Récit de la course : Le Grand Raid des Pyrénées 2009, par PaL94

L'auteur : PaL94

La course : Le Grand Raid des Pyrénées

Date : 28/8/2009

Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)

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Distance : 150km

Objectif : Terminer

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Le récit

GRP 2009 

38 ans !  Putain 38 ans !  38 ans  que je n’étais pas venu dans cette vallée; ça ne me rajeunit pas !  

Aussi pour la circonstance ma première promenade a été cette vallée riante du Rioumajou où tous les étés le curé de St Michel d’Entraygues organisait une colonie de vacances. Je suppose qu’il était de la région mais en fait je ne l’ai jamais su exactement, tout juste me rappelais-je que quand il était jeune il s’était cassé les deux jambes au ski (c’est ce que ce qui se racontait alors) et  à son époque ce sport n’était populaire que chez les montagnards.  

Ca a quand même un peu changé, la piste maintenant est goudronnée jusqu’aux Hospices du Rioumajou mais c’est avec nostalgie teintée d’émotion (même si on n'y croit plus) que je découvre sur le plat près du gave là où se dressait notre camp de tentes, la chapelle quasi virtuelle qui avaient été mise en place, il y a plus de 40 ans et où l’abbé disait sa messe tous les matins. Quelques pierres pour délimiter le lieu et un autel composé d’énormes plaques de schiste. Rudimentaire et fondu  dans la nature mais toujours là en témoignage de ces temps passés.

 

Regards émus également sur ce Batoua (3034m)  qui ferme cette vallée et que j’avais gravi à l’époque avec quelques ‘’grands’’.  

 

Bref une sorte de pèlerinage mais la montagne ici est toujours aussi belle ainsi que je l’avais conservée en mémoire. Comme c’étais l’année, j’avais décidé de ‘’m’offrir’’ le GRP pour l’occasion. Néanmoins je me doutais que ce ne serait pas une ‘’promenade’’ facile et mes souvenirs et les reconnaissances des cols de Portet, Bastanet et Bareges me le confirmaient. Vendredi matin donc ma Blonde m’emmène au départ. J’ai peu déjeuné comme d’hab mais cette année j’innove en vomissant avant même de commencer. Bonjour l’angoisse !

  

  

J’ai le plaisir de découvrir que PAM le canari, Christian et Marc tous les trois, tour à tour, mes binômes de Diago ou d’UTMB qui sont venus me supporter au départ. Ca me touche car je leur avais pourtant conseillé de bien dormir cette nuit car demain ils s’attaqueront au Grand Trail qui va être ‘’technique’’ comme on dit. 

Marc, Pam et Christian :

  

J’aperçois Pépé, du GRP en rando avec qui je discute un temps et que je remercie une nouvelle fois pour le  descriptif en photo qui m’a bien aidé à me plonger dans le tracé de la course.  Il faut maintenant se regrouper derrière la ligne de départ et faire au préalable activer nos puces.  

Je discute en attendant un peu avec JPV qui me semble en pleine forme et à qui j’annonce, vue sa perf au Mercantour que je le vois bien en 38/39 heures. Pour ma part Rodio m’avait prédit un 43 heures qui me semblait très optimiste vu le terrain et surtout me connaissant. 

Ca y est, avec un petit peu de retard, le départ est donné et la troupe se lance raisonnablement pour une fois, dans les petites rues de Vielle Aure. Un dernier bécot à Laurence et nous voilà direction Vignec en trottinant accompagné de mes trois copains. Christian doit être frustré de photos car il mitraille à tout va.  Arrivé à l’église de Vignec où Jojo et Jef nous attendent (ca devait une surprise comme l’avait confié secrètement Jojo à Laurence mais Jef avait depuis longtemps vendu la mêche). 

Dernières embrassades et poignées de main je m’élance maintenant seul sans mes supporters à l’assaut de ces premiers 1400 m de D+.Ca plaisante encore un peu dans le peloton mais très vite avec les premières rampes plus personne ne discute ; la course commence vraiment. Comme j’avais reconnu cette première partie jusqu’à Espiaube j’y vais doucement mais d’un bon pas question de ne pas me griller pour la suite de la course. Malgré l’heure il fait une chaleur humide étouffante qui me suffoquer et chercher l’air. A 3h du matin il faisait déjà 20 degrés. J’espère que là haut ça ira mieux car on nous a prédit un temps un peu couvert mais pas trop.

Les Granges Lias et peu après le premier escalier de clôture ensuite la crête du Coudet. Re-escalier et petit chemin en forêt et encore un escalier.  Je joue au yoyo avec un coureur arborant fièrement un drapeau corse. Passage au guet et petite descente avant de remonter le vieux chemin qu’il nous faut abandonner pour cause de nature inextricable et remontée courte mais raide dans le champ  pour rejoindre la route direction Espiaube.  Passage parmi les vieilles maisons et ensuite le plat vers les pistes de ski, on va attaquer du gros !

Un petit bout de chemin avec Raton Laveur mais on se perd rapidement de vue car nous attaquons la pente. J’y vais prudemment car j’ai en tête le descriptif de Pépé et Miquel et je sais donc que cela va s’accentuer. Ca se confirme et ce n’est rien de le dire. Je progresse haletant, sous cette foutue chaleur humide et je rattrape le corse qui se fait acclamer par ses supporters dans la rampe.

Dernier virage et nous voilà enfin à l’approche du ravito. Un peu d’air frais à ce col de Portet et cela fait du bien car je suis liquide. Ravito rapide non sans discuter avec José qui y fait le bénévole après les dossards de jeudi et ceux juste après, tout cela avant d’attaquer lui aussi le grand Trail, qu’il finira malgré qu’il m’avait confié ne pas le sentir.

