Récit de la course : Les Templiers 2013, par SevenWil

L'auteur : SevenWil

La course : Les Templiers

Date : 27/10/2013

Lieu : Millau (Aveyron)

Affichage : 3984 vues

Distance : 71km

Objectif : Terminer

4 commentaires

Partager :

252 autres récits :

Grand Trail des Templiers 2013

Grand Trail des Templiers 2013 !!!

 

Bon c'est parti, je me lance dans mon premier récit même si j'ai toujours préféré jouer avec les chiffres plutôt qu'avec les mots.

Pour commencer, c'est la première année ou je cours vraiment sérieusement et où j'enchaine les courses (surtout des trails). Du coup, je n'ai découvert ce site que très récemment en recherchant des avis sur du matos et des infos pour préparer mes courses à venir. J'ai lu avec plaisir beaucoup de récits pour préparer mes 3 dernières courses (La nuit des Cabornes, Le grand Trail du Saint Jacques et bien sûr les Templiers), ils m'ont permis de découvrir les parcours, de glaner de bonnes infos et tout simplement de me plonger avec émotion dans des histoires de course. En retour, je vais donc essayer modestement d'en faire autant en vous racontant mon premier grand objectif … Le grand Trail des Templiers.

 

Côté préparation, j'ai fait beaucoup de bornes cet été avec pas mal de dénivelé … le but n'étant pas d'aller vite mais dans un premier temps d'aller loin. Je suis bien conscient que si je veux progresser, il me faudra des préparations avec plus de séances spécifiques (VMA, Seuil, …) mais l'objectif de cette année était de terminer au moins un trail de 70 bornes.

Au niveau des courses de ces derniers mois, début septembre, les 50 km de La nuit des Cabornes qui se passe moyen, après 20 bornes pépères, les 20 suivantes sont galères (pas un jour sans mais une nuit sans jambes) mais quand même très content car je retrouve la pêche pour les 10 derniers.

Ensuite fin septembre, les 70 km du Grand Trail du Saint Jacques pour apprendre et acquérir de l'expérience sur cette distance. Trail très roulant et malgré un départ très tranquille, à mi-parcours arrive les crampes et une bonne ampoule sous la plante du pied gauche … du coup des hauts et des bas jusqu'à l'arrivée où je finis vidé. J'ai quand même pris du plaisir sur cette course bien organisée mais j'ai surtout beaucoup appris en prévision des Templiers. Il faudra que j'arrive plus frais le jour de la course (10 jours de repos), que je prépare mes pieds pour éviter les échauffements plantaires, que je gère mieux les crampes si besoin et que je travaille mes descentes par exemple. Je sais également que je peux tenir un effort physique d'une dizaine d'heures, que je dois revoir pour l'instant à la baisse ma vitesse moyenne sur ce type d'effort … et qu'il va falloir s'accrocher car les Templiers se sera bien plus costaud. Et j'allai oublier, je suis arrivé tellement vidé que je n'ai pas profité de l'arrivée. J'ai passé la ligne la tête baissée, un petit signe à ma chérie venue m'encourager … content d'avoir terminé mon premier 70 km mais trop peu d'émotion. Promis je profiterai de ce moment sur les Templiers, c'est le plaisir qui guide mes entrainements et il faut que je profite de ces moments en course … en particulier le plaisir de passer la ligne du principal objectif de l'année.

