birdy77 a écrit:Plus qu'à lire l'étude. S'inscrire à nouveau au Tor 330. S'entraîner un peu, moins dormir, faire 16 heures de moins. S'inscrire au Tor des Glaciers. Appliquer les résultats de l'études.
J'ai fait le fainéant (pas bon signe de tomber dans la facilité)
Voici une synthèse de l’article “It’s not difficulty that matters, but strategy: Perceived stressor, functional and dysfunctional coping strategies in ultra-trails of extreme duration” (Trabucchi et al., 2025)
Je mets l’accent sur les enseignements pratiques (ce que toi, coureur amateur, tu peux retenir et tester).
⸻
Contexte et objectifs
• L’étude s’intéresse aux ultra-trails de très longue durée (ici, une course de ~ 450 km, 32 000 m de dénivelé, conditions extrêmes)
• Elle cherche à construire des taxonomies (classifications) des stresseurs perçus et des stratégies de coping (adaptation) utilisées en course, puis à voir si ces classifications cadrent avec ce que vivent réellement les coureurs.
• Enfin, l’idée est que ces taxonomies puissent servir de support aux entraînements mentaux, pour rendre les coureurs (notamment les moins expérimentés) plus conscients des difficultés qu’ils risquent de rencontrer et des manières efficaces de les gérer.
⸻
Principaux résultats (avec implications)
Stresseurs perçus (difficultés rencontrées)
Les auteurs identifient plusieurs catégories de défis que les coureurs d’ultra-trail ressentent. Parmi les plus fréquemment évoquées :
• Descente technique / sections dangereuses — anxiété liée à la technicité, peur (notamment la nuit)
• Le « quatre grands D » : fatigue, douleur / inconfort médical, privations de sommeil, conditions météorologiques extrêmes
• D’autres facteurs : perte d’orientation, météo, événements imprévus, attentes irréalistes, etc.
C’est utile : tu peux anticiper que ces classes de difficultés sont « normales » dans un ultra, et qu’il est judicieux d’avoir déjà réfléchi à comment les gérer.
Stratégies de coping : fonctionnelles vs dysfonctionnelles
Les auteurs classent les stratégies de coping en deux grandes familles :
• Stratégies fonctionnelles (efficaces, adaptatives)
• Stratégies dysfonctionnelles (moins utiles voire contre-productives)
Ils ont repéré 9 catégories de stratégies fonctionnelles (dont certaines “nouvelles” par rapport aux Focus Groups) et 8 catégories de stratégies dysfonctionnelles.
Quelques-unes des stratégies fonctionnelles les plus utilisées (et les plus pertinentes à retenir) :
Stratégie fonctionnelle
Description / exemples
Pourquoi c’est utile pour un coureur amateur
Flexibilité et conscience dans la gestion du rythme, du sommeil et de la nutrition
Ajuster son allure selon la fatigue, accepter de ralentir ; reconnaître quand il faut dormir ou manger, ne pas s’entêter à maintenir un plan rigide.
Prévoir des marges de manœuvre : ton plan ne doit pas être inflexible. Apprends à écouter ton corps.
Gestion émotionnelle des imprévus
Face à un événement non planifié (erreur d’orientation, météo, incident matériel), calmer l’anxiété, garder le contrôle émotionnel, accepter l’imprévu et réagir.
Préparer mentalement des “plans B”, des scénarios d’urgence, des attitudes pour rester calme en cas de pépin.
Procédures éprouvées pour les difficultés fréquentes
Avoir des protocoles (« déjà testés ») : plan anticercles, traitement des ampoules, comportement en cas de crampes, stratégies si tu te perds, etc.
Avant la course, définis des “check-lists mentales” ou des mini-routines pour les aléas prévisibles.
Fixer des buts à court terme
Plutôt que de penser “il me reste 200 km”, fragmenter la course en petits segments (point de ravitaillement, col, etc.) pour garder la motivation.
En course, change de repères : “je vise ce ravito”, “cette montée”, “ce point de contrôle”, etc.
Interprétation experte des signaux internes
Apprendre à reconnaître ce que signifient les sensations corporelles : fatigue, douleur, détresse ou malaise passager ; différencier ce qui impose de ralentir de ce qui peut être toléré.
Entraîner ta propre “lecture” de ton corps (via l’entraînement, l’expérience). Cela évite les sur-réactions ou la sous-estimation.
Volonté / autorégulation / persévérance
Pousser dans les moments difficiles même sans gratification immédiate, maintenir la discipline mentale quand la fatigue domine.
Cultiver la résilience mentale via des séances de dépassement, de “se forcer” dans l’entraînement mental, mais sans tomber dans le surmenage.
Quant aux stratégies dysfonctionnelles, celles-ci comportent des pièges à éviter :
Abandonner la prise en charge du problème (ne rien tenter quand un malaise ou une somnolence survient)
Attendre que la solution vienne de l’extérieur (ne pas agir, compter sur d’autres coureurs, l’organisation, etc.)
Construire des attentes irréalistes (sous-estimer la difficulté, croire qu’on pourra suivre un plan trop ambitieux)
Les coureurs de l’étude, très expérimentés, utilisaient majoritairement les stratégies fonctionnelles et peu de stratégies dysfonctionnelles (< 9 % des cas).
Notamment, ceux ayant dépassé 50 % de la course avaient un score de stratégie fonctionnelle compris entre 0,66 et 1 (soit de 66 % à 100 % de stratégies fonctionnelles)
⸻
Conseils actionnables pour un coureur amateur
Voici ce que je retiens pour toi : des idées que tu peux tester et intégrer dans ton entraînement ou ta préparation mentale.