Photo du José au ravito:

 

C’est parti pour le col de Bastanet. Le ciel se dégage et tout le monde trottine sur le chemin panoramique.  Comme il est encore tôt le lac de l’Oule me parait plus sombre que d’habitude :  

 

Montée maintenant progressive vers les lacs du Bastanet. On saute bien le lac inferieur et nous retrouvons le lac du milieu et le refuge de Bastanet.

 

 

   Le temps se dégage et cela devient moins suffocant. Pas trop tôt !Attaquons maintenant l’ascension du col de Bastanet. Champ de caillasses et pierriers et tout là-bas le col et la procession des traileurs : 

 

  

Pas une bonne idée d’avoir pris du saucisson au dernier ravito. C’est bon pour le sel mais j’ai du mal à le digérer.  Montée courte mais final raide. Je suffoque toujours, l’air est encore chargé d’humidité. On se croise toujours avec notre corse au drapeau.   

 

Ca y est le col et sa vue imprenable sur les lacs de l’autre versant :  

  

La descente est caillouteuse à souhait et mes bâtons me sont des bons auxiliaires pour éviter les entorses. On aperçoit déjà au loin le lac de Campana. 

 

 

Quelques jolis laquets et c’est ensuite le lac et le refuge de Campana.

 

 Descente vers le lac de Gresiolles et son barrage. Terrain toujours très caillouteux et pas mal de pierriers. Il ne faut pas relâcher l’attention car c’est technique d’autant que nous commençons à être dans les nuages. Plus on descend et plus il y en a. A tel point que je passerais sous le barrage sans le voir et je commençais à m’inquiéter voyant l’heure tourner. Descente herbeuse maintenant vers le plat de Milomes. Nous sommes maintenant dans le brouillard. Difficile de reconnaitre les lieux. Cà et là on devine quelques chevaux paissant tranquillement.

 

 

Non mais, qu’est ce que c’est ? Je vais me plaindre à l’organisation : il y en a qui ont dressé des chevaux pour dé baliser car j’en aperçois un qui arrache une rubalise et fanfaronne avec son trophée dans la brume. Je l’immortalise en rigolant pour l’occasion :  

Nous suivons maintenant le Garret tout en gardant l’attention sur les balises car le brouillard et de plus en plus dense. Je consulte ma feuille de route et me rassure. Je suis plus que dans mon planning car je calcule plus de 30 mn d’avance. Cela me va car j’aurais un peu de temps à Artigues avant d’attaquer la suite. Descente dans la forêt et quelques randonneurs courageux, vu le temps, nous encouragent.

Enfin la cascade du Garet et c‘est la descente final vers Artigues. Moins de brouillard mais c’est maintenant la bruine soutenue qui nous accompagne.Je trottine tranquillement sur la route en vue du village et je me fais héler par un individu emmitouflé  dans ses vêtements de pluie et en train de satisfaire un besoin naturel dans un coin. Le bonhomme me rattrape en courant en criant Pierrot,Pierrot ! Je me retourne  et je découvre qu’il s’agit de Christian. Surprise ! Il m’apprend en courant qu’ils sont tous venus ici pour me supporter. Manque seulement Marc en pleine confcall avec le boulot (il ne décrochera jamais !).

J’arrive au ravito et Laurence, PAM, Jojo et Jef jaillissent de la voiture pour m’acclamer. Ca me réchauffe le cœur. Ils me congratulent car ils m’attendaient plus tard. Je rentre  sous leur vivas (ce n’est pourtant pas l’arrivée) dans la salle du ravito un peu humide. Ouf une bonne pause et surtout une bonne soupe. Je n’ai pas froid malgré que je sois toujours en tshirt car même s’il bruine l’air est toujours étouffant. Tous sont au petit soin pour moi, jusqu’à PAM mon canari préféré qui se charge de vider ma poche à détritus de patators.

Bon ce n’est pas tout ça après un quart d’heure d’arrêt,  il faut que j’y aille. Dernier baiser à ma Lolo. Gros bisous  de Jojo et tapes dans le dos des copains, je pars vers le col de Sencourt et ces 1200m de D+. Jef en partant me présente un ‘’pays’’ qui part lui aussi et nous faisons un bout de route ensemble.

Nous discutons tout en progressant sur la piste qui nous emmène aux cabanes de Tramezaygues. Mon collègue m’apprend qu’il se sent moyen et m’apprend qu’il fait plusieurs ultras par an. Cela explique qu’il soit un peu fatigué et peu motivé. Cela se confirmera car il se laissera distancer après les cabanes. Je ne suis pas plus rassuré car bien que je n’en aie touché mots à mes supporters, je doute un peu de mes capacités  à finir sachant que cela n’ira pas en s’améliorant.La pluie fine est toujours très présente mais je reste en tshirt car il fait toujours chaud.  J’ai beaucoup de mal à reconnaitre les lieux décrits par Pépé et Miquel car eux avaient beau temps alors que nous progressons  dans une visibilité limitée.

Apres le pont et le changement de versant nous attaquons dans la montée proprement dite vers le col. J’ai perdu de vue mon collègue et je me retrouve à gravir seul. La pente n’est pas trop raide et caillouteuse mais je cherche l’air malgré une vitesse ascensionnelle très correcte pour moi.  En se rapprochant du col la pluie cesse peu  à peu et  c’est sans elle que j’aborde le col et son ravito néanmoins dans les nuages.Tout là-haut à la faveur de quelques trouées nous apercevons le Pic que je tente de capturer en photo :  

 Deux verres de coca pour l’estomac, deux de soupe pour le sel, je fais l’impasse sur le saucisson pourtant appétissant car je ne veux pas renouveler l’expérience.  Remplissage de ma poche à eau avec mon mélange préféré eau plate et surtout pétillante et je repars direction la Bonida et les 3 autres cols successifs.

