Récit de la course : Ultra Trail du Mont Blanc 2003, par nicocz

L'auteur : nicocz

La course : Ultra Trail du Mont Blanc

Date : 30/8/2003

Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)

Affichage : 4217 vues

Distance : 150km

Objectif : Pas d'objectif

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Le récit

UTMB à moi...très long aussi

Bon, on s’y met au CR… Mais d’abord l’avant course..depuis le MBM, je me suis entraîné, sans vraiment préparé de plan, juste aller crescendo dans les distances et puis redescendre 3 semaines avant..donc CAP + vélo mais pas de dénivelée…et je lisais tous les messages sur le forum pour essayer de compenser mon inexpérience, me préparer au mieux…Je n’ai pas participé à ces débats, trop inquiet de faire entrer le doute en moi alors que mentalement j’étais bien...j’améliorais sans forcer mes temps sur mes différents circuits et donc j’étais vraiment confiant (insouciant ?)..alors toutes ces questions de gens expérimentés, il y avait de quoi s’effondrer avant même le départ..
Pour moi, nouveau coureur, l’UTMB ça devait être quelque chose, un rite initiatique, une expérience, y compris dans l’acceptation d’un abandon éventuel !!!
Bref j’avais décider de mettre toutes les chances de mon côté en prenant une semaine de congés avant la course et en allant me mettre au vert du côté d’Aix (y compris pas d’ordinateur !!)..
Au niveau CAP, j’ai levé le pied les 15 derniers jours avec je pense à peine 3-4 heures au total..
J’avais envisagé de rejoindre Chamonix quelques jours auparavant pour un peu de tourisme de base mais j’ai préféré arriver seulement le jeudi en fin d’après-midi, histoire de moins cogiter…un vendredi tranquille, une rencontre avec certains UFO, et puis une sorte d’apparition …Dawa Sherpa, incredible men…bon sang il transpire la sérénité et la simplicité... « l’important pour moi, c’est juste d’arriver au bout »…bref, un vrai régal.. vient alors le temps de se poser un peu, pas de sieste mais 45 bonnes minutes les yeux fermés, tranquille..puis le briefing avec un Michel, plein d’émotion..et là je pense « je vais y arriver, et au bout ce sera que du bonheur, c’est sûr.. »
Là, je raccourci mais on se retrouve à 4 heures pour le départ…premier pas, première fois avec une frontale, première course de nuit…voilà les Houches, Le Col de Volza, et tout va bien, je monte à un bon rythme (pour moi) mais me sens très bien…on bascule et là une première descente ; je m’enflamme un peu et double pas mal et puis je me fais doubler par 3 personnes que je suis…bêtement !!! car 4 idiots viennent de rater un virage à gauche et continuent sur la route..je ne vois plus de balises, je lève de plus en plus le pied, me retourne, je ralentis encore et marche pour lire le roadbook sous un lampadaire..un monsieur sort de la maison et me confirme qu’on s’est trompé de chemin..je crie pour rappeler les autres..donc demi-tour, on remonte tout ça..je pense qu’on a bien perdu 30 minutes..mais bon le pire c’est que j’ai tendance à accélérer toujours pour rattraper le retard..je me rends compte que si je veux réaliser mon rêve, il faut que je me calme..je laisse donc partir le coureur avec qui on remontait jusque là…Enfin, voilà les contamines où je retrouve tous les UFO, frais et dispos en train de finir se ravitailler..un peu plus loin, je double Phil, qui venait de s’arrêter au milieu de la route pour une photo (il devait pas trouver la course assez aventureuse, une voiture arrivait à ce moment là !!)…Pitou me précise aussi que la rue d’arrivée au contamine c’était la rue… « Pitou »..je m’excuse de ne pas l’avoir repéré et du coup d’avoir oublié de me prosterner à cet endroit..il ne m’en veut pas visiblement, donc je continue..voilà le fameux « chemin romain », je m’arrête pour une photo car c’est assez surprenant à cet endroit là..Je m’y reprends à deux fois je respire trop fort et la photo me paraît embrumée !!! Dans la montée du col du bonhomme on trouve la pluie..après un ravitaillement où on blague un peu entre coureurs et bénévoles..je décide de protéger mon sac et me fais chambrer à nouveau par un coureur « t’as peur qu’il ait froid ?? »..je me marre..et on se met à tailler la bavette, enfin lui surtout..j’apprendrai plus tard son prénom : Rémi..on se sépare dans la montée...voilà le haut du col du Bonhomme..et là on se pose plus de question, changement de T-shirt et surtout je mets enfin ma veste Gore Tex..c’est dans descente vers la Ville des Glaciers qu’on se retrouve avec Rémi..et là je lève le suspens, on restera ensemble jusqu’à Champex..
