, il est arrivé à l'amphithéâtre alors que les coureurs avaient tous quittés les lieux pour se diriger vers le sas de départ au pied de la cathédrale. Plutôt rapide comme préparation … je l'ai filmé pour que tu en prennes de la graine Taz.

Bon une préparation rapide peut-être mais c'était quand même un peu le foutoir … faudra peut-être convaincre madame de prendre un peu plus de marge la prochaine fois. Elle est pas encore à son top niveau pour épingler un dossard. Ca manque d'entrainement tout cela. Pas très sérieux.

Bien avant de voir mon mentor trailer arriver, j'ai eu le plaisir de faire la connaissance des cadors bordelais du forum Athlète Endurance. Kristof, Gdb, Petit Jeannot (j'oserais un demi Jeannot puisqu'il est inscrit en relais à 2) et d'autres fêlés des Cotos.  C'est bon de se rencontrer. C'est clair, ils sont aussi barjots que nous les girondins.

Nous avons bien pensé à Oslo absent pour cause de tendinite du fascia latta. J'ai hésité un moment avant de l'appeler pour lui passer une petit bonjour. Je sais que cet appel va le frustrer un peu et probablement remuer un peu le couteau dans la plaie mais je veux qu'il sache qu'on a pensé à lui dans les minutes qui précèdent le départ. J'espère que l'on ne t'a pas trop foutu les boules. Ce n'était pas le but, croix de bois, croix de fer …

Nous quittons la chaleur de l'amphithéâtre pour rejoindre le sas de départ au pied de la cathédrale de Rodez. Il y a un petit moment de flottement, on se perd un instant dans la foule avant de se retrouver tous ensemble au sein du peloton. Biscotte a juste le temps de dégoter les petits satellites nécessaire au démarrage de son Garmin et c'est le départ. Nous traversons la place d'armes sous les acclamations des spectateurs, les feux de Bengale rougeoient dans la nuit et la fumée qui s'en dégage  donne un aspect irréel à la scène renforcé par le classique Ameno d'Era … Un départ bien flonflon comme je les aime digne des seigneurs Aveyronnais que nous serons dans quelques heures. Il faut marquer le coup. C'est parti pour 8h30 de balade au cœur de l'Aveyron. J'espère même pouvoir me rapprocher des 8h00 annoncés par Kristof … Quelle bonne blague !

Rodez – Pont de Salars

Classement : 406ième

Nous débutons notre périple par une petite portion de bitume qui va nous emmener vers le Monastère. Bon ce n'est pas la longue mise en jambe qui nous emmène à Sorbiers lors de la SaintéLyon mais cette portion en descente suffit à me réchauffer. Je prends même un petit coup de chaud. Pourtant je ne porte que deux couches de vêtements. On entre maintenant dans le vif du sujet en attaquant de longues portions de chemin entrecoupées de petites portions sur bitume et de traversées de hameau. Je suis tranquillement l'ami Biscotte. C'est lui le patron. Je me cale dans une allure qui semble me convenir pour le moment. L'avantage avec Biscotte, c'est qu'il est plutôt du genre constant dans l'effort. Ce n'est pas le genre à flâner et musarder, à cueillir des pâquerettes si le terrain ne l'impose pas. Bref, quand on peut courir, on court et quand il faut marcher parce que le terrain le requiert, on marche. C'est simple, carré. Nous avons lâché les compères Bordelais du forum depuis un moment. C'est bon signe pour notre challenge … une bonne pâtée aux girondins. Bon, c'est encore un peu tôt pour vendre la peau de l'ours.

En tout cas, ils ont autant de boue que chez nous en Aveyron ! C'est marrant, dès que ça monte, nous avons droit presque systématiquement à une mini cure de thalasso. Une boue profonde, bien grasse avec de l'eau qui tente de se frayer un passage au milieu. Je ne suis pas fâché d'avoir pris mes guêtres. Elles vont être contentes mes chaussettes d'être épargnées … enfin épargnées, c'est vite dit. Purée, ça y est j'ai les pieds trempés ! Biscotte n'est pas mieux loti.

Il s'est fait attendre ce ravitaillement ! On finit par arriver à Pont de Salars en un peu moins de 2h30.  Biscotte ne semble pas satisfait. Il pensait pouvoir faire ce relais plus rapidement. Je me demande si je ne le freine pas un peu. Purée, je le sens venir, il va vouloir rattraper le temps perdu … je ne vais pas être à la fête pour la suite.

