Récit de la course : L'Echappée Belle - 140 km 2013, par Dan38

L'auteur : Dan38

La course : L'Echappée Belle - 140 km

Date : 30/8/2013

Lieu : Vizille (Isère)

Affichage : 3603 vues

Distance : 140km

Objectif : Pas d'objectif

2 commentaires

Partager :

126 autres récits :

Ma Belle Echappée

Bon, voila, ça, c’est fait !

Après mon GRR (Grand Raid de la Réunion) en 2011, j’avais dit, finis les Ultras Trails ! Trop durs, trop d’entrainement et d’investissement. Et voila que 2 nouveaux trails (UT4M et Echappée Belle) voient le jour dans ma région en 2013 ! Je ne peux pas résister : y’a pas photo, l’Echappée Belle (EB) sera à mon programme !

Bon, début juin, je n’ai pas fait grand-chose ! Je m’inscris sur 2 trails (Drayes du Vercors, 25km et le Grand Duc, 80km) et je me dis que je vais parfaire ma préparation jusqu’à fin aout. Ben non, après le Grand Duc, je ne fais plus rien, pas envie… Vacances, Moritos, Fareniente sont au programme.

Reprise de l’entrainement le 15 aout (pas envie) à la lecture du Road Book : va falloir s’entrainer un peu quand-même ! Bref, avant le départ de l’EB, j’ai 900km et 23000mD+ au compteur (trail 300/15000, vélo 600/8000). Aïe aïe aïe ! Mes proches sont un peu inquiets. On verra bien !

J’ai trouvé tout ce que je recherchais dans cette EB, sauvage, grandiose, cassante, usante.

Je pars donc sur une base de 40-42h comme d'ab.

Sur la première partie, je cour avec un pote, Vincent. Il a prévu de s’arrêter à Fond de France. Sur la ligne de départ, je croise d’autres potes : Frank, Max, Riad, Laurent. « Allez ! On se retrouve tous à l’arrivée ! ».


Avec Vincent, on attaque vite, trop vite à mon goût. A l’Arselle, j’attends 1/4h que ma femme arrive. Elle ne pourra pas me voir sur le reste de la 1° partie et je suis très en avance sur mon programme, il est 8h30.

                                                                  dan-larselle.jpg

Arselle – Lacs Achard – Lacs Robert. Sentier sympa où l’on peut encore courir. Echange 2 ou 3 mots avec Matthias, Croisé aussi Samontetro et Martine(que de KIKOU!). On traverse les lacs Robert, puis un bon coup de cul. Sur le sentier, un gars est tétanisé par une crampe. On s’arrête et Vincent lui donne une pastille de sel. Quelques centaines de mètres plus loin, le gars nous double en nous remercie pour le dépannage express ! Cool ! Direction La Pra par un passage totalement imprévu. Itinéraire superbe. Au refuge de La Pra (107°, 11h), je croise ELCap « Merci pour ton programme en 42h que je ne respecte pas ! ». Direction Croix de Belledonne. Ascension régulière jusqu’aux derniers 300mD+ où l’altitude, les névés, la caillasse, rendent la progression lente. On encourage ceux qui descendent. Arrivée au sommet en 110° position. On touche la Croix, une petite barre, coup de fil à la famille, puis on attaque la descente. Vincent file comme un lapin sur la première partie, on apprend même à faire du ski sur les névés bien tracés. On recroise les gens qui montent, re-encouragements. Direction Col de Freydane. Re-névés + blocs.

