Récit de la course : 24 heures de l'Ardèche 2025, par marathon-Yann

L'auteur : marathon-Yann

La course : 24 heures de l'Ardèche

Date : 28/6/2025

Lieu : Guilherand (Ardèche)

Affichage : 36 vues

Distance : 0km

Objectif : Pas d'objectif

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Sous le soleil exactement

J'avoue, j'ai hésité. Il est 10h30 ce samedi matin, et alors que je passe devant le salon frais d'un coiffeur qui semble s'ennuyer, j'hésite à entrer et à lui demander une coupe qui me permettrait d'avoir un tout petit peu moins chaud sous la canicule du weekend. Et puis l'appel des copains est trop fort, et je préfère passer mon chemin pour avoir un peu plus de temps pour discuter avec eux avant la course.


C'est qu'ils sont nombreux aujourd'hui, rassemblés à Guilherand-Granges Ray sur le 6h, Habiba sur le 12h, Bob, Jean-Louis, Aurélie, et tant d'autres sur le 24h, tellement de personnes à saluer ! Mais attention, l'appel des copains, c'est comme l'appel de la forêt, ça peut vite tourner à la lutte pour la survie dans des conditions extrêmes, et l'alerte canicule dont on nous rebat les oreilles depuis deux jours est là pour nous le rappeler. Il va faire chaud ! Il fait chaud !

 


Privilège de l'âge, je commence à avoir un peu d'expérience de ces conditions, et je sais que si je veux tenir, il ne faut surtout pas se griller tout de suite. Prendre un départ prudent, tel est le secret . Je pars donc prudemment... sur les 20 premiers mètres. Puis l'appel des copains est trop fort : je cale ma foulée sur celle d'Aurélie pour pouvoir discuter un peu avec elle. Après 3 tours je lève le pied, elle est franchement trop rapide pour un 24h !
Le tour fait environ un kilomètre. Nous sortons du stade Mistral, faisons un aller retour sur un parking le long du Rhône, où nous pourrons avoir suivant l'heure un peu d'ombre mais aussi un peu de vent de face plus ou moins bienvenu, tournons à gauche pour passer devant des camping cars qui serviront de camps de base à de nombreux concurrents, puis entrons de nouveau dans le stade où nous attendent une douche, le ravitaillement, la ligne de chronométrage et des barnums sous lesquels veillent les accompagnateurs bienveillants. Un peu plus loin, les vestiaires de foot sont ouverts, et j'irai très fréquemment m'y arroser la tête et profiter quelques furtives secondes de cette ombre protectrice.

Sur le papier, nous sommes 6 ou 7 à pouvoir dépasser les 200 km, et j'avoue tenir compte de ce paramètre en fixant mes objectifs. J'aimerais aujourd'hui atteindre les 200 km (ce qui serait costaud sous ce cagnard), et/ou faire un podium "garçon", voire même faire un podium scratch. Seuls les 3 premieres filles et les trois premiers garçons seront récompensés, et j'aimerais bien rapporter une coupe à la maison, ou plus exactement me promener avec au congrès montpelliérain où je suis attendu lundi. Mais ces deux derniers objectifs ne dépendent pas entièrement de moi, je me concentre donc sur le premier, 200 km.

Pour cela, j'ai un gros objectif intermédiaire, atteindre les 100 km en moins de 11h. Ça veut dire avancer à environ 9 km/h pendant ce temps. Après, il me resterait 13h pour faire 100 km,  soit un peu moins de 8 km/h, c'est jouable.

Et c'est vraiment parti ! Je veux dire, ça y est, j'ai mon rythme de croisière. Il fait très chaud, ce qui me donne le plaisir enfantin de me verser de l'eau sur la tête régulièrement, et de repartir, le tee-shirt dégoulinant séchant rapidement. Je suis heureux de me faire dépasser régulièrement par Ray, qui va chercher une brillante victoire sur le 6h. Je discute un peu avec Fabrice et avec Eric, dont j'ai le plaisir de faire la connaissance. Je compte les tours, fais des projections, pense à boire, bref je ne m'ennuie pas.