 

3 semaines plus tard me voilà près pour les Templiers avec l'objectif d'essayer de le faire en moins de 12h … vu mon niveau ce serai déjà très bien. Avant la course quelques jours de vacances avec mon fils chez mes parents, à 45 mn au nord de Millau dans ma Lozère natale. Et le vendredi après-midi, en allant ramasser quelques noix, un éclair dans le bas du dos. La douleur m'oblige à m'accroupir … pendant quelques instants je reste là, accroupi, les idées fusent dans ma tête, je sais que mon dos à lâcher (et oui c'est le point faible de la bête), ça fait presque 8 mois sans blessure, j'ai la guigne, pourquoi maintenant ? Putain, c'est foutu pour dimanche, la dernière fois j'ai trainé pendant une semaine sans pouvoir mettre un pied devant l'autre. Soirée merdique, je n'arrive même pas à enlever mes chaussures moi-même, tout le monde me dit que c'est mort pour la course … et je sais qu'ils ont raison. J'ai les boules, mes proches essayent de me réconforter en me disant qu'il y aura d'autres courses mais des mois de préparation pour rien c'est frustrant. J'ai quand même pu avoir un rendez-vous en urgence samedi matin chez un kiné-ostéo. A 8h30, j'arrive chez lui, je le remercie de me recevoir car il a d'autres obligations dans la matinée. Il est non-voyant, dans une pièce en sous-sol et dans la pénombre … je passe une demi-heure entre ses mains. Pour lui rien de très méchant, " ni les muscles du fond, ni le pubis ne sont touchés ", il me dit que mon bassin a retrouvé sa souplesse mais que la douleur restera présente encore au moins pendant 2 jours. Et étonnamment, j'ai l'habitude d'entendre les ostéos me dirent " pendant 2-3 jours repos et pas d'excès alimentaires ", mais là il me dit de bouger, de faire travailler mon dos et de ne pas écouter la douleur. Du coup je lui demande si je peux me lancer dans une course à pied le lendemain (bon c'est vrai, je ne lui ai pas dit que la distance était de 72 km avec environ 3300 de D+ et qu'il me faudrait environ 12 h pour la faire) et la réponse, " c'est à vous de voir suivant vos sensations mais n'essayez quand même pas de la gagner, tranquille ... ". Et avec un sourire, je lui réponds " là, il n'y a aucun risque que je gagne !!! ". Je ressors donc toujours avec le bas du dos douloureux mais j’ai retrouvé un peu de souplesse … et un petit espoir pour la course.

 

Samedi après-midi, retrait des dossards en famille avec la participation de mon fils de 13 ans à la Kinder Trail. C'est ça première course, une première expérience, il se laisse tasser au départ contre les barrières … et sur moins d'1 km 600 pas possible de revenir. Le principal c'est qu'il soit content même s'il râle un peu de ne pas pouvoir participer à des courses plus longues … T'inquiètes, t'inquiètes tu auras le temps de faire plus long, chaque chose en son temps. En résumé, belle après-midi, fier de mon petit homme et au milieu de cette ambiance de course entouré de milliers de trailers … une farouche envie de revenir demain chaussures de trail aux pieds.

Samedi soir, mon dos va mieux, pourtant je viens de faire 1h30 de voiture, j'ai beaucoup marché à Millau et même si j'ai mal, je sens que je suis capable de trottiner. L'ostéo semble avoir fait du très très bon boulot … un petit miracle par rapport à mes précédents lumbagos. Je file préparer mes affaires, ensuite dodo, réveil prévu à 3h15 et on décidera à ce moment-là.

 

Petite nuit mais le dos va beaucoup mieux et maintenant plus d'hésitation … c'est parti. Après 45 mn de voiture et un petit tour en navette me voici en train de remonter le flot de coureur.

Il est 5h10, il fait bon, même pas la peine de mettre une veste, je suis content d'être là au milieu du paquet de coureur dans le sas 3. J'ai prévu de partir doucement et je croise les doigts pour que le dos tienne jusqu'au bout. Les 5 mn passent très vite, j'essaye mais impossible de lancer ma Suunto Ambit 2, pas de synchro GPS, d'habitude c'est ok en quelques secondes et pour la première fois il lui faudra environ 15mn. Mais ce matin je suis zen, tant pis ce n'est pas très grave, le principal est d'avoir la chance d'être là.

 

Ca y est, le compte à rebours, la musique d'ERA et c'est parti sous les fumigènes rouges … quel pied, que d'émotions d'être là au milieu de 2500 coureurs et encouragé par des centaines de spectateurs.