Le ravitaillement est à l'abri dans une salle. Je prends le temps de picorer pendant que Biscotte se tartine à la crème anti-échauffement. Je ne remplis pas la poche. En jaugeant le poids du sac, il me semble que j'ai suffisamment de marge. Ah oui j'oubliais, vite une photo pour l'ami Oslo. Biscotte se marre en prenant l'air navré.

Pont de Salars – Curan

Classement : 329ième

Hou là, terrible la différence de température en sortant du ravitaillement. Une chape de froid me tombe sur le dos, les bras. J'hésite à sortir mon coupe vent. Je préfère attendre un moment en espérant pouvoir me réchauffer rapidement. Je ne veux pas prendre le risque de me faire un petit sauna Quechua. Bonjour, le refroidissement qui s'en suivrait. Je me suis finalement vite réchauffé. Il faut dire que l'on a eu le droit à une montée sympathique après Pont de Salars.
Ben m... alors. C'est pas vrai, les Bordelais sont là, juste devant nous ! Faut pas déconner, si en plus il faut les doubler plusieurs fois, on ne va pas y arriver ! En plus, ils avancent bien et qu'est-ce qu'ils sont bavards ! Des vraies pipelettes. On fera une bonne partie du relais ensemble avant de les lâcher définitivement. Kristof, semble souffrir de la hanche. Pas cool.

Je suis un peu déçu par le parcours. Je le trouve vraiment trop semblable à celui de la SaintéLyon. Attention, ne vous méprenez pas, je suis et reste un inconditionnel de la doyenne mais je m'attendais à un tracé beaucoup plus technique, plus sauvage. Je vais être comblé par la suite.

L'estomac de Biscotte lui crée quelques misères. Probablement l'absorption d'une eau trop froide mais il y a peut-être aussi un peu de son alimentation de fin de préparation, sa famille ne s'est pas contenté de lui faire des pâtes … c'était plutôt une cuisine gastronomique (gastronomique, je n'ai pas parlé de gastro). Il semble que le système digestif soit soumis à rude épreuve par notre pratique.  J'étais relativement épargné mais pas assez toutefois pour ne pas l'accompagner dans un duo en pet majeur et rôt. Mon aura va en prendre un coup, la légende arthurienne va se fissurer et voler en éclat. Ces instants ne sont pas un modèle de délicatesse, je le concède,  mais il faut savoir laisser s'exprimer la nature. A la guerre comme à la guerre. Bon, il n'y avait pas de féminine à suivre à proximité sinon je me serais abstenu par galanterie. La dernière que nous ayons vue n'étant pas la première nous n'avions aucune raison de lui emboiter le pas. La tradition lyonnaise du GCO consistant à suivre une féminine ne concerne que la première d'entre elles. Encore, qu'il peut y avoir des exceptions de temps à autres. Un sourire charmant, c'est toujours plaisant à suivre.

Ravitaillement de Curan, je fais le plein en liquide cette fois. Je n'ai pas envie de tomber à sec.
Tiens, il y a du roquefort étalé sur du pain d'épice. Un peu spécial mais ça passe bien finalement. En fait, je tombe sur tout qui ce se présente. Sucré, salé, indifféremment et en alternance. Il y a l'embarras du choix. Seul regret, j'ai loupé la soupe (à la tomate, c'est bien ça ?). Je m'en veux. Je me concentre sur la dégustation d'un TUC quand j'aperçois l'ami Jeanmik. J'étais à cent lieues de penser le revoir ici. Il a failli bâcher (marrant, je ne connaissais pas l'expression) mais nous a finalement attendu en se refaisant une santé. J'ai l'impression qu'il a dû patienter un bon moment vu son chrono sur marathon !
C'est le premier effet kisscool pour moi … finalement, ça se passe plutôt bien pour votre serviteur.

Curan – St Beauzely

Classement : 231ième

J'ai eu un peu de mal à me réchauffer en sortant de Curan. Nous ne sommes pas loin de 1000m d'altitude et la température est négative. Il me semble avoir vu dans Curan un afficheur indiquant -1°C. Heureusement que le vent est tombé.
Je n'ai guère de souvenirs de cette partie effectuée en compagnie de Jeanmik. Si quand même, je me rappelle avoir pesté gentiment en pataugeant dans un champ humide. Nous avons perdu notre compère d'un moment sans même vraiment sans apercevoir. C'est probablement un peu de notre faute. Nous avons augmenté notre allure avec Biscotte alors même que le doyen du GCO marquait le coup. Autres souvenirs, le terrain complètement gelé sur les hauteurs après Vialettes. Je glissais un peu avec les Trabuco.

