Récit de la course : Raid 28 2009, par ouster

L'auteur : ouster

La course : Raid 28

Date : 17/1/2009

Lieu : Bures Sur Yvette (Essonne)

Affichage : 2459 vues

Distance : 85km

Objectif : Pas d'objectif

15 commentaires

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C'est quoi le Raid 28 ?

A l'origine : le Raid 28 "était une manière de s'entraîner près de Paris en réunissant des conditions difficiles"

"Partir à cinq avec au moins une femme et arriver à cinq en passant partout où cela est imposé, en allant le plus vite possible car on risque d'être éliminé "

Concrètement cela veut dire qu'il faut être prêt à se taper 90km en 18 heures avec une nuit blanche, au mois de Janvier, en Ile-de-France. La crème solaire n'est pas sur la liste du matériel obligatoire…

Donc, c'est avec des émotions mixtes que je lis le mail de mon futur Capitaine le matin du 16 octobre 2008 car c'est la ou cette histoire commence. La Libellule aurait constitué une équipe de choc :
- Capitaine : La Libellule (3 raids 28 -> 1 victoire, 1 Sainté-Lyon, 1 Mercantour, 1 UTMB, 1 Diagonale des fous, 1 Origole .....)
- Orienteur : La Tortue (3 raids 28 -> 1 victoire, 2 Sainté-Lyon, 1 Mercantour, 1 UTMB, Embrun, Championnat du Monde de CO....)
- Féminine : Koline (UFOte bien connue, rédactrice pour le mag UFO, 24h, 100 bornes ....)
- Poinconneur n°1 : l'Hippo (24h, 100 bornes …)

Et il cherche son dernier équipier, le cinquième élément quoi. Serais-je Bruce Willis..?

J'accepte cet honneur tout en doutant de mes capacités de terminer cette course hors normes car à ce stade je n'avais jamais fais plus que 42km et des poussières, mais c'est grâce à ma perf dans un marathon dans la présence de la Tortue que je me trouve postulé alors je creuse l'idée.

Pendant les mois à venir j'enchaîne les sorties longues dans le froid, sous la pluie, tôt le matin, à jeun, dans la boue, à travers les champs, sous les bois. Je fais une CO de nuit avec la Tortue suivi d'un petit trail le lendemain matin pour m'entrainer à courir avec les jambes lacérées… heu… fatiguées, je fais les deux tiers de l'Origole pour savoir ce que c'est de courir toute la nuit dans des conditions plus que limites et je fais des sorties avec des Kikoureurs connaisseurs du Raid 28. Je teste mon matos, je m'entraine à courir en mangeant plein de trucs bizarres, je varie mes doses, je trouve un nouveau sac, je change de stratégie de course 14,000 fois et puis arrive le jour J.

Entre temps il ya eu Le Jeu (les majuscules sont importants) – 5 questions posées entre octobre et janvier – des vraies prises de tête comme je n'ai pas souvent vu avec des interludes et des blitz entre chaque question pour faire passer le temps… Je m'y prend vraiment et j'arrive à la fin avec un petit podium, tout cela ne sert qu'à donner le nom d'une ville ou nous passons lors du Raid et ne donne pas d'avantage réel mais c'était amusant.

Montparnasse, 14h le samedi 17 janvier 2009, c'est le lieu du rendez-vous. L'Hippo arrive de La Rochelle et la Tortue de Nantes, les 2 autres sont Franciliens comme moi. Tout le monde arrive sauf mais pas forcément sain car l'Hippo a une bonne vielle gastro et n'a rien gardé depuis la veille. Il dit qu'il va voir s'il arrive à manger qqc avant de décider s'il prend le départ ce soir…

Nous filons à Bures-sur-Yvette pour squatter un café pendant qqs heures et discuter stratégie – en gros les anciens combattants nous racontent leurs histoires de guerre et l'Hippo et ma pomme sourient poliment ;o) On a sorti les cartes et defs de l'année dernière et on s'est amusé à reporter les balises pour que je m'entraine un petit peu. Passage surprise du Poc au café ce qui m'a fait beaucoup plaisir car j'ai pu le remercier pour son aide pour la question "musicale" du Jeu et puis c'est un caractère intéressant.

L'après-midi passe vite, on a rendez vous au Pizza Hut aux Ulis pour un diner Kikourou – on est quarante et c'est très marrant de voir les gens qui se connaissant virtuellement depuis des mois se rencontrer enfin dans la vraie vie. Un plateau de pates et une ile flottante plus tard on retourne à Bures mais cette fois-ci on va au gymnase – lieu de départ de la course. Il est 20h et ca grouille de monde.

