Récit de la course : Marathon de Paris 2008, par francois 91410

L'auteur : francois 91410

La course : Marathon de Paris

Date : 6/4/2008

Lieu : Paris 16 (Paris)

Affichage : 2315 vues

Distance : 42.195km

Objectif : Terminer

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Mon (premier) marathon de Paris

Mon (premier) marathon de Paris 


Mon MDP, il a commencé comme pour tout le monde il y a plusieurs mois, en novembre. Je me suis dit qu’il fallait marquer le coup pour mes 40 ans, alors un premier MDP c’est sûrement un beau cadeau. On n’est jamais mieux servi que par soi-même.

Malgré quelques sollicitations, je n’ai trouvé personne avec qui le faire, mais tant pis. In extremis, je m’inscris.

Une préparation ‘spéciale’

C’était sans compter, courant novembre, sur une tendinite naissante et de plus en plus handicapante, le marathon de La Rochelle achevant cette belle inflammation au genou – fascia lata priori… Je me souviens encore de mon retour à la voiture après la course, boitant bas, tel un blessé de guerre au bord de la déprime. Résultat : après plusieurs essais dramatiques, 2 mois de repos total. Une misère.

Et les jours qui passent, avec un 6 avril qui approche à grands pas. Je commence à compter à rebours. Est-il possible que je doive renoncer à mon cadeau ? Finalement, avec d’infinies précautions, j’ai commencé à reprendre, pour commencer ma prépa en 8 semaines tout juste, soft.

Pas question d’accumuler trop de kilomètres et de faire une course test à S-4. Je sens au fil des séances que le physique a du mal à suivre, mais la tête et le challenge prennent le dessus. Et avec un grand soulagement, je termine le 23 mars ma dernière séance longue. Jusqu’à la veille du départ, toutes mes sorties de récupération se font en me traînant plus qu’autre chose. D’autant que j’ai dû déménager entre temps (drôle d’entraînement), et la fatigue d’une semaine au ski n’a rien arrangé…

Rien n’y fera : je prendrai le départ quoiqu’il arrive, et je terminerai.

Le jour J

Après 3 jours de féculents plein pot comme il se doit et une nuit plutôt courte et agitée, le réveil sonne comme tous les matins, à 5h45. Mais aujourd’hui, je ne vais pas bosser. Ce ne sera que du plaisir (…)

J’avais pris soin de faire cuire mon gatosport la veille, choco banane pour innover. Ca du mal à passer cette fois. J’en emmène les 2/3, pour la route. J’ai hâte d’arriver sur les lieux du départ, j’ai hâte d’en découdre. Sur Marathon Expo, on m’avait conseillé d’être sur place très tôt. Une petite heure de voiture et me voilà Porte Dauphine. Le barriérage est déjà en place, mais on peut passer. Pas un chat … étonnant. Je trouve une place de parking à 200 m de là, avenue de Pologne ... inespéré. Il est 7h10. Curieuse ambiance, je ne vois aucun coureur à part moi ! A se demander si je ne me suis pas trompé de date !Une demi-heure après, je commence à voir quelques bipèdes en short. Ouf, c’est bien aujourd’hui ( !)

Je sors de la voiture pour sentir la température ; 5°C pas plus. Brrr même en trottinant, c’est limite. Mais bon, je me dis qu’avec le monde qu’il y aura, on se tiendra chaud. J’enfile mon short, mon T shirt manches longues (quand même), je chausse avec les précautions d’usage mes chaussures, et n’oublie pas de m’enduire de crème anti-frottement, dispose mon cardio et insère mes temps de passage possibles dans ma ceinture.

Mes temps de passage, c’est précieux. Surtout qu’avec ma préparation, je ne sais pas du tout où j’en suis en terme de tempo… alors je me suis fixé simplement comme objectif de finir, a priori en moins de 4h, comme la dernière fois à LR. Mais rien n’est gagné.

Quelques minutes avant 8h, c’est parti, je me rends sur la ligne de départ ; l’occasion de confirmer, malgré le sac plastique de Jogging, qu’un petit rayon de soleil serait le bienvenu pour se réchauffer un peu. Les dizaines de coureurs qui affluent maintenant et convergent avec moi n’ont pas l’air d’être plus à l’aise, à part quelques groupes bien constitués où ça se chambre dans la bonne humeur. Ambiance. La pression monte ! On traverse la place de l’Etoile au milieu des voitures (?), et nous voilà sur les Champs. Quelle foule … impensable.

