Récit de la course : Ultra Trail du Mont-Blanc 2019, par Gilles45

L'auteur : Gilles45

La course : Ultra Trail du Mont-Blanc

Date : 30/8/2019

Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)

Affichage : 1763 vues

Distance : 171km

Matos : Kalenji en fringues et sac (10l)
Hoka Speadgoat 2

Objectif : Pas d'objectif

4 commentaires

Partager :

272 autres récits :

L'UTMB de la Team GILLOU

Prologue :

Il y a fort longtemps que je n’avais pas remis les pieds à Chamonix.

J’avais participé avec succès à la CCC en 2015, puis bâché sur cette même course l’année suivante (arrêt à Champex – fracture du moral et de la motivation !).

A cette époque j’étais chanceux au tirage au sort !

J’étais également bien décidé à tenter l’UTMB un jour ou l’autre.

La chance a alors tourné et j’ai enchaîné les déconvenues au tirage. Au final ce fut un mal pour un bien.

J’ai pris énormément de plaisir sur l’Echappée Belle 2017 et encore plus sur le GRP 160 en 2017. Entre ces deux mastodontes, j’ai découvert des courses géniales (GR73, Allobroges, Tiranges, Roc de la Lune…)

 

L’ambiance et les décors des Pyrénées m’ont tellement plu que le dilemme pour cette année est très fort. Je suis tiraillé entre le fait d’être pris d’office à la « grande messe » chamoniarde et l’envie profonde de me lancer sur les 220 kils Pyrénéens de l’édition 2019.

J’opte finalement pour la première possibilité en me disant que – compte tenu de la complexité croissante du mode de sélection – je n’aurai plus beaucoup d’occasion de découvrir cette course.

 

Alors, effectivement Chamonix c’est un gros barnum, c’est « m’as-tu vu », ça coute cher, c’est loin d’être le plus beau parcours mais l’enthousiasme est bien présent lorsque mon inscription est validée dès le mois de décembre.

 

Je comptais faire une préparation assez similaire aux années précédentes, mais des évènements de boulot, perso ne m’en ont pas donné l’occasion.

La rentrée trail se fait en douceur sur les 30 kilomètres du Sancy hivernal.

J’enchaine ensuite avec la version 90 km du Roc de la Lune où je parviens à aller chercher une 10ème place assez inespérée. Je suis d’ailleurs plus à l’aise sur les profils nerveux type Causses que sur des courses purement montagnardes.

Je suis inscrit comme chaque année au GR73 mais je ne pourrais malheureusement pas m’y rendre.

Dans le genre pas de bol, je dois aussi annuler mes 4 semaines de vacances en Corse sur Juin /Juillet. Habitant Orléans, c’était pourtant le spot idéal pour aller chercher un peu de D+. La course me confirmera un léger manque de puissance par rapport à l’an passé.

 

Le point positif – il y en a toujours – c’est que je parviens à m’inscrire à la Montagn’Hard 60 à la dernière minute (Merci Olivier91). La course sera arrêtée au 48ème km, mais j’ai pu faire du D+ et accrocher une raisonnable 11ème place (pour moi) à ce stade de la course.

Je profite de ce CR pour préciser que j’ai TOUT aimé sur cette course, à commencer par un parcours magnifique (ah la crête du Mont Joly…) et le village de St Nicolas.

 

L’entrainement D+ sera complété par une sortie en OFF au Mont Dore de 45km/2700D+ fin juillet et d’une demi-douzaine de sorties aux 25 bosses pour y faire le hamster.

 

Bref, je me présente à Chamonix avec une confiance correcte malgré mes petits 30.000m de D+ depuis le début de l’année (et environ 10.000 en vélo). Ce n’est pas le top mais j’ai fait au mieux.

 

Arrivée sur Chamonix :

J’ai pu m’arranger pour me libérer du taff et arriver sur Chamonix le mercredi en milieu de journée. Ma femme est arrivée depuis quelques jours avec des amis, les 4 enfants sont restés à Orléans, en « garde » chez des amis (merci à eux).

Ma team est logée dans le très beau chalet qu’un ami a eu la gentillesse de nous mettre à disposition. De mon côté je suis dans un petit AirBNB dont je connais le propriétaire (ma réservation était validée de longue date, et je suis un grand solitaire)

 

Je profite de l’après-midi pour aller récupérer mon dossard et faire vérifier le matos. La file d’attente est assez impressionnante vers 16h mais au final, grâce à une organisation parfaitement rodée, tout se passe sans encombre.

 

Je fais ensuite un tour au salon du trail mais la foule, le bruit, le business poussé à l’extrême me saoulent très rapidement

La soirée et la journée du jeudi seront en mode on ne peut plus cool : Traîner au lit, bouquiner, faire, refaire, rerefaire mon sac de course et mon équipement.

Je prendrai également beaucoup de plaisir à aller encourager les magnifiques finishers de la TDS.

J’en profite aussi pour faire le point avec ma fidèle « Team Gillou » qui va me faire l’assistance durant la course.

Peut-être que certains parmi vous les auront croisé avec leurs t-shirts roses à différents points de la Course et une grande banderole.

 

Pour vous donner une idée de la logistique de « la team » durant la course :

Présents au départ

Puis navette de l’organisation pour Saint Gervais & Les Contamines

Retour à Chamonix par la Navette

Départ à Courmayeur en voiture par le tunnel du MB, dodo dans une tente près de la base vie

Voiture puis randonnée jusqu’au refuge Bonatti pour me soutenir

Enfin, présence à : Champex – Trient – Vallorcine – Arrivée

Là aussi c’est un sacré Ultra. Ils ont été incroyables

 

Bref tout pourrait sembler rose à ce stade de la course mais je suis méchamment stressé par des douleurs que je traîne depuis quelques semaines aux deux tendons d’Achille (impression d’un élastique trop court) et aux adducteurs (ça c’est habituel pour moi).