Les bonnes sensations sont là. Super descente technique. J’adore ce passage, avec vue sur le Lac Blanc. Je n’arrête pas de dire à Vincent « Regarde comme c’est beau ! Regarde comme c’est beau ! ». Jean Collet (123°, 14h15). Pause 1/2h. Soupe de pattes, Tuc, Coca. Ambiance montagnarde. Un régal ! Je repars tranquille, direction Col de la Mine de Fer + Col de la Vache. Deux gros morceaux à avaler avant Fond de France. J’imprime un tempo régulier dans le premier col qui passe plutôt bien. Dans le Col de la Vache, petit coup de mou. Je ne suis pas le seul, je vois 2 gars qui dorment sur le côté, tout empapillotés ! Je prends des nouvelles, tout va bien. Ils me disent qu’ils se reposent un peu. Je vois revenir sur moi le relais féminin (Elodie Lafay). Impressionnante de facilité, sans bâton. Je m’accroche un moment mais décide de rester sur mon rythme. Arrivent les blocs du Col de la Vache… Je visualise le sommet et trace ma ligne. Je rejoins Elodie et je la double. Elle a visiblement un coup de moins bien. Au sommet, je trouve une paire de bâtons. Bizarre ! Je cherche du regard à qui elle appartient et j’aperçois un gars qui fait des grands signes 200m plus bas. Je lui fais signe de remonter les chercher ;-) Mais non, je les descends ! Dans ce passage aérien, on aperçoit des bouquetins et on entend siffler des marmottes. Super ! Vincent attaque cette descente sur un bon rythme. On double pas mal de monde. Un gars s’accroche à notre rythme derrière moi. Il me fait flipper car il est toujours à la limite. Je crains qu’il ne me tombe dessus ! Sur ces gros blocs, Vincent prend 5/6m d’avance sur moi, et, à la sortie d’un bloc, je le vois assis, la tête en sang ! Oh merde, il a glissé sur un caillou et a heurté un gros bloc. Arcade ouverte et mains éraflées. On va devoir sortir la trousse à pharmacie. Tous les gars qu’on a doublés nous proposent leur aide. Sympa. Ca va aller. On repart 1/2h plus tard, plus timidement jusqu’à sortir de la caillasse. Il me dit que tout va bien et que je peux envoyer. On redouble pas mal de monde dans la traversée des lacs. Sur la fin de la descente, dans la forêt, Elodie nous redouble.

                                      dan-descentefd.jpg               vincent-descentefd.jpg

On arrive à Fond de France (113°, 20h15) dans un état second, euphorique. Je sais que Vincent s’arrêtera là, malgré son envie de continuer (autres objectifs sportifs et obligations familiales). J’ai été très heureux de faire cette partie avec toi ! Inoubliable. Merci ! Ma femme est là et prend soin de nous !

Je croise Damien et Rémy de 3D Trail. Rémy (pacer) qui attend Christophe. Je mange des pates à la carbonara et du fromage blanc, je change de chaussettes, chaussures, enfile un t-shirt manches longues(1/2h d’arrêt). Christophe arrive et Rémy m’annonce que Christophe va repartir bientôt. Je décide de faire un bout de chemin avec eux, nuit oblige. On repart, 94°, il est 21h20. Dans la première ascension, Christophe ne se sent pas bien et commence à vouloir abandonner. On s’arrête et il vomit ses trippes pendant un bon 1/4h ! On repart tout doucement, refuge du Léat, Christophe veut dormir un peu. On s’arrête, je m’allonge aussi tant qu’à faire… Mais j’ai vite froid, pas de couverture dispo. Rémy vient aux nouvelles, Christophe n’arrive pas à dormir, il veut abandonner. Avec Rémy, on le persuade d’aller au moins jusqu’au Gleyzin. Au Gleyzin (99°, 2h21), Christophe me dit qu’il ne repartira pas. Je croise Frank, un ami, qui me propose de me joindre à eux. OK. Je repars en saluant Rémy et Christophe, persuadé de ne plus les revoir sur la course. Il est 3h du matin. Sur le début de la montée au Col de Moretan, j’arrive à les suivre mais dès que la pente se raidit, je les perds de vue. Je force un peu le pas mais je ne suis plus très lucide et pan, je mets mon pied dans le vide et je fais une chute de 3/4m en contrebas, je remonte sur le sentier et j’arrive au refuge de l’Oule. Je leur dis de continuer sans moi. Sachant ce qui va venir, je ne me vois pas continuer sans faire une pause. Il est 4h du matin, je m’allonge dans le dortoir. Je regarde ma montre tous les 1/4h. Je n’arrive pas à dormir… 6h du matin « Allez, relèves-toi ! Le jour va se lever. Tu as un truc à finir ! ».