Le relais 3 nous offre de traverser le cloître de Comberoumal. C'est magnifique ces vielles pierres mises en valeur par un éclairage efficace. Le temps d'immortaliser notre passage en ces lieux et nous repartons. En lisant ces quelques lignes, il ne faut pas vous imaginer, que nous avons traversé ce lieu chargé d'histoire dans le silence et recueillement. Non, c'était beaucoup plus potache tout en respectant les bonnes sœurs. Nous ne sommes pas des mufles.

J'ai lâché un peu Biscotte dans la descente sur St Beauzely. J'adore les descentes lorsque la pente est modérée et le terrain peu technique. Je laisse faire mes grandes guiboles et mon allure augmente sans trop puiser dans les réserves. Je me demande si mon compère ne me laisse pas tout simplement m'amuser un peu avec la certitude de me cueillir mûr à point et bien obligé (par la fatigue) de rentrer dans le rang derrière lui. Mais non. Je tiens le choc et c'est avec un peu d'avance que j'arrive au Château de St Beauzely. Quelques marches à monter tout en filmant, je passe le pointage et je me dirige  dans la salle prêt à en découdre avec la première table du ravitaillement.
Un, deux, trois coureurs … ah, ça y est, c'est à son tour d'arriver. Il ne m'a pas l'air super guilleret en arrivant. Un coup de mou peut-être. Biscotte fait un point rapide sur les réjouissances à venir. Une vingtaine de kilomètres. Allez encore trois bonnes heures … Purée trois heures ! Quand même … Bon, ben quand faut y aller …

St Beauzely – Millau

Classement : 160ième

Nous quittons ensemble le dernier ravitaillement. Il faut à nouveau se réhabituer à la température extérieure. Bon, ça revient vite, on finit par se faire à tout. Cette sensation de forme apparue dans la descente vers St Beauzely se confirme. Je prends beaucoup de plaisir à augmenter la cadence. Pas de douleurs, pas de lassitude, bien sûr je suis loin d'être frais comme le gardon de l'expression mais j'ai cette agréable impression d'être hors du temps. Je ne me projette pas en avant avec l'envie d'en finir au plus vite, encore tant d'heures, encore tant de kilomètres, ce qui est forcément démoralisant. Mon esprit est entièrement focalisé sur l'instant, le plaisir de sentir mon corps répondre aux sollicitations, doubler aisément un coureur, en rattraper un autre, jouer avec le terrain … je suis bien. Que du bonheur !

L'ami Biscotte peine à me suivre … Je finis par ne plus le voir. Quand il m'arrive d'être coincé pendant un moment derrière un coureur et de ralentir, je le guette, pense le voir, mais non il ne revient pas sur moi malgré cela. Je culpabilise un peu de l'avoir abandonné sans un mot, ni un regard en arrière. Le côté sombre d'Arthur … Inavouable. Il faiblissait, je me sentais fort. Il risquait de revenir sur moi, j'accélérais à nouveau. Rien de bien sombre en vérité, le simple besoin irrésistible de me mesurer à mon mentor trailer. Le besoin de savoir si je suis capable de maintenir l'écart, de finir avant lui. Je fais ce qu'il faut pour en tout cas. J'ai bien retenu les leçons. Je ne me laisse pas prendre dans un faux rythme, quand je rejoins un groupe de coureurs, je double !

J'ai bien failli y laisser une cheville d'ailleurs. Un coureur m'a bousculé et j'ai rattrapé mon déséquilibre en prenant brutalement appui sur ma jambe droite. J'ai poussé un cri avec le choc, plus par la surprise d'ailleurs que par une véritable douleur mais j'ai eu beaucoup de chance. Après quelques minutes, j'ai retrouvé une foulée tout à fait normale.