Je fais des soins, je masse régulièrement mais l’expérience commence à me montrer que plus une échéance importante approche, plus le moindre petit bobo semble prendre des proportions énormes (je ne suis pas le seul hein ?). Donc je relativise en me disant que je psychote sans doute un peu

Au final la course se passera bien…de ce point de vue-là du moins.

 

Vendredi enfin :

Le manque de sommeil en course étant ma hantise (je suis régulièrement sujet aux insomnies), je suis ravi de faire une nuit magnifique et non-stop de 22h30 à 6h30. Là aussi la journée sera cool et basée sur la glandouille jusqu’au repas du midi. Le programme assez précis :

13h30 – Déjeuner

14h – Sieste

14h45 – Je m’équipe

15h15 – départ du gite (A 800 m du centre) en me promettant de revenir « en vainqueur » de cette course

16h00 : j’ai déposé le sac d’allègement et je suis au départ (avec deux heures d’avance…et je suis loin d’être dans les premiers).

 

L’attente sur la ligne de départ passe finalement assez vite, il y a tellement de choses à observer :

Le trailer sans gêne qui tente de te pousser pour s’installer à côté de toi sur le trottoir

Le trailer japonais qui malgré l’orage d’avant course reste assis par terre, les yeux fermés, imperturbable de zénitude

Le trailer suréquipé : petit coussin pour s’assoir sur le sol, assisté de madame qui tient le parapluie

Le trailer espagnol qui parle, qui parle…

Les familles qui papotent…

 

Bref, c’est top sa passe vite.

Tiens voici désormais un contrôleur qui choisit des coureurs au hasard pour contrôler le matériel obligatoire.

Je me dis que ça va être pour ma pomme…Bingo. Obligé de vider l’intégralité du sac pour faire contrôler TOUT le matériel.

Ce dernier me dit : « ne t’inquiète pas, je te mets une gommette sur ton dossard, tu ne te feras plus contrôler de la course ». Bien sûr !  Nous en reparlerons aux Chapieux…

Alors que le temps est au beau fixe depuis plusieurs jours (si ce n’est une averse le jeudi soir), le temps se couvre, l’orage monte.

Nous essuyons une averse qui fait monter le stress dans les rangs et  chuter le thermomètre mais au final elle nous rafraichie plus qu’autre chose.

La grande majorité s’équipe de la veste imperméable, ce que je ferai également, mais nous pourrons quasiment tous nous remettre en t-shirt à 10 minutes du go.

 

En ce qui me concerne, il n’y aura plus une seule goutte de pluie par la suite.

 

A 10 minutes du départ, l’animateur commence à sérieusement chauffer l’ambiance. C’est un peu grandiloquent, mais il est vraiment bon dans son rôle. J’ai une vue légèrement en surplomb, je suis bluffé par le monde (spectateurs) massé dans l’hyper centre de Chamonix.

Lorsque la fameuse musique « Conquest Of Paradise » démarre, le silence se fait, les visages se ferment, les yeux s’humidifient un peu partout autour de moi. Ce départ c’est quelque chose quand même.

Je me recentre quelques secondes, je pense à mes proches, aux raisons de ma présence ici, je me promets d’en profiter un max et de passer cette ligne « en vainqueur » d’ici 2 jours.

Je crois me souvenir d’avoir poussé un cri au moment de m’élancer

 

Chamonix – Les Houches – Saint Gervais :

Lors du départ, je suis dans le premier quart de la course. Comme tout le monde je marche sur les premiers mètres, mais je ne piétinerai pas aussi longtemps que je ne l’avais imaginé. La Team Gillou est au bord de la route, à côté de la fontaine centrale. Je suis tellement dans mes pensées que je les rate quasiment.

Les deux premiers kilomètres sur le bitume sont l’occasion de dérouiller des jambes qui n’ont rien fait depuis 9 jours. Nous courrons de manière assez cool à 13-14 km/h, avec qq avions de chasse qui semblent déjà très pressés.

Les spectateurs tendent leurs mains, sont à fond, il faut vraiment se canaliser pour éviter de bruler des cartouches

 

Pour l’anecdote, avant d’entrer dans les sous-bois, nous avons longé un bar dont les serveurs nous proposaient des bières pression « sur un plateau ». Je n’ai pas de vu de trailer se servir mais j’ai appris par la suite que Sangé Sherpa, pourtant dans le plateau élite, s’était arrêté pour en profiter.

Le parcours en lui-même est vraiment extrêmement très roulant, le bord de l’Arve plongé dans la brume, a cependant du mal à apporter de la fraicheur en cette fin d’après-midi.

La météo est chaude est humide.

Je suis aux Houches en 41 minutes (342 ème). Je n’ai pas vu passer cette partie.

 

Je ne m’arrête pas au ravito et continue tranquillement mon petit bonhomme de chemin.

Paradoxalement, je vais beaucoup apprécier la partie suivante alors qu’elle est très peu évoquée dans les récits.

La montée vers le Deleveret est douce et offre une vue vraiment splendide au fur et à mesure que nous prenons de l’altitude. Le sommet arrive relativement vite dans une lumière orangée assez jolie. A ce stade de la course les spectateurs sont encore assez nombreux, les enfants tapent dans nos mains. Dans le peloton, la concentration est forte, ça ne discute pas beaucoup entre coureurs (je trouve d’ailleurs que ce sera une constante sur l’ensemble du parcours).