 

Dans ce long flot de frontale, je trottine tranquillement (d'après un voisin environ 10,5 km/h). Je me répète de profiter de cette journée car j'ai failli la passer assis dans un canapé avec beaucoup de frustrations. La première montée de Carbassas se passe nickel, je sens que mon dos, mes jambes se mettent en route sans problème. Je me cale dans la file indienne de frontale, on marche rapidement et en arrivant au sommet on laisse les lumières de Millau en bas sur la droite. Je me dis que la journée risque d'être longue et que j'espère revoir Millau en fin d'après-midi … si possible de jour. Voilà l'objectif du moment, une arrivée de jour et ne pas ressortir la frontale.

 

La traversée du Causse Noir passe vite même si je me traine volontairement. Je sais qu'il faut arriver relativement frais au 50 km et j'ai encore un doute pour mon dos. Je me dis, vas doucement et tu iras loin. Dans cette fin de nuit, devant moi un coureur bute sur une pierre et s'étale de tout son long. Il se relève sans gros bobo apparent mais cet événement me plonge dans mes pensées. Si cela m'arrive, en voulant me rattraper, mon dos ne tiendra pas le coup. Il va donc falloir que je me concentre un peu plus et oui j'ai tendance à oublier de lever les pieds quand l'attention se relâche. Le jour se lève sur le causse et permet enfin de voir le paysage qui nous entoure. Par contre je suis un des derniers à éteindre ma frontale, j'ai trop peur de ne pas voir une racine ou une pierre. Je reste très concentré sur où je mets mes pieds. Et après cette large piste au chacun est libre de courir à son rythme, on attaque le premier single pour descendre sur Peyreleau. J'attaque doucement cette première descente, j'essaye de rester souple sur mes jambes pour éviter les chocs et je fais toujours très attention où je pose mes pieds. Très vite on se retrouve à la queue leu leu et le rythme me convient bien, même si derrière, j'entends quelques impatients qui voudraient envoyer dans la descente. Le seul problème du moment est que j'ai trop serré mes lacets et j'ai une douleur sur le dessus du pied mais j'attendrai d'être au ravito pour les desserrer. Sinon, je suis content déjà plus de 2 heures de course et tout va bien, j'ai bien pensé à m'hydrater un petit peu tous les ¼ d'heure. Il fait un super temps et magnifique paysage avec les Gorges du Tarn et de la Jonte en contre bas. On entend maintenant les encouragements des spectateurs et très vite on arrive au village pour le 1er ravito en presque 2h33 (classement : 1170). J'avale du salé et du sucré avec plusieurs verres de boisons énergétique et coca. Et oui contrairement au dos, l'estomac est costaud. Après avoir desserré mes lacets, je repars avec une pâte de fruit et une barre de céréale que je mangerai tranquillement pendant la remontée sur le Causse Noir.

 

