Récit de la course : Off - Mon Grand Tour de Cham' - Août 2012 2012, par Elcap

L'auteur : Elcap

La course : Off - Mon Grand Tour de Cham' - Août 2012

Date : 18/8/2012

Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)

Affichage : 2065 vues

Distance : 161km

Objectif : Terminer

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Mon Grand Tour de Cham' : Prologue + Etapes 1 à 4 sur 5

Prologue

Penché sur mon bureau, une main sur la souris, je déplace ma carte IGN à l'écran. Je cherche des coins dont j'ai vu des photos, il y a longtemps. Le Dérochoir, le Désert de Platé, le Cheval Blanc... des noms qui parlent à celui qui rêve de voyage. D'autres coins en revanche me sont familiers, je suis déjà allé là-bas : le Plateau du Trient, le Mont Buet. J'aime les souvenirs que ces noms me rappellent. C'étaient de belles journées ensoleillées avec mon père, Patrick était parfois du voyage. De petites galères aussi, quelques frayeurs, des décisions à prendre, là, au milieu de la montagne. Elles m'ont donné l'impression d'être un aventurier. Je veux revivre ça.

L'alpinisme est récemment revenu dans ma vie, mais moins qu'à la grande époque, avec mes copains puis avec Virginie. Aujourd'hui c'est surtout le trail qui occupe mes sorties, seul ou en famille. En compétition ou pas. Le trail c'est le dépassement de soi, l'entrainement, la compétition, la souffrance aussi. Les lignes d'arrivées franchies en pleurant, la main des enfants dans la mienne. Larmes libératoires dit-on. Où la pression accumulée durant les mois d'entrainement s'efface d'un coup. On sait maintenant pourquoi on a fait tout ça. Ces quelques instants magiques où le temps s'arrête. Toutes ces sortes de choses liées à l'effort intense et long, où les heures qui passent vous mettent dans un état second, un long voyage intérieur. Mais pas uniquement. Le trail c'est aussi les sorties avec les copains, la bière et le saucisson à l'arrière des coffres des voitures après des heures passées sur les sentiers. Les repas, la veille des courses, avec tous les copains : prévisions de chrono, discussion sur le matériel. C'est aussi, lors des entrainements, le soleil qui se lève sur un petit sommet à 20 minutes de chez soi, seul, face à la vallée brumeuse.

Mais il me manque l'aventure, celle des débuts, en alpinisme. Faite de ces doutes sur l'itinéraire à prendre, sur la qualité de la neige. La peur de tomber, de manquer d'eau. Celle qu'on partage avec l'ami. Le compagnon de cordée. La communication, faite de regards, qui n'existe que dans la complicité née de l'effort partagé. Et puis l'aventure qu'on a préparé soi-même a toujours plus de saveur que celle préparée par d'autres, fussent-ils des cordons bleus du trail.

J'ai pris ma décision. Cette année je ne ferai pas d'UTMB, pas de GRP. Il n'y aura pas de dossard, d'inscription. Rien de tout ça. Je partirai en voyage. Un trail à moi pour m'évader et voir du pays. Pour vivre l'aventure. Mon aventure. Et je partagerai cette aventure avec ma famille, avec mon pote, pour le plaisir.

Ce sera Mon Grand Tour de Cham'.

 


 

Section 1 - Chamonix <> Servoz

                        

5h30. Dernier repas avant le départ. Pas celui du condamné. Nan. L’heure est plutôt à la bonne humeur, sous la tente. Tout le monde somnole encore un peu, les enfants se réveillent tranquillement. Coté repas c’est facile : un bol de mon mélange habituel et quotidien, rallongé de chocolat en poudre. Ben tiens. J’en profite pour remercier ici Alain Roche pour sa recette de crème sport’dej qui m’accompagne donc tous les matins et avant chaque course, parfois même pendant les courses. Oui, ça se rallonge avec tout ce qu’on veut, pour varier le goût. C’est énergétique et super digeste.

Puis nous retrouvons vite Julien, arrivé dans la nuit au camping, pour discuter des derniers détails que nous n’avons pas abordé par email, car c’est la première fois que nous nous rencontrons. Direction les voitures, pour descendre à Chamonix. Etant installé au camping du Buet, du côté Suisse du col des Montets, il nous faut rouler un peu. Pub : ça fait 3 ans qu’on passe nos vacances d’été dans ce camping. Le rêve : proche de Chamonix, mais très tranquille. La plupart de nos trajets se font en train ou en bus (gratuits, car « résidents temporaires » de la vallée). Bref,  je monte en voiture avec Ju, pour continuer de discuter et répondre à quelques questions sous l’œil de sa caméra.

 

La place de parking est vite trouvée. Sac sur l’épaule, tête dans les montagnes, direction la place de l’église où nous avons décidé que le départ et l’arrivée se feraient. Cela nous a semblé assez logique. Quelques préparatifs, lacets, barres énergétiques maison, derniers remplissages de poche, vérification du gps… Tic tac tic tac….

6h55.

Dans quelques minutes c’est le départ. Aucune appréhension car nous savons que ce tour a été bien préparé, par tous. Le hasard a bien sûr sa place, nous sommes en montagne donc prêts à toutes les improvisations. Mais l’objectif est simple : se faire plaisir, la prise de tête n’est pas envisagée. Je ne m’impose qu’une chose : finir en 60h maximum. Pour permettre à Julien de repartir chez lui, en Alsace, dans un délai raisonnable (déjà 60h, ça le fait partir très tard….). Les jambes frétillent, l’esprit déjà dans l’effort à produire, le planning se déroule dans ma tête. Curieusement, je suis serein, comme jamais. Ce tour c’est notre tour, c’est mon tour. Je jouis de l’instant en sachant combien il est précieux. Ces quelques minutes avant le départ auront pour toujours une saveur spéciale. Je les imprime dans ma mémoire.

Nous sommes seuls sur la place toute endormie… Les enfants, et encore plus Virginie, semblent un peu stressés. Je ne m’inquiète pas, une fois que je serai parti je sais qu’ils seront pris dans le suivi et tout ira mieux.

J’embrasse les enfants, mon père et serre Virginie dans mes bras. Comme si c’était la dernière fois. Que cherche-t-on à se transmettre dans ces moments-là ? De l’amour ? Du courage ? On sait tous les deux combien la suite va être dure, que de cette difficulté naîtra une grande fierté mutuelle. Alors peut-être est-on déjà fiers l’un de l’autre, d’avance, pour ce qui va suivre. On sait que ce sera dur. Je l’aime tellement.

7h.

C’est parti !

Bâtons en mains je file en trottinant direction le Brévent. Ju me passe devant, puis sur le coté, derrière, remonte. Il va falloir que je m’habitue plus ou moins, c’est assez bizarre d’être ainsi suivi.

La montée au Brévent se passe, évidemment, très bien. Je suis plutôt en bonne forme et encore frais. Après 30 minutes de montée je vérifie mon altitude. 900 m/h. Faciles. Je le sais, c’est trompeur. Je dois réduire la voilure si je veux que la suite ne se transforme pas en enfer. Réduisons-donc. Je passe à 700 m/h. Quelques fraises des bois me tendent les bras. Je m’étais promis du plaisir. En voilà à portée de main. Je ne résiste pas et fais une première pause sous ce ciel d’un bleu profond, sans un nuage.

L’arrivée au Brévent se fait avec un peu d’avance. J’en profite pour aller vraiment au sommet où je discute avec des randonneurs arrivés par la première benne. Mon accoutrement les surprend un peu. On discute un peu, sur le tour, la rando-course en général…

Ju m’attend un peu plus bas pour une autre séance vidéo. Je descends donc en direction de la crête qui va me servir de guide jusqu’à l’Aiguilette des Houches. Cette descente est absolument géniale, très ludique : le sentier, quoique bien marqué, est le plus souvent un enchainement de blocs. Il faut sauter de l’un à l’autre. Pas question de trop envoyer à ce stade du tour. Il est trop tôt et c’est un coup à se faire mal, en plus. Le sentier qui court tantôt d’un coté de l’arête, tantôt de l’autre, est un vrai bonheur. C’est dans ces instants où tout est facile, où la nature est si belle, la météo si clémente qu’on sait pourquoi on est là. Tout ici est si beau.

J’arrive dans les temps à l’Aiguillette des Houches. Une petite pause, là encore pour immortaliser ces instants, ce paysage. D’ici je vois quelques points majeurs du tour : le Dérochoir, le Buet, au fond le Chardonnet qui surplombe les glaciers où nous seront dans quelques dizaines d’heures, avec Ogo.

Mais surtout je profite de la vue absolument incroyable sur l’arête effilée qui tombe jusqu’à Servoz, où je dois retrouver mon équipe d’assistants dévoués. De là-haut le sentier est parfaitement visible. Tel un câble, il file droit en bas. J’ai hâte d’y être.

La descente le long de ce fil se passe bien. Les jambes sont (heureusement) là au rendez-vous et je suis seul à descendre, ne croisant que de rares randonneurs qui montent. Plus bas, d’autres randonneurs se sont arrêtés pour le casse-croûte, il est midi. La chaleur commence à se faire sentir, au fur et à mesure que je redescend dans la vallée. Face à moi, toujours le Dérochoir. Il fait de plus en plus chaud. Penser à s’hydrater, beaucoup, en prévision de cette portion très technique qui s’annonce difficile.

Je profite d’un dernier lacet avant de rentrer dans la forêt pour me retourner et saluer le Mont-Blanc. Fidèle observateur qui a veillé sur moi jusque-là. Je ne sais pas bien pourquoi à ce moment-là je me mets à lui parler. C’est d’autant plus stupide qu’il ne me répond pas.