J’aperçois le sas qui m’est destiné : 4h. Je patiente pour y pénétrer. Quelques minutes après, je me fraye un chemin pour me positionner au début du sas. Je préfère car j’aurai ainsi moins de coureurs à doubler si tout va bien.Commence l’attente habituelle d’avant départ. L’ambiance est très conviviale : un bon point. Je discute avec un gars et une fille dont c’est le premier marathon. Pour elle, c’est sa deuxième course, après un semi il y a 15 jours …. Quel challenge. Pour un peu, je passerai pour un vieux routier avec mes deux petits marathons au compteur ! Ca fait bizarre de leur donner des conseils, mais ça me redonne un peu confiance.

Le départ

Après les handis, ça y est, c’est notre départ. On ne voit rien devant. Les minutes s’égrènent, et on avance comme des albatros soucieux d’éviter les sacs plastiques, bouteilles et autres vêtements jetés à terre par les concurrents devant nous. Quel chantier ! A quelques mètres de la ligne, il y en a bien vingt centimètres d’épaisseur par endroit. C’est le moment où on se dit : « surtout ne pas glisser, ne pas se tordre la cheville !! » ; ce serait trop bête…

Enfin, 8 minutes après le départ officiel, je franchis la ligne de départ, au milieu d’un rugissement de plaisir de mes collègues et des spectateurs réunis. Je ne sais pas s’ils ont tous conscience qu’il faut profiter de ce plaisir, qui s’estompera au fil des kilomètres pour devenir un enfer sur les derniers hectomètres !

La descente des Champs est bien agréable, très bon enfant. Beaucoup discutent ou s’interpellent autour de moi… Pour ma part, je suis déjà dans ma course, et suis très attentif à l‘état de la chaussée et aux coureurs devant moi : le trafic est dense.

Avant d’arriver à la Concorde, je m’arrête 30 sec pour me soulager dans la contre-allée… Après ça va mieux, et je peux maintenant commencer à essayer de trouver le bon souffle, la bonne allure.Je me refuse pour l’instant à regarder mon cardio et mon chrono ; je cherche les bonnes sensations, j’en ai besoin.

  si, si, je suis là, un peu à droite au fond...

Après avoir un peu joué des coudes en sortie de la Place de la Concorde, nous sommes à présent rue de Rivoli. Je me dis que nous sommes finalement bien privilégiés de pouvoir emprunter ce parcours, d’ordinaire si trépidant et dangereux. Elle est longue, cette rue, mais bien sympa au niveau du public, notamment les pompiers de Paris qui animent les carrefours à proximité de leurs casernes.

Au km5, ça commence à aller mieux ; je me prépare au ravitaillement, place de la Bastille, en espérant ne pas avoir à bouchonner en sortant vers la rue du Faubourg St Antoine. Quelques morceaux de bananes pris au vol, je m’aperçois après coup que je ne me suis pas arrêté comme j’en ai l’habitude sur marathon. Arrive le faux plat ; on entend le souffle court des coureurs, mais le Boulevard Soult arrive rapidement. On approche du km10, et je commence à me demander quand même où j’en suis de mon chrono ; juste avant les tapis, je remarque un drapeau brésilien, puis mexicain : on vient de loin pour en découdre.

  Km 8 : on a encore le sourire !

Km 10

Passage en 54’53’’ ; je suis tellement dans mon truc et concentré à ménager mon genou que je ne cherche même pas à apprécier ce chrono : trop vite, pas assez vite ? Je ne me rends pas compte : la machine est lancée, mécanique mais souple, elle avance tranquillement à son rythme.

On arrive maintenant dans le bois de Vincennes. Ce sont des coins que je ne connais pas vraiment, alors je découvre ; je trouve ça plutôt joli comme quartier. Encore un faux plat, mais ça passe pas mal. Le km 15 est dépassé sur le même rythme, la même sensation, et j’ai maintenant hâte d’atteindre le semi. Mon cardio monte un peu.