On trouve un petit coin ou on ne va pas trop se faire marcher dessus et on se change tranquillement, très vite il est temps pour les capitaines d'aller chercher les cartes et on va chopper une table pour reporter les balises. Nous prenons le choix de reporter assez de balises pour pouvoir courir jusqu'au petit matin, c'est-à-dire une soixantaine sur les 92 et ceci nous prends une heure, La Lib et l'Hippo partent faire le Prologue en attendant et nous rejoignent au gymnase. Je vois plein d'équipes partir au galop dès qu'ils ont la carte à la main, y'a qqs pros de l'orientation dans les équipes qui vont reporter en live entre chaque balise mais je suis réconforté par la stratégie choisi par la Tortue – j'aime bien savoir ou on va et comme ca j'ai pu bien participer  :-)

Il reste que 2 équipes sur les 57 dans le gymnase quand nous partons mais je ne suis pas inquiet car la course est longue et on s'est bien facilité la tache en faisant le reportage à l'intérieur, au sec et chaud car la météo ne s'annonce pas clémente cette nuit. Plusieurs fois on verra des équipes accroupies dans des stations service ou sous des arbres pour essayer de trouver un peu d'abris pour reporter.

Nous sortons et il fait plus chaud que je m'y attendais et, surprise, il ne pleut pas… je commence même à avoir chaud avec mes 2 couches alors je dé-zip tout. Je ne suis pas capable de décrire chaque balise mais y'en a certaines qui sortent du lot. Comme la 3 ou il fallait déjà se mouiller les pieds après seulement 10 minutes de course, la 10 uniquement accessible par un tunnel de 400m avec de l'eau glaciale jusqu'aux cou…des (pour certaines), celle ou il fallait que je mette le 'pitaine sur mes épaules pour qu'il poinçonne, la balise sur une ile ou j'ai failli mettre Koko à l'eau quand j'ai glissé avec elle sur mon épaule, la 19 qui était introuvable (et pourtant c'était une verte), celle ou j'ai foncé tout droit dans une eau immonde malgré le pont à moins de 2m de moi, en haut d'une tour avec une jolie vue du pays illuminé aux lampes frontales, la 42 qui a nécessité 750m de boue de plus avant qu'on la trouve, toutes les bleues de la CO précision (mes préférées malgré la fatigue dans mes cuisses) et puis il y'avait les Points de Contrôles toujours super bien accueilli malgré le froid, la fatigue, l'ennui, la pluie car les bénévoles sur cette course sont vraiment top; mais pas toujours de bonne augure… Le PC6 ou l'Hippo abandonne sans avoir pu ingurgiter quoique ce soit pendant toute la course, le PC7 ou Koko met fin à son aventure et le PC9 ou notre cher Capitaine démissionne, dépité par la tournure des évènements.

Ce qui laisse une Tortue dure comme sa carapace, dans sa carte et déterminée à nous mener à bout et un Ouster avec rien à perdre et tout à prouver qui n'est pas venu jusque la pour ne pas aller jusqu'au bout. Merde !

Seul problème : on est carrément à la bourre mais on décide quand même de faire le grand tour car il paraît que la CO c'est bon et il faut en manger. A 6h20 on retrouve l'Electron et Damodile qui nous ont préparé les spéciales mais qui ont fermé boutique, ils nous font pitié tout fatigué et froid dans leur voiture alors on n'insiste pas trop et on trottine vers la prochaine spéciale – en route on retrouve une balise de la première spéciale :-)

Des chasseurs nous déconcentrent au départ de la prochaine spéciale et on jardine pas mal avant de plier bagage et continuer notre chemin, car on est sacrément à l'arrache. On accélère un peu le pas pour ne pas trop déconner non plus mais le PC10 est à qqs kms et on et déjà à la barrière horaire. Lors d'une longue descente on double pas mal de monde qui visiblement vont abandonner au prochain PC, je croise Langevine et son équipe qui sont un peu incrédule quand ils nous voient cavaler comme des malades et se foutent carrément de ma gueule quand je m'arrête pour poinçonner une balise et je sprint pour rattraper la Tortue. On arrive au PC avec une demi-heure de retard sur la barrière horaire et on commence à négocier pour pouvoir passer, ils acceptent assez rapidement car on est hors compétition de toute façon et ils voient qu'ils vont devoir se mettre à plusieurs pour me foutre dans le bus…

On s'arrête pour reporter le reste des balises, ranger les affaires de nuit et manger un gros coup car on a bien la fringale. La Tortue sort la gourdasse bleue et ca nous remonte un tour aussi ! A partir d'ici on commence à remonter du monde, assez rapidement on voit une autre équipe devant nous et avec notre allure et l'efficacité de la navigation on les double vite fait bien fait. On ramasse une dizaine de balises assez facilement dans les 15 bornes qui suivent et on est reçu avec fureur à presque tous les PC – faut dire qu'on est pratiquement les derniers à passer et on est 2 alors ils savent que tout n'est pas allé sur des rails jusque la, mais on est toujours au vertical.

