L'analyse est peut-être un peu longue... mais voilà un sujet qui me tient à cœur, et que j’aimerais partager avec bien d’autres, car c’est sans doute le meilleur moyen de rester objectif et… vœux pieux (?), faire progresser les organisations ?!!
La course en elle-même a un côté fantastique mais… il faut savoir garder du recul et essayer de contribuer au meilleur pour les prochains participants.
Autant l’avouer de suite, j’ai été assez (voire très) déçu par de nombreux points de l’organisation. La course souffre de la comparaison avec toutes les courses (petites, grandes ou géantes) déjà effectuées depuis 10 ans.
Ceci étant dit, sans être évidemment exhaustifs, voici tout d’abord les faits constatés (de manière chronologique). Certains sont des « détails », d’autres sont plus significatifs. Au bout de compte, rien n’est anodin :
AEROPORT St Denis (Lundi 15/10) : pot d’accueil = super !! + petit mot, en toute franchise, du Président qui nous avoue que la course sera peut-être annulée à cause d’Anaïs. Il insiste aussi lourdement sur la discipline de retrait des dossards et notamment le parking (éloigné) organisé avec des navettes.
STADE LA REDOUTE (Mercredi 17/10) :
Parking (de la République) : il n’y a strictement
aucune navette organisée (!) et une longue marche est imposée (alors qu’on pouvait se garer bien plus près). Au moins 2km de trop la veille de la course.
Retrait des dossards :
aucun affichage des zones par numéros de dossard. Il faut aller de table en table pour trouver… Il faut aussi un autre lieu pour récupérer les T.shirts obligatoires. Et surtout on ne nous fournit pas les sacs pour les affaires de rechange… « qui, promis, nous seront donnés sur la ligne de départ »
Roadbook : il nous est donné la
veille seulement, avec en plus des
erreurs (pages inversées, titre ne correspondant pas à la bonne course). Pourquoi ne pas l’envoyer un mois avant avec le programme, ce qui laisserait, surtout aux non-Réunionnais, le temps de mieux se familiariser avec le parcours ?
CAP MECHANT (Jeudi 18/10) :
Il faut se garer à au moins 1km du départ (ce qui est tout à fait normal). 1er A/R vers 15h pour demander les
sacs des affaires de rechange : on me redit de passer à 17h car les camions ne sont pas arrivés. 2e A/R à 17h : les camions ne sont toujours pas là. On me redit de passer à 18h. Là quelqu’un finit par m’annoncer qu’il n’y aura aucun sac fourni ! (Economies ?)
Bilan : 6km à pied A/R pour rien + il faut gros bouchopartir à St Philippe trouver des sacs poubelles en catastrophe.
Entrée dans le sas :
gros bouchons, on
étouffe (limite malaise pour les plus petits de taille) et il faut porter longtemps les sacs de rechanges à bout de bras avant de pouvoir passer.
Contrôle des Sacs : très efficace
Zone de départ : pas grand-chose pour se restaurer et incroyable…
pas d’eau (que du coca) ! (Economies ?) Tout juste existe-t-il un pauvre robinet à trouver quelque part…
Attente du départ : animation et concerts plutôt bien organisés pour faire passer le temps. Seul souci, un malaise d’un coureur dans la zone d’attente, un peu dense et étouffante ?
POINTS DU PARCOURS (vus jusqu’au 102km) :
Ravitaillements :
extrêmement pauvres pour faire face à une course aussi longue. Très peu de salé et variété très limitée. Au mieux, vous avez des soupes… qui ne sont que des bouillons avec des pâtes au fond. Les plats chauds se limitent à des coquillettes, même à Cilaos. (Economies ?)
Soins : une très bonne volonté d’aider… mais on nous avoue un sérieux
manque de moyens et produits ! Les pb de pieds sont peut-être exceptionnels (météo) mais j’apprends avec surprise à plusieurs endroits que les équipes médicales s’organisent entièrement seules (y compris pour les produits : pansements, crème…) et que livrées à elle-même, elles sont parfois peu organisées ? y compris dans le roulement des équipes…
Cilaos : outre l’absence de
marquages en ville pour trouver le stade (plusieurs hésitations !), le site s’avère
extrêmement peu clair. Très étendu, il n’y a ni plan ni indication pour s’organiser.
Plus « fou » encore : la
sono est installée juste à côté des tentes de repos !
Dangers : il existe manifestement des zones plus dangereuses que d’autres (en particulier dans Mafate), mais il n’y a
aucune indication ou prévention particulière. Sauf erreur, le lieu de l’accident dramatique était clairement dangereux.
