L'auteur : Benman
La course : Ultramontée des Posettes
Date : 15/8/2025
Lieu : Vallorcine (Haute-Savoie)
Affichage : 198 vues
Distance : 0km
Objectif : Pas d'objectif
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Pas d'autre récit pour cette course.
Me voilà de retour des Posettes.
Je vous propose ma petite causette sur cette 1ere édition de l'ultra Montee des Posettes. Une causette à faire pleurer dans les chaumières des gens, valjean ou pas
Pour moi, les Posettes, jusque là, c'était la terrible montée du Marathon du Mont Blanc de jadis, canal historique:
c'était ce juge de paix de la course, qu'on faisait depuis Vallorcine en passant par le col des Posettes, puis jusqu'au sommet de l'Aiguillette du même nom.
Ça c'était avant qu'ils nous refassent un parcours à l'envers, où depuis le Tour, tu commences par l'Aiguillette, pour prendre tes jambes à ton col et filer en pente dure jusqu'au refuge Vallo.
Là, sur l'ultra Montée des Posettes, on te propose de faire un petit saut de puce de 710 m jusqu'au col, le plus de fois possible en 6h. (4h ou 2h, ou une fois, à sec pour ceux qui veulent moins se mouiller), avec -royal au bar- une descente en télécabine pour préserver tes petits quadris de quadra (ou tes petits tracas de quinqua)
Le parcours est choupinou: on commence par une descente super roulante pour passer la ligne du Mont Blanc Express et ses petits trains rouges pleins de blé, surnommés "les galettes so swiss"
Puis on arrive au départ de la vraie montée qui te fais rappeler pourquoi tu es là (ou las).
Y'a plein de gars du coin qui t'encouragent avec la cloche de la dernière reine du pré.
Je ne sais pas si elle s'appelait Jacqueline (je laisse cette référence aux mélomanes pour qui les strings, c'est une corde sensible).
L'arène est devant nous: du brutal, mais joyeux, au milieu des prés. De près ou de loin, ça ressemble quand même à un petit KV, et tu te dis qu'au bout de 6h, ça va te gaver.
Donc tu traverses l'espace délimité par 2 fils électriques au milieu du champ. Pas le droit de sortir du droit chemin.
Tu meugles, tu gémis, tu baisses la tête façon combat de vaches. Tu te dis encore que celui qui va te doubler ici n'est pas encorné.
Après les prés, les bois. Le parcours se redresse et serpente entre les troncs. Pas vu d'étron de coureurs en perdition par contre. Aux Posettes, on sait se tenir, et on en chie avec discrétion.
Après les bois, inexorablement le sentier se cabre et s'enroule en spirale autour du halo deboisé du télécabine.
C'est pas le moment de déboîter le peu de résilience qui te reste. Tu peux compter les pylones et jouer à chaque tour à vérifier combien de minutes perdues par rapport au 1er passage.
Puis tu traverses définitivement le champ d'honneur mis en valeur par le télé. Si tu n'y es pas tombé, tu as droit de retraverser les bois, saison 2 avec un petit passage de relance, façon, "tu verras bien dans 6 heures si tu courras encore"
Et enfin, tu rejoins la piste de ski et te laisse glisser jusqu'au sommet. Enfin, le terme te laisse glisser est un peu trompeur. En fait, tu t'accroches comme tu peux à ce qui te reste de dignité pour éviter de finir trop cramé.
Comme disait un ancien premier ministre: "la route est droite, mais la pente est forte."
Tu es alors pris en charge par 2 bénévoles juchés sur leur chaise d'arbitre, qui relèvent ton numéro de dossard pour te permettre d'accrocher un nouveau numéro au porte-mental de tes montées.
Avant d'être aspiré dans l'air confiné de la cabine, tu as le droit de te restaurer aussi brillamment qu'un tableau de Brueghel l'Ancien, de retour au Louvre: abricots, pastèques, saucisson et gâteaux secs sont là pour te permettre de repasser de l'état de nature morte, façon gateux sec, en un nouveau fringant trailer, de la team Kikinenveu.
Tu as exactement 7 min 30 pour ravaler ta morve et ton vomi et descendre ta flasque en même temps que la cabine.
Arrivé en bas, la foule en délire vient applaudir tes exploits et te donner plein de courage pour la terrible montée des Posettes, qui s'annonce bien choupinou, avec une descente super roulante jusqu'au passage de la dame de fer, avant de reprendre la combat des vaches qui rient de la pente qui leur est proposée, car le bonheur est dans le pré.
Mais camembert, ça je vous en ai déjà parlé. Vous reprenez 5 fois ce récit, et vous avez une idée de ma course.