Je me colle aux baskets de 3 coureurs, arrivent à nouveau les blocs de pierre. Les 3 gars s’arrêtent pour se ravitailler. Je continue seul. Le jour se lève et je suis heureux de ne pas avoir fait ce passage de nuit ! J’arrive au Col de Moretan à 7h30. Les bénévoles nous annoncent que les derniers coureurs viennent de repartir de Fond de France ! « Courage à eux, quand on sait ce qui les attend ! ».

La descente… Que dire ? Je n’avais jamais fait un truc pareil ! Prendre la corde, ou pas, sur le névé gelé. En voyant tous les « Candeloro » sur la glace, je prends la corde quand il y en a. J’aperçois Riad sur le névé. Je l’appelle. Il me demande « Qu’est-ce tu fais là ? Tu devrais être devant toi ! ». Je continue sur ma lancée, je suis bien. Je double une dizaine de personnes. A Périoule, les bénévoles m’offrent un chocolat chaud. Je n’en prends jamais mais là, je l’apprécie, autant que leur gentillesse ! Merci à eux ! 4 ou 5 personnes arrivent. Je laisse la place et repars, direction Super Collet. Je continue à doubler du monde. La dernière montée, je la fais avec un V3, respect (Daniel Barbier, finisheur, premier V3) !

                   dansupercoller.jpg                                dandepartsupercollet.jpg                         remyavecmesbatons.jpg

J’arrive au Super Collet (117°, 11h30) et Oh Surprise, Christophe est là assis et que me dit-il ? « J’arrête, j’en peux plus ! ». Je lui réponds que je vais manger un bout et qu’on va repartir ensemble, d’un ton ferme. Nous voila donc repartis. Au bout de 800m je me rends compte que j’ai oublié mes bâtons au ravito ! Ni une ni deux, Rémy fait demi-tour pour les récupérer ! Il est frais lui ! Rémy et Christophe ont un rythme qui me convient pour le moment. Arrive l’ascension des Ferice, je suis un peu distancé. Ils font des pauses pour m’attendre et pour que je recolle le train. Je leur dis de faire leur course et de ne plus m’attendre. Ils prennent de l’avance. Je les vois au loin sur la montée du Col de la Frêche. Une bavante pour moi, de vraies montagnes russes. A ce moment, ma montre GPS rend l’âme ! Plus de batterie !

Je rejoins Val Pelouse (99°, 16h37) où Surprise ! Ma femme, ma sœur et mon beauf sont la ! Ce n’était pas prévu, ça fait super plaisir ! Au ravito, je recroise Christophe et Rémy qui sont prêts à repartir. On ne retient plus Christophe qui n’a plus qu’un but : l’arrivée, après avoir tant voulu abandonner. Je raconte mes aventures de la nuit à ma femme et elle m’annonce à ma grande surprise que Frank a abandonné au refuge de l’Oule ! Il n’a pas franchi le col de Moretan et a fait demi-tour. 

                                     dan-valpelouse.jpg

Un bénévole serre-file me propose une bière, je lui dis « Banco ! Au point où on en est… ». Je m’arrête 3/4h. « C’est presque fini non ? ». Ben non, il dit qu’il faut bien 10h encore pour rejoindre l’arrivée ! « Ha, quand-même ! ». Je n’arrive plus à avaler de sucré, je prends un peu de jambon et fromage. Puis je repars tranquille sur la première bosse. Je grappille quelques myrtilles sur le chemin. Faudra revenir une prochaine fois pour faire le plein tant il y en a ici! Je double 3 personnes dans la descente et loupe la bifurque à droite à la source du Gargotton. Je tombe sur des barbelés, allez, demi-tour, direction Col de la Perche. J’apprécie cette montée, ainsi que le sentier qui mène au Lac des Grenouilles, où je suis accueilli avec enthousiasme par des enfants. Traversée de clôtures à pâturages puis vient la descente vers le Cucheron. Je pense y être avant la nuit… Erreur ! Je ne sors pas la frontale avant 20h30, après avoir chuté plusieurs fois dans cette descente interminable ! Sur la fin, on a l’impression de tourner en rond. Pas terrible. J'ai plus de notion de temps et de distance, vu que mon GPS est HS !