 

La descente vers Saint Gervais est d’abord assez raide sur des pistes de ski, puis emprunte un chemin un peu plus étroit. Cette section est forcément piégeuse si on se laisse emporter par l’euphorie. J’ai bien en tête de préserver mes quadris.

Je descends derrière un trailer dont le nom me dit quelque chose : « René Rovera ». Après vérification sur Google je percute que c’est un ancien triathlète de niveau international.

Nous sommes ensemble à ce stade…il finira dans le top 25 de la course et 1er M2… comme quoi…on n’a pas la même qualité de gestion de course (et de niveau)

 

L’arrivée dans Saint Gervais est exceptionnelle, c’est le tour de France, peut-être la plus belle ambiance de la course. Il faut vraiment être vigilant à ne pas se laisser griser par l’adrénaline.

Arrivé près du ravito, ma team fait un boucan pas possible. 2 amis trailers d’Orléans se sont joint à eux pour m’accueillir. Le speaker attiré par tout ce boxon viendra m’interviewer qq secondes. Sympa même si je ne sais pas quoi dire

Je me dirige vers les tables pour me rendre compte que je n’ai absolument pas touché à mes flasks en presque 2 heures…oups…pas bon pour la suite

Saint Gervais – 20h18 – 267ème

 

Les contamines – ND de la Gorge – La Balme – Col de la Seigne :

La suite d’ailleurs elle arrive vite et se révèle assez désagréable pour moi. Après l’euphorie précédente, je me sens assez lourdaud sur cette portion. Ce n’est jamais très plat, ce n’est jamais très raide. J’ai du mal à savoir s’il faut courir ou pas. Je sens que les deux heures passées sans boire sont une erreur de débutant.

La nuit tombe j’ai du mal à prendre mes marques (je suis myope et je n’ai pas de lunettes pour courir, la transition jour nuit est pénible)

Les contamines arrivent assez rapidement néanmoins. L’ambiance autour du ravito est moins sympa, les accompagnants sont assez éloignés. Seule personne en charge de mon assistance – Juliette - pourra m’approcher (bon, vue la foule, ça se comprend).

Je profite de sa présence pour changer de t-shirt, mettre un gilet sans manche et repartir au sec pour la nuit. Les Contamines – 21h41 – 268ème.

 

Après quelques kilomètres assez plat, le chemin commence à s’élever doucement. J’arrive rapidement à Notre Dame de La Gorge et son traditionnel feu de bois puis embraye sur la montée vers la Balme. Les sensations sont toujours assez moyenne, je pioche en montée et peine à suivre une concurrente que j’ai déjà croisé (Sabrina Cachard) qui finira dans la course en 30h !

En général, je cours sans bâtons, ils sont simplement attachés à mon sac et ne me servent jamais, sauf gros coup de bambou. Cette fois je décide de les prendre, le résultat est quasi immédiat.

Je suis beaucoup plus à l’aise, je parviens à trouver enfin mon rythme en montée.

 

Il y a souvent deux types de ravitos :

-        Ceux que l’on voit de loin et que l’on a l’impression de ne jamais approcher

-        Ceux que l’on découvre au dernier moment.

C’est ce second cas pour celui de la Balme, dont je découvre les tentes oranges juste à la faveur d’une sortie de raidillon. A ce stade de la course je parviens à prendre quelques morceaux de fromage et de charcuterie. Ce sera le dernier « solide » avant bien longtemps.

La Balme – 23h12 – 288ème

 

Je vais prendre beaucoup, beaucoup de plaisir sur la montée de la Croix du Bonhomme. Je ne force pas car j’ai décidé de me gérer le plus longtemps possible. Le moral est bon, les pieds, les jambes, l’estomac. Je me suis mis à boire car ce temps chaud humide déshydrate beaucoup.

Je précise d’ailleurs que je ferai l’intégralité de l’UTMB en manches courtes avec manchons de temps en temps. Le col du bonhomme et la croix du bonhomme offrent une vue magnifique sur le ruban de frontale.

Bonhomme – 00h33 – 287ème

 

J’avoue avoir assez peu de souvenir de la descente qui mène vers le Chapieux, je suis incapable de vous en parler. Je sais juste qu’arrivé aux Chapieux…contrôle du matériel obligatoire.

Je précise au chef de poste que j’ai été contrôlé dans le sas de départ. Il me fait comprendre qu’il n’en a pas grand-chose à faire.

Bref, je me soumets (pas le choix de toute façon). La bénévole est charmante et le contrôle rapide. Je crois qu’il y avait de la musique à fond également

Je profite de ce ravitaillement pour prendre une soupe + pates (plus tard ce sera soupe + riz) quasiment le seul aliment que je vais prendre sur l’ensemble de la course.

Ah si…je profite de l’excellente idée d’avoir mis de la pastèque aux ravitos pour me gaver. Un régal !

 

Les Chapieux – 1h12 – 303ème

Sur cette portion, je perds quelques places mais je cherche surtout à bien m’économiser après un départ que j’estime trop rapide et mal géré niveau boisson/bouffe.

 

La partie qui suit les Chapieux est globalement sans intérêt de mon point de vue. Je discute d’ailleurs avec un « collègue » de nombre de passages « bitume » que nous nous sommes déjà enquillés. Comparé à la Montagn’Hard, au Pyrénées, le parcours n’est vraiment pas très fun pour l’instant. En y ajoutant la nuit et le manque de point de vue, c’est une petite déception.