Semi

Plutôt rassuré par mon genou, qui tient, je commence alors à m’intéresser vraiment au chrono : 1h55’51’’. Je consulte cette fois mes tablettes et constate que je suis dans le coup, finalement. Ca serait pas mal de résister jusqu’au bout à cette vitesse… Je suis surpris par la foule qui nous encourage sur le chemin qui nous ramène à la Bastille. Formidable.

Je me méfie toutefois des kilomètres qui suivent, car je me souviens parfaitement qu’à LR, c’est à partir du 28e que je me suis réellement demandé si je pourrai continuer tant cette maudite tendinite me tenaillait, de plus en plus au fil des kilos…

km24.jpg  km26.jpg km 24 et 26 : toujours confiant ... pourvu que ça dure !

27e, 28e, 29e … je ne sens pas davantage de douleur : ça va. Je dois faire vraiment attention aux ravitaillements maintenant, bien marcher à chacun, bien boire. J’attends comme tout le monde le fameux mur, mais une nouvelle fois il ne se présente pas à moi. Tant mieux, c’est toujours ça de gagné. 

Km 30

Je ne ressens pas de mur, mais ça commence quand même à tirer. Il faut commencer à se forcer pour avancer, lever les genoux, ne pas s’endormir dans un faux rythme de ‘confort’. Autour de moi, ça ne parle plus. Dans les tunnels, après une ambiance tonitruante genre « hola » dans les descentes, les remontées se font en silence. Je double de plus en plus de coureurs qui marchent ou sont arrêtés sur le côté, enfermés dans leur douleur du moment.

A nouveau, je suis agréablement surpris du nombre de spectateurs : certains cherchent désespérément à repérer l’un des leurs dans le flot continu de coureurs, d’autres sont des promeneurs du dimanche, des curieux, mais tous nous encouragent. Les banderoles sont élogieuses pour les marathoniens. Ca remonte bien le moral à ce stade de la course ! 

Km 35

Là les choses sérieuses commencent. Je sens bien que je dois ralentir si je ne veux pas exploser mon cardio et exploser tout court plus loin. C’est là que la tête doit absolument prendre le dessus sur le physique. Je ne pense même plus à mon genou ou à autre chose d’ailleurs. Sauf à rester au mieux dans le rythme, et résister, résister.

J’ai emporté un gel ‘coup de fouet’ cette année, une première pour voir l’effet que à va me faire, ou pas. J’ai décidé d’attendre le 37e pour l’engloutir, pour les 5 derniers kilos. Déjà cette récompense du 37e met un temps fou à arriver ; signe de fatigue évident. Normal.

J’espère que je ne suis pas allé trop vite jusque là, je commence à douter. A certains moments, les jambes sont si lourdes qu’on se dit qu’on va s’arrêter un peu, pour marcher, pour récupérer. Mais hors des ravitaillements, je me l’interdis. Je dois avancer.

Au 38e, j’entends des spectateurs qui hurlent (presque) plus que 4 ! Plus que 4 ! C’est vrai, qu’est-ce que c’est, 4 kilomètres à l’entraînement ? Alors je continue sans m’arrêter. Il faut tenir. Mes oreilles sifflent, je ne vois plus personne, ou presque, le regard est bas, très bas. Inconsciemment, je tente de m’économiser pour le final et espère déjà le ravito du 40e.

Km 40

Le temps de passage ne compte plus. Je suis au 40e hurlant. L’heure est à la résistance pour les 2195 m qui restent à parcourir. Assurément la partie la plus longue à négocier. Mais je fais déjà un bilan très positif de ma course jusque là. Je suis en passe de réussir. Je repars comme je peux après le ravito et essaie d’accélérer un peu ; je dois en être capable.

La fatigue aidant, j’ai l’impression que la fin du parcours ne ressemble pas à grand-chose, un peu déprimant avec ces boucles dans le Bois de Boulogne, je ne me souviens même pas des animations. Pourtant, il y a du monde pour encourager les forçats que nous sommes.

Le km 41 est là ; une belle arche, tout aussi fière que les coureurs qui passent en dessous ; alors j’essaie de conserver le rythme soutenu de fin de course, je continue à doubler du monde, comme depuis le départ finalement. Certains sont vraiment à l’agonie, essaient de repartir cahin caha.

Soudainement, je ressens des crampes derrière la cuisse gauche, un coup de poignard… C’est pas possible. Pas maintenant. Je suis contraint de couper mon effort, de ralentir jusqu’à ce que la douleur se résorbe. Pour le coup, ce dernier kilomètre va me sembler long, très long.

J’essaie d’apercevoir le rond-point de la porte Dauphine … toujours pas. Il ne l’ont tout de même pas déplacé !? Enfin, voici cette place. Je double une concurrente portée de chaque côté par des bénévoles, follement encouragée par les spectateurs : pathétique.

Ce coup-ci, j’arrive sur l’avenue Foch. Ca y est, l’émotion m’envahit, comme à chaque fois. Quelle aventure… Dans la douleur partagée par tous les coureurs, je franchis enfin la ligne après un dernier flash victorieux.

Je l’ai fait !

   heureux ... mais pas frais le garçon ...

L’arrivée

Je n’en reviens pas. Tout s’embrouille dans ma tête, je suis au bord des larmes comme beaucoup autour de moi, hagard mais tellement heureux et fier au fond de moi. Je me dis qu’il faut quand même en vouloir pour accepter de souffrir autant. La réussite n’en est que plus belle.

Mon temps, assurément en dessous des 4 heures convoité, est quasi le même qu’à LR : 03h53’56’’. Une grande satisfaction et l’espoir, déjà, de pouvoir descendre en dessous en novembre prochain, à LR à nouveau. Quitte à se trouver un peu fou, autant continuer.

Comme un robot, je suis les autres, prends un bon ravitaillement et rejoins comme je peux la voiture.

Au calme, au chaud.

Je n’en reviens toujours pas.

Je me re-souhaite un bon anniversaire.

Vivement le 30 novembre.

 

François - Dossard 32169

11 commentaires

Commentaire de calimero posté le 11-04-2008 à 19:20:00

J'ai été absorbé par ton récit jusqu'au bout, c'est vraiment bien écrit!!

Bravo pour ta course et ton super chrono en forme de récompense!

Commentaire de chris78 posté le 11-04-2008 à 20:49:00

Effectivement c'est un très beau récit ! Bravo pour ton chrono malgré tes problèmes au genou.
Bonne récupération

Commentaire de gdraid posté le 11-04-2008 à 21:04:00

Merci françois pour ton excellent récit.
Bravo pour la conduite parfaite de ta course, et pour ton mental fort.
JC

Commentaire de moumie posté le 11-04-2008 à 21:27:00

Quel beau cadeau d'anniversaire tu t'es fait, moins de 4h. Bravo.

Il est vrai que ce bois de Boulogne était long avec ces boucles que l'on n'était plus capable de voir :-)

Bonne récupération
Moumis

Commentaire de taz28 posté le 11-04-2008 à 22:36:00

Magnifique récit pour une très belle course !!
Bravo à toi d'être parti malgré le doute de la blessure...
Moins de 4 h : que du bonheur !!

Taz

Commentaire de philtraverses posté le 12-04-2008 à 07:49:00

un beau récit et on est content que tu es terminé et en plus avec un temps intéressant malgré tes soucis de blessure

Commentaire de KIKIVAL posté le 12-04-2008 à 07:59:00

déja avant tout je te souhaite un joyeux anniversaire, et chapeau pour ton marathon bien mené , et ce récit très emouvant. je te souhaite maintenant un aussi beau marathon en novembre prochain a la La Rochelle.
bonne recup
KIKI

Commentaire de hellaumax posté le 12-04-2008 à 13:11:00

C'est un bien bel anniversaire que tu t'es offert, François. Tu as fait un très beau marathon, très bien géré. Bonne chance pour la Rochelle, et refais nous un aussi bon récit que celui-ci.
Amitiès

Commentaire de wil14 posté le 12-04-2008 à 14:11:00

très bon récit, bravo pour ce marathon en - de 4h

Commentaire de loicm posté le 12-04-2008 à 15:10:00

Bon anniversaire à toi !! avec une semaine de retard mais l'intention y est.
Et effectivement quoi de plus beau cadeau que ce défi réalisé avec brio.

Chapeau à toi !!

Loic

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 17-07-2008 à 08:02:00

Je croyais avoir lu tous les CR de Paris cette année ! Le tien est précis et vécu de l'intérieur. Bravo pour ton temps et ta gestion de course. Ce n'est pas comme le Lutin qui s'est vautré lors de cette édition !

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