1 Préparation mentale + scénarios d’imprévus
Avant la course, réfléchis aux difficultés probables (fatigue, météo, erreurs de navigation, douleurs) et imagine comment tu réagirais.
Prépare des “plans B” : que fais-tu si tu as des crampes, des ampoules, si tu te perds, etc.
Entraîne-toi mentalement à rester calme en face de surprises, plutôt que de paniquer.
2 Fragmenter la course en segments courts
Au lieu de penser “il reste X km”, divise mentalement le parcours en sections intermédiaires (ravito, sommet, point de contrôle).
Cela aide à maintenir la motivation et à garder le focus sur l’instant présent.
3 Flexibilité dans le plan
Ne sois pas esclave d’un plan horaire rigide : adapte ton rythme selon ta fatigue, ton état physique, les conditions.
Accepte de ralentir si nécessaire — mieux vaut terminer que s’épuiser prématurément.
Gère intelligemment le sommeil et la nutrition : savoir quand faire une pause, même si cela “casse” le rythme.
4 Se connaître corporellement
En entraînement, apprends à distinguer :
-Une douleur musculaire normale vs un signal de blessure grave
-Une fatigue passagère vs un début d’épuisement
En course, observe tes sensations et ajuste en conséquence (ralentir, reposer, boire, manger).
5 Établir et tester des “procédures d’urgence” en conditions d’entraînement
Par exemple, prévoir et tester dans les sorties longues un protocole pour soigner une ampoule, pour combattre les crampes, pour réagir en cas de météo soudaine (pluie, vent).
Simule des situations “pénibles” (sorties longues fatiguantes, dénivelé, chaleur) pour t’habituer mentalement à ce qui peut survenir.
6 Cultiver la résilience et l’autorégulation
Ajoute des entraînements où tu apprends à “tenir” malgré la fatigue mentale (ex : finir une séance quand c’est dur, faire des efforts contrôlés quand tu es déjà fatigué).
Utilise la respiration, la visualisation, les phrases positives pour maintenir la concentration dans les moments de doute.
7 Surveiller les signaux d’alerte intérieure
Sois vigilent aux signaux (tremblements, confusion, vertiges, engourdissements) qui peuvent indiquer que tu dépasses les limites sûres.
Si tu as un doute, privilégie la prudence (ralentir, pause, vérifier) plutôt que l’acharnement.
⸻
Si tu veux, je peux faire une version “checklist mentale” que tu pourras imprimer ou garder dans ta poche lors d’une ultra. Veux-tu que je te la prépare ?
Voici une checklist mentale “Coureur d’ultra”, directement inspirée de l’étude PLOS ONE (Trabucchi et al., 2025), adaptée pour un coureur amateur — simple, pratique, imprimable ou à garder dans ton téléphone.
⸻
CHECKLIST MENTALE – ULTRA TRAIL
AVANT LA COURSE : préparation mentale et organisation
J’ai identifié mes principaux stresseurs possibles : fatigue, douleur, météo, erreurs de parcours, sommeil, etc.
Pour chacun, j’ai un plan B concret (crampes → marche + sel ; pluie → couche chaude + capuche ; erreur → vérifier trace GPS calmement).
Mon plan de course est flexible : j’ai des repères mais je peux ralentir, dormir, m’adapter.
J’ai testé en entraînement mes protocoles de secours : ampoules, crampes, nutrition, fringale, etc.
J’ai prévu des phrases mentales clés (“Je gère, pas à pas”, “Chaque montée a une fin”).
J’ai découpé mentalement la course en segments courts (ravito, col, village…) pour garder la motivation.
J’ai réfléchi à mes signes de fatigue (corporelle et mentale) et comment y répondre.
⸻
PENDANT LA COURSE : adaptation et autorégulation
Auto-check mental toutes les 2–3 h
-Mon rythme est-il encore soutenable ? (→ Ajuster si besoin)
-Ai-je faim / soif / froid / sommeil ? (→ Corriger rapidement)
-Est-ce que mes pensées deviennent négatives ou confuses ? (→ Respiration + micro-pause)
-Est-ce que je pense à abandonner ? (→ Revenir à l’étape suivante, pas à la ligne d’arrivée)
Stratégies “fonctionnelles” à activer
-Ralentir pour mieux repartir — Le corps a souvent besoin de récupération, pas d’héroïsme.
-Réévaluer calmement les imprévus — Erreur d’itinéraire ? Recentrer, pas paniquer.
-Fixer un mini-objectif — “Rejoins le prochain point d’eau”, “Monte jusqu’à la crête”.
-S’ancrer dans le présent — Regarder le paysage, respirer, ressentir ses appuis.
-Reformuler positivement — “C’est difficile, mais j’avance toujours.”
Pièges mentaux à éviter
Croire que “ça passera tout seul” sans agir (malaise, blessure, fringale).
S’accrocher obstinément à un rythme ou à un plan initial malgré la fatigue.
Se comparer aux autres ou se décourager en voyant les abandons.
Attendre que l’aide vienne d’un autre coureur ou de l’organisation.
⸻
EN CAS DE COUP DE MOU
1 Respirer profondément 3 à 5 fois
2 S’arrêter 30 secondes et scanner le corps : douleur, faim, froid, mental ?
3 Traiter le besoin prioritaire (manger, ajuster vêtements, pause courte).
4 Se fixer un objectif ultra-court (“jusqu’au prochain virage”).
5 Repartir calmement, sans forcer.
⸻
APRÈS LA COURSE
Identifier ce qui a bien marché mentalement et physiquement.
Noter les situations de stress mal gérées → réfléchir à des réponses alternatives.
Ajuster ton plan mental pour la prochaine fois.
⸻