Je ne m'attarderai pas sur mon cas perso, assez peu intéressant.
D'ailleurs, ma moitié m'a dit quand je suis rentré: «arrête de faire ton calimero.»
Je lui ai répondu que j'avais fait une course quali, mais oh! Je ne fais jamais les choses à moitié (et elle non plus d'ailleurs)
C'est trozinzuste, j'avais pourtant plein de choses à raconter sur mon statut de V3 qui pense encore avoir un moteur de V6.
Un zeste de retenue donc, et je vous cacherai pourquoi, d'une 1ere montée effectuée en 48 minutes montre en mains (en restant pourtant très en dedans), je suis passé à une 5ème montée effectuée en 1h05, sans même avoir appuyé sur le bouton pause.
Ah, j'aurais bien fait une petite pausette sur le chemin des Posettes, mais c'est la course: tu montes ou tu crèves (et pas que l'ecran)
A l'arrivée, un des nombreux bénévoles présents voit mon dossard et me qualifie de benman. Après avoir repris vaguement un bout du peu d'esprit qui me restait, je réalise que c'était aquanaut, l'initiateur du fil sur kikourou, qui m'avait donné envie de venir.
J'essaie de lui raconter quelque chose de cohérent à défaut d'être intelligent, mais en fait je ne rêve que d'une chose: m'allonger les jambes en l'air, pour alimenter mon compteur -déjà bien garni- des PLS d'arrivée, preuve que dans la peine j'ai donné le max.
Mais étais-je au max vers c'te peine?
Mon turbo était-il cassé? Ma PLS était-elle liée à une panne de DRS?
Et là, il faut se retourner vers les essais et le warm-up.
Probablement que l'enchaînement de la veille était un peu tendax comme diraient notre descendance, selon plusieurs formules:
Formule 1: aller valider le plus bel endroit du monde -bubulle dixit- , j'ai nommée la Combe des Fours, aux confins des Aravis, pour y voir la Gouille. Si vous ne savez pas ce qu'est la Gouille des Fours, je vous le déclare, allez-y. N'hésitez pas à vous y tremper, dans la Gouille, elle est soyeuse, mais il n'y en a qu'une (ce qui signifie peut-être que Lance Armstrong en est le parrain?)
Mais je ne vais pas vous caser les gouilles trop longtemps sans vous y montrer d'image (notez l'emploi du "y" tellement local, c'est mon coté moi, moche et monchu qui se rebelle).
Je ne sais pas si j'ai fait le meilleur tour, mais certainement pas le moins long. Ma place sur la grille devient inexorablement celle du grillé.
Formule 2: nager et mettre le feu au lac des Ilettes le plus beau lac du monde -beau frère de Xian dixit- , avec le Grand Timonier en personne, à la nage raffinée et tellement stylée avec ses lunettes de soleil et son port altier.
Il fait tout ça pour éviter de tremper son auguste apex, à la crinière de plus en plus immaculée.
Un peu le Flavio Briatore de la natation, quoi.
Formule 3: finir sa journée en picolant joyeusement avec les cousins/cousines au stand. Tout ça pour se donner l'illusion qu'on ira plus vite, au delà du mur du son le lendemain, après avoir avalé un macvin (qui n'est pas, je précise pour les monchus jurassiens, le dernier avatar de Ronald Mac malbouffe. Là, on est à 100% dans la bonnepicole)
Bref, ce genre de mélange la veille d'une course n'a jamais donné des resultats très brillants. Je suis plus.proche du mur du çon.
Evidemment, y'a pas eu de miracle. Mais l'essentiel est ailleurs.
En chemin, je me mets même à revasser en passant devant le dernier pylone. Mon esprit me ramène au petit trailer que je désire être, loin des défis des grandes personnes, à la recherche de record de temps au tour et de ravitaillement express.
La télécabine se met soudain à me parler :
« Salut. »
« Salut, dit le petit trailer, les jambes encore lourdes de la montée. »
« Je suis là, dit la télécabine, juste derrière la crête. »
« Qui es‑tu ? »
« Je suis la télécabine», dit-elle
« Viens avec moi sur le sentier, dit le petit trailer. Cette montée m’a épuisé. »
« Je ne peux pas courir avec toi, dit la télécabine. Je suis là pour t’aider à redescendre, pas pour grimper. »
« redescendre, mais pourquoi? » demanda le petit trailer.