Je fais une pause dans la forêt pour prendre une petite photo, rien que pour mon papa. Une conduite d’eau forcée… cela me ramène quelques semaines en arrière, à Laissey.

La descente se passe bien jusqu’au retour à la civilisation. Là, je dois passer sur un sentier qui coupe la route en descendant dans la pente. Sauf que le long de ce sentier il y a…. des chiens. Bon, pas grave, je suis simplement la route. Oui mais voilà. Il y a dans un virage deux patous qui, à mon avis, ne me laisseront pas passer. La barrière est trop petite. Et puis c’est comme ça, j’ai peur des chiens. Un SMS à Virginie pour crier mon agacement. Et puis arrive un motard. Je le coince au milieu de la route. Un moment de honte étant vite passé je lui demande de m’accompagner dans le virage pour passer les chiens. Il rigole un bon coup et accepte finalement. Il voit bien que je suis tétanisé par la peur. On passe le virage sans encombre, les chiens ne font qu’aboyer. Mon garde du corps m’abandonne là, me souhaitant bon courage et en riant encore un bon coup. Pas grave, je suis passé. Et sans mourir dévoré par d’horribles monstres.

Un peu plus loin je retrouve le plat et réalise que mon tracé passe par le Camping de la Plaine Saint Jean. C’est amusant : j’ai passé de nombreux étés dans ce camping, en vacances. Alex, le propriétaire, est là, fidèle au poste. Je m’arrête quelques minutes pour taper la causette avec ce morceau d’Histoire. Mais il est occupé et, curieusement, moi aussi. Je file donc sur les quelques centaines de mètres qui me séparent du 1er ravito où j’arrive, tout frais.

Virginie et le reste de l’équipe semblent surpris de me voir. J’ai plus de 20 minutes d’avance. Ce qui est beaucoup, compte-tenu du nombre de fois où je me suis arrêté, mais peu, quand je vois la chaleur accablante qu’il fait désormais.

En responsable de l’équipe consciencieuse, Virginie fait tout son possible pour que je me ravitaille bien et le plus rapidement possible. Elle est stressée comme jamais. Je tente, plus ou moins vainement, de la rassurer. Mais cela semble peine perdue : elle veut tellement bien faire qu’elle en est complètement paniquée. On discute un peu, elle semble revenir à la raison : je suis en avance et rien ne nous presse. On se relaxe.

Ogo est là, récupéré un peu avant par l’équipe à la gare. Tout le monde est aux petits soins avec moi, c’est un plaisir. J’en profite pour faire une première pause dans les toilettes de l’accueil des Gorges de Servoz. Il faut en profiter je n’aurai pas toujours la chance de trouver de confortables lieux d’aisance, avec papier et savon parfumé ! Un peu (beaucoup, c’est le secret !) de crème Nok sur mes petits pieds et je repars direction le Dérochoir.


Section 2 - Servoz <> Refuge de Moede Anterne

Le Dérochoir. Sacré morceau sur la carte. Sacré morceau sur les photos. Et ce n’était pas qu’une illusion. Mais d’abord il faut emprunter un bout de route. Beurk. J’ai pas aimé. Trop près des voitures, qui vont trop vites. Surtout après la solitude de la matinée. Heureusement on parle là de moins de 10 minutes. Sur 60 heures on ne s’en offusquera pas. Vient ensuite un agréable sentier qui zigue-zague dans la forêt. Durant cette montée qui durera presque une heure, je croise un couple de randonneurs chargés comme des mulets. Enfin non. Des mulets, personne ne les chargerait comme ça. C’est inhumain de s’infliger des sacs pareils. Ils doivent rallier le nord de la Suède en autonomie complète, c’est pas possible autrement. S’ils me lisent aujourd’hui (aucune chance) : je suis désolé. Quand je vous ai doublé en ricanant je ne me moquais pas de vous, mais je pouffais sincèrement de cette pensée hautement philosophique. A mourir de rire. Vraiment. Allez comprendre…

Je finis par sortir de cette agréable, verte et fraîche forêt vers 13h.

Blam ! Je prends la température dans la tronche comme un coup de massue. Le sentier qui va jusqu’au point de rendez-vous avec mon assistance est en plein soleil. Je réalise à ce moment que la suite va être moins douce. Il doit faire au moins 100°c à l’ombre. Enfin, c’est la sensation que j’ai à ce moment.

Je continue jusqu’aux Chalets de Souay où je suis seul, mon assistance n’étant pas encore arrivée. Je bois et mange, sans stress, à l’ombre du chalet. Je finis par m’inquiéter. Où sont-ils ? Je risque de manquer d’eau sans eux… Comme je ne veux pas m’endormir là à l’ombre je décide de faire le tour du chalet pour admirer un peu le paysage. Je me lève, tourne au coin et je découvre… Virginie et Ogo !!! En fait ils étaient arrivés avant moi et attendaient derrière le chalet. Ogo était parti en reconnaissance, Virginie l’ayant rejoint aussi vite qu’elle a pu.

Virginie, toujours aussi peu détendue, est presque paniquée à l’idée de m’avoir fait perdre de très nombreuses minutes. Au moins 5, à vue d’œil ! C’est dire comme mon planning en est bouleversé.

On discute un peu de la suite avec Ogo, le profil, etc. Je fais le plein de ma poche à eau et je repars. Il fait de plus en plus chaud. Mais c’était prévu. Et puis, je préfère ça à la pluie. Enfin pour le moment…

Sur la large piste qui me mène au pied du Dérochoir, je reçois un SMS de Ju. Il est plus haut, à l’attaque des difficultés et m’attend pour une séance vidéo. Je le rejoins assez vite mais il me distance immédiatement vers l’avant pour multiplier les prises de vue.

Les éboulis avant le Dérochoir, j’avais lu que c’était pas de la tarte. Ce randonneur n’avait pas menti. Là, je dois bien l’avouer, la chaleur est telle que je commence à me demander si je vais finir : ma tête sonne comme une cloche à Pâques, je sue toute l’eau que je bois, et même davantage. A ce rythme, je vais vite être déshydraté et contraint à l’abandon. Voilà le genre de noires pensées qu’on peut ressasser lorsque le corps montre des signes de faiblesse, alors que tout était si simple jusque-là.

Ju m’attend sur un rocher. Il va me suivre de près, pour la vidéo. Ca me force à sortir un peu de ma torpeur et me remotive. Je relance dès que je peux et me mets à foncer tête baissée dans les rochers. Inévitablement, je sors de la trace et finis par devoir faire un peu d’escalade. Ce qui devait arriver arriva. A force de faire le kakou au milieu des rochers gros comme des autobus, je réussis à me vautrer dans les rochers. Heureusement pour le tour, je ne me fais pas mal. Heureusement pour mon ego, la scène filmée ne sera pas retenue pour le montage final.

Arrivé au pied du Dérochoir j’abandonne mon cameraman. On ne se reverra qu’à Vallorcine, dans à peu près 24h. J’entame la montée, le plus prudemment possible. Là, pas le droit de glisser, de déraper, de chuter.

Le début attaque directement par une série de marches fixées au rocher. Une grosse corde permet de trouver le bon chemin et surtout de se tenir pour progresser. Ce que je n’hésite pas à faire. Je ne suis pas là pour discuter d’éthique d’escalade mais pour faire mon tour, entier. On verra un autre jour pour l’escalade pure et dure.

Un peu après on a carrément droit aux échelles. Bon. Je ne sais pas si c’est justifié. En tout cas pas moyen de ne pas les prendre. Je fais donc avec.

Je ne progresse pas très vite. De toute façon je n’ai pas trop envie de balancer de la caillasse (ni moi) en bas. La vue est vraiment superbe. Julien est encore en-dessous, minuscule point dans le carré d’herbe verte. Je profite de ce moment un rien magique, quand même.

 La difficulté de la section m’a forcé à ralentir, pas moyen de courir ici. La chaleur est plus supportable, du coup. Sans parler d’une brise bienvenue qui me rafraichit. Je prends un immense plaisir dans cette portion un poil plus technique que ce dont on a l’habitude en trail. Evidemment, point de place pour ça dans une course officielle. Le taux de perte acceptable pour un organisateur devant avoisiner les 0%, il y a aurait de la casse et ça ferait vilain. Je les comprends, au fond.

J’arrive au sommet du Dérochoir. Mais. Quel est donc ce bruit. Oui, du bruit. Du bordel. On se croirait au camping de la plage. Je continue un peu pour déboucher réellement sur l’arrête et tombe sur un groupe. Adultes et enfants. Ils ne sont pas si nombreux que ça en fait, une dizaine maxi, mais ils font du bordel comme 25 ! Les adultes parlent fort, tous en même temps, j’en vois un jeter un papier par terre qui s’envole aussitôt. Je cours après l’intrus (le papier hein, quoique…) pour le ramasser. Je m’écarte du groupe pour profiter de l’instant, regarder le paysage et manger un bout avant la longue descente qui m’attend.

5 minutes. Je suis resté tranquille 5 minutes avant de voir débarquer 3 gamins braillards et affreux (oui, dans ces cas-là, les gens deviennent vite laids) par le bas, coté Servoz de la falaise. Ils ont fait le tour du promontoire où je me trouve, surplombant des centaines de mètres de vide. Totalement inconscients, ils courent dans de la caillasse instable et pourrie. Cette fois j’interviens pour leur dire de dégager car ils balancent des cailloux sur les gens en bas, s’il y en a. Qu’ils tombent, eux, je m’en fous totalement. Ils se sauvent comme des poules effrayées et rejoignent leurs parents. Je ne tiens plus, il faut que je parte d’ici avant d’aller agresser leurs stupides parents. J’avale rapidement le reste de ma barre, fais un clin d’œil au Mont-Blanc que je ne verrai plus avant le second passage au Brévent et me lance dans la pente sans un regard pour ces immondes parasites. Parasites, si vous me lisez (aucune chance mais sait-on jamais) : ne retournez pas en montagne. Vous n’êtes pas fait pour ça.