Je m'arrête quasiment à tous les tours pour réclamer à boire aux bénévoles. Les boissons sont fraîches, c'est important, surtout aujourd'hui. Avec de la pastèque et une pomme de terre que je mangerai cette nuit, ce sera mon seul ravitaillement de la course. 

Toutes les heures, le speaker annonce le classement. Troisième, second, premier, celui-ci évolue tranquillement... Premier ? Ce n'était pas forcément prévu ! 

Ne nous emballons pas ! Alors que je suis un peu déstabilisé de voir cette première place menacée par Marie-Pierre, qui n'est qu'à un tour et me qui me reprend quelques dizaines de mètres à chaque tour, j'ai une discussion avec Eric, qui me rappelle mes objectifs. Ce que je veux, aujourd'hui, c'est les 200 km, le reste suivra naturellement. Ou pas. De l'importance d'être honnête avec ses objectifs.

Marie Pierre me dépasse, et je la félicite sincèrement. Songez que pour son premier ultra, elle va courir pendant presque 23h, avant de commencer à marcher ! Pour ma part, ça fait quelque temps déjà que j'ai introduit un peu de marche dans ma progression, régulièrement, environ 200 m par tour. Cela me met dans une position un peu bizarre avec Chris, deuxième garçon à seulement 2 tours. Pendant plusieurs tours, il me rattrape pendant que je marche, chaque fois au moment où j'avais prévu de relancer. Je relance donc, lui reprend quelques dizaines de mètres d'avance, marche, me fait rattraper, relance... J'essaie de lui expliquer que je ne cours pas contre lui et que ce n'est qu'une coïncidence, mais il ne parle pas français, et à cette heure de la nuit mon anglais est encore moins compréhensible que d'habitude. Je ne sais pas ce qu'il a pensé de ma façon de courir.


C'est la nuit maintenant. Cela fait longtemps que les coureurs du 6h ont fini, c'est au tour des coureurs du 12h d'arrêter. Certains coureurs du 24h s'arrêtent pour dormir un peu. D'autres au contraire se remettent à courir, profitant de la fraicheur relative. La chaleur est un peu tombée, et nous goûtons à la douceur de la nuit. La piste est à nous, silencieuse.

Être honnête avec ses objectifs ne veut pas forcément dire n'en avoir qu'un. Les 200 km sont toujours accessibles, le podium garçon aussi, et même laplus haute marche de ce podium. Je surveille quand même Chris du coin de l'œil. Deux tours à 12h de l'arrivée, ce n'est rien. Je suis donc soulagé de le voir dormir sur un transat. Je pense creuser rapidement l'écart, jusqu'au moment où je me rends compte que le coureur blond qui dort tranquillement n'est pas Chris, mais un autre concurrent. Il me faudra insister un peu pour creuser l'écart.


Et celui ci se fera naturellement, comme me l'avait prédit Éric. 

Le jour se lève tôt, c'est à la fois un soulagement et une inquiétude. Assez tôt, le soleil se remet à cogner, et je recommence à m'arroser régulièrement la tête avant 8h. 
Il reste un peu moins de 4h de course, et ma seule boussole, c'est les 200 km. En avançant à ce rythme, c'est toujours faisable.

Il ne reste qu'une heure, et le speaker a décidé de nous la faire vivre intensément, nous encourageant à chaque passage, et annonçant notre kilométrage chaque fois. Il m'annonce ainsi, presque surpris : "195 km, tu as une heure pour faire 5 km, tu peux aller chercher les 200 !" J'espère bien !

J'arrive encore à alterner course et marche, et les 4 premiers "derniers kilometres" passent gentiment. Au moment de franchir les 200 km, je rejoins Marie Pierre, brillante vainqueure avec 208 km, et nous décidons de nous offrir un dernier tour d'honneur, en marchant et en savourant pleinement ce dernier tour de piste. 

Je finis finalement avec 201,4 km. Comme diraient nos amis cyclistes, je suis parti frais comme un gardon, et arrivé fumé comme un saumon. Mais heureux comme un poisson dans l'eau !

 

 

 

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