 

La montée vers le col de la Seigne est la première difficulté qui me vient en tête à la rédaction de ce récit. Je trouve la montée interminable. Certes le ruban de frontale est toujours magnifique mais que c’est long.

Néanmoins au sommet, j’ai une avance de 40 minutes sur le temps de passage que je m’étais fixé. J’ai conscience d’être globalement bien en rythme cependant car je double de manière assez régulière des coureurs que je trouve déjà bien entamés.

Col de la Seigne – 3h08 – 275 ème

 

La partie suivante m’intrigue, car j’ai beaucoup entendu parler de la technicité des Pyramides calcaires.

Effectivement, après une brève descente, nous remontons dans un sentier marqué par les blocs rocheux et cailloux en désordre. C’est plus technique que ce qui a précédé mais ce n’est pas non plus Belledonne (col de la vache, mine de fer). La descente est du même tonneau, ce qui la rend assez ludique. Il faut faire gaffe à ne pas se faire une cheville sur un mauvaise appui

Il est tard (ou tôt car c’est bientôt le petit matin) mais cela a le mérite de me réveiller en requérant toute mon attention et ma concentration.

Je suis très heureux à ce stade de la course car je n’ai pas vu passer les heures et les sensations sont aussi bonnes que mon état de fraicheur. Seul hic, je fonctionne essentiellement au liquide, je ne parviens pas à m’alimenter.

Le ravito du Lac Combal est visible d’assez loin, j’y arrive à 4h35 – 268ème.

Le schéma est le même : Coca – eaux gazeuse – soupe.

Je bois énormément, ce qui va sans doute me pénaliser par la suite, je me demande avec le recul si je n’ai pas saturé mon estomac.

 

Au redémarrage vers l’Arête du Mont Favre, il ne faut pas traîner car la fraicheur est réellement présente dans cette zone humide.

Là encore, j’ai peu de souvenir de cette montée, elle ne m’a pas réellement marqué par sa difficulté.

Je me souviens juste avoir éprouvé un petit sentiment de déception.

J’ai tellement entendu parler de la beauté de ce coin que je suis frustré d’y passer de nuit.

 

J’ai maintenant hâte d’entamer la dernière descente avant la base vie et le retour auprès de team Gillou. Je trouve la descente assez douce jusqu’au col Chécrouit puis franchement plus raide ensuite.

L’arrivée sur Courmayeur est assez technique avec des marches et des rondins glissants. L’avantage c’est que le dénivelé baisse rapidement et franchement.

Je partage cette descente avec deux coureuses Chinoises qui impriment un bon rythme.

Le lever du jour me donne un net regain d’énergie

Je comptais arriver à la base vie vers 7h30, je serai en avance

Courmayeur – 6h50 – 256ème

 

 

Courmayeur – Champex :

 

Jusqu’ici, la course s’est parfaitement déroulée. Les 80 premiers km et la nuit sont finalement passés assez vites. C’est un point de satisfaction, mais j’éprouve quand même la déception d’avoir surtout profité du faisceau de ma lampe. Je choisi souvent mes courses en fonction de la beauté des paysages alors…

 

La base vie de Courmayeur est relativement vide et calme. La récupération du sac est très bien organisée : un bénévole crie votre N° de dossard, un suivant vous le transmet au passage. J’ai prévu de changer de chaussures ce que je ne ferai pas, mes Speedgoat me vont bien et iront jusqu’au bout.

 

Mon assistance, après avoir quitté Chamonix, est venue planter la tente vers 1h du matin près de la base. Hélas pour eux, ils ont tenté de dormir près du passage des coureurs. Donc leur nuit fut rythmée par les encouragements incessants à destinations des élites et des suivants.

Bref, je rejoins Juliette qui va m’aider dans mon organisation : Changement de t-shirt / Red Bull / soupe / salade de fruit en conserve.

Tout cela s’est beaucoup de liquide et peu de solide. Je vais le payer un jour…

Je profite aussi d’un massage des mollets et des cuisses qui me fera énormément de bien.

J’avais prévu 45 minutes de pause à Courmayeur, finalement je repars en 25 minutes.

 

La sortie de la base vie est un peu compliquée, il fait frais en ce petit matin et la traversée de Courmayeur sur le bitume (encore !) n’est pas très glamour.

 

J’attaque cependant assez frais la montée vers Bertone. C’est du direct, je n’aurais pas eu froid très longtemps. Je suis très heureux de profiter des températures du matin car en plein soleil ce ne doit pas être la même musique. Le sentier est assez technique avec quelques racines et une érosion assez marquée. La montée est franche et régulière. Lorsque nous sortons des bois, le refuge est assez rapidement attrapé. Les bénévoles sont au petit soin comme d’habitude et c’est magnifique. De mon côté je serai bien resté dans l’herbe à profiter de la vue mais j’ai encore de la route

Bertone – 8h33 – 236 ème.

 

A partir de maintenant, je connais l’intégralité du parcours qui reprend celui de la CCC.

J’apprécie énormément la partie suivante, un sentier en balcon magnifique qui nous emmène à Bonatti. La vue sur le versant italien du massif, sur les Grandes Jorasses est splendide.

Ces kilomètres ne présentent pas de technicité mais leur difficulté réside dans le fait de soit courir pour garder un bon rythme soit marcher pour s’économiser. Dilemme.