On arrive dans le bois de la Roche Turpin pour la troisième spéciale CO. La prochaine barrière horaire de 12h30 est à 3 ou 4km de la et il est 11h30, on n'aura pas le temps de tout faire mais on attaque à partir de la 6ème balise sur onze. C'est une CO précision ce qui veut dire qu'il peut avoir jusqu'à 4 balises dans les alentours de la vraie balise donc il faut bien lire la carte pour être sur à 100% que la balise qu'on choisi est la bonne. Très ludique comme exercice que la Tortue maitrise sans problème mais nécessite une bonne coordination d'équipe, en plus la forêt est très belle, il fait jour, il ne pleut pas, c'est juste dommage qu'on est contre la montre.

On sort de la au plus vite avec juste assez de temps pour atteindre le PC avant la barrière horaire mais c'était sans compter sur le terrain. Toute la boue (ou presque) qu'on n'a pas eu sur la première partie est concentrée sur ces 3km avec pas mal de D+ en plus. On croise un terrain de jeu de quads et motos trial – on aura dit la Somme en 14-18, des tranchés partout, des chemins impraticables, plus de végétation… horrible. J'étais furax quand j'ai pensé au fait que l'ONF nous interdit de passer la nuit dans la forêt et je vois de l'abus comme ça… Bref, on continue notre bonhomme de chemin et la Tortue décide de se baigner dans une ornière, tellement profonde et glissante qu'il n'arrive pas à s'en sortir tout seul. Un peu plus tard on croise le Bagnard et ses boulets, l'évadé et Lepidop n'ont pas l'air en forme et ils abandonnent au prochain PC qui n'est pas loin. On arrive avec 15 minutes de retard, une petite négo et on passe – l'avantage d'être à deux je suppose et puis l'état boueu de la Tortue ne motive pas trop les bénévoles à la mettre dans leur voiture toute propre.... On reporte le reste des balises et remange, un petit échange sympathique avec les bénévoles et on repart.

Il reste 20 bornes à faire en 3h30, le reste du parcours est assez simple, une bleue qu'on trouve sans problèmes, une verte qu'on ne trouve pas malgré une indication de l'Ourson, une côte super glissante avec des photographes en haut qui sont venu rigoler un petit coup et on continue à avaler les équipes qui trainent. Avec 6 ou 7 km qui reste j'ai le genou gauche qui commence à couiner, ca va quand je cours, faut juste ne pas faire de pauses alors quand la Tortue s'arrête pour vérifier la carte je fais les 100 pas pour ne pas refroidir. Très vite on est sur la dernière ligne droite, on zappe une balise pour faute de temps et on continue notre rando course. Il est 16h15, il nous reste un peu plus de 2km et l'heure limite est 16h30 – ca va le faire ! J'appelle la Lib pour le prévenir de notre arrivée, je penche la tête et je mets tout ce que j'ai dans les jambes. On redouble l'équipe du Raton Laveur et on suit l'Yvette jusqu'au bout de la course. La Tortue me rappelle de déguster ce moment et j'ouvre bien les yeux, j'écoute bien mon corps, je refais la course dans ma tête et je me rappelle de tout ce que j'ai fait pour en arriver ici et surtout de tout ce qu'a fait ma femme pour que je puisse être ici, les petits et gros sacrifices pour que je m'entraine et je parte tranquillement faire mes courses, les sms de soutien pendant la nuit, les appels d'encouragement, l'accueil chaleureux au retour à la maison…

Je vois l'arche d'arrivée et je ne sais pas quoi penser, je suis à la fois triste et soulagé d'arriver à la fin de ce Raid. Je vois le reste de l'équipe qui nous attendent sur la ligne d'arrivée et je suis ému qu'ils ont tous les 3 attendus toute la journée pour qu'on arrive, ils ont du s'ennuyer comme c'est pas permis mais je suis super content qu'ils sont la. On traverse la ligne à 16h25 et je vois plein de monde mais j'ai l'impression de planer, j'arrive pas à croire que j'ai terminé, j'ai même envie de continuer…

Quelques bols de soupe et une douche plus tard, assis devant mon assiette de pâtes entouré de Kikoureurs je ressens comme une sensation de calme avec juste un tout petit truc qui gratte… what's next…?

ouster

15 commentaires

Commentaire de la panthère posté le 22-01-2009 à 12:16:00

"j'ai même envie de continuer..." dis-tu....
pour t'avoir vu cavaler sur le parcours un grand sourire aux lèvres,tu as eu l'air de goûter pleinement ce raid 28, y'a plein de belles courses qui t'attendent....bravo! see you soon....