La première partie est finie et on attaque la deuxième difficulté après une centaine de mètres. Très vite on se retrouve en file indienne et derrière moi, un râleur indique que comme l'année dernière ça va bouchonner. Mais pour moi, la vitesse est idéale. La plupart du temps je m'accroche aux mollets qui sont devant moi et quand je suis un peu plus facile, j'en profite pour m'alimenter et boire. Cette montée est dure pour les cuisses (même si je n'ai pas encore vu les suivantes) mais vraiment agréables sur ce single en sous-bois. On s'approche enfin des gros rochers qui dominent les Gorges de la Jonte et voici la deuxième côte de franchie, il en reste plus que 4. Et c'est au moment de reprendre la course quand commence le replat que j'ai une alerte dans le du bas du dos. Sur le moment petite frayeur, je m'arrête de courir, marche un petit peu, me redresse bien. Je comprends d'où vient le problème, je suis resté courbé pendant la montée en appuyant les mains sur les genoux et il n'a pas aimé que je reparte brutalement au pas de course. Il faudra que je fasse attention après chaque partie montante. Contrairement à la première partie sur le Causse Noir, celle-ci est bien plus vallonnée et boisée. Voilà 30 km de parcouru, tout va bien à part une petite pointe derrière une cuisse et encore une chaussure trop serrée. Je suis vraiment trop nul de ne pas avoir pris le temps de mieux lacer mes chaussures. Les kilomètres défilent en alternant course et marche dans les petites montées et j'arrive enfin au 2ème ravito à Saint André de Vézines en 4h08 (classement : 1053). Je sens que les kilomètres commencent à peser sur les jambes donc je prends le temps de bien m'alimenter avec du salé (soupe et tartine de roquefort) et sucré (banane, barre de céréales et pâtes de fruits, …). Je fais également le plein de mes 2 gourdes que j'ai vidé en alternant eau et boisson énergétique avec 2-3 gorgées toutes les 15 mn. Par contre croyant mettre une boisson énergétique dans ma 2ème gourde, je me retrouve avec de la soupe énergétique. Surprenant lors de la première gorgées mais finalement elle est bien passée et cela m'a changé du gout sucré. J'en profite également pour quitter mes baskets et bien les secouer … trop désagréable les quelques gravillons ou brindilles sous les pieds. Une fois les baskets bien lacés (enfin) c'est reparti sous les encouragements de nombreux spectateurs comme dans tous les villages traversés.

 

Et très vite, j'arrive à mi-course en cheminant sur cette partie du Causse que j'imaginais moins vallonnée. J'ai ressenti la première petite morsure d'une crampounette … Il reste des bornes, il va falloir gérer. J'ai pris du sporténine ce matin et j'ai avec moi un tube homéopathique de Cuprum Métallicum 5ch. J'en prends 5 gélules pour la premières fois et j'en reprendrai toutes les fois où les crampes feront leurs retours. Un concurrent qui me double à ce moment-là, me lance « Un bon petit effet placébo, l’Arnica » et on papote sur les crampes et les remèdes … et il me sème définitivement en me disant « du Cuprum, c'est pas con ». On verra bien !!!

On s'approche maintenant des Gorges de la Dourbie, c'est magnifique. On longe des petites falaises pendant quelques temps et certains s'arrêtent pour prendre quelques photos. Je regarde tout au fond et par moment, on voit la rivière … la descente va être longue. Et en face on voit bien le plateau du Larzac … on devine la 3ème côte qui va faire mal aux cuisses. J'avais prévu d'appeler ma chérie et mes parents à mi-course pour les rassurer sur ma capacité à finir cette course. Je préfère attendre d'être en face (sur le Larzac) pour le faire, si mon dos et mes jambes vont bien à ce moment-là, ça devrait le faire jusqu'au bout. J'attaque la descente bien physiquement et moralement. Le soleil a fait son apparition et dans cette descente on va avoir chaud car le petit air que l'on avait sur le plateau a disparu. Je double, me fait doubler et reste très concentrer dans les parties techniques. Cette descente comme prévu est vraiment longue mais on se rapproche enfin des cris d'encouragements et du village de La Roque - Sainte Marguerite. Je profite de la traversée du village pour boire et souffler un peu avant la côte qui se profile. Je profite également des encouragements des très nombreux spectateurs … ça fait du bien.