Cette section est moins caillouteuse je le sais par le descriptif mais la succession de cols risque d’éprouver les réserves, aussi bien que trottinant vers le lac  d’Oncet,  je ne force que peu mon allure.  Quelques randonneurs gravissant vers Sencours nous encouragent et c’est toujours appréciable.  J’envie quelques peu mes camarades du Grand Trail pour qui  ici débutera la descente vers Tournaboup. Pas dit que je verrais ce point de contrôle. Alors que nous avons officiellement déjà de 3000 D+ au compteur,  Il en reste 6000 pour boucler la boucle.

La remontée maintenant vers le col de la Bonida et déjà les nuages qui s’épaississent. Partie pas très technique mais qu’il faut aborder prudemment car la succession des 4 cols peut vous griller trop tôt avant le gros morceau du Caballiros. Le col de la Bonida dans le brouillard et enchainons maintenant vers le col d’Aoube. Quelques replats où je risque une dernière photo sur une cabane perdue dans la ouate nuageuse. 

Poursuite des montées et descentes et remontées. ‘’Que nous avalons sagement !’’ J’ai en tête cette sentence du descriptif en rando qui m’accompagne. ‘’Que nous avalons sagement’’ c’est ce que je me dis soucieux de ne pas griller mes maigres cartouches. Et toujours ce halètement qui me prend dans les montées. J’étais venu pourtant assez tôt pour m’acclimater à l’altitude  mais cela ne me quitte pas.  Je fais maintenant le yoyo avec une féminine que je suppose belge à son accent et qui bien que je la distance sur les côtes me reprend sans conteste dans les descentes.

Le col d’Aoubé passé, c’est maintenant la bonne descente vers le lac Bleu.  Pas de photos car trop de nuage et de bruine. Ca ne se calme pas. J’avais espéré que le temps tournerait comme prédit mais pour l’instant cela ne vient pas !

Alternance de terrain roulant et de caillasse et nous commençons notre remontée au dessus du Lac. Pierriers et passages scabreux se succèdent, le temps humide et chaud est toujours présent. Je commence à me dire que mon option des spartiates à Villelongue va être impossible. Quoiqu’il en soit il faudra faire avec.

La rampe raide pour atteindre le sommet à l’est du lac donc je note qu’il diffère du descriptif. D’autant que mauvaise surprise nous nous trouvons maintenant dans la courte  mais raide descente, j’ai la surprise de voir la main courante pourtant prévue et prévenue mais inconnue pour moi n’ayant pu assister au briefing du jeudi.

Là, la moyenne baisse très vite car il n’est pas question de se risquer là-dedans, d’autant que je ne suis pas rassuré car malgré les nuages j’aperçois le bas de cette mini falaise. Etant sujet au vertige je n’en mène pas large.

Nous sommes 5 y compris la coureuse batave à présent, perdus dans cette rampe et nous nous aidons successivement à passer ces passages délicats. Une fois passé cet intermède rocheux, il nous faut progresser maintenant vers le col de Bareilles. Simplement 288 de D+ mais qui me semblent faire le double. Cela me confirme que je ne le sens pas alors que parallèlement mes halètements ne se calment pas. J’ai l’impression de me trainer encore plus qu’avec mon sac de 20 Kg de rando mais j’avance néanmoins et même si je suis limité dans ma progression je ne me sens pas fatigué.

Le col, je note mon temps, constate qu’il est mieux que prévu (bizarre) et ne m’attarde pas pour la redescente vers le lac d’Ourrec. Partout le brouillard, la pluie fine et ces lieux endormis. Nous sommes loin du descriptif et du temps prévu.

Entreprenons maintenant la montée que j’ai notée rude sur ma feuille de route vers la hourquette d’Ouscouaou mais que je sais être la dernière ‘’formalité’’ avant la grande descente. Pas d’amélioration du temps ni de ma condition dans cette montée et le patator que je prends ne calme pas mon envie d’air mais m’aide à progresser. J’ai doublé la féminine belge et je progresse maintenant, rudement vers la hourquette. 

 Le col est atteint avec désormais 45 mn d’avance sur le planning. Tant mieux car j’avais noté qu’il ne fallait pas que je traine sur cette section afin de me garder suffisamment de tempsà Villelongue avant l’ascension du Caballiros.Descente maintenant vers les crêtes de Hautacam et c’est sur la piste que j’entends des pas rapides. C’est notre féminine belge qui nous rattrape. Elle en veut ! 

Le ravito perdu dans la brume où j’aperçois Sandrine74, que j’avais croisé à Auffargis et qui repartira rapidement avec la traileuse belge. Je note le temps mis et constate que j’ai gagné du temps malgré mes difficultés, cela me laissera encore plus de temps à Villelongue avant la barrière horaire. Autre motif de satisfaction je découvre alors que je n’y pensais plus, que mon articulation du fémur gauche ne me gêne plus, tout juste quelques reliquats de sensibilité. J’ai vraiment été bien inspiré d’avoir été chez l’ostéo 3 jours avant.  Soupe et re soupe, eau gazeuse pour ma poche à eau et je repars après 7mn de pause. 

 J’attaque la grande descente de 1350 m de D- d’une bonne foulée tout en évitant soigneusement les ruisselets çà et là pour ne pas me mouiller les pieds. Passage de la rivière en contrebas nous progressons maintenant sur une bonne piste forestière.  Je me fais rattraper par un traileur qui a fait la Diago et l’UTMB (c’est marqué sur son sac) avec qui j’échange quelques mots dont quelques considérations sur la Montagn’hard qui a tenté tout en ne se classant que sur le 95km, étant hors temps. Comme il me semble un ou deux crans au dessus de moi je me dis  que cette course est définitivement perdue pour moi. Il me distance rapidement et du coup je me retrouve encore une fois seul.

Je trottine tranquillement sur cette piste dans l’humidité et le brouillard mais avec toujours, cette chaleur étouffante.  Je suis toujours en tshirt mais sans gêne car je n’ai vraiment pas froid. Je regrette de ne pas avoir mis mon débardeur de la Diago tellement j’ai chaud. Je tente une photo  du chemin mais ça ne rend pas :     

  J’avance et c’est long  (quand ça descend, ça descend longtemps, disait Darmaillacq). Il  y a quelques 10 km de descente et ça dure. J’atteins le joli village d’Ortiac où je ne croise âme qui vive. Villelongue est encore loin !  Dans le pré, effrayé par le passage des traileurs, un chevreuil aboie dans  les bosquets.  Je ne relâche l’allure que pour vérifier le marquage des balises parfois espacées. Le temps tourne et je trouve que les kilomètres commencent à durer un peu plus que les 10 km promis.

Après les sentiers coupant la route j’aborde enfin le village base-vie où je me suis planifié 45mn d’arrêt mais sans avoir rattrapé Sandrine74 et la coureuse belge (elles ont bien tourné). 

Le contrôle et la bénévole qui officie au pointage me conseille de bien prendre mon temps et de bien me me restaurer car m’apprend-elle, il y des chances que je ne puisse repartir car la course est en attente de décision pour être neutralisée à cause du mauvais temps.  J’accueille la nouvelle mi-figue mi-raisin, déçu de ne pouvoir avoir l’opportunité de continuer mais quelque part résigné tellement je ne me sens pas au mieux de ma forme.  Je ruisselle d’eau et surtout de sueur, je crêve de chaud et je suffoque. Je ne le sens définitivement pas. Mon sac récupéré, j’entreprends de me tartiner les pieds et de changer de chaussettes et de tshirt. Vues les conditions j’opte pour un autre tshirt à la place du débardeur.  Je jette un regard triste à mes spartiates qui ne me seront d’aucune utilité cette fois-ci et j’entreprends de me restaurer un peu d’une soupe, de banane et de quelques tranches de jambon. Pas envie de manger plus. J’évite les pâtes pourtant appétissantes mais qui ne me semblent pas propices à être digérées par un estomac toujours à la limite. J’agis comme ci j’allais repartir bien que rien ne soit sûr. Tout autour ça ne parle que de cet arrêt hypothétique. Je vais aux nouvelles mais ca ne semble pas bien se présenter. Certains râlent et d’autres semblent être résignés ou soulagés car la fatigue en marquent beaucoup.

Lolo m’appelle prévenue par sms. Ensuite c’est PAM qui s’enquière de mes nouvelles et me réconforte. L’humeur est morose et l’ambiance est humide. Tout d’un coup un bénévole rentre sous la tente et nous informe que la course est libérée mais que seuls les coureurs agréés par le corps médical pourront repartir. Sans réfléchir, je fais ni une ni deux et saute sur l’officiel pour m’enquérir où il faut se rendre pour être déclaré apte.  Je courre vers la tente des pompiers qui m’interviewent sur ma condition et me m’autorise à continuer mais en me couvrant car je suis toujours en tshirt.

Je pars rapidement dans la nuit noire, le gore-tex enfilé et fait route dès le départ avec deux traileurs qui m’avouent avoir été impressionnés par mon court arrêt à Villelongue. Faut pas exagérer,  40mn d’arrêt tout de même.

Pour éviter de longer la nationale nous faisons une courte mais rude montée avant de redescendre vers Pierrefittes et repartir de plus belle pour la montée directe vers le Tuc de Béné. La pluie fine ne se calme pas bien au contraire et je me réjouie maintenant d’avoir enfilé le gore-tex. Mes deux comparses avancent d’un bon pas et je me force un peu pour tenir leur allure.

Les diverses routes quittées c’est maintenant une progression dans les sentiers qui me semblent bien éloignés des photos de Pépé et Miquel tant le contraste de conditions et de luminosité est important avec leur périple. La bouillasse et la suffocation font leur apparition. Entamé par le rythme soutenu des deux coureurs, je laisse filer la ligne en leur indiquant que je préfère y aller plus calmement.  Je les vois s’éloigner inexorablement sans pouvoir limiter notre écart. 

Seul maintenant et pataugeant tant bien que mal évitant au mieux de me mouiller les pieds, je me fais doubler par plusieurs coureurs. Le moral est en baisse et sans parler déjà de fatigue, j’ai des pensées noires qui me poussent à poser la question sur ma motivation. D’accord cette année était l’occasion choisie mais ai-je vraiment encore envie encore de terminer un gros ultra ? Je m’étais dit que le GRP serait le dernier pour moi mais vais-je seulement le finir ?  Tout cela me semble bien vain.  Je progresse certes à mon rythme, vus les temps mais j’ai l’impression de me trainer et je ne peux calmer ces foutus halètements cherchant l’air comme un asthmatique.  

Seule réjouissance, je n’ai pas froid ce qui est déjà un luxe à cet altitude et dans ces conditions.  J’ai  quand même bien fait d’avoir acheté un nouveau coupe-vent car mon habituel m’avais inquiété lors d’une dernière rando sous la pluie.  Il m’aura quand même été fidèle sur 2 UTMB, 2 Cro-Magnon, 2 Mercantour et une Diago sans parler des autres trails de moindre kilométrage. Je l’ai bien amorti celui-là. Cette pluie est désormais bien partie pour durer. Moi qui m’étais planifié une montée soutenue mais à la fraîcheur de la nuit, je suis servi mais l’allure ne me semble pas là.Tant bien que mal j’aborde toutefois la dernière remontée vers le Tuc accompagné seule du halo pluvieux de ma frontale et de mes considérations personnelles.

 Le tuc de Béné ! Je constate que j’y arrive mieux que dans le délai prévu depuis Villelongue. Etrange, je n’ai pourtant pas l’air de flamber ou alors je me suis planté en faisant mes tableaux de route quoique ceux-ci soient basés sur 47 heures de course. Je pointe et rentre dans la cabane où le ravito se tient. Ambiance plus que morose. Des traileurs trainent sur les bancs avec des mines déconfites ou éprouvées. J’apprendrais que c’est là, à la suite d’abandons successifs, au rythme d’un coureur sur deux, qu’auparavant la nouvelle étaient parvenue aux organisateurs, ce qui les avaient poussés à neutraliser pour un temps la course, inquiets des conditions.  Je comprends mieux car l’environnement dehors est loin d’être accueillant. Je mélange soupe et coca, fait re-remplir ma poche à eau par les bénévoles au petit soin et décide de repartir après 5mn d’arrêt. C’est que je suis pressé d’en finir avec le Caballiros.

Pour sortir de la cabane il faut descendre une marche haute mais dessous c’est une mare de boue.  Je négocie au mieux ce passage et signale à un bénévole que je pars. Celui-ci me demande si je suis seul, ce que je lui confirme. Il n’est pas d’accord pour que j’entreprenne la dernière montée en solitaire bien que cela ne me gêne pas le moins. Du coup il hèle un groupe parti juste devant et leur demande de m’attendre. Ca m’ennuie un peu car je préfèrerais aller à mon rythme mais il fait son travail sérieusement et vue les conditions je ne peux que lui donner raison.  En fait le groupe de trois auprès desquels je m’excuse de cette attente, se compose de mes deux traileurs de Villelongue (finalement ils ne m’ont pas trop enrhumé) et d’un Palois.  

J’avais noté sur mon tableau que cette montée mis à part la pente terminale était de bon terrain et de pente peu abrupte. Certes mais c’était sans compter sur la pluie car la progression va se montrer plus éprouvante.  Tout d’abord tout est détrempé et de nombreuses flaques de boue sont à éviter quand c’est possible. Je plains mes pieds ! Chemin faisant nous discutons tous les quatre mais c’est surtout le Palois très prolixe qui nous fait la conversation.  C’est Didier qui ouvre la marche sans bâton sauf un en bois qu’il s’était taillé dans les bois au dessus de Pierrefittes. Thomas ferme la marche juste derrière moi et j’essaye de suivre le rythme toute en haletant comme une carpe hors de l’eau. La montée se passe tant bien que mal et d’un coup notre Palois a un gros coup de calgon et ne peut plus suivre. On lui conseille de prendre un patator ou quelque chose d’énergétique mais il n’a pas de réserve alimentaire (on rêve !). Il a pourtant un sac à dos suffisamment volumineux pour en contenir. On s’arrête et Thomas, bon apôtre lui fourni une barre et reste avec lui pour l’accompagner jusqu’au sommet.  En contrebas on aperçoit tout une procession de lucioles qui grimpe et nous rattrape.

Nous repartons Didier toujours en tête. Je suis maintenant derrière lui et essaye de suivre son rythme. Mais cela ne pas être facile car le terrain et de plus en plus gadouilleux et peu à peu la pente s’accentue. J’ai toujours en tête le descriptif et le tracé mais je suis incapable de déterminer où nous nous trouvons.  Me reviens cette sentence du Canari dans Bovines en 2006 : ‘’il faut prendre son mal en patience’’.  Tout juste ce qu’il nous reste à faire.

Nous n’avançons pas si mal car personne ne nous double dans cette pente. Nous sommes maintenant dans la pente terminale sans le savoir. Ca grimpe bien mais souvent pour 2 pas en avant on en fait un en arrière.  Mes semelles incrustées de boue sont devenues lisses et me font chuter 2 ou 3 fois. Finalement  plus haut j’aperçois un faisceau mouvant mais qui reste en position comme un phare  et je me prends à espérer le sommet. Connaissant les déconvenues que cela peut parfois procurer,  je ne m’attache pas trop à cela et maintient mon rythme. Finalement peu après Didier j’aborde le sommet.

Nous pointons auprès d’un bénévole frigorifié et emmitouflé dans ces vêtements sous un abri de fortune. Chapeau les gars vous n’avez pas du vous amuser  cette nuit. Thomas arrive rapidement sans le palois qui a préféré suivre un autre groupe plus lent.  Nous ne nous attardons pas et un autre bénévole nous indique le chemin de la descente. 