J’arrive enfin au ravito, pas grand monde (98°, 21h40). Je suis le seul coureur. Arrive un relais qui peste aussi contre la descente au Cucheron. Je m’enfile 3 tranches de jambon avec un peu de Coca. Je repars à 22h. « Allez, la fin est proche » Plus de difficultés particulières. Je me fais vite doubler par le relayeur croisé au Cucheron. Au ravito du Foyateet, je dépanne les bénévoles qui n’arrivent pas à allumer leur réchaud. En échange, ils me proposent une goutte de gniole. « Ha non la, faut pas abuser ! ». La suite est une succession de pistes qui montent, descendent, remontent… Assez monotone. J’ai même l’impression de faire le parcours en sens inverse, persuadé d’être déjà passé par ces endroits. J’essaye de me convaincre que ce n‘est pas possible. Je commence à avoir les yeux qui se ferment. Je décide de me faire violence et de me remettre à courir. Jusqu’à la fin, je ne m’arrêterai plus de courir sur cette route qui n’en finit plus. Je redouble le relayeur qui m’avait doublé, lui dis 2 ou 3 mots car il est complètement à l’agonie. J’arrive au bout de la route, plus d’indication ! Je vois le panneau d’entrée d’Aiguebelle. Merde, je ne suis plus sur le bon parcours ! Je traverse toute la ville et tombe sur les signaleurs qui me demandent d’où je viens… Allez, plus que 300m !

J’arrive dans une ambiance plutôt feutrée. Seuls mes proches sont là ! Je suis heureux d’en finir, il est 2h du matin, je suis 92°.

Le relayeur arrive 1/4h plus tard et je prends de ses nouvelles. Je bois une bonne bière (merci Patrice !), je prends un sandwich Jambon-fromage. Entre temps 2 autres solos arrivent. Bon il est temps de rentrer à la maison maintenant (3h du mat’) !

Je finis cette aventure en 44h07mn !

Bilan: Super content de la 1° partie avec Vincent. Perdu pas mal de temps après Fond de France avec Christophe et ses problèmes gastriques! Mais aucun regret, ces moments-là sont plus importants que le temps. Bien fait de m'arrêter 2h au refuge de l'Oule. Déçu de n'avoir pas pu suivre Christophe et Rémy sur les Ferices, du à mon manque de foncier. Ils m'ont lâché, dommage, tout comme mon GPS qui n'a pas tenu la distance (hein, mon Brice?). J'ai couru les 15 dernières heures seul, pas facile à gérer.

Si je devais changer quelque chose, je ne changerais rien à ma préparation ni à ma façon d'aborder le trail. C'est comme ça que je vois les choses. Je vis ma vie comme je l'entends.

 

Christophe boucle la course en 42h23 en 78° position, Riad finit en 49h04 en 130° et Max termine en 51h11, 147°.

Merci à mes proches pour leur soutien à distance, à Vincent pour le plaisir partagé sur la première partie, à ma sœur Manu et mon beauf JP et Patrice pour leur présence. A Frank, Max, Riad, et toute l’équipe de 3D Trail. Brice d’Endurance Shop. Et tous les trailleurs avec qui j’ai partagé un bout de chemin.

Un grand merci à ma femme. Elle était là pour me soutenir et c'est important, le dernier mot sera pour elle.

« Vue de l’extérieur, cette course peut paraitre complètement dingue. Vue de l’intérieur, C’EST vraiment dingue ! J’ai suivi mon mari comme j’ai pu ! Inutile de chercher à comprendre ce qu’il cherche en repoussant ainsi ses limites, physique et morale, ni d’où il tient sa détermination. Perso, j’ai eu mal pour lui, même s’il n’a émis aucune plainte, manifesté aucune trace de découragement ! Parti pour terminer, il a terminé, même pas mal ! Mais quand-même, j’ai vu beaucoup de souffrance sur les visages pendant cette épreuve, dès Fond de France, et heureusement beaucoup de sourires aussi et beaucoup de plaisir partagé. Beaucoup de courage aussi. Un grand bravo à tous ! »

2 commentaires

Commentaire de ptijean posté le 08-09-2013 à 20:30:10

bravo pour ta course et merci pour le CR.

Commentaire de alban posté le 18-09-2013 à 22:42:30

Oui on a surement du se croiser à partir de FDF... je repense à cette descente sur Cucheron qui m'a bien énervé sur le moment !
Bravo à toi.

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.16 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !