Récit de la course : Saintélyon 2012, par Eric VOLAT

L'auteur : Eric VOLAT

La course : Saintélyon

Date : 2/12/2012

Lieu : St étienne (Loire)

Affichage : 3408 vues

Distance : 69km

Objectif : Pas d'objectif

2 commentaires

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IL NE NOUS AURA MANQUÉ QU’UN PEU DE PLUIE !

« Il faut qu’un homme ait médité sur un paysage avant d’entreprendre d’en jouir pleinement. Ce n’est pas la faveur du juvénile enthousiasme, éprouvé à la conquête d’un sommet, que l’on peut s’approprier la quintessence de la beauté ».

 

Quelques semaines avant la course… « Pfft ! Japhy ! Pas de soucis, la SaintéLyon, ça va te paraître facile par rapport à ce que tu as déjà fait… » Oui, mais ça, c’était avant !

 

Deux ans, deux ans de blessures, deux ans de doutes, deux ans d’échecs, presque 18kg de pris (97,5kg sur la balance), je sombre…

Après le grand raid de la Réunion 2011, le ras le bol me prend… Pour la première fois depuis que je cours, je pause un mois. Décembre, je recommence à courir tranquillou mais le plaisir n’est pas revenu. Seules les courses en accompagnant ou pour le moins avec de jolies rencontres me donnent satisfaction, IsaRun au semi-de Paris, Fanny48 au marathon de Marseille et au trail du Lodévois, Caliméro1972 à la course du viaduc de Millau, Gygy et Nadine à Roscoff to Roscoff…

 

Je m’inscris cependant au Grand Trail de Stevenson. J’y tiens, comme un hommage à mon petit papa qui m’avait fait découvrir et la vie romanesque de l’auteur de « l’île au trésor », et les chemins qu’il avait parcouru avec Modestine pour guérir de sa passion déconvenue d’avec Fanny OSBOURNE. Pour mon plus grand plaisir, Estelle m’accompagnera. La première journée se passe plutôt bien, je suis lent, très lent, trop lent mais le plaisir revient… Deuxième journée, patatras, je souffre le calvaire, des ampoules à en veux-tu en voilà, je termine tant bien que mal les 63km en… plus de 13h et pourtant, ces chemins, je les connais sur le bout des pieds puisqu’ils sont mes terrains de jeux depuis plus de quarante ans… J’abandonne le soir venu, je ne ferais pas la troisième étape.

 

Marvejols-Mende le premier que je ferais sans mon petit papa à l’arrivée, sera le moins bons, et de loin, de toutes les éditions de ma course fétiche et ceux malgré la présence réconfortante de MAude et de Fanny48. Trop d’émotions, je m’effondre à l’arrivée.

 

Heureusement, j’avais promis à Fanny48 de lui faire découvrir la Corse et si je veux suivre la marathonienne, il va falloir que je me réinvente une forme. Je décide donc dans un premier temps de retrouver un poids convenable. La randonnée se passe bien, j’ai bien un peu de mal dans les montées ou la belle ne cesse de me décrocher mais je boucle le séjour avec une confiance retrouvée.

 

Mi-août, je décide de reprendre les fondamentaux puis j’enchaînerais les courses, d’abord un semi « Eure-Madrie-Seine », objectif tenir le 12km/h le plus longtemps possible, je le finis en 1h44mn puis surtout pour le plaisir de retrouver Gégé92, se sera « Courir pour un enfant ». Je veux tenter de tenir le 12,5km/h sur les 12km du parcours que je boucle en un peu moins de 55mn. Viendra ensuite la course de mon club « L’Ébroïcienne », un 10km avec beaucoup de relance ou je veux tenir le 13km/h. Je finis en un peu moins de 45mn. Enfin voici le test grandeur nature, le marathon « Seine-Eure » que je veux courir en moins de 4h et si possible approcher les 3h45mn. Je ferais 3h46mn.

 

Tous mes objectifs sont atteint, je suis donc près pour un petit ultra, j’en choisis donc un facile pour débuter, ce sera la « SaintéLyon ». Je débute mon plan le 22 octobre et je ne raterais aucune séance courant près de 400km et marchant plus de 150km en un mois et demi.

 

Durant le plan, l’envie de revoir un pays cher à mon cœur, me prend, et je m’alignerais sur le semi « St Pol – Morlaix ». J’avais l’ambition d’approcher les 1h40mn en tenant le plus longtemps possible 13km/h. C’était sans compter sur la difficulté de la course. Je ferais un peu plus d’1h41mn. Mon séjour me permettra de revoir brièvement Nadine et Gygy.

 

Mes sorties successives gonflent ma confiance. Les kilos s’envolent… J’attends avec impatience le moment d’en découdre. Samedi 1 décembre, enfin ! Dernière pesée 77,6kg. Pile poil dans la fourchette de mon poids de forme. Petit imprévu, des travaux sur la voie SNCF. C’est en car que je rejoindrai la gare de Mantes la Jolie ou je prendrais le TGV pour Lyon. Mais de toute façon, rien ne peux m’atteindre, je me sens fort et sûr de moi, cette Sainté ne sera qu’une formalité et puis, de toute façon, je me sais protégé par un ange-gardien…

 

Le voyage se déroule sans encombre, j’arrive à Saint-Etienne à 14h10mn. Je file retirer mon dossard avant que le monde n’encombre le palais des congrès.

 

Je déroule mon tapis et m’enfonce dans mon duvet. Protégé du froid et des courants d’air, je vais dormir 2h dans le hall mis à disposition des coureurs.

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17h, je me réveille, le dortoir s’est bien rempli. Je vais aller me dégourdir les jambes. Dehors la nuit est déjà là et la température est tombée. Je passe devant le Flore. Le restaurant, lieu de rendez-vous des « CLM » et des « Kikouroù » est déjà ouvert, mais je serai le premier à m’y installer. Le bivouac est monté dans la salle de repos chauffée qui nous est destinée. Je redors une heure. 18h, les premiers Kikous et CLM arrivent. Pour le coup, je suis inscrit CLM, Nologo notre PDC a, comme à son habitude bien fait les choses, je retrouve donc mes camarades autours de la table qui nous est réservé. Mais auparavant, je suis allé « bisouter » nos CAFeuses ou apparentées (Darkmoon, Lyset et son team) qui se trouvent dans le hall 2.

 

Japhy arrive suivit d’Aurely42r, puis ce sera ma Juju qui m’a bien inquiété lorsqu’elle me dit que sa poche à eau s’est renversée. J’imagine déjà toutes ses affaires mouillées et je m’emploie déjà à trouver une solution. La Marmotte me dit qu’elle pourra éventuellement lui prêter un change. Mais mon inquiétude est vaine, enfin celle-là, car seul le sac à dos est trempé et d’ici le départ, il aura bien le temps de sécher. Le repas est parfait, il faut maintenant penser à s’habiller et le grand déballage recommence. Juju m’inquiète encore lorsqu’elle m’apprend qu’elle a été victime d’un malaise en arrivant et sa tenue de course n’est pas faite pour me rassurer. En effet, les ultra-fondus du LyonSaintéLyon m’ont fait parvenir une photo du parcours, il semblerait bien que la neige et le verglas précèdent la boue qui nous attend en arrivant sur Lyon et il se pourrait que la Sainté de cette année ne soit pas la promenade de santé que j’annonçais. Quoiqu’il en soit, je ne regrette pas ma tenue « GIGN ».

 

Pour information, je vous donne les détails de ma tenue : Chaussures de trail (goretex), chaussettes étanches, chaussettes fines, guêtres, collant de compression, collant hiver, maillot de corps compressif, polo hiver, polaire légère, gants de soie, gants en polaire, tour du cou polaire doublé laine, passe-montagne léger et passe montagne en laine. Une lampe de ceinture et une frontale. Les YakTrax sont attachées sur le sac.

 

Dans le sac, un sur-pantalon, un coupe-vent léger et une paire de sur-gants imperméables. Neuf gels et une poche à eau hiver de 2l de boisson isotonique légèrement sur-dosée.  À cela se rajoute le matériel obligatoire, le gobelet, la couverture de survie que j’ai complété d’une bande d’élasto, d’un ciseau, d’un téléphone portable, d’un carnet et d’un stylo. J’ai également pris une pièce d’identité, une carte bleue et un billet de 20€.

 

Petite photo CLM… Le dépôt des sacs est rapide et très bien organisé, rien à voir avec 2009…

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Juju et moi entrons dans notre sas de départ. Minuit trois, le départ est donné… Il fait -3°C.

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Peut-être est-il temps pour moi de vous faire part de ma façon d’aborder cette course ? L’objectif que je m’étais assigné était d’effectuer les 70km en 9h30mn. Je sais que si tout se déroule de manière optimale, je suis capable d’approcher les 9h mais ça, c’était avant de connaître la météo… Coté tactique, la météo ne change rien à mes habitudes en ultra. Je connais le terrain, 50% de routes, 50% de chemins en kilomètres mais en temps je sais déjà que ce sera 30% de course sur route et 70% de trail. Le parcours est relativement roulant et peu technique mais les conditions météo rendent cependant piégeux certains passages soient parce qu’ils seront glissant, soient parce que la neige cachera le relief. J’espère donc maintenir une vitesse de 7 à 8 km/h sur le plat, je marcherais au environ de 5km/h en montée lorsque la pente sera supérieure à 3% et je lâcherais les chevaux dans les descentes puisque je sais que c’est ici que se trouve mon point fort. Seule petite entorse à cette règle, les sept premiers kilomètres qui se court sur bitume et qu’il faut parcourir assez rapidement pour ne pas subir trop fortement les inconvénients de la foule (près de 8000 raideurs et relayeurs réunis). Je compte me poser 15mn à chaque ravitaillement et 30mn au ravitaillement de Soucieu en Jarrest qui marque généralement la fin de nuit et des grosses difficultés.

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Parc Expo de Saint Etienne (490m) – Saint Christo en Jarez (16ème km – 754m) : +441m ; -174m de dénivelés cumulés.

 

Il faut bien 500m pour se mettre dans le rythme mais comme ces 500m sont magiques avec ces milliers de spectateurs, ces milliers de lucioles qui scintillent dans la nuit. Juju et moi filons maintenant d’un bon train puisque les 7 premiers kilomètres sont avalés en 38mn. Première petite côte pour monter aux Sorbiers, je marche et je profite de l’accalmie pour demander à Juju si cela va bien, elle me dit que les douleurs intestinales qui avaient occasionné son malaise ne passent pas… Neuvième kilomètre, des flocons et des coureurs commencent à tomber, nous quittons l’asphalte pour un bon chemin déjà enneigé. Quelques glissades et je mets les Yaktrax sur mes chaussures. Juju m’inquiète, elle a de plus en plus de mal à suivre le rythme pourtant pas trop élevé puisque nous marchons en rang d’oignons. La nuit est ponctuée de mes appels « Nathalie », « Juju, t’es où ». Bientôt plus de réponse… Nous sommes au onzième kilomètre et nous venons de passer Albuzy. Je m’arrête sur le côté et appelle régulièrement. Je me refroidis, le thermomètre de ma montre indique -7°C. Je repars donc rempli d’inquiétude. Je continue lentement, espérant avoir des nouvelles. Je me retourne régulièrement espérant voir son sourire à chaque moment. Petite angoisse supplémentaire lorsque je veux boire, rien ne sort de ma poche à eau pourtant protégée du gèle. La boisson à gelé dans le tuyau… Sur ce rythme, j’arrive au premier ravitaillement à St Christo en Jarez. 1h58mn de course se sont déjà déroulé… Je dégèle le tuyau dans une soupe bien chaude et me rentre dans le crane le fait de ne pas oublier de souffler dans la pipette pour que le froid ambiant n’est rien à figer. Je m’installe à la sortie de la tente et j’attends 20mn… Pas de Juju.

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Saint Christo en Jarez – Sainte Catherine (28ème km – 716m) : +725m ; -502m de dénivelés cumulés

 

Je me résous à partir, je sais que les premiers kilomètres montent durs et j’espère encore entendre la voix familière… Mon téléphone sonne, le temps que j’enlève mes gants et c’est le répondeur qui m’apprend l’abandon de Nathalie. J’apprendrai dans la semaine que Juju souffre d’une colite hépatique. Il fallait donc mieux qu’elle abandonne… Deux sentiments contradictoires me taraudent alors, je fais demi-tour pour pouvoir soutenir mon amie ou je continue. Je sais que Juju voudrait que je fasse ma course et de toute façon, le temps que je revienne, il y a un fort risque que le bus soit déjà parti. Je passe l’hôpital puis vient le point culminant de l’épreuve. Je décide d’avaler mon premier gel mais celui-ci est figé et il m’est impossible d’en tirer le moindre gramme. Faut dire qu’à ma montre, il fait -9°C.  Heureusement que les ravitaillements sont copieusement garnis. Nous sommes sur un plateau, et malgré les nombreux passages, la neige reste poudreuse, des congères d’un mètre et il n’est pas rare de courir dans 40cm d’une poudre blanche immaculée, c’est magnifique, pas besoin de frontale. Et puis, il y a ces spectateurs, nombreux malgré l’heure tardive qui chantent autour d’un feu, qui encouragent chacun d’entre nous. Que le son des crécelles et le bruit des casseroles est beau, que ces claques sur les épaules ou ses bisous volés font du bien.  Je suis bien malgré le vent malicieux qui essaie de refroidir nos ardeurs… J’ai conscience de la chance que j’ai et, malgré les dizaines de chutes autour de moi, je suis certain qu’il ne peut rien m’arriver. Une belle descente en sous-bois, une nouvelle petite montée avant d’arriver au lieu-dit Le Chatelard et d’aborder la descente sur Sainte Catherine. Je crois que c’est ici que j’ai décidé de faire fi de ce qui se passait derrière moi. En effet, les chutes sont maintenant monnaies courantes et les bords des chemins rappellent un peu les tableaux d’Adolf Northern

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ou de Janvier Suchodolski

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qui illustraient de manières si terrifiantes à mes yeux d’écolier, la retraite de Russie en 1812. Mais peu importe, grâce à mes chaines, je tiens la route, alors je fonce… J’arrive donc au ravitaillement, je ne m’y attarde pas trop car je sais que le suivant n’est qu’à 8km. Après 10mn, je repars, 3h54mn de course.

                                                                                    

Sainte Catherine – Chaussan – Saint Genoux (36ème km – 642m) : +936m ; -778m de dénivelés cumulés.

 

On débute par une belle montée mais bientôt un faux plat descendant nous amène à la Bullière qui annonce la descente redoutée du Bois d’Arfeuille. A la Sainté, course mi-route/mi-chemin, il y a des routards et des trailleurs et s’il est un endroit qui permet de les reconnaître, c’est bien ici. Le routard descend sur les fesses, zigzague ou se tient aux branches, parfois il fait office de boulle de bowling et se sert de ses compagnons de route comme quilles. J’en ai même vu faire de superbes Strikes. Le trailleur descend, généralement droit, telle une bombe en criant des onomatopées  du style « Gauche », « droite », « centre ». Généralement, entre trailleurs pas de problème, on se comprend mais où ça se complique, c’est quand on mélange les deux espèces. En effet, il faut savoir que le descendeur indique le côté de son passage… Je vous laisse imaginer ce qui se passe lorsqu’un routard est devant et qu’il pense que l’injonction lui indique l’endroit où se placer… Bref, en ce qui me concerne, je m’amuse et je laisse aller. Je m’efforce de contrôler mes trajectoires et d’éviter la collision. Dernière petite montée et me voici arrivé à Saint Genoux. Je ne peux m’empêcher de penser à Nano, il y a 3 ans, c’est ici que ma jeune et courageuse accompagnatrice avait commencé à coincer. Mes 15mn d’arrêt me permette une rapide vidange (la seule de la course). 5h17mn de course et tout va bien.

 

Chaussan – Saint Genoux – Soucieu-en Jarrest (48ème km – 376m) : +1185m ; -1315m de dénivelés cumulés.

 

C’est la partie que je redoute le plus. Une succession de grimpettes et de descentes ne laisse que peu de place à la récupération. Je ne trouve pas le parcours des plus sexy, mais par contre la vue que nous avons sur les vallées de la Saône et du Rhône encore endormies est agréable. Les multiples points lumineux me font penser aux bougies d’une église. Chacune d’elles ayant été plantée là pour que l’on se rappelle d’un être aimé…

Le passage du Bois de la Dame m’interroge ? Sans doute comme moi, vous aurez entendu parler d’une Dame Blanche ou Noire selon la région. Elle s’est montrée, la nuit, sur les hauteurs, se promenant silencieusement. Une première fois, elle passe non loin de vous, elle porte une coupe remplie d’eau. Vous l’interpellez, elle ne répond pas et disparaît. Bientôt elle revient, et cette fois elle porte une torche d’où jaillit une flamme livide. Vous l’appelez encore ! Même silence ! Elle reparaît une troisième fois tenant à la main un pain ; toujours le même silence ! Enfin elle revient une dernière fois un glaive flamboyant à la main. En la voyant armée, vous prenez peur. La Dame s’arrête et répond d’une voix lugubre et solennelle : "Quand je suis passé près de toi avec une coupe pleine d’eau, c’était l’inondation et tous ses désastres ; tu vois... la torche signifiait la peste ; le pain, c’est la famine, et ce glaive, c’est la guerre. Malheur, malheur, malheur à vous tous ! Et elle disparait, sans qu’on ait pu savoir qui elle était."

 

Mais voilà, moi, il ne peut rien m’arriver, et même sans mon GPS qui m’a lâché ici, je finirai. Je suis protégé par une fée au pouvoir plus fort encore…

 

Et pourtant, je sens le coup de mou venir, heureusement, les difficultés s’amenuisant, les coureurs commencent à se montrer plus bavard… C’est rigolo, comment l’on se rassure en se racontant nos faits de « guerre »… Je chemine avec Bernard, je courotte avec Arnaud, je marche avec Clémence, j’encourage Thierry et Marcel me dit de tenir, que de toute façon, on n'a pas d’autre choix que celui de finir… Voilà, tant bien que mal j’arrive au pays de Breizh69, le ravitaillement de Soucieu en Jarrest. Je pause le sac et compte enlever le premier passe-montagne, je range également la frontale. Grâce à mes chaussettes étanches, mes pieds sont au chaud et secs, mais je ressens tout de même une douleur à un orteil mais elle est supportable et je décide de ne pas soigner ce que je sais être une ampoule sous-unguéal. 6h57mn de course et je doute, peut-être le seul moment… Mon téléphone sonne, je vois son nom sur l’écran et j’en pleurerai… Comment Fanny a-t-elle fait pour deviner le moment précis où je serais moins bien, je ne me souviens plus de ce qu’elle m’a dit, mais après 20mn d’arrêt, c’est en courant que je repars…

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Soucieu en Jarrest – Beaunant (60ème km – 172m) : +1343m ; -1683m de dénivelés cumulés.

 

Doucement la vie se réveille. La traversée de Soucieu se fait sous les encouragements du quidam qui va chercher son pain ou promener son chien. Je descends maintenant d’un bon pied vers le Garon, petite rivière mais grand torrent comme me disait ma mémé… La neige recommence à tomber et le sol se couvre d’une fine pellicule blanche, c’est beau et quoi que l’on dise, la fatigue exacerbant les sentiments et les émotions, je ne peux m’empêcher d’appeler Fanny48 pour partager ce moment qui me semblait magique. Elle dû me prendre pour un fou, car je ne peux que lui répéter bêtement, « c’est beau, il neige, c’est magnifique… Je vais bien, mais que c’est beau », quoi qu’il en soit, la montée passe ainsi plus vite… À nouveau nous courons sur un petit plateau, nous traversons Chaponost le Vieux et son petit parc agréable mais très boueux, je n’essaie pas d’éviter les flaques ni la boue. Souvent, la blessure arrive sur un écart et il serait mal venue de se blesser maintenant, si près du but… Mes YakTrax ont rendu l’âme et je manque de chuter en me prenant les pieds dans une sangle coupée. Je décide cependant de les garder jusqu’à Beaunant car elles accrochent encore et me permettent de courir sans glisser dans les passages boueux. Beaunant, enfin, je retire les chaines et les jette dans une poubelle. Je prends le temps de bien me ravitailler car je sais que juste derrière se trouve la dernière grosse difficulté la montée sur Ste Foy Lès Lyon. Déjà 8h58mn de course et il me reste 10km (enfin presque 12 si j’en crois les copains et l’itinéraire que j’ai piqué sur openrunner)… 10mn d’arrêt et je repars…

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Beaunant – Palais des Sports de Lyon (71,8ème km – 155m) : +1492m ; 1853m de dénivelés cumulés.

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La montée sur Ste Foy n’est pas très longue, à peine 1,5km, mais les premiers 500m montent à près de 20%, il me faudra presque 16mn pour arriver au sommet. Je profite de ce passage pour envoyer un texto pour rassurer ma fée bienfaitrice. Je parviens à conserver un rythme convenable dans la descente et le seul arrêt que je fis, fut pour reprendre une tradition… Aucune gendarmette à mettre sous mon bisou, alors je décide d’embrasser la première lyonnaise venue. Le sort avait bien fait les choses en 2009… En 2012, ce sera une charmante jeune femme de 70 ans qui revenait de chez le boulanger.  La descente est interminable mais la Saône est là que nous traversons au niveau de la gare de Perrache. Dieu que cette partie me paraît longue, les kilomètres me paraissent interminables et pour cause, chaque kilomètre fait en moyenne 1200m... Un coup de téléphone à Fanny, histoire de passer le temps, c’est Axel qui répond, je suis heureux de l’entendre, je lui dis qu’il ne me reste que trente minutes et que cela le fera… J’arrive au confluent, la Saône se jette dans le Rhône, un jeune jogger décide de m’accompagner. On discute, on ne court pas vite mais on cause et je ne sais plus comment on en est venu là, mais je lui dis, « Tu vois, là maintenant, je serais prêt à donner une heure de mon temps pour un café et une tartine de pain beurre »… Et Benoît de me répondre (ben oui, Benoît c’est son prénom quoi !), « donne-moi 10mn et je te promets que tu ne perdras pas plus de 5mn »… Le voici qui s’éloigne, je passe une passerelle, je cours maintenant le long du Rhône. J’arrive dans un parc et là, voici Benoît qui me rattrape. « Viens, t’assoir »  et v’là-t’y pas (en Normand dans le texte) qu’il me sort une thermo et deux tartines… Délicieux ! Nous repartons, cette petite collation m’a requinqué. Benoît me dit au revoir à l’entrée de la dernière ligne droite. Grâce à lui, je finis comme je l’aime, à fond et en faisant le Kéké… 10h35mn d’efforts, 1 heure de plus que mes prévisions, mais c’est un homme heureux qui téléphone à Fanny que je trouve en plein footing pour annoncer à CAF que je suis finisseur et que surtout, au pays du Beaujolais, le Éric nouveau est lui aussi arrivé…

6500 raideurs inscrits, plus de 6000 partants, à peine plus de 4000 finisseurs et je fais partie peut être des 5% qui n’ont eu à déplorer aucune chute…

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Scotsala qui m’a invité à manger, aura la gentillesse de venir me chercher. Je passerais donc une partie de l’après-midi entouré de sa jolie petite famille. La douche est salvatrice mais la fatigue se fait tout de même sentir. Je rentre à l’hôtel, me couche vers 16h et je ne me réveillerai qu’à 5h le lendemain matin.

 

Puisque j’avais commencé par citer Stevenson, je vais me permettre de clore mon récit en le paraphrasant…

 

« Je ne cours pas pour aller quelque part, je cours pour le plaisir de courir ; l’essentiel est de bouger, d’éprouver d’un peu plus près les nécessités et les aléas de la vie, de quitter le lit douillet de la civilisation et de sentir sous ses pieds le granit terrestre avec, par endroits, le coupant du silex. »

2 commentaires

Commentaire de Japhy posté le 09-12-2012 à 19:02:43

T'inquiète pas Riquet, je ne t'en veux pas de m'avoir vendu "un parcours beaucoup plus facile que ce tu as fait auparavant". :D
Très contente de voir que tu as remonté la pente, dans tous les sens du terme, et ceci assez rapidement finalement.
C'est marrant, mes propres gels n'avaient pas gelé. Marque différente? :D
Je ne vois pas les photos moi, c'est normal?

Commentaire de Eric VOLAT posté le 09-12-2012 à 19:06:01

Pour les gels, je pense que tout dépend ou ils se trouvaient, les miens étaient dans une pochette filet... Pour les photos, je ne sais pas pourquoi elles n'apparaissent pas !

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