Nous progressons rapidement maintenant tout en constatant que ce versant est moins humide. Ca ne sera pas du luxe parce que la boue en descente merci !  1400m de D- nous attendent et ca va être long. Cette longue descente ne se passera pas si mal  non sans que nous prenions quelques belles gamelles dont qui me projettera sur un rocher et fusillera mon mobile malgré qu’il fut dans une ceinture antichoc. J’y gagnerais en plus une hanche toute endolorie. Finalement nous atteignons Cauterets sans plus d’encombre pour y découvrir une ambiance pluvieuse et froide. Juste devant le ravito un traileur nous apostrophe et nous demande si nous comptons continuer. Nous répondons tous les 3 par l’affirmative sans trop réfléchir mais notre interlocuteur nous indique que beaucoup abandonnent ici. De fait un minibus attend devant pour prendre en charge son chargement de traileurs dépités. D’autres ont déjà en train de charger leur voiture. L’ambiance n’est pas à la fête et c’est là que j’ai douté. Comme dans le numéro d’Ultrafondus sur l’abandon, m’est venu en tête le désir d’arrêter là. La perspective de dormir 3heures plus tard dans mon lit me faisait rêver et beaucoup de chose me poussaient à arrêter les frais. J’apprendrais plus tard que mes 2 compagnons se sont eux aussi posé la question. Pourquoi ai-je continué sans même exprimer cette envie, je n’en ai encore maintenant, aucune idée. Cela a tenu à presque rien mais dire quoi j’en suis incapable. 

Nous pointons néanmoins dans la salle maculée de boue et sous les félicitations des bénévoles toujours attentionnés. Sans plus trop réfléchir nous nous installons pour  nous restaurer et souffler un peu. J’avais planifié 30mn d’arrêt on verra bien ensuite.  Première chose changement des piles de la frontale qui donnait  plus que des signes de faiblesse. Ensuite déshabillage des pieds pour constater qu’ils ont été très éprouvés par l’humidité. Fort prudemment je trimballe plusieurs paires de chaussettes de réserve ce qui me permet un relatif confort mais les chaussures sont dans un état innommable et trempée de surcroit.  Un quart d’heure après nous, notre palois arrive avec toujours autant de verve preuve qu’il s’est refait une santé.

Je profite des lieux pour une halte technique et après quelques morceaux de bananes je pousse mes comparses à repartir. Dehors l’air nous semble glacial et chargé d’humidité. Nous partons alors que le café d’à coté prépare déjà son ouverture. Nous avançons d’un bon pas pour nous réchauffer tout en discutant. 1000m de D+ nous attendent mais je sais qu’ils seront longs mais moins rudes. Nous discutons de l’UTMB 2006 et 2007 avec Thomas qu’il les a fait lui aussi alors que nous sommes sur le GRP mais comme dans un bon repas on discute toujours des autres bon repas qu’on a fait.

Peu après le chalet de la reine Hortense, la pluie donne des signes de fatigue. Pas trop tôt. La montée est régulière et le chemin moins détrempé. Nous atteignons le replat avec vue sur le col et enfin le ciel se déchire. Nous allons peut être avoir une belle journée.  Thomas mène un bon rythme et nous distance. Je reste à quelques encablures de Didier.   La dernière incurvation de pente et j’aborde le col 1mn derrière Didier et à 4 ou 5 de Thomas. Le jour et le soleil aidant, le moral revient ; d’autant que la vue est magnifique.

Derrière au loin au dessus d’une mer de nuages, on aperçoit le Caballiros : 

  Je prends le temps d’une photo de mes deux compères qui m’assurent, bien que je leur enjoigne de rouler à leur rythme, qu’ils veulent qu’on continue ensemble.   

  Ils ont l’air d’être assez frais et si Thomas à gauche a déjà plusieurs ultras à son actif, c’est le premier de ce genre pour Didier. Il commence par du lourd mais ça n’a pas l’air de l’inquiéter plus que ça.

Didier me donne quelques unités pour que je prévienne Laurence afin qu’elle ne s’inquiète pas et nous repartons. Descente maintenant dans le beau temps il faut essayer de relever la moyenne. Nous atteignons rapidement ainsi le point de contrôle de Bederet où nous faisons une halte de 10 mn bien  méritée.  

Nous reprenons la grande descente maintenant vers Luz qui promet d’être elle aussi longue. On y va d’une bonne allure, preuve qu’avec le jour tout va mieux.  Nous arrivons après pas mal de kilomètres à Grust puis en vue de Sazos  et au loin Luz St Sauveur.  

Je m’aperçois que mes photos sont de maigre intérêt. C’est que je n’ai pas mon binôme Christian, reporter fou et toujours à l’affut de prise de vue intéressante. Sur un parcours comme celui-là et malgré la pluie, il aurait déjà pris plus de  100 photos. De quoi faire son choix. 

Passés Grust et Sazos deux jolis villages, la descente devient plus monotone et alternant les portions de route et de chemin, il nous faudra pas mal de temps pour atteindre Luz alors que nous l’avons en visuel depuis longtemps. 

Luz enfin mais il faut se taper la remontée dans les rues et sous le soleil qui commence à bien chauffer. Arrivée pour finir au gymnase. Pointage et félicitations des bénévoles et nous nous posons. 45 mn de planifiées à mon tableau. J’informe mes camarades et nous nous mettons finalement d’accord pour partir à 13h.  