On traverse le pont et tout de suite les choses sérieuses commencent, nouvelle file indienne pour une montée sur le Cause du Larzac. Les cuisses sont dures mais on s'accroche … je me répète que j'ai la chance d'être là et qu’il faut en profiter même si c'est hard. J'arrive en haut avec quelques crampes au niveau des cuisses mais je continu de bien boire et reprend mes gélules « placébo ». Le début du Causse est difficile, tout d'abord le bas du dos a encore du mal de passer de la marche courbé à la course. Les jambes sont lourdes et le mental flanche un petit peu. Je me raccroche au fait que 3 côtes sur 6 sont passées, que l'on a déjà fait la moitié du parcours et que l’on se rapproche du 3ème ravito. Enfin la clameur des spectateurs au loin, le village de Pierrefiche est tout proche et j'arrive à ce 3ème ravito en plus de 6h28 (classement : 959). Je commence par rincer ma gourde qui a contenu la soupe, j'ai bien apprécié mais je préfère repartir avec une boisson énergétique sucrée ce coup-ci. Je rempli bien l'autre avec de l'eau, il fait vraiment chaud et le prochain ravitaillement est dans une quinzaine de km avec plusieurs difficultés. En filant me restaurer, je passe devant le PC portable du pointage et j'en profite pour demander combien de coureurs sont déjà passés. La bénévole derrière le PC me dit ne pas trop savoir et m'annonce qu'environ 1500 sont déjà passés. Zut, un peu déçu, je ne suis pas dans la première moitié et pourtant c'est une info qui m'aurait boostée. Tant pis, on va s'accrocher et essayer de finir dans la première moitié. Je prends encore quelques minutes à engloutir quelques tartines de roquefort sans oublier fruits, barres de céréales, … le tout arrosé d'eau minérale gazeuse et coca.

 