Au fait, Line, j'ai eu la surprise de découvrir dans une des montées (j'avoue ne plus trop savoir laquelle, après Moulibez, après Peyre ?) des marches de géant semblables aux petites gâteries rencontrés dans Bovine. Je pense que ça t'aurait certainement bien plu. Par contre, tu n'aurais certainement guère apprécié la descente sur Peyre très technique, abrupte. Je l'ai moyennement apprécié également. C'est dans cette portion que je me suis fait distancer par un des rares coureurs qui m'aie doublé. Faut dire, que je n'étais pas très à l'aise.

La montée vers la Pile P1 a été un moment très fort, un régal physique. Nous avons fait toute la montée au taquet avec un autre coureur. Je donnais le rythme, il s'accrochait, je ventilais beaucoup mais je ne voulais pas lâcher prise. Impossible de le distancer. Je savais qu'il allait finir pas me passer. Ah, l'orgueil ... j'avais décidé d'arriver en tête à la pile P1. Je me suis mis la pression pendant toute la montée. On a passé un bon paquet de coureurs à ce jeu là.
Ca y est, nous arrivons à la pile. Je laisse passer mon poursuivant pour filmer les lieux. Ben m... je me suis fait courser par un relayeur ! Pas étonnant qu'il ait été à l'aise !
Le passage de la pile P1 en pleine nuit est magique. On pénètre au centre d'un puits de lumière. L'éclairage, situé en hauteur éclaire le centre de la pile et nous éblouit, rendant très difficile la distinction du tablier du viaduc. C'est impressionnant. La pile P1 ne fait pourtant que 95m de haut, on est loin des 245m de la plus haute pile (P2). Il faut continuer maintenant. Je quitte les lieux un peu à regret.

Mon allure a un peu baissé. Probablement le contre coup de cette petite surchauffe en montant. Je continue malgré tout de trottiner le plus possible. J'ai l'impression de passer mon temps à tournicoter. On voit les lumières de Millau mais le tracé donne l'impression de s'en éloigner régulièrement. Pas grave, je m'attendais à ce que cette portion soit difficile mentalement et elle passe finalement assez bien. C'est probablement grâce à un terrain très ludique qui monopolise toute mon attention.

Et puis, c'est le bitume, une belle descente jusqu'à Millau ! Je laisse dérouler tranquillement jusqu'à ce qu'un groupe de coureurs m'apparaisse en ligne de mire. C'est le moment ou jamais de sprinter. Pas très vite je le concède. Un sprint d'ultrafondeur on va dire. Je ne sais pas moi, un truc comme 15km/h au plus fort. Pas mieux. Je passe le groupe par la droite le plus vite possible. Un virage. Je sors mon portable. Il me faut une preuve ! On a des idées saugrenues après de longues heures de course ! C'est en filmant que je remonte l'allée de la victoire. Un virage à droite, je passe sous l'arche, un petit raidillon pour rentrer dans la salle, il faut la traverser … ça y est !!! Je suis finisher. Purée une sacré course. Et en plus, c'est qui l'homme fort du jour … YES ! YES ! YES !

9:52:59

Et ensuite :

Je grimpe les quelques marches pour accéder à l’estrade. Sympa la déco chez vous. Une courte pause pour la photo à 9 euros (grand luxe la photo). Je cherche l’hôtesse pour le bisou au vainqueur, la remise du bouquet et ma couronne de laurier. Applaudissements, autographes, les flashs crépitent … C’est vrai quoi, c’est pas tous les jours que l’on arrive en première ligne devant ses compères de forum ! Bon, il y a eu 159 coureurs avant moi alors il faut vite redescendre sur terre. Je m’éclipse pour éviter le bisou du barbu (pas trop sexy et beaucoup trop chargé en testostérone pour jouer le rôle de l’hôtesse) et je récupère mes cadeaux de finisher : un plateau avec le logo de la course (un seigneur pas bien gâté par la nature et souffrant d’une vilaine jaunisse) et un livre sur le sport en Chine. Sympa l’idée du plateau, on peut dire que c’est original … Par contre le rapport entre le sport en Chine et l’Aveyron faut chercher un peu. A vrai dire je m’en fous. Je vais rentrer chez moi en ayant fait le plein de souvenirs. Souvenirs qui vont me « porter » jusqu’à la prochaine aventure. Et là c’est du souvenir de première qualité !

Histoire de me faire pardonner par compère Biscotte je vais m’asseoir à proximité de l’arrivée pour filmer mon mentor dans son ultime effort. 5’ … il ne devrait pas tarder … 10’ … je commence à me refroidir … 15’ … purée mais qu’est ce qu’il fout ! … 20’ (enfin presque) … voilà ma Biscotte qui débarque tranquillement … 20’ … hum … 20’, et oui, ça me semble être une bonne déculottée !

Je n’ai pas trop le temps de savourer. Mon compère doit prendre le train pour retourner à Rodez. C’est ça de traîner en chemin. Je l’accompagne à la gare, il faut que je récupère ma voiture sur le fameux parking de la Sernam à 500m Purée, ça caille. Non, c'est pire que cela. Je n’ai toujours que mes deux épaisseurs sur moi et la chaleur apportée par l’effort physique n’est plus qu’un lointain souvenir.

Je retourne au parc de la victoire pour me changer. Jeanmik est arrivé entre temps. J'avais peur qu'il est abandonné au troisième relais. Ce n'est pas le cas. Le GCO a bien tiré son épingle du jeu.
Du côté de nos compères Bordelais, Kristof n'a pas eu la chance de connaître le parcours du dernier relais. Ses douleurs de hanche l'ont arrêté au dernier ravitaillement. Je sens qu'il est déçu, forcément mais je sais qu'il va rebondir et qu'il prendra sa revanche une prochaine fois. Gdb, lui, a terminé en un temps tout à fait honorable. C'est cool pour un premier ultra.

Il n'est pas envisageable de dormir sur place. Ce n'est pas génial mais on va devoir faire sans pour le trajet de retour. Nous prenons congé des Bordelais et reprenons la voiture avec Jeanmik pour rentrer sur Lyon. Un trajet sans histoire malgré la fatigue. La bonne dose d'adrénaline sécrétée dans la nuit et des pauses régulières m'ont permis de maintenir l'attention nécessaire à une conduite prudente. Mon coéquipier était là pour veiller au grain. J'ai hésité pendant un moment à faire une halte chez Miaou à Clermont-Ferrand pour papoter et visiter sa cave de St Nectaire mais j'ai eu peur que cette halte n'occasionne plus de fatigue qu'elle n'en enlève. On n'allait quand même pas squatter son canapé toute l'après-midi pour se refaire une santé ! Nous avons donc poursuivi notre chemin jusqu'à Lyon. Je n'étais pas fâché d'arriver à la maison.

Pour terminer :

Une épreuve à faire, assurément, avec des moments forts qui cassent la monotonie et contribue à son originalité. Le départ au pied de la cathédrale de Rodez, la traversée du Cloitre de Comberoumal, le château de St Beauzely, le secteur de la pile P1 sont autant de souvenirs appréciables de ce week-end Aveyronnais.
La première partie du tracé est très semblable à ce qu'offre la SaintéLyon. Le seconde partie est plus physique, moins roulante mais je l'ai trouvée également plus ludique, sauvage.

Nous avons été encouragés à maintes endroits. C'est l'avantage d'une épreuve offrant une formule en relais. Ce type de course draine automatiquement beaucoup plus de spectateurs pour faire la claque malgré le froid qui devait être terrible pour des personnes immobiles.

Merci aux bénévoles courageux. Il en fallait du courage et de l'abnégation pour rester planter comme un piquet une bonne partie de la nuit à un carrefour à encourager des lucioles à peine entrevue.

L'idée du passage sur le podium à l'arrivée est une idée sympathique. Tu devrais étudier la chose Michel pour la SaintéLyon. Bon c'est certainement plus difficile, le nombre de coureurs n'est pas le même. Mais un coureur qui s'est baladé 10 heures dans l'obscurité apprécie d'avoir une arrivée à la hauteur de son périple. C'est juste ma vision des choses et ce n'est pas une critique négative.

Merci à mon co-pilote Jeanmik. J'ai apprécié ta présence et ta gentillesse. Tu mérites de porter les attributs qui font de nous des membres du GCO.

Voilà un excellent weekend Aveyronnais qui prend fin. Un weekend sportif avec les compères du GCO, ce n'est que du bonheur.

2 commentaires

Commentaire de domdom g posté le 01-03-2009 à 09:38:00

bravo arthur pour cette belle course et pour ce beau cr et aussi felicitation pour le chrono.

Commentaire de arthurbaldur posté le 01-03-2009 à 15:16:00

Merci. Vraiment géniale cette course. J'ai du mal à descendre de mon p'tit nuage ... :))

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