La descente qui suit se fait à un train d’enfer. Le sentier est bon. Raide mais pas piégeux. Je déroule avec le sourire, profitant de chaque instant passé dans ce coin magnifique et, pour le coup, peu fréquenté. Un peu avant le plat qui forme le fond de cette vallée, je passe une courte zone de lapiaz dans lequel serpente le sentier. Il y a là de quoi se faire une cheville toutes les 5 secondes. Très technique. Comme j’suis pas une fiotte je relance, tout content d’être à l’aise. Je réalise aujourd’hui combien j’ai bêtement joué avec le feu sur ce coup… mais bon, il faut aussi savoir profiter des bons moments. Le fond de la vallée est un peu étouffant. On est en altitude mais quand même dans un four.

Je continue en courant jusqu’aux Chalets de Sales où je fais une pause indispensable : ravitaillement en eau (pure, mais tant pis il vaut mieux ça que rien) et dessalage de la viande. Comprenez par là que je me plonge tout le haut du corps dans un abreuvoir. L’occasion de discuter avec une famille de randonneurs qui font le tour des refuges des Fiz. Je repars trempé mais nettoyé. Qu’il est bon de ne plus se sentir tel un gros jambon salé. Juste un gros jambon sec.

Il fait chaud et j’ai laissé pas mal de plumes, enfin d’eau, depuis le départ de Servoz à cause de cette satanée chaleur. Je bois encore et encore. Et je sais déjà que je vais manquer d’eau. Je me dis que la route jusqu’au refuge de Moede-Anterne s’annonce longue. En réalité, elle le sera encore plus.

Mais pour le moment je profite de la gravité : ça descend et je laisse l’attraction terrestre me tirer vers le bas de la pente. Je déroule dans ce joli sentier le long d’un ruisseau rafraichissant. Cette fois il y a pas mal de monde et je dois commencer à faire attention à ne pas marcher sur les pieds des gens.

J’arrive à la cascade de Sales où je fais une photo, puis continue jusqu'à la cascade de la Sauffaz où je bifurque en reprenant le chemin de la montée, direction le Collet d’Anterne.

Re-BLAM. Forcément, quand on monte, on a plus chaud. Et là c’est carrément insoutenable. Pas un brin de vent. Je n’ai rapidement plus d’eau. Je crève de chaud, de soif. C’est le début de la descente aux enfers.

Ma vitesse ascensionnelle est nulle. Bon, techniquement ce n’est pas le cas, mais c’est l’impression que j’ai : ne plus avancer. Du tout. Je me sens aussi sec qu’un raisin de corinthe. Un sablé aux amandes oublié dans un four. La soif est quelque chose de vraiment terrible, d’autant plus quand il faut produire un effort : ça vous obsède, vous ne pensez plus qu’à ça. Vos forces vous abandonnent et rapidement le mal de tête s’en mêle. Arrivé au Collet d’Anterne je double un randonneur. Bon, ok, il est assis sur le bord du chemin et prend une pause à l’ombre. Je vois que je suis arrivé sur le plat et qu’il ne me reste plus qu’a rejoindre le Col d’Anterne là au fond pour ensuite redescendre sur le refuge de Moede-Anterne. La motivation revient et faisant contre mauvaise fortune bon cœur, je « relance » à 6 km/h et arrive au Refuge Alfred Wills.

De l’eau ! DE L’EAU !!! Je fais le plein. Je m’en mets plein la poche à eau, plein l’estomac. Forcé de ralentir à cause de l’estomac qui fait floc floc, je ne regretterai pas. La soif que j’ai eu jusque là a failli m’avoir. Je ne dois plus revivre ça.

Mais pas de temps à perdre. 5 minutes après être arrivé je repars, direction le Col d’Anterne. Il est 17h15

J’attaque la montée. Marqué par cette longue journée, ces 10h15 de course, la soif, je ne monte pas bien vite. Mais je reste motivé.

Le Lac d’Anterne pointe rapidement le bout de son nez. Je laisse les randonneurs venus faire trempette, nu(e)s pour certain(e)s, et continue mon chemin, droit sur le col. Avant d’y arriver, je vois arriver Ogo ! Il a de l’eau avec lui. De l’eau plate, de l’eau gazeuse. Une merveille ! On repart donc tous les deux. On passe le col assez vite et on attaque la petite descente sur le refuge de Moede-Anterne où nous arrivons aussi vite.

18h30.

Je pose enfin mes fesses sur une chaise en plastique du refuge. Qu’elle est douce et moelleuse !!! Ogo a tout ce qu’il faut dans son sac aux trésors pour me remplir de bonheur : de l’eau gazeuse, des vêtements propres, du jambon, du pain, du fromage. Je mange beaucoup. 11H30 de course. Je le sais, au-delà de 10/11h de course je commence a avoir très faim. Parti pour une soixantaine d’heures il faut que j’anticipe et que je ne résiste pas, il faut manger. J’engloutis de grosses quantités de pain. Ca me fait un bien fou. Mais il ne faut pas trainer, sinon je vais me refroidir. La route est encore longue. Et j’ai déjà plus d’une heure de retard.

Repartir.


Section 3 - Refuge de Moede Anterne <> Le Buet

J’avale quelques poignées de noix de cajou histoire de faire le plein de sel, d’énergie et puis… et puis et puis zut je trouve ça tellement bon ! Je tends mes affaires sales et salées à Ogo, puis m’habille avec des vêtements propres. Je ne suis moi-même pas vraiment propre mais le simple fait de changer de 1ere couche fait la différence, on se sent immédiatement mieux. Surtout quand on a passé la journée à suer du sel, tel un vrai marais salant.

On repart. Ô bonheur ! Ogo a repéré le chemin et je n’ai pas à me soucier de ce détail. L’air de rien il est plus facile de trouver son chemin quand on monte à un col où il n’y a souvent qu’une trace que de prendre la bonne piste au départ d’un chalet. De quoi perdre 10 ou 15 minutes à jardiner… Et c’est pas le moment, j’ai toujours mon heure de retard.

Nous cheminons en trottinant vers le bas, les cuisses se remettent en marche. Il est toujours dur de repartir : les muscles sont froids, le bonhomme aussi un peu, et je sais que désormais la solitude m’attend pour un bon moment : la nuit va bientôt tomber et je ne croiserai plus de randonneurs, ni de grimpeurs...

Ogo me quitte quelques minutes plus tard. Il va descendre direction les Chalets de Souays, je crois. Pour retrouver le reste de l’équipe qui n’avait pas pu monter. Je file donc direction le Pont d’Arlevé. Une fois les muscles chauds je me laisse filer, cosncient que c’est bien dans la descente que je peux récupérer du temps ou, au moins, ne pas en perdre. Chose faite, je suis au pont assez rapidement. Ce qui n’est pas si mal. Maintenant la montée, direction le Col Brévent, où je suis plus ou moins déjà passé le matin.

La montée est longue, la journée a laissé ses traces. Mais très belle ! Je profite d’une petite pause pour me retourner et admirer le paysage dans mon dos : au loin le Col d’Anterne, dessous le refuge, puis la longue descente qui tombe sur le Pont, que l’on ne voit pas.

Depuis quelques minutes, il me semble bien être épié. J’entends quelques blocs instables basculer sous des pas. Non, je ne délire pas… pas encore du moins. Je ne verrai pas mon visiteur, même si le bruit ne trompe pas. Sabns doute un bouquetin, ou plus peureux, un chamois.

Durant la montée j’ai eu le temps de réfléchir et de faire mes calculs : je vais attaquer une portion sacrément technique. J’ai déjà emprunté certaines portions il y a des années. Je m’en souviens bien : c’était pas du sentier à mémés. La nuit tombe déjà bien et vu mon retard, je ferai cette portion entièrement dans la nuit. Si je reste prudent je n’irai pas vite et perdrai encore plus de temps. Si je tente de rester dans les temps, je vais prendre trop de risques. Sans parler du chemin à trouver, qui risque de ne pas être évident.

Le choix est donc vite fait : je prendrai les balcons inférieurs. Bien moins techniques. Du bon sentier chamoniard, très évident et que je connais très bien. Je ne me perdrai pas, au moins.

Je finis par arriver au col. Une arrivée vraiment belle, malgré la chaleur qui se refuse à me laisser tranquille. Là, il y a pas mal de vent. De quoi me donner un peu froid. Une petite barre vite avalée, je mets ma veste et repars en direction  du Col des Montets.

Je fais pars à Virginie et au reste de l’équipe de ma décision par le biais d’un petit SMS. Ils approuvent évidemment tous : leur inquiétude n’est pas feinte et quand je fais preuve de prudence, ils sont ravis.

La descente en traversée qui suit ne pose pas vraiment de problème. Je me sens plutôt bien, quoique fatigué. Mais il fait trop chaud. Je range ma veste et reste en t-shirt. Il doit faire encore au moins 20°c ici. Le vent promène un air chaud qui remonte de la vallée. Dire que j’espérais me rafraichir avec la nuit, c’est raté.

Je finis par croiser un « randonneur ». Un chamois en plein milieu du chemin. Evidemment, il ne me laisse pas l’approcher et s’enfuit très rapidement

Tout le reste du chemin, jusqu’à la descente finale sur le Col des Montets, je verrai des yeux jaunes luire en contrebas du sentier.