Je prends le parti de suivre deux coureurs Espagnols dont l’un…équipé d’un kit piéton est constamment au téléphone et gère les affaires familiales avec madame…

Cela gâche un peu la quiétude du moment mais fait passer le temps et accessoirement bien rigoler.

 

Je suis impatient d’arriver sur Bonatti où ma troupe est venue me rejoindre après une randonnée de 45 minutes. Je souhaitais absolument leur faire découvrir cet endroit que j’adore.

Après un dernier raidillon j’y suis enfin.. La vue sur les glaciers est à couper le souffle, la météo s’annonce très belle

Bonatti – 9h44 – 233ème

 

Ce ravito est idyllique en termes de point de vue. L’organisation est par contre intransigeante sur la séparation entre les coureurs et les accompagnants. C’est dommage car nous ne devons être que 4 ou 5 coureurs grand maximum mais la règle c’est la règle après tout.

J’échange donc de part et d’autre d’une barrière. Je m’enfile une bouteille de Quézac fraiche qu’ils m’ont apporté et zou.

 

La partie suivant est rapide et passe extrêmement vite. Je suis assez surpris de la brièveté de la descente sur Arnouvaz. Cette dernière est ludique, assez technique, je passe crème !

Globalement tout va bien mais je sens poindre un léger coup de bambou et un petit coup de chaud : Pas d’alimentation depuis le départ + un soleil qui monte…hum, ça ne sent pas bon pour la suite

Arnouvaz – 10h38 – 233ème

 

La sortie c’est du brutal direct, le Grand Col Ferret dont le sommet marque l’entrée en Suisse est bien décidé à me faire payer un droit de passage. Dès les premiers lacets, je suis planté dans la pente. La première partie est très raide, je suis courbé sur mes bâtons. Je cherche du regard le sommet, mais je n’arrive pas à le situer. D’ailleurs, il ne vaut mieux pas car la vision des coureurs qui me précèdent est assez décourageante. Beaucoup de randonneurs sont présents sur le sentier, j’arrive quand même à les doubler ce qui me rassure à minima

En rattrapant un groupe de deux coureurs, je prends le partie de ne pas doubler et de les suivre jusqu’en haut. Au final le pointage m’indique un gain de place assez significatif que je mettrai plutôt sur le compte d’un arrêt assez court au précédent ravito.

Je suis dans le dur, mais lorsque j’observe mes comparse, je constate que je suis loin d’être le seul, maigre consolation mais à ce stade de la course c’est important de se dire que tout le monde a mal aux jambes. J’ai 1h d’avance sur ma prévision. Les 33h sont possibles.

Grand Col Ferret – 11h57 – 223ème

 

Au sommet, une pause s’impose. Je redoute énormément la partie suivante qui m’avait complètement usée en 2016 et causée mon abandon à Champex. J’ai beau tenter de manger une Pompote, je sens que je suis très entamé.

Sur un Ultra on est forcément dans le dur à un moment ou un autre, je sens que c’est maintenant et que ça va durer.

En effet, je vais avoir beaucoup de mal à garde le rythme. J’alterne entre course de 30 secondes, marche, marche rapide avec les bâtons. C’est con que cela arrive à ce moment car cette section est propice à de gros gains ou de grosses pertes de temps

Lors du passage à la Peule où un ravito non officiel est organisé, je bois une grande quantité d’eau. Je sens que je suis complètement déshydraté.

J’ai du mal à trouver du plaisir sur ses sentiers qui ne présentent aucune technicité et qui m’ennuient profondément. Pourtant la Suisse est magnifique mais là j’ai d’autres chats à fouetter

Lors de l’arrivée à la Fouly, je ne relance même pas sur la partie bitumée.

Je n’ai pas réellement perdu de place, ce que je mettrai en relation avec les nombreux abandons qui commencent à tomber (plus de 900 au global)

La Fouly – 13h24 – 224ème.

 

A la Fouly, je cherche la team Gillou du regard, mais ils n’ont pas eu le temps d’arriver et ont préféré partir directement sur Champex. Je tire mon chapeau aux coureurs qui font la course totalement sans assistance car ce n’est pas la même musique. Je suis beaucoup moins efficace, je continue un régime eau, coca, pastèque, mais toujours pas de vrai solide. Je squatte un peu sur un banc mais le redémarrage est vraiment difficile.

 

La suite va se résumer à une longue marche rapide dans les chemins larges et sur la route (oui oui, encore du bitume) jusqu’à la montée vers Champex.

Dans ce chemin de croix, je trouve quand même quelques moments sympas, comme ces enfants qui ont improvisé un ravito avec « la meilleure eau de Suisse et de France » à la sortie de Praz le Fort

Je redoute énormément la montée vers Champex : sur le roadbook elle ne ressemble à rien, mais elle vient après 24 km de descente, elle est étouffante et jonchée de racines.

Heureusement, je crois apercevoir quelques maisons en altitude, légèrement sur ma droite ce qui me permet régulièrement d’entrapercevoir l’arrivée. Je suis avec une jeune femme avec qui nous alternons pour prendre le lead

Enfin : arrivée au ravito…ah non, il reste un coup de cul à passer. La base vie est en surplomb de la route sur laquelle nous débouchons.

A mon arrivée, je rejoins ma team…je suis FRACASSE

Suisse 1 – Gilles 0

Champex – 16h10 – 233ème

 

Champex – Chamonix :

A partir de là, c’est le plan ORSEC pour mon équipe qui me prend en main. Il y a plein de choses à faire mais nous le ferons dans une sorte de désorganisation générale : Boire (beaucoup), manger (un peu – salade de fruit en conserve). Tentative de sieste de 20 minutes dans une tente pendant que Juliette me masse les jambes.