Commentaire de Khanardô posté le 22-01-2009 à 12:50:00

Ah, excellent le récit...
Je ne vais pas en mettre une couche supplémentaire sur le fameux fighting spirit, mais ce n'est pas l'envie qui manque !
Que dire ? Eh bien bravo. Bravo pour votre ténacité. Et merci pour ce récit tellement précis sur lequel flotte cet humour si typically....
;-)
Et à l'année prochaine, probablement...

Commentaire de l'ourson posté le 22-01-2009 à 13:12:00

Bravo Ouster ! Quelle brillante arrivée dans ce monde de doux-dingues ;-) Content de t'avoir revu, tu faisais plaisir à voir avec la Tortue peu avant l'arrivée :-)

Euh.. Compte tenu de tes zorigines britaniques, j'ai une idée pour ton nom de zanimal... en fait je pense à un nom d'insecte : "le criquet" ou "the cricket" :-) même si tu es plutôt gaulé comme un bourdon ;-)

L'Ourson_gaulé_comme_une_mouche_;-))

Commentaire de LtBlueb posté le 22-01-2009 à 13:35:00

Le bruit courait dimanche su radio kikou en tête de course que , votre équipe décimée, la Tortue continuait néammoins accompagnée d'un autre coureur...
Je voyais plutot la Lib en compagnie du carapacé et , mea culpa, je dois dire que j'avais très largement oublié la capacité de nos amis d'outre manche à aller jusqu'au bout !!

Un vrai plaisir de vous voir arriver tous les 2, avant le gong fatidique ! Pour du beurre, certes , mais Ô combien symbolique !

Chapeau à toi !

Commentaire de DJ Gombert posté le 22-01-2009 à 13:49:00

GOD save the mud !

Que dire, ... l'essentiel a été écrit, allez jusqu'au bout pour ne rien regretter.

Commentaire de L'Castor Junior posté le 22-01-2009 à 14:21:00

Ah, c'est facile, quand on est anglais et qu'on mesure près de deux mètres de ne pas se sentir abattu par les traversées de rivière et la pluie.
Reste le sourire permanent : une énigme.
Et, comme il n'est pas idiot, ce sourire, j'en déduis que tu es un chic type, et un coéquipier de choc ;-))
Très heureus de t'avoir rencontré en vrai : vivement les prochaines balades !

Commentaire de Petit-colibri posté le 22-01-2009 à 14:35:00

Bravo!!! CR très agréable à lire et au suivant...

Commentaire de _azerty posté le 22-01-2009 à 14:44:00

Good Game ;-)





Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 22-01-2009 à 20:43:00

Excellent ! J'ai vécu ton texte de l'intérieur. Toi et ton coéquipier avez été très forts !
J'ai noté cet anglicisme charmant : "et puis c'est un caractère intéressant." Very nice !

Commentaire de Le Bagnard posté le 23-01-2009 à 19:16:00

Bravo Ouster !!!!! le raid cette année en a tilté plus d'un, mais toi jamais Game over.
bravo et a bientôt

8-)

Commentaire de francois 91410 posté le 24-01-2009 à 20:42:00

bravo pour cette perf détonnante ! My God !

Commentaire de gdraid posté le 25-01-2009 à 19:47:00

Merci pour ce beau récit ouster.
Pas besoin de photos, rien que des mots , mais les bons !
jc

Commentaire de ETRURIEN posté le 26-01-2009 à 00:02:00

Bravo l'ami!

Voilà une folie douce qui s'insinue partout en vous comme la douceur d'une absinthe.....
Tu as donc "facilement" cédé aux courbes de la course d'orientation.

A plus

Commentaire de lepidop posté le 27-01-2009 à 17:03:00

Bravo pour ta ténacité. Ton bonheur faisait plaisir à voir à l'arrivée.
A l'année prochaine

Commentaire de langevine posté le 02-02-2009 à 17:53:00

quel mental de choc et quelle volonté cher Andrew!! Et toi qui me disait très modestement avant le départ n'avoir jamais dépassé les 30 et qq bornes.. et ben la prochaine fois je saurai à quoi m'en tenir!! ;-)
récupère vite et bien, et féliciation pour cette magnifique perf, votre sourire faisait largement plaisir à voir à votre arrivée!!
Bisous!!

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