La gentille jeune fille, nous dit alors..le refuge des Mottets, c’est à ½ heures !!! visiblement elle a voulu en rassurer beaucoup comme ça..elle a juste oublier de préciser avec quel moyen de locomotion !!parce qu’on a mis beaucoup plus !! Arriver au Mottet on se met un peu à l’abris, j’en profite pour enlever les cailloux des chaussures et demander à tout hasard si le coupe-vent trouvé sur le chemin (dans la descente du Bonhomme) n’était à personne. ;et bin le proprio était à 1 mètre de mois, ravi de revoir son coupe-vent !!!
Vient alors le col de la Seigne qui passe assez bien, avec une descente beaucoup plus facile,pour ma part, que la précédente …on passe dans un large plateau vraiment splendide de mon point de vue…une ligne droite qui ravi le coureur de bitume que je suis et qui rebute complètement mon guide, un pur trailer désormais..nous étions persuadés à ce moment là que plus aucune montée ne se dressait entre nous et Courmayeur : c’était tranquille depuis si longtemps..mais là virage à droite toute et on grimpe à nouveau jusqu’à l’arête Mont Favre..autant dire que c’est pas le moment le plus rigolo dans la tête..mais le plus sympa était encore à venir avec cette descente sur Courmayeur..que j’ai véritablement détesté !! outre le fait de bien voir les maisons en bas pour me rappeler qu’il restait du chemin à parcourir, le chemin contient des marches, toujours extra pour les cuisses…
Nous voilà à Courmayeur..douche, vêtements secs et chauds (cuissard long pour moi), et pasta..nous voici reparti..on traverse Courmayeur (très joli) et on emprunte une route (un vrai repos pour mes pieds !!)..mes intestins me font faire une petite pause mais je ne suis pas trop inquiet, ça ne semble pas augurer de gros problèmes…On marche à un bon rythme, emmené par Rémi..la montée jusqu’au refuge Elena se fait dans la nuit ..on est toujours bien..Au ravito on retrouve une petite dizaine de coureurs..on part dernier dans ce mur mais on garde un bon rythme et on double tout le monde..je me sens bien en haut, on retrouve des gens qui nous encouragent à tue-tête (p**** que c’est bon !!)
La première partie de la descente se passe pas trop mal (petit arrêt pour nico, trop de coup sur mes intestins je ne pourrai pas tenir le rythme !!)..la deuxième partie est horrible : de la boue, de la boue et encore de la boue..en plus par moment je sens bien que le vide sur ma droite n’est pas anondin mais je me refuse à scruter avec la frontale…deux gars qui nous encouragent : « ça va ? »… » « bin plein le c** de la boue !! »… « Ah bon ? »..alors là je suis scié mais bon ils annoncent encore dix minutes et puis une route bien lisse, bien dure…je m’élance sur cette route, Rémi m’a laché dans la descente et comme il se refuse à me laisser depuis le début, j’ai peur qu’il m’attende trop au ravito de La Fouly..je vais à un bon rythme et le rattrape enfin..un peu abattu..il a froid et il n’a pas aimé la boue…moi je suis tellement content d’en avoir fini que je rentre au chaud en chantant « la gadoue, la gadoue.. »..une pause d’un bon quart d’heure je pense et c’est reparti… peu après on voit deux italiens revenir vers nous.. « on trouve pas de balises, on a essayé plusieurs fois et on trouve rien »..on reprend le chemin, elle doit bien être par là …un losange jaune, signalétique du TMB..ça doit être bon..je me poste en tête du groupe et balaye au loin avec ma frontale halogène (au passage je suis ravi de mon choix d’une frontale hybride led/halogène)..et enfin une balise..on appelle le reste du groupe resté en arrière et on continue..les deux italiens, Rémi et moi et un autre coureur partons en tête..à un très bon rythme de marche…on traverse un village…les discussions sur le chemin à parcourir sont assez optimistes mais erronées !!..nouvelle montée pour Champex..on s’en sort pas mal..les deux italiens décrochent et on croise des gars un peu hagards… Rémi mène la danse..et nous voilà à Champex lac…et là sur la partie à plat, le long du lac..Rémi m’annonce qu’il est vraiment trop fatigué et frigorifié pour continuer..merde, j’avais visualisé cette image si souvent jusque là, nous deux les bras sur les épaules arrivant tout sourire à Chamonix… J’essaie vaguement de lui dire qu’il a juste besoin d’un peu de chaleur et de ravito et qu’il repartira..mais il semble tellement sûr de lui, et il a de l’expérience, je n’insiste pas…Champex arrivée 1 km dit le panneau…heu plus tard on aura comme un doute sur cette info..enfin nous voilà au bout de la deuxième étape… à l’entrée deux ambulances..je ne fais pas trop gaffe, je pense « des secours, normal »…
La question : « vous continuez ? », pas d’hésitation « oui »..mais à l’intérieur on dirait un campement des films sur la guerre de sécession…des gens assis, le regard hébété..je croise Patrick Leservoisier qui m’annonce qu’il s’est arrêté à Champex..ça me met un coup parce qu’il est plutôt pas mauvais le bougre.. « c’était trop dangereux », me dit il.. « vraiment ? ».. « oui c’est trop dangereux de courir sur ces chemins »..alors là banane sur mon visage parce que je réponds « c’est vrai y’en a qui courre, mais ça fait longtemps que ça n’est plus un problème pour moi !! ».. je me fais masser et soigner les pieds..au passage des jeunes gens super sympa !! enfin c’est stressant d’être là , des hypothermies à tour de bras, des gars qui s’évanouissent, qui dans les douches, qui se casse le nez en tombant au sol…
Il faut que je parte vite sinon je ne pourrai plus bouger..je mange un morceau, discute avec Rémi qui va un peu mieux..et là son ami Maurice, qu’il a retouvé me dit « tu peux plus continuer, il est passé 6h30, ils ont bougé la barrière horaire !! », il est 6h29 à ma montre mais il y avait un retard de 4 minutes par rapport au départ, je me lève et me précipite au contrôle, je crie une première fois « jusqu’à quelle heure le départ ? », pas de réponse, puis plus fort « elle est à quelle la barrière horaire pour le départ ? »..et là la réponse tombe…. « 7h30 » (hehehe vous y avez cru à la fin du périple !!)..je repars rassuré, finis mon repas.. et me voilà reparti sous la pluie… non sans un encouragement de Rémi, qui a les boules je le vois bien, mais je me dis que j’ai maintenant une nouvelle bonne raison d’arriver..
Un peu de trottine sur le plat, je suis plutôt bien..mais bientôt voilà la montée..des rochers et des racines, avec des marches bien hautes à passer avec un ruisseau permanent dans le chemin..mais c’est pas grave, j’avance bien.. mais là un vrai stress..il faut passer un cours d’eau..certainement un filet habituellement mais là un vrai torrent, infranchissable à ce niveau… je pense un instant que l’aventure va se finir là..mais je ne peux pas en rester là comme ça..je remonte un peu (2-3 mètres) trouve un endroit plus étroit et me jette de l’autre côté..c’est passé !! mince ce bonheur, l’aventure continue…2-3 enjambées de rusiseau du même style plus tard, me voici à la ferme de Bovine.. je discute, parle de Dawa avec les bénévoles qui ont vu passer un extraterrestre tout souriant !! les propos seront les mêmes jusqu’au dernier ravito !! enfin ils me foutent dehors parce que je me sentais tellement bien que j’ai dû y passer plus d’un quart d’heure…je ne me rappelle pas bien de la descente..juste la fin dans des passages où la verdure a fraichement été coupée, bien glissante et puis un petit zig zag assez étrange dans Trient (je me suis demandé s’ils n’avaient pas confondu avec un marathon, histoire de rajouter les 195 m manquant !!)..
Je sais désormais qu’il ne reste qu’une grosse difficulté et j’ai de l’avance..je demande quand même s’ils peuvent vérifier que les autres barrières horaires n’ont pas été modifiées, notamment à Vallorcine..ils appellent, me rassure et puis j’ai même droit à un descriptif précis par un bénévole (merci encore)…on sort du village et on atteint le pied de la dernière grosse montée, ça passe bien, je double un couple (76 et 77 ), et atteint le ravito, me pose une seconde dans le chalet (10 minutes), où on me propose même un steack prévu pour leur repas !!! je remercie mais on va pas prendre de risque avec les intestins qui tiennent bien..voilà la descente, là je suis un peu cuit et mes pieds sont en miettes..le couple me redouble et s’envole..les parties gadoue sont pénibles aussi…au niveau de la plateforme de télésiège, je croise un randonneur.. en slip !!! Je me dis qu’il faudra que j’en discute avec les autres concurrents parce que moi j’ai peur de commencer à délirer ferme..plus tard j’apprendrai que d’autres l’ont vu..ouf !!