Je rencontre depuis quelques temps une douleur sous le pied gauche. A mon réveil, je décide de mettre de la NOK et là surprise : J’ai une fissure sous la plante des pieds qui part de la base des orteils et descend quasiment jusqu’au talon. C’est ouvert au sang.

Cette fois c’est direction tente du podologue qui tente de me soigner. Puisque je suis là, autant ce faire manipuler par un kiné. Le chrono défile mais je tente de garder mon calme. Repartir sera déjà une victoire car sur le moment j’ai une motivation assez faible.

 

Ces soins font quand même du bien mais lorsque je repars c’est un « pit stop » de près d’une heure et un moral dans les chaussettes.

A ce stade je ne suis vraiment pas en condition pour repartir, dès que je me lève, je suis contracté derrière les genoux et les cuisses. J’ai du mal à me redresser

Le fantôme de mon abandon en 2016 ressurgit.

Heureusement, ma femme me booste (synonyme de coup de pied au cul) et toute mon équipe m’accompagne sur les premiers hectomètres.

Je ne suis pas blessé, je suis très loin de BH et finalement, je suis encore dans mon plan de course car j’avais pris plus d’une heure d’avance au Grand Col Ferret. Il est donc bon de prendre du recul et de relativiser la situation : le gros de la troupe de trailers est derrière et j’ai largement le temps de me refaire.

 

Ils me suivent sur les bords du lac, chantent derrière moi ce qui provoque aussi l’hilarité des spectateurs (une chanson spécialement créée pour l’occasion). Pour tout vous dire mon équipe est équipé en rose avec des T-shirts Gillou / ils ont créé une banderole…bref, tout un pataquès qui me force à faire bonne figure. Mine de rien ça booste.

 

Néanmoins, j’arrive sur la phase la plus difficile de mon UTMB. La descente vers le Plan de l’Au se fait en marchant ce qui est hyper frustrant tant c’est roulant et là arrive…la montée de Bovine. Ah Bovine, je ne l’avais pas oublié celle-là.

 

Alors cher lecteur Bovine, comment dire…quand on est mal et en plus quand il fait jour c’est terrible.

Je me remémore une sorte de tranchée verticale qui s’élève devant moi et n’en finit pas

Je me remémore des marches où il faut lever les genoux. Je me souviens de calculer au centimètre près où passer pour faire le moins d’effort possible.

Ma montre est tombée en rideau, tant mieux, je ne verrai plus ma vitesse ascensionnelle.

Je n’ai plus de jus. L’essentiel de ma montée sera destinée à réfléchir à la problématique suivante : « Comment annoncer à mon groupe que je vais abandonner à Trient ?».

J’avance toooouuuuut doucement en ressassant mes idées noires.

Lorsque j’arrive sur un alpage, je tombe sur un berger et sa famille dans un isolement le plus total, ils sont entourés de vaches et m’offrent la possibilité de boire au tuyau de leur abreuvoir. Leur maison c’est le chalet d’Heidi, j’adore !

Je continue promptement (ou presque) avec un candidat chinois qui va se trouver en panique quelques mètres plus loin :

 

Au sommet d’un raidillon, une magnifique vache de combat suisse est plantée au milieu du chemin. Il est tétanisé par la musculature et les cornes du bestiau. Je lui explique qu’il peut passer doucement à côté. Finalement, c’est un groupe de 4 qui arrive bien entamé au sommet de bovine et entame une courte descente vers le ravito de la Giète.

La Giète – 20h05 – 286ème. L’heure de repartir au fight

 

C’est à ce stade que je commence à basculer psychologiquement vers quelques choses de plus positif. Il reste deux gros machins à passer, 2000D+ grand max. ça se tente !

 

Et puis…

Je ne veux pas priver mon équipe du bonheur de passer la ligne d’arrivée avec moi

Je ne veux pas avoir à me trouver des excuses pour abandonner et justifier mon abandon auprès des autres.

Je ne veux pas revivre les semaines de frustration qui avait suivi mon abandon de 2016.

En plus de cela le jour qui commence à baisser apporte de la fraicheur et propose des vues magnifiques sur la Suisse. Je commence à profiter de l’instant présent.

Quelque chose me dit que ça va le faire quand même

 

Le ravito me fait du bien. Pour la première fois je m’alimente correctement. Le sentiment d’être constamment en déficit hydrique s’efface peu à peu et la saturation de mon estomac s’estompe.

Je serai assez agréablement surpris par la descente sur Trient : Certes c’est très raide, les marches font mal mais cela a la mérite de nous amener plus vite en bas. Je suis d’ailleurs heureux de rebasculer en mode nuit

Lorsque j’arrive en ville, mon équipe fait déjà un bazar pas possible. Ils se sont fait connaître, ils ont pris l’apéro avec les kinés et podos, bref, tout va bien pour eux.

Je suis passé de 1h d’avance sur mon plan à une heure de retard, mais au final ce n’est rien. D’ailleurs à partir de là je ne perdrai plus de temps sur les prévisions en dépit de pauses longues

Trient – 21h00 – 288ème

 

Je sens que je pourrais faire un stop assez bref, mais la fissure sous le pied + la dizaine d’ampoules sont assez pénalisantes. Après un ravito et un change assez complet, je file au pôle médical. Là-bas, ça ne va pas chômer : Massage, injection d’éosine dans le pied, soins…Lorsque je repars je suis raide comme un bâton mais :

-        Je sens qu’après quelques mètres cela va se détendre

-        J’ai désormais la certitude que rien ne m’empêchera d’aller au bout du truc.

 

Dès la sortie de Trient, je repère un groupe de 4 coureurs avec un bon rythme, dont deux gars du sud est qui parlent non-stop. C’est l’idéal pour moi. Je me cale dans leurs pas, je prends le train pour me faire tirer dans la montée et me change les ides avec leur conversation.

La montée de Catogne est raide, certes, mais présente l’avantage d’être plus régulière que Bovine. C’est dans un état un peu second que j’arrive au ravito des TSEPPES, je me demande même si je n’ai pas somnolé en marchant

NB : attention aux futurs participants, la bergerie est basse…je me suis éclaté le crâne à l’intérieur. Là aussi, je peux manger un peu de tout, boire. Les bénévoles sont à fond

Je compte enquiller la descente vers Vallorcine, mais là, une mauvaise surprise que j’avais totalement zappée…ça ne descend pas mais monte encore de 150 mètres de D+.

Les Tseppes – 22h57 – 302ème

 

J’ai assez peu de souvenir de la descente vers Vallorcine si ce n’est que je l’ai partagée avec pas mal de coureurs asiatiques mais surtout qu’elle était interminable. Le D- descend lentement, je n’aperçois pas la ville, les passages sous des télésièges me rassure quand même sur le fait que je ne dois plus être trop éloigné de la civilisation.

Quelques sentiers sont assez techniques et ludiques. Cette fin d’UTMB (depuis Bovine) offre un parcours plus marrant.

J’avais gardé le souvenir en 2016 d’une descente finale droit dans l’herbe qui m’avait fusillé les quadris, ce ne sera pas le cas cette année.

L’arrivée dans la ville se fait par un autre accès. J’arrive fatigué mais serein auprès de ma team.

Vallorcine – 00h22 – 297ème

 

 

Vallorcine ouah…la tente c’est un mouroir où il fait 35°c saturés d’humidité. Faut pas trainer.

Les pieds sont encore assez douloureux et l’état de fatigue bien présent.

Je vais une nouvelle fois mutualiser les choses : 10 minutes de sieste sur un lit de camp pendant que ma super assistante me masse les jambes avec de l’arnica.

Je crois avoir réellement dormi profondément, c’est elle qui me réveille

En bonus, j’ai pu manger en quantité et de tout

De la Nok et hop c’est reparti.

Décidemment j’aurai passé beaucoup de temps aux ravitaillements. Entre Champex – Trient et Vallorcine c’est quasiment deux heures de perdues (mais investissement rentable !)

 

Il est désormais l’heure d’aller affronter le dernier morceau de la course et pas des moindre, la Tête aux Vents. Je sens un très net regain d’énergie depuis que j’ai pu m’alimenter.

Le démarrage de Vallorcine reste néanmoins assez prudent, je suis un couple sur le chemin facile et régulier vers le Col des Montées.

Le ruisseau apporte énormément de fraicheur, c’est très agréable. La vision des frontales plus haut dans la pente est très impressionnante mais…pas décourageante, c’est bon signe

 

La route est traversée et ça démarre direct dans le dur. Finalement je suis relativement bien. Je suis très concentré sur le fait de bien poser les pieds de manière stratégique pour éviter les trop nombreux levés de genoux. Je fausse rapidement compagnie au groupe dont je mène l’allure. J’ai adoré le sentiment de me retrouver seul dans la pente pour profiter de cette montée.

Certains passages restent assez techniques, il faut mettre les mains. J’en avais gardé un souvenir très rude lors de mon passage en 2015, cette fois cela me semble plus facile.

 

Arrivé vers 1700m/1800m, le profil change. Finie la grosse pente, place désormais à un passage légèrement montant très technique entre les blocs, les cairns…

De mon point de vue, avec la fatigue, c’est plus complexe que les pyramides calcaires.

Cette partie de nuit est sauvage, lunaire. Une boite de nuit tout en bas de la vallée (argentière ?) laisse monter de la musique techno, ajoutant encore à cette ambiance si spéciale

C’est sans doute dommage de ne pas profiter des aiguilles rouges de jour mais qu’importe.

Je suis très heureux quand j’aperçois la tente du pointage.

La Tête au Vent – 3h09 – 304 ème

 

Une fois le pointage passé, j’avais le souvenir de 3 kilomètres très pénibles jusqu’à la Flégère…bon…c’est toujours le cas car il est très difficile de courir mais le fait de se rapprocher de l’arrivée est un vrai vecteur de motivation. Je parviens à retrouver « du pied » et à sautiller de pierre en pierre

La dernière pente de cet UTMB se présente enfin. Je sais que je ne vois pas le ravito mais qu’en haut de cette piste de ski j’y serai.

Ce raidillon est avalé avec beaucoup d’aisance

Je serre le point face à la caméra car je sais que l’écurie est proche.

La Flégère – 3h59 – 302ème

 

J’hésite à me poser mais je stoppe quand même 10 minutes (ce qui me vaudra de perdre ma place dans les 300 mais ça je le découvrirai une fois la ligne franchie…et je m’en moque un peu à vrai dire).

Lorsque je repars, je rentre dans un certain flow que j’apprécie vraiment en trail.

Les jambes sont légères, je vais mettre moins d’une heure désormais pour franchir la ligne (le pointage est pris à l’entrée du ravito) alors que j’avais mis 1h15 pour la CCC.

Je ferai toute la descente en trottinant d’abord sur une piste de ski puis dans un single encore relativement piégeux après avoir basculé sur la gauche.

Les lumières de la ville sont bien visibles, c’est magnifique. J’ai vraiment le sentiment à ce stade que je pourrais courir encore très longtemps ce qui sera confirmé par l’absence de courbature le lendemain de la course.

 

Au chalet de la Floria, je sais que le chemin ne présente plus de technicité. Je cours, que dis-je, je vole…bon, à 12-13km/h seulement j’imagine.

 

Malgré tout, j’ai aperçu deux frontales derrière moi, je mets un point d’honneur à ne pas me faire rattraper, ce que je parviendrai à faire. Avec le recul, j’aurais aimé me détacher de ce côté « compet » et profiter encore plus des derniers kilos mais bon…on ne se refait pas.

Une dernière frayeur : je cours avec une femme et nous entendons une grosse pierre venir du dessus et nous passer devant à une vitesse folle. On se regarde sans un mot mais on se comprend : chaud !

 

La suite passe vite, trop vite : L’entrée dans Cham avec le plaisir de fouler le bitume (pour une fois), prendre un échafaudage pour traverser une route (déserte !), longer l’Arve où quelques jours avant je me voyais passer la ligne « en vainqueur ». j’ai tellement attendu ce moment.

 

Arrivée dans l’hyper centre...

 

Ma team, toujours fidèle au poste, m’attends au niveau de l’Intersport. Nous faisons les derniers mètres ensemble. Ouaip, bah y a un peu d’émotion là !

Chamonix – 5h09 – 301 ème

 

Les émotions sont mêlées après l’arrivée:

Bonheur d’avoir franchi cette ligne mythique

Fierté d’avoir su outrepasser cette envie d’abandonner entre Champex et Trient

Joie de partager cela avec des personnes que j’aime dont ma petite femme bien sur

Légère déception quand même face au résultat : Terminer en 35h était pile mon plan de départ, mais j’ai longtemps été sur un trend qui me permettait d’envisager les 32/33h sans pauses aussi longues.

Ce dernier point sera vite oublié

 

Quelques minutes après le franchissement de la ligne, c’est un sentiment de plénitude. Je récupère le cadeau finisher, on fait quelques photos, je déguste la bière d’arrivée. 30 minutes plus tard je suis douché et au lit (j’ai tellement rêvé de ce moment durant la course).

 

Dans ma tête trotte quand même l’idée que ce sera mon dernier ultra « 100 miles ».

J’en ai vraiment bavé

Cela a pris beaucoup de temps sur ma vie pro et sur ma vie perso

Je pense que je vais désormais faire un long break puis reprendre sur des formats 60/70 km moins éprouvants

Je pense que je cours après quelque chose que je n’attraperai jamais de toute façon. A quoi bon autant de sacrifices. Je n’ai pas grand-chose à me prouver, ni aux autres.

Bref, la réflexion est déjà engagée sur la suite ou plutôt la non-suite. C’est en réflexion.

L’envie de Off seul ou avec des amis me titille de plus en plus.

 

Un grand merci – du fond du cœur - à ma team Gillou, aux amis du 45 (et aux Runners d’O), aux bénévoles, aux Kikous pour leurs récits et pour le partage d’expérience. C’est une belle communauté.

 

Pour finir, une petite synthèse de ce que j’ai aimé…ou pas

 

J’ai aimé :

Les jours précédents la course et…la nuit d’après

Organisation sans faille du début à la fin

L’émotion du départ

Le versant Italo-Suisse de la course et les sentier après Champex

Les équipes kiné / podo incroyables de professionnalisme et de patience, les bénévoles de manière générale

La diversité des participants, les croisements culturels

L’achalandage des ravitos

 

J’ai moins aimé :

Courir 2/3 de la course de nuit et ne pas profiter pleinement des paysages. Ahh un départ à 6h le vendredi serait génialissime mais business is business

Un parcours avec des portions moyennement fun (route, piste de ski, chemin larges…) on est certes nombreux mais il y a tellement à faire dans le coin (appelez Olivier91)

L’eau gazeuse aux ravitos : si je bois de la gazeuse, c’est évidemment pour ce qu’elle contient en minéraux. Alors proposer de l’eau plate transformée en eau gazeuse par une machine c’est : 1- Sans intérêt pour le coureur / 2- pas digne d’une course comme l’UTMB

Le peu d’échange entre les coureurs durant la course

 

Bonne continuation à toutes et tous

4 commentaires

Commentaire de shef posté le 06-09-2019 à 23:36:01

Bravo, beau ressort mental à la Giète!

Commentaire de Bérénice posté le 07-09-2019 à 11:03:51

Récit palpitant ! Un grand bravo pour la perf, l’analyse à chaque instant, les descriptions...on s’y croirait.

Commentaire de Spir posté le 09-09-2019 à 14:47:21

Et ben, quelle épopée, avec son lot d'incertitudes et de rebondissements ! Heureusement que cette fissure au pied ne s'est pas trop aggravée dans la course. Je te rejoins sur l'importance de l'assistance, ça fait une sacrée différence !

Commentaire de keaky posté le 01-04-2020 à 16:49:54

Gilles 1 - UTMB 1 ;)
Merci pour ce récit bien détaillé également !!! J'ai vraiment ressenti les mêmes choses que toi, beaucoup trop de nuit et peu de partages entre coureurs. Mais je t'invites à aller voir le Val Veni de jour, il est magnifique :)
Ta synthèse perso sur le format 100 miles me correspond bien ;) On a fait presque course similaire à 7h d'écart ;)
Encore bravo, quel mental avec les pieds dans cet état !!!

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.21 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !