Récit de la course : 100 km de Millau 2015, par olivier1110

L'auteur : olivier1110

La course : 100 km de Millau

Date : 26/9/2015

Lieu : Millau (Aveyron)

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Distance : 100km

Objectif : Terminer

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100 km millau 2015

Compte-rendu 100 km Millau 2015

Honnête marathonien (3h30 en moyenne, avec une dizaine de marathons à mon actif), je m’élance sur les 100 km sans avoir jamais couru plus de 42,195 km. Côté préparation, j’ai couru deux marathons au printemps (Rome et le Mont-St-Michel) et  suivi le plan d’entrainement  sur 12 semaines de Bertrand COCHARD (Team RaidLight), un des seuls avec seulement 4 séances par semaine (avec deux sorties longues collés le samedi/dimanche). Je le recommande vivement pour tous les débutants sur 100 bornes, l’objectif du plan étant de vous amener au bout de la course et sans véritable objectif chrono. Perso, même si la charge a été conséquente et oblige à sacrifier les matinées du week-end, je l’ai plutôt bien digéré sans jamais souffrir exagérément, à la différence de certains plans marathons où j’en ai vraiment bavé…sans vrai bénéfice à l’arrivée.

Niveau logistique, je choisis de profiter de l’hébergement mis à disposition par l’organisation (à 300m du parc de la Victoire). Et là, autant dire que si jamais je devais refaire Millau je choisirai une autre option…deux nuits blanches (avant et après la course), bercé par les ronflements et les allers-retours aux toilettes de mes camarades qui pour la plupart se lèveront à 6h du matin (!!) le jour de la course (pour un départ à 10h). Heureusement l’excitation du départ fait oublier la fatigue.

Pour l’équipement (je cours sans suiveur), après une longue hésitation (sac à dos ?), j’opte pour la ceinture avec deux bidons d’eau et quelques barres énergétiques. Au final, seule l’eau me sera utile, étant incapable d’avaler les barres énergétiques dont la seule vue me donnera des nausées pendant la course (j’y reviendrais…)!

Je profite de l’attente au départ pour discuter avec d’autres concurrents et là je me rends compte que mon pari est quand même assez osé… tous ont une petite ou grosse expérience sur des courses de plus de 50 bornes et sont étonnés que je me lance sans véritable expérience des très longues distances. Bah oui, j’avais fait la même chose en me lançant sur la marathon (sans jamais avoir couru plus d’un semi) et je l’avais payé assez cher le jour de la course mais j’avais été au bout (certes, en 4h15)…Bon, de toute façon trop tard pour reculer, le départ est dans moins d’une heure…

Après la traditionnelle marche dans Millau jusqu’à la ligne de départ, c’est parti avec du Van Halen (ça fait toujours plaisir) pour nous accompagner en musique. Il fait beau, juste chaud (13° au départ), c’est parfait !!

1ére boucle                     

Sur cette première partie, la tactique est simple : courir à 10 km/h (contre 12km/h pour un  marathon classique) pour boucler le marathon aux alentours de 4h15 et surtout sans puiser dans les réserves. En fait, je tiens à ne pas trop « trainer » sur le marathon, de peur que le reste de la course me paraisse encore plus long.

Cette première boucle se passe sans trop d’histoire, les paysages sont magnifiques, l’organisation au top et l’ambiance dans le peloton particulièrement sympathique, bien plus que sur les marathons où la course au chrono rend les concurrents souvent hargneux, pour ne pas dire plus…

Je tiens sans problème la moyenne mais le parcours est un peu plus vallonné que je ne l’imaginais, surtout dans le deuxième semi, et je commence à ressentir quelques petites douleurs inquiétantes au 35ème. Et là, le début du commencement d’une légère inquiétude…si déjà je commence à souffrir avant même la fin du marathon, dans quel état je vais être après 60 ou 70 bornes et la succession de côtes de la deuxième boucle?

Bref je commence à cogiter, un peu trop, jusqu’à l’arrivée à Millau.

J’avoue que je craignais la fin du marathon et le ravitaillement dans le gymnase de Millau, où j’avais un peu peur de prendre un coup au moral avec les marathoniens qui, eux, en ont fini et la tentation de s’arrêter là…à 300 m de mon matelas pneumatique.

Du coup, je traine un peu au ravito (mais je commence à avoir du mal à avaler du solide) et repart doucement dans Millau pour le début de la vraie course !

2ème boucle 

Pas de tactique pour cette deuxième boucle, trop d’inconnues pour moi ! Je me dis juste que si je coince dans les montées (et je vais coincer), je ne forcerai pas et la ferai en marchant. Encore une fois, l’objectif est de finir, pas de faire un temps. Je vais également prendre mon temps aux ravitaillements, mais  je sens que mon estomac commence à protester.

La sortie de Millau se passe sans encombre et j’arrive assez vite dans Creissels ou un dernier ravito nous attend avant le début des hostilités… un dernier rond-point avant la montée du viaduc et là, la claque !

Je suis scotché au bitume dès les premiers mètres, avec l’impression de courir (marcher plutôt) sur une autoroute en plein soleil ! Et autour de moi c’est guère mieux, les suiveurs mettent pied à terre, certains coureurs font demi-tour et redescendent vers Millau ! Ce sera la seule fois de la course où je me demanderai sérieusement ce que je fais là à marcher et souffrir alors qu’on n’est qu’à la moitié (en km hein, pas en difficultés !) de la course. Je vis cette montée (3 km environ) comme le début d’un calvaire, alors qu’en fait ça sera mon seul vrai coup dur dans toute cette journée. Certains essaient quand même de courir dans cette montée (et quelques-uns même plutôt bien). Pour ma part, je n’insiste pas, je marche et compte sur la descente pour reprendre un rythme un peu plus digne. J’en profite pour passer un coup de fil à ma chère et tendre pour la rassurer et à priori j’arrive à faire croire que tout ne va pas trop mal… Je passe le km 50 dans un brouillard et entame la descente pas bien vaillant, et là bonne surprise je retrouve mes jambes et rattrape pas mal de ceux qui m’avaient déposé dans la montée (il ne m’avait finalement pris que quelques centaines de mètres). Le phénomène se reproduira dans quasiment toutes les montées/descentes de cette boucle. Moralité : courir dans les montées n’a de sens que si vous tenez un bon rythme et qu’il ne vous épuise pas trop. À mon niveau, autant marcher, j’irai à peine plus vite en courant et j’y laisserai beaucoup plus de plumes que je ne gagnerai de minutes.

Dans cette partie, au moins au début, j’ai payé mon profil de marathonien. Je suis très mauvais en marche rapide, et en plus je vis le fait de marcher dans une course comme un échec alors que sur une course type Millau, la chose est tout à fait normale. Même si on se le dit avant, il n’y a qu’une fois sur le terrain qu’on l’assimile vraiment. Il m’a fallu une côte pour que la leçon soit apprise…

Du coup, le moral remonte. La route aussi, vers St-Rome de Cernon, mais moins que ce que je craignais. Il s’agit en fait d’un long faux-plat que je courre à un peu moins de 10 km/h sans forcer et qui nous amène au 60ème, à un ravito où j’entame mon régime St-Yorre (pour le sel)/Coca (pour le sucre).

En fait, je n’arrive plus à avaler autre chose que du liquide et quelques malheureux sandwichs au jambon.  Je n’essaie même pas de toucher à mes barres énergétiques de peur de les rejeter dans la foulée (par en haut ou en bas !!). Fatalement, je m’inquiète des conséquences que cela pourra avoir sur la fin de course, non seulement parce que je risque un vrai coup de fringale par manque de carburant mais surtout parce que mon estomac ne supportera pas forcément l’abus de boissons gazeuses.  Du coup, je me forcerais après chaque ravitaillement à repartir en marchant afin de ne pas traumatiser mes intestins. 

J’attaque la côte de Tiergues avec cette légère inquiétude, mais que j’oublie bien vite devant la difficulté de la pente qui me ramène à mes douleurs musculaires. La côte me paraît bien raide et je marche dès le début. Je suis rattrapé par un binôme (père et fils ?) qui partage mon avis. Le coureur me dit alors : « bon on va se mettre en mode trail ». Il arrête de courir, se met à marcher et là me dépose littéralement !  Son suiveur est incapable de le suivre, j’essaie d’accélérer le pas mais en quelques secondes il m’a déjà mis au moins 20 m ! Impossible de le rattraper, même en courant ! Vraiment impressionnant…

Je finis la montée tranquillement en m’économisant le plus possible, la route est encore longue. Je souffre beaucoup moins que dans la montée du viaduc et du coup le moral est au beau fixe. Je crois que c’est à ce moment-là que j’ai compris que j’irai au bout.

La descente vers St-Affrique se passe comme dans un rêve, je tiens un petit 10km/h sur cette partie assez longue où nous croisons les premiers qui entament le retour vers Millau, à une allure qui laisse rêveur… Le seule mauvaise nouvelle me vient de ma montre dont la batterie est en train de lâcher…pas trop grave, de toute façon je ne regardai plus trop le chrono, le plaisir est ailleurs !

Je profite largement du ravito à Saint-Affrique (un bon ¼ d’heure, je pense), je récupère mon sac, me passe de la NOK  sur les pieds pour les ampoules, change de chaussettes et enfile un manche longue (la fraicheur de la soirée et de la nuit va vite se faire sentir). Je glisse la frontale dans la ceinture, le temps de téléphoner rapidement et d’envoyer deux-trois messages pour dire que tout va bien (ce coup-ci, c’est vrai !) et c’est reparti vers Millau.

Je me sens encore très bien dans la remontée vers Tiergues ou j’alterne course et marche. Je dépasse pas mal de monde dans cette montée et profite de ce petit moment d’euphorie pour encourager les concurrents qui eux sont en train de descendre vers Saint-Affrique.

Vient ensuite la longue descente vers Saint-Georges de Luzençon qui va nous amener au pied de la remontée vers le viaduc. Je fais toute la descente en courant (à quelle allure, mystère ?) dans un état de fraicheur qui m’étonne vraiment (hormis les douleurs gastriques post-ravitaillement). Je profite d’un ravito pour mettre en route la frontale. La nuit est tombée et j’ai l’impression qu’une autre course commence et pour moi courir en nocturne c’est une première ! Du coup, cela rompt la légère monotonie de la course qui était en train de s’installer dans cette longue partie descendante.

Je m’arrête pour ce qui sera mon dernier ravitaillement à St-Georges, où je ne m’attarde pas. Juste le temps de voir un concurrent qui abandonne, à peine à 10km de l’arrivée ! Je trouve ça tellement dommage de lâcher si près du but, pourquoi ne pas faire ce qui reste en marchant même s’il y met trois heures ? Bon, je me mêle de ce qui  me regarde et je repars…

À la sortie du village, on est déjà dans la remontée vers le viaduc, pas bien longue (3 km) où je reprends la marche avec la ferme intention de tout donner dans la descente vers Millau.  Dans cette partie, et dans un des rares moments où je reprends la course, je rattrape un petit groupe à qui je demande l’heure. Et là, je ne sais plus quelle heure ils m’ont donné, mais je comprends que je vais peut-être finir sous les 12 heures ! Un truc de fou ! Même si je n’avais pas de véritable objectif chrono, je pensais plutôt terminer autour de 14-15 heures.

Du coup, je les plante sur place et finit la montée en courant et attaque la descente comme un avion, même la dernière bosse à Creissels est avalée vitesse grand V et je rentre dans Millau à une allure que jamais je n’aurais imaginée tenir au bout de 97 km. Quelques-uns essaient de prendre ma foulée, mais je crois que personne n’y arrive. Un suiveur déconseille même vivement à son binôme de tenter de me suivre par peur de le voir exploser.

Et là dans la traversée de Millau, tout y passe…les séances du plan à Vincennes, Boulogne, dans le Perche et en Vendée…la famille qui est en train de me suivre sur internet …les collègues de course le midi au boulot…Philippe, mon mentor de running…ma femme et mon petit garçon et leur touchante vidéo envoyée ce matin…etc., etc…mais bizarrement, surtout, je me rappelle de ce gars croisé il y a quelques années au Lac Daumesnil, un soir,  lors d’une de mes premières séances d’entrainement après que je me sois mis à la course et qui m’avait proposé de faire un tour de lac avec lui. Il m’avait laissé à l’agonie au bord du lac après un tour que l’on avait fait à une vitesse qui doit être aujourd’hui celle que je tiens sur marathon. Il m’avait dit que je courrais très bien et que je valais bien mieux que ce qu’on venait de faire. En s’éloignant, il m’avait surtout dit qu’en course à pied, on valait souvent bien mieux que ce qu’on pensait.

Voilà dans le dernier km de ces 100 bornes, j’en suis là : à me dire que finalement, je valais mieux que ce que je pensais.

En passant devant une pharmacie dans Millau, je regarde l’heure : 21h41. C’est bon, les 12 heures sont dans la poche.

Une dernière ligne droite, un virage à droite pour rentrer dans le parc de la victoire, la remontée de l’allée, un dernier virage à gauche pour rentrer dans le gymnase et c’est fait…en 11h47. Je suis un cent-bornard, un truc de fou…

Le temps de prendre mon diplôme, mes petits cadeaux et je fonce au bar prendre…de la Saint-Yorre et du coca !! Sauf que là, j’éprouve le besoin urgent de sortir prendre en l’air…je m’éloigne un peu, pose mes petites affaires, et à peine le temps de dire ouf que tout ce que je dégurgite tout ce que j’ai avalé depuis ce matin. Un secouriste vient voir si tout va bien, je le rassure…de toute façon, les brancards sont en train de rentrer dans la tente des secours, il ne s’attarde pas avec moi.

Je récupère doucement sur une chaise au frais en me passant de l’eau sur la nuque. J’essaie la tente des massages, mais un monde de folie. Je préfère récupérer mon sac (avec mes affaires de douche dedans et de quoi me changer, si jamais vous faîtes cette course pensez-y !) puis prendre une douche. Je reviens dans le gymnase le temps de regarder ceux qui en finissent, puis de profiter du repas d’après-course même si je n’avale pas grand-chose.

Je boîte ensuite jusqu’à mon matelas et m’allonge. Je me rends compte que je ne suis pas trop mal classé (380ème) parce que je suis un des premiers à regagner mon lit (à moins que les autres ne soient partis fêter leurs 100 bornes en ville !). J’avale un doliprane pour les douleurs musculaires et…je regarde le temps passer jusqu’au lendemain matin, la nuit étant rythmé (en plus des ronflements) par le retour des uns et des autres. Je repars le lendemain à 7h30, direction Paris, et je croise encore dans Millau des concurrents en train d’en finir ! Une belle leçon de persévérance…

Finalement, les douleurs post-course ne sont pas pires que celles que j’ai connues après mon premier marathon. Au bout de trois jours, elles ont mêmes quasiment disparues. Et encore, je ne suis pas sérieux sur la question puisque j’ai zappé la case massage et étirements.

Je termine en remerciant tous les bénévoles que nous avons pu croiser sur cette course. Leurs sourires, leur gentillesse et leurs encouragements auront été précieux pour nous accompagner.

Et peut-être à l’année prochaine !!

7 commentaires

Commentaire de Manuwak59 posté le 21-11-2015 à 16:30:13

Bonjour bravo pour ta course rondement menée. J'avais fait exactement la même que toi en 2009 sauf qu' un point de côté au 94eme km m'avait empêché de bien finir. Au final 12 h 26 pour moi.

Commentaire de abc posté le 21-11-2015 à 17:07:27

Hello,
C'est cool, c'est une course mythique, tu as bien géré. J'ai trop envie de faire un 100 bornes, ce sera pour 2017. Bonne continuation.

Commentaire de kld_root posté le 23-11-2015 à 14:47:39

Bj Excellent !! belle course et .... la bonne surprise a l'arrivée ..- de 12h !!!Bravo

Commentaire de natchou posté le 23-11-2015 à 16:00:05

bravo, moi j'ai du m'arrêté a st-Afrique

Commentaire de olivier1110 posté le 23-11-2015 à 21:36:12

Merci à tous!
C'est une course étonnante, qui fait découvrir de nouvelles sensations.@ Walter Kurtz je ne peux que t'encourager a foncer !
Et Natchou tu nous dois une revanche !
En tout cas en 2016 je pense que j'en serai de nouveau...a moins que le trail des templiers...

Commentaire de Berty09 posté le 28-11-2015 à 08:51:11

Bravo et merci du partage!

Commentaire de Mickael CRUBLEAU posté le 07-01-2017 à 14:19:46

bravo à toi,
J'ai fait cette course la même année et comme toi je la recommande vivement, l'ambiance est exceptionnelle, les paysages magnifiques et une organisation au TOP.
Nous avons du faire la course pas loin l'un de l'autre car mes temps sont a peu prêt équivalent, je termine en 11h43. Nous avons du nous parler (car je suis un bavard...lol et avec mon numéro 10 je ne passais qu'à moitié inaperçu...)
Vraiment bravo pour cette performance en tout cas.

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