« Cela signifie créer un lien, un fil dit la télécabine. Comme apprendre à connaître chaque pierre du sentier, chaque souffle, chaque montée. »
« Un lien, un fil? »
« Oui. Pour toi, je ne suis qu’une télécabine parmi toutes celles de la vallée de Chamonix, mais si tu m’apprivoises, tu apprendras à apprécier la descente autant que l’ascension, sans jamais perdre le fil »
« Je crois comprendre… Ma montée… elle m’a apprivoisé, comme un sommet que l’on attend. »
« Oui. On ne connaît vraiment que les sentiers qu’on a foulés. »
« On ne connaît que les sentiers qu’on a foulés, répéta le petit trailer. Je vais pouvoir y retourner plein de fois alors?»
« Les trailers l’oublient souvent, à chaque descente, succède une nouvelle montée, toujours plus extraordinaire» dit la télécabine. «Mais toi, souviens‑toi : tu deviens responsable de chaque montée que tu apprivoises, et de chaque descente que tu savoures. »
« Je suis responsable de ma course… et de chaque montée, même si mes jambes se dérobent à ma vue… »
« Oui, dit la télécabine. »
Puis elle ajouta :
« On ne monte bien qu’avec le coeur. L’essentiel est invisible pour les yeux… même quand je file doucement sur les câbles pour te ramener. »
« L’essentiel est invisible pour les yeux… » répéta le petit trailer, en respirant l’air frais de la vallée.
D'un coup de cul, je me réveille et comme le petit trailer, redevenu benne-man, je reprends le fil de mon récit, à la recherche d'une pause aux Posettes, comme quand j'étais encore petit enfant.
Mais je suis un adulte, je n'ai pas droit aux pauses. Là c'est la course.
Les grandes personnes aiment les chiffres. Quand on leur parle d’une nouvelle montée, elles ne vous questionnent jamais sur l’essentiel.
Or tous les grands trailers ont d’abord été des enfants. (Mais peu d’entre eux s’en souviennent.) C’est le temps que tu as perdu pour ta pause qui fait ta pause si importante.
Je suis arrivé, pour un peu les larmes couleraient presque, C’est tellement mystérieux, le pays des larmes.
Je prends un petit Prince qui traînait sur la table du ravito, et me mets à reprendre en mains mon récit.
J'aime bien ce type de course un peu bourrin ou tu viens travailler ton mental à 2 pas du pays de l'Emmental.
Mais tu est côté Beaufort, beau et fort, sans trou dans ton fromage de tête.
J'ai eu le privilège de partager cette course avec Antman, qui est un spin-off du benman.
C'était bien chouette.
La relève du trail mondial à coller sur les frigos (private joke uniquement pour ceux qui connaissent mon nom) y faisait sa première expérience de gros dénivelé.
Avec lui, la performance se nivèle par le haut.
Un peu mal aux pattes au début, mais haut les coeurs, il est des nôtres, il a fait 5 montées comme les auuutres.
Merci aux Posettes de nous avoir gratifiés de cette belle parenthèse avant le terrifiant défi de la Swisspeaks 170. Un défi suisse qui pique.
Merci aux organisateurs, la valeureuse équipe qui nous régale déjà au trail des Aiguilles Rouges, et à Aquanaut, son digne représentant.
Merci aux bénévoles qui sont là pour nous permettre de rajouter du temps à l'exceptionnel de notre vie.
Moi aussi, à ma maniere, j'irai benevoler un peu de mon temps perdu la semaine prochaine à l'échappée Belle.
Perdu dans mes étoiles au col de la Perche, j'y regarderai le
le ciel, la nuit, puisque j'habiterai dans l'une d'elles, puisque je rirai dans l'une d'elles, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras, toi, des étoiles qui savent rire.
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4 commentaires
Commentaire de Mazouth posté le 16-08-2025 à 18:05:32
Bref, si on voit ça sous un autre angle, droit, tu es monté du côté aux Posettes à l'hypoténuse...
Commentaire de Benman posté le 16-08-2025 à 18:16:29
Ah, c'est donc pour ça que j'ai eu un mal fou à mettre la photo de la gouille droite...
Commentaire de bubulle posté le 16-08-2025 à 19:31:23
Hébin, ça promet pour le récit de la Swisspeaks....
Commentaire de Aquanaut posté le 17-08-2025 à 08:28:33
J’avais bien vu que tu n’avais pas encore retrouvé toutes tes facultés mentales!
Rassure toi, tu n’es pas le seul à ressembler à un zombie après de pareils efforts: je me souviens du discours de bubulle à l’arrivée de l’UTB 2024 qui ne valait pas mieux que le tien avant-hier. Et plein d’autres à La Flégère (Rive droite…) au bout de leur effort sur la fin des courses de quartier de fin août…
Bravo en tout cas et merci d’être venu à cette première.
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