Abandons / Arrêts forcés par les organisateurs : les coureurs doivent
se débrouiller intégralement par leur propre moyens, même si cela doit prendre plusieurs heures, avec tous les
risques inhérents éventuels. Un peu léger comme réponse ?!!!
Déchets : le parcours comporte un nombre anormalement élevé de déchets
L’organisation en est consciente mais parle surtout de son souci d’avoir des amendes !... Apparemment des sachets avaient été distribués en 2011 mais pas en 2012 (Economies ?).
Un bénévole qui les ramasse dans Mafate m’a fait part du peu d’intérêt manifeste de tout le monde sur le sujet. Un autre (local) m’explique que c’est vite une mauvaise mentalité des Réunionnais qui pensent que ça créé du boulot…
Tableau détaillé des points passages : pas fiable sur de nombreux points ! La bonne blague découverte après des dizaines d’heure de course : 10m de dénivelés pour atteindre le « Sentier Scout » depuis la « Route Forestière Haut Mafate »… tout en passant de 1620 à 1758m d’altitude.
Sans parler des autres points (médical, alimentaire) pas toujours au RdV.
AUTRES :Résultats : les résultats « détaillés » ne sont disponible que sur le site du sponsor SFR. Ce qui est surprenant est le
manque de détails et statistiques. Peu d’indicateurs pour les coureurs alors que ces infos permettent pourtant de mieux appréhender les (zones de) difficultés.
Le site internet est également assez limité. Les détails manquent, comme les abandons / éliminés par secteurs par exemple.
Barrières horaires : celles-ci sont manifestement très
figées, bien que le parcours soit chaque année plus long et plus difficile. Il est donc évident que de plus en plus de coureurs n’arrivent pas au bout.
Cette année, au pied du sentier du Taïbit, (limite 23h), il sera annoncé… à 23h qu’une heure de plus est finalement accordée. Idem pour Marla (limite 4h au lieu de 3h) mais pas pour le Sentier Scout (toujours 7h) ni au delà. Quelle est l’idée ou la cohérence d’un tel système ? Si ce n’est de planter les coureurs un peu plus loin ?...
ESPRIT DE LA COURSE :
J’avais entendu dire et lu (sur des forums) que la particularité du GRR étaient le souci de "tout faire pour aider les coureurs à finir" (à l’opposé de l’UTMB où performance sportive prévaudrait). Cette rumeur était soit infondée, soit… ancienne.
Pourtant quand 1/2h avant le départ, l’organisation vous annonce encore « solennellement et sincèrement, souhaiter que 100% des coureurs soient à l’arrivée… »
Pendant le déroulé de la course, on est vite persuadé d’avoir rêvé. On a même l’impression que les barrières servent à éliminer un maximum de coureurs d’ici Cilaos. Economies ? Plus simple à gérer ? Volonté d’entretenir une réputation « d’enfer » ?
COMMENTAIRES DE REUNIONNAIS :
Plusieurs coureurs réunionnais (y compris un coureur très chevronné, participant depuis 15 ans déjà), mais aussi des bénévoles, m’ont fait part du manque de préoccupation de l’organisation vis-à-vis des coureurs. Le message était qu’ils ne se sentent pas écoutés. Ils ont insisté pour que des « Métros » fassent remonter les complaintes, pensant que l’organisation y serait beaucoup plus sensible. Localement, l’emprise de la course noie toute tentative de critique.
L’organisation est largement perçue comme peu au fait des besoins des coureurs et peu soucieuse de s’améliorer régulièrement. Pire, ils dénoncent le manque de transparence financière du « business », y compris le fait que son Président refuserait toute communication sur sa rémunération.
A côté de cela, l’enthousiasme et l’accueil général de la population fait chaud au cœur et constitue un très gros point fort
CONCLUSION :
Je sais combien c’est difficile et complexe d’organiser de tels évènements. Mais pour une 20e édition, on pouvait imaginer beaucoup plus de maturité. Car sans tomber dans la position du consommateur râleur, c’est la somme de « petits détails » qui interpelle et… ne facilite pas la tâche !
Les coureurs font d’énormes sacrifices en temps et finances pour réaliser de telles courses.
Bien sûr finir se mérite et n’est pas un droit. Bien sûr, personne n’est forcé de venir…
Mais prendre soin de ses coureurs est quand même le tout premier devoir des organisateurs ?!
Enfin, la moyenne montagne est par nature beaucoup plus dangereuse qu’elle en a l’air (cf livre Anne Sauvy, Secours en Montagne) surtout dans des conditions sportives difficiles. C’est aussi pour toutes ces raisons que l’accident du regretté Thierry n’était pas ou ne doit pas être considéré comme une simple fatalité ?!...