Et c'est reparti … doucement, je veux profiter d'être en zone civilisée pour appeler mes proches. Premier appel, je tombe sur la messagerie de ma chérie, du coup j'appelle ma mère mais je n'ai même pas le temps que lui dire que tout va bien … ça coupe, plus de réseau. Enervé, je range le téléphone et me force à remettre la machine en route … vraiment dur dur. C'est vraiment la partie de course avec une baisse de mental et j'ai vraiment du mal dans la toute petite côte qui suit Pierrefiche. J'ai mal aux jambes et au lieu de me projeter vers des pensées positives … je commence à m'imaginer faiblir dans les 3 dernières difficultés et finir bien plus tard que prévu. Je continu de mettre un pied devant l’autre et finalement, le profil s'inverse, on attaque la descente vers la Dourbie. Après avoir passé une période à me faire doubler voilà que maintenant je suis le groupe devant moi … ça fait du bien au moral. Je sors enfin de cette mauvaise passe, sûrement sous l'effet des calories englouties au dernier ravito mais aussi (et surtout) à cette longue descente gérée tranquillement. Et, une descente de plus de terminée. On est en sous-bois sur un single magnifique à une dizaine de mètres au-dessus de la rivière. On va la suivre un petit peu avant de remonter sur le plateau du Larzac. J'écoute les conversations autour de moi et j'attends les conseils avisés d'un coureur à son collègue … attention, on va attaquer la plus longue côte. J'avais bien étudié le profil mais j'avais oublié l’aspect  longueur, je me rappelai seulement qu’elle était un peu moins pentue que la suivante. C'est parti en marche rapide, je me retrouve pour la première fois un peu isolé et je monte à mon rythme. De temps en temps je regarde tout en haut pour voir les gros rochers qui indiquent le début du plateau … les minutes défilent en me rappelant que c'est vraiment cool de pouvoir être là. Les jambes commencent à tirer mais un PC sécurité nous annonce la fin de la côte dans quelques dizaines de mètres. J'ai le sourire car cette 4ème côte s'est bien passée. En réalité on a continué à monter bien plus longtemps qu'annoncé et du coup ces derniers raidillons m'ont semblé sans fin. Comme quoi le mental joue beaucoup surtout quand on est fatigué. Mais voilà enfin, le Causse du Larzac, il était temps car les crampes pointaient le bout de leur nez. Environ 60 bornes de parcourue, paysages magnifiques, d’un côté on voit le viaduc et de l’autre le Pouncho d'Agast avec la montée qui nous attend mais je suis content. Je suis encore capable de courir et je pense que je verrai l'arrivée même si je finis en marchant. Avant la descente, je rattrape un couple qui m'avait doublé quand j'étais dans le dur. Je ne pensais pas les revoir (du moins avant l'arrivée) et on va se suivre jusqu'à Massebiau. Le temps a défilé et je n’ai toujours pas rappelé mes proches. Un petit coup de fil rapide pour leur dire que tout va bien et qu’ils peuvent prendre leur temps car je suis encore loin de l’arrivée … et mon fils qui me suit sur le suivi live m’annonce un passage en 959ème position à Pierrefiche, très belle surprise, je ne pensais pas être si bien classé. Retour à la réalité et à cette descente qui m'a semblé interminable. En plus par endroit, elle est vraiment technique vu mon niveau de descendeur et j'évite une bonne gamelle de justesse. En plus sur la fin, on enchaîne des parties très pentues (je n'ose même pas imaginer cette descente dans la boue, s'il avait plu) et des rochers en formes de marche … Aie aie aie les mollets n'apprécient pas du tout. Comme à chaque fois, on entend de très loin les spectateurs et on s'approche de la Dourbie et de Massebiau. Encore plein de monde pour traverser le pont et ce petit village, ils ont rajouté un petit ravito non prévu avec de l'eau … sûrement à cause de la chaleur. J'avais fait le plein à Pierrefiche et j'en ai largement assez pour arriver au prochain ravito à la ferme " Le Cade ". Je trottine tranquillement tout sourire en remerciant les personnes qui m'encouragent et détends au maximum mes mollets qui ont soufferts de petites crampes en fin de descente. A ce moment-là je suis presque content que cela remonte, je me dis qu'un peu de marche va me faire du bien … je vais vite déchanter. Quelle côte !!! J'ai l'impression qu'elles sont de plus en plus dures … et dire qu'il en restera une. Je me suis callé derrière un petit groupe et je m'accroche. A mi-côte, je suis obligé d'appuyer fort sur mes genoux pour passer les grandes marches faites de rochers. Je suis raide … surtout mes cuisses et les crampes sont de retour. Tout le long de cette montée des coureurs sont à l'arrêt et même certains couchés. Par contre mentalement ça va, je me redis que j'ai de la chance d'être là et surtout que mon fils et mon père m'attendent à l'arrivée. Malgré cela dans une épingle je suis obligé de m'arrêter à cause des crampes. Je ne veux pas m'assoir car j’ai trop peur de ne pas pouvoir repartir, pendant 2-3 minutes, je me masse les cuisses, je bois, je mange, un peu de Cuprum Métallicum et je repars. Mais une centaine de mètres plus haut je coince à nouveau, nouvel arrêt, je respire à fond et masse à nouveau les cuisses. Je regarde passer un petit groupe et leur emboite le pas. Allé accroche-toi, on t'attend à l'arrivée, tu as déjà fait les ¾ de la côte. Quelques accompagnateurs venus encourager les leurs sont là au milieu de nulle part et ils nous décrivent ce qui nous attend jusqu'au ravito. Maintenant c'est sûr, le plus dur est passé et je commence déjà à me projeter vers l'arrivée en essayant d'estimer mon heure d'arrivée. Si je ne lâche pas je dois pouvoir passer sous les 12h, me revoilà re-boosté. Une fois sur le plateau, les jambes sont lourdes mais les crampes ont disparu pour l'instant et je peux repartir en trottinant. Encore et toujours du monde pour nous accueillir sur ce dernier ravito, environ 65km de parcouru en 10h31 de course (classement : 875). Voici enfin « Le Cade » très jolie ferme typique des causses mais pas le temps de faire du tourisme. Même s'il reste peu de km, je sais qu'il reste encore une difficulté et je prends donc le temps de remplir mes 2 gourdes et de m'alimenter (hummm, c'est bon du pain d'épice avec du fromage dessus).

 

Après 5 petites minutes d'arrêt au stand, je repars gonflé à bloc. Je sais maintenant qu'il faut courir dès que cela sera possible et passer cette dernière côte en serrant les dents. Je remonte des coureurs sur cette petite partie roulante. J'attaque la descente presque euphorique et avec une pointe d'émotion en m'imaginant passer la ligne avec mon fils. La descente est pentue, ils ont même installé des cordes par endroit mais je suis bien mieux maintenant que dans la descente vers Massebiau. J'ai l'impression d'envoyer (sûrement qu’une impression car je ne suis pas un grand descendeur) même sur la partie pleine de pierres qui termine cette descente. On est maintenant à mi-colline et on longe la pente en sachant qu'il faudra remonter vers les falaises du Pouncho d’Agast qui nous surplombent. Avec le mec qui me précède, on vient de rattraper un petit groupe quand une crampe à l'intérieur de la cuisse droite m'oblige à m'arrêter net. Oh non, merde, pas maintenant, c'est la première fois que j'ai une crampe à cet endroit. Je masse énergiquement, le muscle se détend un petit peu et je repars doucement. Encore 5 granules homéopathiques, je bois, me masse tout en trottinant … et elle me lâche enfin. Je reviens sur le groupe au moment où commence la dernière difficulté. Ça va être costaud mais je sais que c'est la plus courte et surtout la dernière. Et très vite on rattrape pas mal de monde, je ne suis pas seul à en avoir pleins les pattes, certains sont même plus mal en point que moi. Quelques coureurs à l'arrêt par ci, par là et on monte à un tout petit rythme. Même des petits arrêts avant les passages difficiles aux milieux des rochers. J'en profite pour m'alimenter une dernière fois, boire et admirer le paysage avec Millau en contrebas. Les rochers sont raides à monter mais je suis tout sourire, je crois être dans les temps pour passer sous les 12h, je pense à l'arrivée qui se profile. Je sors mon téléphone et remarque que mon fils a essayé de m'appeler une dizaine de fois. La dernière fois que je l'ai rangé, je l'ai mis par mégarde en silencieux. Et juste à ce moment-là, le voilà qui rappelle. Tout va bien, ils m'attendent à l'arrivée et je lui annonce mon arrivée dans une vingtaine de minutes. On est juste sous les antennes du sommet et j'imagine qu'il reste simplement une descente rapide. J'aurai du comprendre que je m'emballai à la mou qu'a fait le mec à côté de moi quand il a entendu mon estimation d’arrivée. Me voici aux pieds des antennes du Pouncho d’Agast, je n’ai pas vu passer la montée et on finira par quelques escaliers que l'organisation nous avait gardés en dessert. Encore beaucoup de monde ici pour nous encourager à finir cette difficulté, merci à eux.

Cette montée à durée plus que prévu et il ne faut pas trainer. Je suis vraiment bien et j'attaque la descente sur un bon tempo mais très vite on se retrouve à la queue leu leu. Ça descend raide dans ce bois et certains n'osent pas ou non plus les jambes pour envoyer. Je reste donc tranquille et écoute un habitué dire que la fin est plus dure que l'année dernière. D’un commun accord, c’est vraiment dur mais c’est magnifique. Très peu ose doubler et je commence à comprendre que si on continue à ce rythme je ne serai pas en bas en moins de 12h. Mais quand on arrive au pied de la toute petite montée pour passer la grotte du Hibou, il y a un tout petit peu de place pour remonter sur le côté et j’accélère. Une bonne montée de la fréquence cardiaque mais je passe tout le groupe juste avant que le sentier se resserre. Me voilà enfin dans le noir en train de passer à tâtons la fameuse grotte du Hibou. A la sortie, je regarde ma montre et je comprends qu’il va falloir accélérer si je veux accrocher les 12h. Euphorique d’en terminer, bien physiquement, je me lance à fond dans la descente. Je saute les grandes marches et enchaine les épingles en m’accrochant aux arbres. Les quelques coureurs que je rattrape m’entendent arriver et se gare pour me laisser passer. Un petit merci au passage et je relance. J’arrive très vite sur une route goudronnée et tellement concentré sur ma descente que je la traverse sans voir mon fils. Je ne m’attendais pas à ce qu’il remonte si haut pour m’attendre. Vraiment content de le voir, je lui demande de me suivre et lui dit qu’on va foncer pour essayer de passer sous les 12h. Plus on s’approche, plus le chemin s’élargie, on double quelques coureurs et il m’explique la fin du parcours. Je suis vraiment bien, les jambes déroulent et j’ai assez de souffle pour papoter avec mon fils. Mon père est là au dernier 250 mètres, un signe de la main et j’essaye d’accélérer. Encore quelques marches et voici en fin l’arche d’arrivée … cette fois ci, applaudi par la foule, je profite de ce moment. Je suis tout sourire, je prends la main de mon fils et on passe la ligne ensemble les bras levés. Emu et heureux … même si je viens de voir le compteur qui affiche 12 :02 :43. Quel pied cette fin de course !!! Sur un écran, je vois que je suis 821ème quelle agréable surprise (je m’en fou car je suis content d’être sous les 1000 mais bizarre car le soir sur le classement j’étais 819ème, puis maintenant sur le résultat scratch je suis 826ème et sur le résultat avec détail je suis 825ème ??? Pour un tel évènement, je ne suis pas certain que le chronométrage ainsi que le suivi live sur Internet soit au niveau). Embrassades, photos souvenirs sur l’aire d’arrivée et les félicitations de mon père qui nous a rejoint. Je suis fier de moi avec ma médaille et mon tee-shirt finisher, content d’avoir pu être au départ mais aussi de pouvoir la finir en aussi bonne forme.

En fait c’est ça le plus important, bien plus que le chrono ou la place, c’est d’être assez bien préparé pour bien finir et pouvoir en profiter à 100%.

 

Bon moi qui étais parti pour faire un petit récit, j’ai presque écrit un roman !!! Mais maintenant fini le bla bla, il va falloir reprendre l’entrainement car il reste une SaintéLyon pour finir en beauté cette année.

 

Merci à vous tous pour vos conseils et vos récits,

Merci aux spectateurs, aux bénévoles et à l’organisation pour ce super parcours qui va crescendo dans des paysages magnifiques,

Et enfin un grand merci à mes proches pour leurs soutiens pendant ce week-end riche en émotions et tout particulièrement à ma chérie qui a supporté mes heures d’entrainements.

4 commentaires

Commentaire de Fa² posté le 08-11-2013 à 14:12:29

Superbe récit, on a vécu quasiment la même course (je fini 1 heure après toi quand même).
Je retrouve mes joies et mes coups de mou dans tes écrits, je pense que nous avons eu les mêmes interrogations et nous avons su puiser dans nos motivations pour finir cette terrible côte entre Massebiau et la ferme du Cade. Elle a été fatale à beaucoup.
Comment va ton dos ?
Bravo à toi et félicitations pour ton chrono.

Commentaire de SevenWil posté le 08-11-2013 à 17:21:52

Tout d'abord encore merci pour ton message sur le forum avant la course mais aussi pour ce commentaire. Le dos va bien maintenant, il a été douloureux pendant quelques jours ... comme les cuisses !!!
Bravo à toi aussi en espérant que tu as bien récupéré après cette belle course pleine de joies.

Commentaire de nfkb posté le 21-04-2014 à 08:52:39

très bon récit, ça m'aide à comprendre la course pour préparer ma première participation aux Templiers et ce qui sera ma plus longue course !
merci

Commentaire de poucet posté le 01-09-2023 à 06:53:29

Mythique les Templiers. Felicitations

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Votre annonce ici !

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version mobile - 0.18 sec
Kikouroù est un site de course à pied, trail, marathon. Vous trouvez des récits, résultats, photos, vidéos de course, un calendrier, un forum... Bonne visite !