Enlevage des chaussures et tarif identique pour les 3 : des pieds blancs. Un reporter nous prend en photos en nous disant qu’il veut immortaliser nos ‘’têtes’’ mais Thomas lui conseille plutôt de prendre nos pieds. Faut dire qu’ils sont impressionnants et marcher pied nu dans cette grande salle, relève de l’exercice douloureux. Didier  a été les présenter au podologue et celui-ci lui a conseillé de simplement bien les laver de les sécher pendant une heure et de les enduire de Nok. Remède simple mais qui se révélera assez efficace. Je laisse dans le sac de base le roadbook que j’ai trimballé jusqu’à présent car je sais que j’en n’en ai plus besoin, sachant où je vais et puis j’ai toujours ma boussole sur mon sac à dos au cas où. Les préparatifs terminés, je commence à piaffer car j’aimerais bien partir plus tôt. Comme je l’explique à mes collègues, l’urgence pour nous est de passer le Col de Barèges et si possible une bonne partie de la descente avant la nuit. J’ai en effet reconnu le coin et je sais que ce ne sera pas superflu.

Thomas part néanmoins faire une sieste de 15mn sans mettre de réveil. Je tenterais bien l’expérience mais j’ai trop peur de ne pas me réveiller comme ce médecin en 2005 à Vallorcine. Je le vois au fond sur sa couche qui a sombré, un bras en l’air et ne bouge plus. Quand je vais pour le réveiller, l’heure tournant, je le vois qui se lève tout seul frais comme un gardon. Alors là, je ne sais pas comment il fait mais c’est efficace.

Après pas mal de petits réglages dont une nouvelle paire de chaussures pour moi  qui me gardera les pieds au sec, nous partons quelques minutes après 13h.  

Passage à Sesquières puis par le château Ste Marie. 

 

Montée maintenant vers Viey mais pas par le vallon, le propriétaire ayant refusé l’accès. Montée rude dans ce joli village puis c’est le village de Sers qu’il nous faut traverser avant d’aborder le collet St Justin qui nous semble bien raide. La montée se fera toutefois sans trop de peine puisque nous l’aborderons tout en discutant de différents trails.

Descente vers Barèges par le chemin des curistes où nous en croiserons un certain nombre. Descente maintenant vers Barèges et remontée dans la ville. Ensuite longue remontée facile passant au milieu des granges pour atteindre Tournaboup qui a vu certainement passé déjà mes copains sur le Grand Trail.  

Abordant les derniers mètres avant le ravito j’ai la surprise de voir Lolo ma blonde, courir et me sauter au cou. Si je m’attendais à ça. Jojo elle aussi accourt pour me congratuler et me faire plein de bisous. Elle m’apprend qu’elle attend son poilu Jef qui veut s’arrêter car ayant trop mal aux genoux dans les descentes.

Nous nous accordons un quart d’heure de pose avant d’attaquer la grande montée caillouteuse vers le col de Barèges. Apres restauration pour mes deux compères et remplissage des bidons (toujours eau pétillante pour moi), nous nous apprêtons à repartir. Derniers bisous à ma blonde et embrassades avec Jojo et nous voilà partis.

Un gros morceau technique nous attend et il n’est pas question de lambiner ni de s’endormir. De fait, passée la traversée de la route du Tourmalet, les caillasses font vite leur apparition mais en compensation le paysage est magnifique. 

Je ne noterais pas le passage de Pountou ni celui de la cabane de la Pègue tout entier concentré sur mes appuis mais le chemin sera long pour atteindre la cabane d’Aygues Cluses dernière étape avant le col. 

Montée rude maintenant je le sais et je me fais  distancer par Thomas toujours très alerte et Didier le suivant pas trés loin. C’est que je recommence à suffoquer est-ce l’altitude ? Peut être pas assez d’acclimatation. Néanmoins j’arriverai au col avec un temps plus rapide que celui de la reconnaissance mais en cherchant toujours l’air.

Vue du col vers la cabane d’Aygues Cluses : 

Maintenant c’est la grande descente caillouteuse qui nous attend. Comme il fait encore jour nous allons pouvoir en faire une bonne partie à la lumière naturelle.  Au lac du Gourget nous tombons sur des tentes de bénévoles qui relèvent nos numéros de dossard. Je ne sais pas ce qu’ils sont en train de cuisiner mais ça sent rudement bon et me mettrais presqu’en appétit. Sauf qu’il faudrait être capable de manger autre chose que des patators ou des pastilles de glucose. On se rattrapera demain si tout va bien.

La descente toujours très caillouteuse avec de nombreux passages de ruisselets qui inondent le chemin sont toujours délicats à négocier mais ma reconnaissance m’a permis de trouver les meilleures passages. Néanmoins cela ne permet pas de faire une bonne moyenne et nous aborderons le Lac de l’Oule qu’au crépuscule. 

Arrêt poche à eau et un traileur vient s’intégrer dans notre petit groupe. Il arbore sur son sac à dos un dossard comme neuf qui nous surprend car les nôtres sont dans un état pitoyable. J’avais pourtant inséré le mien dans un ziploc mais avec l’humidité et les gamelles il a souffert. 

Départ donc à quatre le long du lac et puis rapidement la piste qui remonte sèchement. Comme c’est devenu une habitude j’enjoins à mes compagnons de suivre leur rythme car je suffoque déjà. Cette montée est pourtant la dernière et pas très longue mais se révélera la pire pour ce qui concerne le manque d’air. J’ai conscience d’avancer mais comme si je me trouvais à plus de 3500  d’altitude dans ces randonnées sur glacier que Marc nous concocte parfois en été. C’est la première fois que j’aurais eu ce genre de difficulté tout le long d’un ultra. Au moins ai-je le temps avec cette vitesse d’escargot, d’admirer le ciel étoilé au dessus du lac.