La fin de la descente est plus facile et je veux arriver avant 14h , la barrière étant 14h30..je crois y être finalement à 13 h45 donc tout va bien.. l’accueil est encore fantastique à Vallorcine..je retrouve le bénévole qui m’avait décrit l’itinéraire..Je sais désormais que ça va aller mais j’ai plus envie de forcer..j’essaie de trottiner dès que je peux dans les descentes mais mes pieds sont vraiment en feu.. et j’adore les quelques montées !! (j’aurai jamais penser dire ça un jour !!)..voilà la dernière partie n’a rien de fantastique..je sais juste qu’arriver devant l’hôtel Alpina, je n’ai pas su trouver le chemin (il y avait bien cette balise en face de moi, il fallait descendre ces escaliers ??)..tant pis, je sais où est l’arrivée donc je passe par les rues piétonnes..et me voilà sous l’arche..je vois Catherine qui vient vers moi avec un grand sourire..je suis heureux d’avoir réussi, de pouvoir lui rendre hommage ainsi elle que j’admire comme tout le reste de la famille Poletti pour tout ce qu’ils ont fait…je dis 4 conneries au micro (désolé le gens autour, je suis pas certain que c’était très drôle !!) mais je suis content car je n’oublie pas de citer et remercier Rémi (je m’en serai tellement voulu sinon !!)

Voilà mon aventure..avant tout humaine. ;formidable…le jour même j’ai dit « je sais que je suis content de l’avoir fait mais je ne sais pas si j’ai eu du plaisir autrement que dans ma rencontre avec les autres »..mais aujourd’hui je pense que je ferai mon possible pour revenir l’an prochain parce que ça reste la rando la plus intense et la plus belle d’Europe très certainement..par contre j’aurai encore longtemps besoin du bitume, de la course avec ces kilomètres indiqués, de tenter de m’améliorer sur marathon et de m’essayer au 100 km pour trouver mon équilibre dans la compétition (à mon niveau of course !!)

La prochaine fois par contre, je prendrai des batons….

Le soir j’ai été peu loquace je l’avoue mais j’ai été ravi de vous rencontrer tous et bravo encore pour vos perfs à tous..

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nico

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