Lorsque j’arrive aux escaliers je m’amuse : il m’a fallu moins de temps pour les monter aujourd’hui que pour les descendre lors du Marathon du Mont-Blanc. Décidément, parcourir la montagne en solitaire est bien plus sympa qu’en masse.

La suite se passe bien, je déroule. La température doit probablement diminuer, à altitude égale, mais comme je descends, ça ne change rien pour moi. Il faut toujours chaud et je sue. J’éteins régulièrement ma frontale pour économiser mes piles, un peu, et pour profiter du ciel, beaucoup. Les étoiles sont magnifiques. Si belles que je décide de perdre du temps. Il faut savoir profiter des moments uniques quand ils s’offrent ainsi à nous. Sac posé sur le côté, allongé sur un rocher chaud, je profite un instant du spectacle et observe la Voie Lactée. En tournant la tête, on voit quelques points lumineux en face, petites taches de vie dans cet incroyable panorama de rocher et de glace : les refuges du massif du Mont-Blanc ne sont jamais aussi visibles que la nuit. Je pense aux alpinistes en train de bivouaquer sous le Refuge du Couvercle ou sur une vire, quelque-part dans une de ces magnifiques faces granitiques. Observent-ils aussi les étoiles et le paysage ? Je suis tellement bien que je ne sais pas trop combien de temps je suis resté là. 5 minutes ? 15 minutes ? Je n’en sais rien et je m’en fous. Je soupire de bonheur. Mais il ne faut pas que ces instants me coutent trop. Il faut y aller. Je repars le sourire aux lèvres et motivé par cet instant magique.

J’avais repéré la descente, depuis une zone située sous le Lac Blanc jusqu’au Col des Montets, la veille du départ. Non pas par souci de repérage de la trace, mais parce-que c’est à côté du camping. J’avais mémorisé les passages techniques où je dois ralentir et ceux où je sais qu’il n’y a aucun piège. J’en tiens donc compte pour mettre de la vitesse dès que c’est possible. Mais pas toujours facile : je commence de somnoler et mes yeux se ferment tout seuls. Je fulmine. Bon sang, quand vais-je pouvoir enfin faire une course sans être contraint de dormir dès qu’il fait nuit ? Je me bagarre tant que je peux pour rester éveillé et arriver en bas sans me faire mal.

L’arrivée au Col des Montets est étrange : pas évident de se retrouver là à traverser la route après tant de temps passé sur les sentiers. Je file tout droit sur le sentier qui suit, direction le parking, au-dessus du village du Buet où m’attend l‘équipe. Ogo, justement, me récupère juste après être sorti de la zone de travaux, vers le pont. J’avais repéré ça consciencieusement pourtant. Mais cette nuit, tout est fermé. Je dois escalader les barrières pour sortir de là… pas génial, mais j’arrive à le faire sans me faire mal ni tout casser.

Il est 2h05 du matin. 7h40 de rando-course depuis que j’ai quitté Ogo. Le reste de l’équipe dort tranquillement au Camping. Virginie et Ogo, eux, m’ont installé un véritable camp de base, comme prévu. Il y a une tente, avec de quoi dormir, l’ordinateur portable pour vider ma trace GPS car ma montre ne supportera pas 60h de balade. Et c’est l’occasion de faire une petite sauvegarde : pour une fois, j’ai envie d’avoir la trace complète du parcours réalisé. J’ai même droit à un lavage de pieds par Virginie. Et c’est ça c’est un luxe incroyable ! Ca fait un bien fou.

Coté nourriture c’est le paradis ! Je m’enfile des sandwiches tome-jambon cru tant que ça passe ! Quel bonheur !

On fait le point sur les horaires avec Virginie et Ogo, sur le tracé aussi. Il est maintenant évident que j’ai perdu trop de temps. Une bonne portion du tracé fait une boucle qui, maintenant que nous sommes sur place, ne me semble plus du tout pertinente : je vais y perdre encore plus de temps, et je vais manquer d’eau. Aucun point de ravitaillement en eau n’est possible. Et contrairement à ce qui était prévu, je serai dans le plus dur en plein jour. La chaleur de la 1ere journée m’aura rendu raisonnable sur ce point.

Nous décidons donc de complètement couper cette portion et de faire plus direct. Ainsi il n’est plus question de repasser par où je suis déjà passé, en partie. La section Col de Salenton-Anterne-Wills-Fonds-Buet est remplacée par un direct Col de Salenton-Sommet du Buet. Au fond plus logique, même si la distance et le dénivelé en prennent un coup.

Après quelques tergiversations, je décide de dormir 2h30. Si cela ne suffit pas, je somnolerai un peu plus longtemps. Je reste bien habillé et me glisse dans le sac de couchage, laissant égoïstement Virginie et Ogo se débrouiller avec le bordel que j’ai laissé sur la table. Sans me forcer je plonge dans un sommeil profond : dans peu de temps il faudra repartir.


Section 4 - Le Buet <> Vallorcine

 

Virginie rentre dans la tente et me secoue doucement. Cela fait 2h30 que je roupille. Très curieusement, je me réveille puis me lève sans problème. Je m’en souviendrai pour de futures escapades : 2h30 me conviennent bien. Je me sens frais et motivé pour repartir, malgré l’heure et le peu de sommeil que cela représente. C’est vraiment une excellente surprise : je m’attendais à implorer Virginie de me laisser dormir encore, à me trouver des excuses (bidons, hein) pour rester. Mais non.

C’est donc regonflé à bloc que je m’extrais de la tente pour aller manger… les classiques sandwiches jambon-tome des Bauges. Ils passent vraiment tout seul. Par contre je fais attention à ne pas trop en avaler, il faut repartir. La digestion risque d’être difficile. Pas évident, c’est tellement bon. Je ne le sais pas encore mais bientôt, la nourriture deviendra ma deuxième obsession après l’eau.

Cela fait plus de 22h que je suis parti. Plus de 70km parcourus, presque 6000m de dénivelé montés. Quelques belles arêtes, un beau passage technique, au Dérochoir, quelques nœuds au cerveau quant à l’itinéraire. On y est : la fatigue est désormais installée pour de bon. Jusqu’au bout elle me tiendra compagnie. Désormais la moindre émotion prendra alors des proportions aussi incroyables qu’inespérées. Les petites choses deviennent encore plus belles, les paysages encore plus grandioses, les moments partagés encore plus forts mais les difficultés sont aussi impactées par ce changement d’état.

De fait, je laisse mes deux anges gardiens derrière moi. Je me retourne, et me contente d’un signe de la main dans leur direction. J’aurais aimé trouver à cet instant précis les mots pour les remercier. Leur montrer que leurs efforts ne sont et ne seront pas vains et qu’ils me touchent pour de vrai. Leur dire que leur amour et leur amitié prend ici une dimension inimaginable. Rien ne vient. Trop d’émotions. Ils ne le savent pas mais le regret de n’avoir su leur dire ce que je ressens à cet instant me fait verser une petite larme.

La petite montée le long du torrent est belle. La forêt paisible, tout comme moi. Ma frontale ne m’est pas de grande utilité pendant longtemps car le soleil se lève assez rapidement après mon départ. La température a baissé durant la nuit, un peu. La proximité du torrent ajoute à la fraicheur ambiante. Qu’on se sent bien dans ces moments où l’on est calme, apaisé. Où l’on se sent à sa place. Trop rapidement je sors de la forêt pour me retrouver sur une portion qui monte assez peu, sur le bord droit du vallon de la Pierre à Bérard. J’aurais aimé marcher encore avec les arbres. Heureusement je ne croise personne et profite ainsi de la tranquillité si propre à ce moment de la journée, quand tout est encore endormi.

Au loin, avant d’arriver sous le refuge de la Pierre à Bérard, j’aperçois un randonneur qui vient sans doute de quitter le refuge. Il est arrêté. Il lève les bras à hauteur du visage. Il semble observer quelque chose avec des jumelles. Je ne tarde pas à réaliser qu’il s’agit d’un énorme bouquetin pile en face à moi, à quelques dizaines de mètres. Je ne l’avais pas vu, mais lui est figé. Il m’observe. Pas une hésitation, j’immortalise l’instant. De mémoire je ne crois pas avoir vu d’aussi gros bouquetin avant ce jour.

Je repars, non sans avoir laissé à notre bovidé le soin de filer dans la direction qui lui convient. Moins de 5 minutes plus tard j’entends alors souffler derrière moi, assez loin. Le clic-clic des bâtons qu’on pose à bonne cadence ne laisse aucun doute : y’a du trailer là-dessous, ou je ne m’y connais pas ! Je me retourne et découvre que mon trailer est une traileuse. Rien d’étonnant jusque-là. Sauf qu’elle est toute de fushia vêtue ! Mamanpat ! Ici ? Non ! Impossible. Pourtant… Elle me rattrape rapidement et je découvre alors qu’en effet ce n’est pas Mamanpat. Elle me double, sans répondre à mon bonjour, sans un signe. Oui. C’est sûr : c’est pas Mamanpat !

Mon randonneur, lui, est très souriant et nous échangeons quelques mots sur notre rencontre commune. Le refuge n’est plus très loin. Je fais une pause sur un banc, sous l’œil des locataires du refuge qui viennent pour la plupart de se lever. Cette pause me fait du bien, mais j’ai un peu froid.

La suite est loin d’être évidente : l’attaque qui suit le refuge est raide. Ensuite il y aura les rochers. Uniquement des rochers, jusqu’au sommet. Et encore après… pour bien plus longtemps que ce que je m’imaginais. Tout en mâchant une barre, je regarde la vallée devant moi. Le soleil, dont les rayons rasent les arêtes d’en face, ne va pas tarder à me réchauffer. La séparation entre l’ombre et la lumière est moins nette que ce que je pensais. Je profite de cet instant en fermant les yeux, me laissant baigner dans la chaleur du soleil levant. Je soupire de bonheur. Etre là est une chance, j’en ai conscience à ce moment. Ce que je vis est unique.

Une fois le corps réchauffé je me décide à repartir. Je fais une nouvelle fois le plein de la poche à eau et c’est parti ! La montée est donc assez raide mais finalement courte. Je double des randonneurs, chargés avec des sacs grands comme des immeubles, les pauvres. La dernière du groupe semble en baver comme pas possible.

On attaque ensuite la partie minérale. Au départ assez simple il devient vite moins évident de mettre du rythme. On enchaine les gros blocs, petites portions où l’on doit mettre les mains. En tout cas le paysage est magnifique. Le sommet est visible mais, je le sais, ne sera atteint que dans longtemps, il est encore loin.

Mon rythme est désespérément lent, par rapport à mes estimations. Je n’avais pas souvenir de ces portions très rocheuses. Et puis la fatigue est plus importante que prévu. Mais je ne m’en plains pas, tant le plaisir que j’ai à être ici est important. De bloc en bloc je parviens au Col de Salenton, comme prévu. Le paysage, de l’autre côté est splendide ! Je regrette un peu de ne pas avoir décidé de faire le tour complet. Enfin, peu importe. C’est beau et j’y retournerai, voilà tout.

Sans trop tarder je file au sommet. Mais heu… par où ? Pour aller du refuge de la Pierre à Bérard au sommet du Buet il ne faut pas passer par le Col de Salenton. Ce petit détour m’aura couté vingt minutes mais j’aurai gagné pas mal de belles images en mémoire. Je redescends donc du col et, à la bifurcation, reprend la montée en direction du sommet. Une très longue montée, ponctuée d’accélérations : des coureurs venus sans doute s’entrainer en vue de l’UTMB ou d’autres courses, ou peut-être pour le plaisir, filent à bonne allure. Je les accroche dès que je peux, tant que je peux. Ce qui me permet de diminuer un peu mon retard. Ou plus exactement de ne pas prendre encore plus de retard.

J’arrive finalement au sommet. Il est 9h40. J’ai mis 4h pour monter. Ce qui, au fond, n’est pas si mal que ça. Le sommet, sans être encombré, est tout de même bien occupé. Il y a pas mal de monde ici. Les gens arrivent nombreux depuis le col situé à l’aplomb de l’arête qui descend du sommet.

Je me pose un petit quart d’heure avant de repartir. C’est un peu long mais je sais que la descente sous le sommet va être technique, il vaut mieux avoir les cuisses, et la tête, reposées. Bonne idée que j’ai eue là : c’est la descente jusqu’aux traces de dinosaures qui va me poser quelques soucis.

Après un sentier qui serpente sur le flanc gauche de la montagne j’arrive assez vite à la portion la plus raide : une succession de désescalade facile avec des câbles, quelques marches. Les gens qui montent ou descendent ont l’air assez souvent inexpérimentés. Ils me ralentissent pas mal. Mais leur lenteur, relative, a du bon : elle m’évite de prendre des risques là où l’erreur ne peut arriver qu’une seule fois. Patiemment et tout en profitant de la vue magnifique dans cet univers de pierre, je suis docilement un couple dont la dame panique un peu. Moi derrière, son mari devant, nous réussissons à lui faire franchir malgré tout les passages plus raides.

Une fois l’arête horizontale atteinte je me retourne et admire le beau passage qu’on vient de se taper. J’ai une pensée émue pour les coureurs de la PTL qui viendront ici sans avoir repéré le parcours ni expérience de ce genre de passage. Il leur faudra pas mal de courage : c’est vraiment aérien.

Mais je ne m’attarde pas, il faut profiter de la descente pour, au minimum, ne pas prendre plus de retard : l’arête m’a pris plus de temps que prévu. Après un court jardinage, j’arrive au Col du Genévrier pour tomber nez à nez avec d’immondes poteaux électriques. Non, pas le petit modèle en béton. On parle là du modèle haut de gamme. Le modèle en treillis « Beaubourg ». Le plus laid, quoi. Curieusement, cette rencontre inattendue me laisse pantois. Une énorme déception. Il est sans doute plus ou moins indispensable de faire passer ces lignes haute-tension ici… mais je ne peux pas m’empêcher de me dire que ça n’a vraiment rien à faire au milieu de ce paysage lunaire. La roche est le seul habitant de ce secteur, si l’on excepte les lichens et les petits insectes. Pas un buisson, pas une cabane, pas une herbe à l’horizon. Seulement de la roche. Nue. Coupante. Les randonneurs ne sont pas légion ici. D’ailleurs, sur cette portion allant de l’arête sous le sommet du Buet jusqu’au sommet du Cheval Blanc, je ne croiserai qu’un couple de randonneurs suisses surpris de croiser quelqu’un ici.

En arrivant sous la dernière pente, avant le Cheval Blanc, les rochers gris cèdent en partie leur place à une roche d’un jaune éclatant. Je ne suis plus sur la lune, mais dans un décor de cinéma !

Tout en me jurant de savoir ce qu’est cette étrange roche, j’en ramasse trois petits exemplaires pour les donner aux enfants. Ils seront sûrement ravis d’avoir un petit souvenir. Le paysage qui s’étend derrière moi est splendide.

J’arrive désormais au sommet du Cheval Blanc. Je me demande vraiment d’où il tire son nom. Tout comme le Buet c’est un sommet fait de roche pourrie qui ne tient debout on ne sait comment. La fatigue, quoique présente, m’indiffère. Le chrono, je ne m’en occupe plus du tout. Je suis tellement heureux ici. Le paysage autour de moi est superbe. Je m’en mets plein les yeux, le sourire aux lèvres. Du côté est, tout est minéral. Mais coté Emosson la roche est progressivement envahie par la verdure, les lacs.

Tout en m’imprégnant des images une question me vient. Par où descendre ? La falaise située sous mes pieds, et repérée lors de la montée précédente n’est clairement pas le bon endroit. C’est pourtant de ce côté qu’il faut aller, le GPS est formel. Sans parler de l’évidente trace qui se dessine dans le fond de la vallée.

La réponse à ma question ne tarde pas à venir : un chien déboule d’une petite arrête sur ma gauche, suivi par son maître, un jeune militaire (ses vêtements en attestent) venu ici avec un copain « pour se dégourdir les jambes ». Nous discutons tous les trois un moment. Ils me confirment que mon chemin se trouve bel et bien sous mes pieds, par où ils sont arrivés. Sans plus tarder je file dans la descente après avoir laissé passer un couple de randonneurs.

Le bruit des 3 cailloux se frottant les uns contre les autres dans ma poche ponctue chacun de mes pas dans la descente assez technique. Ici, les câbles sont remplacés par des chaines. Pendant une bonne demi-heure, le temps de la partie technique, cette différence entre la France et la Suisse occupera l’intégralité de mes pensées : quel est le meilleur système ? Qu’en est-il de la tenue dans le temps ? Quel est le plus adapté lorsqu’il fait froid ? Et pour les enfants ? En cas de neige, quel est le plus adapté ? Pourquoi je me pose toutes ces questions ? Fatigue ? Je ne sais pas et n’ai toujours pas trouvé de réponse...

Rapidement cette descente devient moins technique et j’aperçois au loin le fameux point « traces de dinosaures » indiqué par ma carte IGN qui m’avait tant intrigué lors de la préparation. Pour ne rien gâcher, j’avais fait attention à ne pas me renseigner sur le sujet. Quelle bonne idée !!! Je tombe nez à nez avec… des traces de dinosaures ! Des vraies, dans la roches. Bien protégées par de petites barrières on peut les admirer, et même, aller… les toucher du bout du doigt. Oui, ça ne sert à rien, mais comme les enfants, j’ai envie de toucher.

De fait, je profite d’une explication sur ces traces par un spécialiste venu ici avec un groupe…. de filles en maillot de bain ! Bon ok, elles sont en short. Mais en haut… point de doute. Je cligne des yeux une seconde, je dois rêver. Non. Il y a bien devant moi 5 ou 6 filles fort peu vêtues et fort avenantes toutes fort concentrées sur des histoires de millions d’années, de boue, de mares. Je fais mine d’écouter aussi et réalise que je dois être ridicule : il est évident que je n’écoute pas un mot de ce que dit le spécialiste. Un peu (mais pas trop) honteux, je m’éclipse. Curieusement, mon souvenir le plus marquant restera tout de même ces fameuses traces. Je ne m’attendais pas à voir des dinosaures d’aussi près.

Vu d’ici, le Cheval blanc n’a toujours pas livré son secret : son nom n’a toujours pas de signification. En tout cas, ça fait une belle descente !

La fameuse montée jusqu’en haut des Gorges de la Veudale est finalement plus courte et plus facile que je ne l’aurais cru. Cela me redonne du cœur et me relance dans la descente sur un très bon rythme. Il y a beaucoup de randonneurs ici. Ma descente est un peu ralentie, mais là encore, ça m’économise. Et je ne suis pas à quelques dizaines de mettre par heure de perdu. Le moral n’est pas atteint c’est l’essentiel.

Parti du Buet à presque 10h, j’arrive au Barrage d’Emosson à 13h. 3 heures pour faire 10km, 300m de D+ et 1400m de D-. J’ose même pas calculer ma moyenne. On ne peut pas dire que j’ai vraiment tracé sur cette portion. Mais ce n’est pas vraiment une surprise : avec la 1ere descente depuis le sommet du Buet et la vue sur la suite, j’ai tout de suite compris que ce n’est pas là que j’éviterai de perdre encore du temps. Enfin bon, c’est plat désormais : donc je trottine. Courir sur un pont métallique suspendu au-dessus de la route, c’est assez curieux. Il ne bouge pas d’un poil mais la sensation est bizarre.

Le nombre de randonneurs va en augmentant au fur et à mesure que je me rapproche de la route qui surplombe le barrage d’Emosson. Je croise des familles entières avec le chien en laisse. Et parfois sans laisse. Je m’en tire à bon compte avec une ou deux frayeurs inutiles : ils ne bougent pas la truffe et se foutent complètement que je sois là ou pas. Heureusement que le ridicule ne tue pas…

Je quitte donc la Suisse et me retrouve en France, en tournant au pied du Grand Perron. J’ai le choix entre un premier sentier ascendant ou un autre, descendant. La carte indique un chemin plutôt à l’horizontale. Je me décide pour la descente, aucune raison de monter alors que la trace indique l’horizontale, hein. Après 5 minutes de descente je me rends à l’évidence : le chemin ne repartira pas sur la gauche. Il file tout droit en bas. Je savais que je prenais ce risque. C’est le moral toujours au beau fixe que je remonte les 60 mètres de dénivelé que je viens de descendre. Avec un regard en arrière pour le superbe paysage qu’offre le barrage, j’entame la petite montée qui me permettra de rejoindre le sentier horizontal où je pourrai relancer.

Horizontal... J’aurais aimé que le sentier suive la trace que j’avais dessiné sur l’ordinateur. Mais non, la montagne ne fait pas ce genre de chose. On s’adapte à elle, pas l’inverse. Je ne cesse de faire des montées et des descentes. Avec force câbles (oui on est en France, fini les chaînes) et petites grimpettes. Ha il est beau mon tracé à l’horizontale !!! Cette fois le moral en prend un coup. Sans crier gare, je m’effondre complètement. Plus aucune pêche. Le soleil se met à me faire souffrir de nouveau, comme la veille. Il me faut 30 minutes pour faire 3 malheureux kilomètres. Je souffle comme un bœuf et meurs de soif. Ma poche à eau est vide depuis longtemps et j’ai soif. Et faim. J’envoie un SMS à Virginie, comme je le fais régulièrement depuis le début pour lui dire à quel point j’ai faim. Une image m’obsède : une omelette roulée à la tome des Bauges. Je le lui dis. Sans grand espoir, je continue de penser à cette omelette. Mon ventre gargouille de plus en plus. Je suis épuisé. Et j’ai soif. Un randonneur me croise : « hé mon gars, faut pas te mettre dans cet état, tu finiras jamais l’UTMB sinon ! ». Je le laisse à ses conneries d’UTMB en ravalant un juron. Qu’il aille se faire foutre ! Je le maudis avec son UTMB. Je m’en fous de l’UTMB ! Sans le savoir, il cristallise toute ma frustration de me trainer lamentablement. Durant la prochaine demi-heure, je l’insulterai sans discontinuer. Puis j’aperçois enfin le sentier qui redevient courable et en descente douce !

Les Chalets de la Loriaz sont enfin à portée de main. Ouf. Je n’en peux plus. Je meurs de faim. Et je meurs de soif. Le moral revient un peu et je reprends du rythme pour aller aux Chalets le plus vite possible. Je traverse le petit groupe de chalets sans voir l’ombre d’une fontaine. Misère... Depuis des heures je mise sur un point d’eau à cet endroit. Je l’avais même vérifié pendant l’organisation du Tour. Je me décide à partir dans la descente quand je tombe, à la sortie des chalets, sur la fontaine. Miracle ! De l’eau. Fraîche. Je bois sans m’arrêter. Le ventre plein comme une outre je continue de boire. Pour le simple plaisir de sentir l’eau couler dans ma gorge sèche. Une main dans le bassin, pour me rafraichir, je refais un SMS à Virginie pour la prévenir. Je serai lent et en retard. Si elle peut, qu’elle me prépare ce qu’elle veut, pourvu que je mange.

Je commence de descendre et une autre excellente surprise m’attend : Ogo est monté à ma rencontre ! Il est monté plus vite que le Roi Kilian ne l’aurait fait. Une fois de plus il vient à mon secours. Je me rassois vers la fontaine et remet les mains dans l’eau. De son sac, il me sort une bouteille de St Yorre fraiche. Je bois tant et plus. Cela me fait un bien fou ! Heureusement qu’il est là. Encore merci, mon ami.

Sans perdre trop de temps nous descendons. C’est que j’ai toujours aussi faim ! Ogo passe devant pour me montrer le chemin et mettre du rythme. Nous mettrons 35 minutes pour descendre les 800 mètres de dénivelés qui nous séparent du ravitaillement.

Le ravitaillement est là. ENFIN ! Je vais pouvoir manger, me reposer et surtout. Envisager la suite : une longue nuit, un beau glacier. Et surtout de merveilleux moments en compagnie d’Ogo. Le compagnon parfait.

 


 

Section 1 - Chamonix <> Servoz

Mes attentes les plus folles sont comblées ! Ma merveilleuse équipe m'attend avec un vrai camp de base installé, plus ou moins, à l'ombre. Chaises, tables, tente. Tout y est. Comble du bonheur, mon ventre creux va pouvoir se remplir avec le plat qui me hante depuis des heures. Une omelette au fromage ! De la Tome. Des Bauges ! De la vraie de vraie. Ils ont même acheté un réchaud et du matériel de cuisine pour me faire tout ça. Quel bonheur d'être si bien entouré.

De fait, je me goinfre d'omelette au fromage. Et pas qu'un peu. Puis, quand même soucieux de la suite, décide de dormir un peu. Mais pas facile : la tente a été installée dans ce qui semble être….  Un lieu d'aisance ! Pas possible que je dorme dans cette odeur de merde. On déplace la tente. Cette fois c'est bon mais à moitié au soleil, en pente. Décidant de faire fi de ces petits tracas, je m'installe pour dormir un peu pendant qu'Ogo commence à se préparer pour la suite. Pas moyen…. Il fait trop chaud dans la tente. On la déplace, je retente de dormir, mais non. Rien n'y fait. Je laisse tomber et sors de la tente pour me préparer aussi.

D'ores et déjà, vu l'heure et il faut le dire, ma fatigue, nous décidons de ne pas passer par l'Aiguillette des Posettes et le Tour. Du col des Posettes nous rejoindrons directement le Col de Balme. Là encore, aucun regret à posteriori.

Nos préparatifs prennent un peu plus de temps qu'espéré mais ce n'est pas grave. Je ne suis pas à quelques minutes près, à ce moment de la course. En effet, la suite de la course comporte un petit passage par la haute montagne, ses chemins tortueux, ses glaciers, ses crevasses. Ogo m'accompagnera pour la fin de ce parcours. L'occasion pour lui de découvrir les hauts sommets mais aussi une question de sécurité pour moi : avec cette chaleur le glacier, pas totalement déneigé, a pas mal de crevasses à peine visibles. Pas question que je me foute dedans bêtement.

C'est donc lestés de bons sacs qu'Ogo et moi quittons le reste de l'équipe. Il est 18h20, la nuit ne va pas tarder.

La montée au Col des Posettes est conforme à mes souvenirs du Marathon du Mont-Blanc : régulière. C'est donc sans me mettre dans le rouge qu'Ogo et moi montons, d'autant plus que je sais que la suite devrait être éprouvante. Elle se sera en réalité encore plus qu'imaginée.

20h30. La vue au Col des Posettes est époustouflante. Les couleurs sont magnifiques, c'est une peinture de Maître que nous avons sous les yeux : la Verte, les Drus, le Mont-Blanc comme prenant feu. Un petit vent se lève et nous ne perdons pas de temps à trop rêver, il commence à faire frais. Nous attaquons le sentier qui monte en direction de la Tête de Balme puis continue en balcon au Col de Balme, frontière avec la Suisse.

De là, le sentier descend en pente douce et nous sortons les frontales pour atteindre le chalet des Grands Dessus où ma trace GPS me joue un mauvais tour. Le sentier a-t-il disparu pour de bon ? L'IGN a-t-il commis une erreur ? Toujours est-il que le sentier du GR est sensé passer de l'autre coté en amont du chalet. Mais nos aller-retour n'y font rien, ça ne passe pas. C'est près du chalet que nous trouvons la solution : le sentier bifurque là. Nous filons droit dessus, direction le ruisseau du Trient.

Nous traversons le ruisseau et entamons la longue montée sur le Fenêtre d'Arpette. 900m de dénivelé à avaler, moins de 4km de long. Je me sens assez bien. Mais ça ne va pas durer. Pas du tout. Les encouragements d'Ogo n'y font rien. Je suis de plus en plus lent. Nous mettons près d'1 h 10 pour faire 400m de dénivelé. Je me couche là où je suis, sur le bord du chemin. Ogo me laisse faire, conscient que je dois faire une pause. Les araignées me dérangent : elles me grimpent dessus, minuscules et brillantes sous le feu de ma frontale. Le bord du sentier est boueux, en pente. Je glisse. Ogo a raison : je ne me repose pas vraiment. Je dois me relever et repartir.

Quel calvaire. Je mettrai 2 heures pour faire les 500 m de dénivelé restant. Ce n'est que le début de mes aussi soudaines qu'emmerdantes variations de vitesse. Lorsque le mental prend le relais du physique et parfois fait défaut. Puis reviens. Là tout de suite, je suis épuisé. Ogo est d'une patience infinie. Jamais il ne proteste, jamais il ne me pousse plus que de raison. Qu'aurais-je fais sans lui ?

Je le supplie de faire une pause à la Fenêtre d'Arpette, je n'en peux plus. Mon sac me pèse trop. Il accepte. Malgré le vent, nous nous blottissons l'un contre l'autre, dans un creux du rocher. Nous ne sommes pas seuls : une tente est aussi nichée sur un replat, à l'abri du vent. J'espère ne pas avoir fait trop de bruit. Nous restons là 1h15. Mais, pour la deuxième fois depuis le début c'est une odeur de merde qui me déloge. Le coupable est trouvé. Nous sommes pelotonnés à quelques centimètres d'un bel étron même pas encore sec. Je me marre un bon coup. C'est l'occasion de se décider à repartir. De toutes façons il fait décidément trop froid.

La descente est curieusement plus facile que la montée. On dit toujours que c'est l'inverse. Je continue de ne pas être d'accord. Malgré tout, je ne suis pas rapide : 1h40 pour 1000m de descente.

De cette descente du Val d'Arpette je garderai à jamais en mémoire, et en horreur, les papillons de nuit. Ils viennent se coller à ma frontale, par dizaines, par milliers. Sans doute leur nombre est-il exagéré mais c'est la sensation que j'ai. Il se fourrent dans mon nez, dans ma bouche et mes yeux. C'est avec les mains balayant mon champs de vision en permanence que je descends. Très pénible. Très.

Un peu avant Arpette nous remontons en direction du soleil qui se montre plus haut sur les crêtes. Près de 2 heures pour les 700m de dénivelés à faire. Je me permets une pause dans les champs de myrtilles. Elles sont délicieuses, j'ai faim. Tant pis si Ogo doit m'attendre !

La montée au col est minérale, sans être austère. Il fait beau, pas trop chaud. Je me sens mieux que cette nuit. Le début de journée est pour moi un moment toujours magique. Le corps se réveille, les sens reprennent vie.

Ogo continue de monter, sans forcer. Nous parlons peu. Il n'en est pas besoin.

Un peu avant d'arriver au col de la Breya je me retourne pour admirer le paysage. C'est magnifique. Quel plaisir d'être là, simplement.

Un petit quart d'heure de descente et nous réattaquons la montée en direction de la cabane d'Orny, dans le même temps. A partir de là, le sentier se complique. Le glacier a fortement reculé, nous montons péniblement dans un amas de pierres. Typiquement le genre de sentier qui devait être enneigé il y a 30 ans. Il me semble même qu'Ogo commence à peiner : il a aussi faim et soif que moi.

Nous n'avons plus rien à manger depuis de nombreuses heures. Ogo est aussi bon coureur qu'il est généreux, ce qui n'est pas peu dire. Aussi me promet-il de faire fumer sa carte bancaire à la Cabane du Trient pour une bonne omelette. Je ne refuse pas. Nous en avons l'eau à la bouche. Les sacs posés, nous entrons dans la cabane et demandons s'il est possible d'avoir une omelette ou qqch du genre. Pas de problème, le gardien commence à casser ses œufs. Ogo sort la carte. Et là. C'est le drame. Pas de machine à carte bancaire. Il faut du cash ou un chèque. Nous n'avons rien de tout cela. Le gardien remballe ses œufs. Nos ventres continuent de crier famine. Nous l'implorons de nous donner un quelque-chose, n'importe quoi… un morceau de pain rassis ferait l'affaire. C'est d'un peu de sucre en poudre versé directement dans la bouche qu'il faudra se contenter. Nous voyons bien que le trailer-mal-équipé-mal-préparé-mal-alimenté qu'il voit de plus en plus ne lui plait pas. Tant pis. C'est toujours mieux que rien nous disons-nous.

Une petite descente et nous prenons pied sur le glacier. Il est 11h. Changement de vêtements, de chaussures, gants, etc. Baudrier, crampons, casques, corde. Nous sommes fin prêts. J'en profite pour donner quelques explications à Ogo sur la marche à suivre dans les zones crevassées : ponts de neige et tout le tremblement. Ainsi que quelques explications si jamais l'un de nous venait à passer dans une crevasse. Ca peut arriver, surtout vu l'état d'enneigement de la partie supérieure du glacier et l'heure excessivement tardive pour ce genre de traversée.

 

Nous y allons, tranquillement cette fois. L'idée maitresse ici est de se faire plaisir, en toute sécurité. Ogo semble ravi de cette première. Moi aussi de lui faire découvrir ce milieu.

J'ai prévu de passer par le Col du Tour. Mais une précédente expérience dans le secteur me refroidit un peu : les crevasses a son approche y sont nombreuses et avec la canicule de ces derniers jours, et l'heure, je suis sûr de ne pas y échapper. Ce sera donc par le Col Supérieur du Tour que nous passerons. Bien plus raide il a l'avantage d'être plus simple à approcher et nous évite une importante zone de crevasses.

Une crevasse barre tout le glacier ou presque. Nous remontons la trace des alpinistes précédents qui me semble la meilleure. Un pont de neige est à peine visible mais il est bien là. La neige est molle. Il ne faut pas passer dans les traces, le pont cèderait. Je passe avec un saut en faisant moult recommandations à Ogo qui m'assure. Pas de problème. Vient le tour d'Ogo. Il a l'air un peu emprunté par la corde, qui le gêne pour passer le pont et sauter. Du coup son saut manque de longueur, il atterrit avec une jambe qui passe à travers la neige. Je le bloque, il ne va pas plus loin, heureusement. Il réussit à s'extirper de son trou sans problème. Plus de peur que de mal. Je me demande alors s'il réalise seulement le trou béant qu'il avait sous les pieds, prêt à l'avaler. Je ne lui en parle pas.

La descente du Col Supérieur du Tour ne pose normalement pas trop de problème. Mes souvenirs d'ados sont encore clairs : de la neige, au minimum de la glace remonte tout le couloir. Le réchauffement est encore passé par là. La neige a disparu en presque totalité, la glace est réduite à peau de chagrin. Il faut désescalader le haut du col dans du rocher pourri puis descendre dans un mélange de glace fondue et de gravier pour prendre pied sur la partie glace. Ogo a du mal à désescalader avec les crampons. Je l'assure pour lui permettre de rejoindre une zone plus stable. Puis je le rejoins.  Interdiction de tomber ici. Tant bien que malnous parvenons au pied du col.

 

Pas question de relâcher notre attention, il reste d'autres crevasses et ponts de neige à traverser, tous plus traitres les uns que les autres. A 5 heures du matin cela ne poserait pas de problème. Mais à 14h, le soleil est à son zénith. Et nous sommes en pleine canicule. Toutes les conditions sont réunies pour avoir des problèmes. Quelques crevasses sans aucune difficulté me permettent même de faire des photos pour immortaliser l'instant.

 

Malgré tout, nous atteignons le Signal Reilly où nous quittons nos costumes d'alpinistes pour redevenir des trailers. C'est un peu plus loin que nous retrouvons Ju, toujours fidèle au poste, caméra à la main. Il s'est tapé les 1400 mètres de dénivelé pour venir faire quelques images, époustouflantes.

 

Est-ce l'odeur de l'écurie ? Grisés par la caméra ? Je ne sais pas. Toujours est-il que nous descendons du refuge Albert 1er à un train d'enfer. Près de 1300m de dénivelé négatif en 1h. Ogo va se payer une gamelle durant la descente, tout comme moi. Heureusement sans gravité.

 

L'arrivée dans la vallée est un moment de soulagement : ce tour, je vais le terminer, et avec Ogo.

Il est temps de se poser, de manger et de faire le point sur le suite…

56 commentaires

Commentaire de sabzaina posté le 29-09-2012 à 16:03:51

Non ce n'est pas stupide de parler au Mont Blanc.
Merci pour ce 1er épisode très prometteur.
Quelle belle plume...

Commentaire de totoro posté le 29-09-2012 à 16:09:11

On t'a beaucoup embêté pour avoir ce récit. Mais c'était pour être encore plus derrière toi, tu nous as émerveillé cet été et ça continue encore par cette belle prose accompagnée de photos qui vont envie (enfin pas celles de tes jambes poilues ;-).

Merci Merci Merci !

Commentaire de Nini posté le 29-09-2012 à 16:41:22

J'aime les jambes poilues moi !!! ;-)
On veut la suite !!!

Commentaire de lalan posté le 29-09-2012 à 16:48:59

Prend ton temps pour la suite. Une aventure comme ca se déguste. Cette première partie était l'apéritif. La suite du menu s'avère prometeuse.Ne traines pas trop non plus !!!

Commentaire de calpas posté le 29-09-2012 à 16:57:46

vite vite la suite !!!!!

Commentaire de franck de Brignais posté le 29-09-2012 à 18:01:40

Oh oui, vite la suite !!... tu as réalisé un rêve merveilleux. Merci de nous le faire partager !!

Commentaire de Arclusaz posté le 29-09-2012 à 18:46:30

Ben.... ça valait le coup d'attendre !

et cette idée d'épisode est excellente (bon, faut pas que les mi-temps soient trop longues quand même...).

Dire que j'avais prévu de te rejoindre à Servoz : je sens que la 2eme partie va me donner beaucoup de regrets.

Commentaire de Elcap posté le 29-09-2012 à 19:22:40

Ca vous gêne si je poste la 2eme partie ce soir ??? ;-)

Commentaire de Arclusaz posté le 29-09-2012 à 19:42:46

non, non, pas de problème !

on peut digérer 2 épisodes d'un coup, depuis le temps qu'on attend....

envoie le 2eme opus....

Commentaire de RayaRun posté le 29-09-2012 à 19:26:44

Super le feuilleton avec épisodes photos vidéos somptueuse et bien écrit. Vraiment de la chance d avoir une petite famille aussi dévouée, de la chance de vivre si près d une si belle région ! La suite, vite !