J’aborderai ainsi à la peine mais soulagé le ravito sachant qu’il ne nous restera plus qu’à descendre jusqu’à l’arrivée. Je retrouve mes deux traileurs toujours là et me restaure d’un coca et d’une soupe. On va pour repartir mais nous attendons le quatrième qui se fait soigner.  Dés le départ c’est un coureur espagnol qui a décidé de nous suivre. J’ouvre la marche, pressé d’en finir et nous commençons à descendre à un bon rythme sur cette pente douce panoramique au dessus de la mer de nuages de la vallée, seulement éclairée par le dessous par les différents villages. Nicolas Darmaillacq avait noté après sa reco que cette section était désespérément longue ce que nous ne pouvons que  constater. Après un temps qui nous semble une éternité simplement égayé par la traversée de troupeaux de chevaux et de vaches et avoir subi les monotraces creusées pas toujours faciles à négocier dans le noir, nous apercevons enfin le poste du bénévole qui fait le Phare dans la nuit avec son spot, ce qui nous apprend que nous abordons la descente raide vers Soulan.

  Raide c’est rien de le dire ! Tellement raide que mes doigts pieds iront tutoyer le bout de mes chaussures bien qu’elles fassent deux pointures de plus. Ca échauffe également bien les dessous de pied mais comme ce passage est relativement court ça ira quand même. 

Le Joli village de Soulan où nous faisons une petite pose. C’est au tour de Thomas de me faire l’aumône de quelques unités pour prévenir Lolo de mon arrivée prochaine. Prochaine, certes mais il faut encore avaler quelques kilomètres. Nous repartons donc rapidement pour ce final.

La suite se passera sans plus de difficulté et c’est dans un rythme soutenu que nous retrouvons tous les trois, les deux autres n’ayant pas suivis,  les rampes qui me paraissent plus longue qu’à l’allée et le petit village de Vignec. A partir de là ce n’est plus qu’une formalité, je plie mes bâtons et nous devisons de concert tout en descendant vers l’arrivée d’un bon pas.  Nous doublons ainsi peu avant  Vielle Aure, un traileur qui est rincé jusqu’à la corde et qui n’avance plus que soutenu par ses proches. Allez, il n’y en a plus pour longtemps ! Mais le pauvre ne répond même pas, il a l’air vraiment d’en baver. 

Vielle Aure enfin et encore une fois je me fais accueillir par Lolo et ce qui n’était pas prévu car je les pensais dormant à poings fermés, Pam, Christian et Marc frais comme des gardons.  Photos de circonstance et passage sous l’arche si longtemps espérée. 

Ouf ! C’est terminé tu parles d’une ‘’promenade’’ !  Répondant à un souhait que nous avions exprimé, Marc et Christian reviennent les mains chargées de canettes de bière pillées au bar d’à côté et dont on a rêvé depuis le col de Portet. Il faudra attendre 10 mn pour voir arriver notre traileur fatigué qui arrive soulagé d’en avoir fini.  

Le ravito sous le grand chapiteau et l’heure est au bilan. Thomas est content car il voulait mettre 48 heures, Didier pour sa part ne s’était pas fait de pronostic mais c’est sacrément réussi pour un premier ultra et finalement nous aurons mis  45h40. Pour ma part pas mécontent non plus car je m’étais planifié un 47H prudent. Je suis loin des 43 heures prévues par Rodio mais peut être que je ne  l’aurais pas fait mentir si je n’avais été  pris de ces  suffocations sur tous le long de ce trail. Je sais bien qu’un ultra longtemps préparé ne se passe jamais comme on le voyait et celui-là n’échappe pas à la règle alors que j’aurais voulu qu’il se passe pour moi un peu comme une course parfaite pour que je sache ce que c'est une fois au moins.  En plus, j’ai conscience d’avoir été une sorte de boulet pour mes deux compagnons d’ultra qui m’ont souvent attendu et  dont je suis sûr qu’il seraient passés sous la barre des 45 heures voire mieux, s’ils ne s’étaient souciés de moi. 

Beaucoup on fait des comparaisons et avant de venir j’imaginais moi aussi le GRP comme une sorte de mixte entre L’UTMB, la Diago et le Mercantour mais en fait les Pyrénées n’ont pas besoin de comparatif. Cet ultra a une personnalité bien à lui et vient avantageusement compléter la liste des grands ultras de France et d’Outremer. 

 Le dimanche nous viendront faire un tour aux résultats pour voir la consécration de Nicolas Darmaillacq sur l’utra ce que nous avions prédit avec Rodio. Je rencontre JPV  tout content de son 36 heures sur l’ultra. Faut quand même le faire ! Mais surtout,  plaisir non dissimulé, pour voir le podium en V3 que fait PAM sur le grand trail. Chapeau l’artiste ! Ca nous donne l’occasion de voir pour la première fois un canari sur un podium. 

Cet ultra était  planifié pour moi, pour être le dernier. Serment d’ivrogne comme on dit. Il devait surtout être le cadeau que je m’offrais pour l’année de mes cinquante ans, un cadeau  choisi dont je savais qu’il ne serait pas facile mais qui m’avait fait salivé avant la première édition et qui loin de là, n’a pas  déçu mes espérances. Un cadeau costaud et dont je me rappellerais. 

Mais putain quel cadeau !!! 

2 commentaires

Commentaire de Cantalou posté le 07-09-2009 à 21:54:00

Un grand bravo Pierre, je savais après le Mercantour que tu avais les ressources pour terminer le GRP.

Jean-Pierre

Commentaire de didierchou posté le 10-09-2009 à 22:41:00

bonjour,
super recit j espere que tu as bien recupere moi ca va j ai repris le boulot et je commence a faire du velo

didier un de tes compagnons de route sur ce raid

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