Et vivement la saison 2 avec le Beaufortain !

Commentaire de Elcap posté le 29-09-2012 à 19:45:15

Et voilà, posté !

Commentaire de Arclusaz posté le 29-09-2012 à 20:04:55

Bien, bien, cette deuxième partie.

De la chaleur, de l'escalade, des femmes nues..... tout ce que je déteste !

j'ai bien fait de te faire faux bond....

Commentaire de Nini posté le 29-09-2012 à 20:15:01

Lol

Commentaire de sabzaina posté le 30-09-2012 à 06:47:58

Palpitant! J'adore

Commentaire de Mamanpat posté le 30-09-2012 à 07:44:45

Egaré dans la vallée infernale
Le héros s´appelle Elcap
A la recherche du dérochoir
Le bandit s´appelle chaleur
Avec l´ami Julien
Sauvé de justesse des pitous
Stop au trafic d'eau pure
Escale au refuge d'Anterne


Et soudain surgit face au vent
Le vrai héros de tous les temps
Elcap contre tout chacal
L´aventurier contre tout guerrier
Elcap contre tout chacal
L´aventurier contre tout guerrier

... (ben allez, la suite quoi !)

Commentaire de ogo posté le 30-09-2012 à 17:56:21

Pour un gros jambon salé, je trouve que tu t'en sors sacrément bien côté écriture ;) Un vrai plaisir que de se replonger dans cet environnement magnifique deux mois après ton Grand Tour. Vivement la suite de la série et la prochaine aventure. Juste par curiosité, ils ressemblent à quoi les 50 derniers km du GTB ? ;)

Commentaire de Nini posté le 30-09-2012 à 19:09:28

Ils ressemblent à 3 gosses à garder, une voiture à conduire et Elcap et sa femme à assister !!!
Merci Ogo de te porter volontaire !!!! :-))))

Commentaire de sebmelalix posté le 30-09-2012 à 17:59:45

Le défi, les photos, les vidéos, la Team et le récit : EPOUSTOUFLANT
Mille merci de le partager!
Et dire que tu remets le couvert...

Commentaire de Elcap posté le 30-09-2012 à 19:11:31

Les 50 derniers km ? Je ne m'en suis pas encore occupé. Tu aimes les surprises ? ;-)

Commentaire de Byzance posté le 30-09-2012 à 21:05:29

vite la suite ou ... les suites !

Commentaire de Jean-Phi posté le 01-10-2012 à 13:46:30

Et bé, je viens de tout lire, c'est mieux que Match et Esprit trail ou Endurance réunis ! Le poids des mots, le choc des photos (magnifique), le plaisir de la lecture écrite comme photographique en plus ! Ca valait le coup de te pousser un peu au derrière pour que nous le fasses ce CR ! Vite la suite !

Commentaire de Elcap posté le 01-10-2012 à 13:52:57

attention... pour la suite y'aura plus de photos, ou presque. ça, c'est quand la fatigue s'en mêle ;-)

Commentaire de Japhy posté le 02-10-2012 à 11:12:37

Merci de nous donner envie comme ça!

Commentaire de CROCS-MAN posté le 06-10-2012 à 10:08:15

Une super MEGA balade qui doit bien oxygéner les neurones. Super CR, MERCI

Commentaire de Arclusaz posté le 06-10-2012 à 10:19:08

Objectif du jour : faire du jus pour le semi !
cet objectif me semble idéalement conciliable avec la rédaction de la partie suivante du CR.....

En plus, tu as ta soirée de libre....

Commentaire de Elcap posté le 06-10-2012 à 10:26:10

C'est bien ce qui est prévu ;-)

Commentaire de Elcap posté le 08-10-2012 à 13:57:20

Voilà ! La section 3 est ajoutée !

Commentaire de Arclusaz posté le 08-10-2012 à 14:50:42

bien, bien, ça avance bien.....

Si tu veux une autre soirée de solitude pour la section 4, ça peut s'arranger....

J'ai beaucoup aimé tes instants de rêverie sous les étoiles : finalement, serais-tu humain ?

Commentaire de Elcap posté le 08-10-2012 à 14:53:05

Enfoiré ! Pour la section 3, je l'ai faite ce midi ;-)

Commentaire de sarajevo posté le 08-10-2012 à 20:23:54

super génial ton récit !!! Chapeau !!

Commentaire de RayaRun posté le 08-10-2012 à 23:53:25

l un de mes feuilletons préférés ! On peut pas trouver la suite en fichier pirate ;-)

Commentaire de Elcap posté le 09-10-2012 à 12:50:15

hé non ! Mais je suis déjà sur la suite. En fait... j'ai envie de vous la raconter ;-)

Commentaire de Stanislas Thouret posté le 13-10-2012 à 16:09:53

La suiiiite ??????

Commentaire de Matchbox posté le 14-10-2012 à 13:41:50

Passionnant et très bien écrit.
Vite, la suite !

Commentaire de Elcap posté le 22-10-2012 à 09:34:59

Voilà, la suite est postée.

Commentaire de Jean-Phi posté le 22-10-2012 à 10:18:58

Et elle est on n peut plus sympa cette suite ! Quels paysages fabuleux quand même !
PS : Trop drôle l'anecdote du randonneur et l'UTMB !

Commentaire de Elcap posté le 22-10-2012 à 10:21:01

avec la faim, la soif, la fatigue et la frustration de cette portion dont la technicité m'a surpris (j'avais un trait sans D+, super roulant sur le tracé)... je l'aurais poussé dans le vide :-D

Commentaire de Stanislas Thouret posté le 22-10-2012 à 10:04:13

J'aime :-)

Commentaire de ogo posté le 22-10-2012 à 10:39:44

Sublime ! Je regretterais presque de ne pas t'avoir accompagné plus tôt (et pas seulement pour les filles en maillot de bain ;)
Merci à toi pour ce récit captivant et superbement illustré !

Commentaire de Arclusaz posté le 22-10-2012 à 13:48:58

Qu'est-ce que tu écris bien !
Sérieux, c'est très très agréable à lire.
Et les photos sont superbes (surtout celles des nanas en maillot que tu m'as montrées discrètement samedi). Celles d'Ogo nu sont bien aussi mais bon, c'est pas pareil.....

Allez, je pense que tes fidèles lecteurs peuvent t'accorder un ou deux jours pour la suite..... mais pas plus !

Commentaire de RayaRun posté le 22-10-2012 à 20:56:03

Toujours aussi bon, ça valait le coup d attendre ( euh en même temps on a pas le choix hein :) )

Au prochain épisode !

Commentaire de franck de Brignais posté le 27-10-2012 à 10:26:56

Tu nous plonges encore avec tant de facilité dans ta belle aventure !
Ma gorge se serre avec toi quand tu quittes ton camp de base et les tiens... je suis a tes côtés quand tu t'allonges sur cette pierre chaude et que tu découvres avec de nouveaux yeux le ciel étoilé... et je rêve de croiser 5 nanas en maillots de bain et un bouquetin (mais pas en même temps...)
Merci encore pour ce partage.... et la suite ?!...

Commentaire de Elcap posté le 27-10-2012 à 11:02:50

La suite.... Je suis tellement pris par la STL... Je vais m'y atteler !

Commentaire de petit_merou posté le 27-10-2012 à 20:12:25

je me ballade de-ci de-la sur les CR
et je tombe sur le tien:
wahoo, respect !!!!

Commentaire de Elcap posté le 27-10-2012 à 20:42:26

Merci ! Il faut toujours se balader : sur les cr, en montagne... ;-)

Commentaire de petit_merou posté le 28-10-2012 à 08:23:42

je me ballade de-ci de-la sur les CR
et je tombe sur le tien:
wahoo, respect !!!!

Commentaire de Elcap posté le 30-04-2013 à 12:19:49

Je ne t'autoriserai à me respecter que quand je me serai décidé à finir ce CR.... je suis vraiment un mauvais CRiste...

Désolé :-(

Commentaire de petit_merou posté le 28-10-2012 à 11:52:04

je me ballade de-ci de-la sur les CR
et je tombe sur le tien:
wahoo, respect !!!!

Commentaire de cloclo posté le 27-05-2013 à 20:44:34

Bon, on attend tous avec impatience la fin de ce récit , Florent !

Commentaire de stphane posté le 08-12-2014 à 21:44:59

Un bien beau voyage...., très beau récit.

Commentaire de Elcap posté le 09-12-2014 à 01:30:02

Merci :-)
Et avec l'étape 4 postée à l'instant tu peux voyager encore un peu :-p

Commentaire de auvermarc posté le 09-12-2014 à 05:18:30

Merci Florent pour ce très agréable moment, le récit de ton aventure m'a rappelé des passages de ma PTL. Ton aventure en solo m'a épaté, bravo à toi et à ton "team".

Commentaire de Elcap posté le 09-12-2014 à 06:53:11

J'ai bien pensé aux coureurs de la PTL oui. Je suis très admiratif

Commentaire de Jean-Phi posté le 09-12-2014 à 08:44:56

Aahhhh !!! Ca faisait longtemps que l'on attendait ! Chouette que tout ça et toujours aussi impressionnant !

Commentaire de Stanislas Thouret posté le 09-12-2014 à 08:50:44

ça me fait penser que je voulais envoyer 0.50 CHF au gardien du refuge du Trient pour son sucre.
Je vais attendre l'été prochain. La le refuge doit doit être fermé.

Commentaire de Arclusaz posté le 14-12-2014 à 10:43:22

j'dis rien mais j'en pense pas moins.

ah, si, merci.

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