Récit de la course : Sur les Traces des Ducs de Savoie 2012, par Tonton Traileur

L'auteur : Tonton Traileur

La course : Sur les Traces des Ducs de Savoie

Date : 30/8/2012

Lieu : Courmayeur (Italie)

Affichage : 1783 vues

Distance : 109km

Objectif : Pas d'objectif

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TDS 2012 par Julien (futur Kikoureur ... encore timide ...)

TDS 2012

 Courmayeur Chamonix – 114 kilomètres – 7150 mètres de dénivelé positif

 

 Pour une première tentative au delà des cent kilomètres, je m’inscris sans vraiment y prendre garde à une des courses de l’UTMB. Et oui, à force de côtoyer les traileurs de l’UASG, de discuter des cols alpins en famille, le click de l’inscription paraît simple, comme si leur expérience légitimait le souhait de se frotter au mythe de l’ultra-trail. La préparation est rodée. D’abord sur route pour le marathon. Puis passage aux trails avec deux stages : dans les Bauges et trois jours en groupe autour du Mont Blanc. Malgré une dernière alerte fin juillet sur l’Xtrail, où je fais demi-tour effrayé par les orages, en ce mercredi soir, l’ambiance est détendue devant notre plat de pâtes en Italie. Les vannes fusent : c’est pratique ça permet d’oublier d’avoir peur, et ça masque le bruit de la pluie !

 Jeudi matin, nous prenons notre temps car nous sommes proches de la ligne de départ qui est donné à 7h. Dix minutes avant, je tourne sur la rue à droite en pensant m’installer tranquillement pour attendre le coup de feu. Et là - confrontation avec la réalité de l’UTMB – la rue est remplie de 1400 coureurs ! Heureusement que nos réflexes des 10 kilomètres parisiens reviennent, nous rejoignons Laila, Gilles, Jean-Luc, Alex et sommes finalement plutôt bien placés quand l’hélico (!) nous filme une minute avant le départ. Quelques mélodies lacrymales, le décompte en italien et c’est parti.

 La stratégie avec Damien et Aurélien est fixée : on court ensemble jusqu’au 60ème kilomètre, après … on verra bien. La première montée se fait en rythme car nous voulons éviter les bouchons au Col de la Youlaz. Les gouttes de pluie s’invitent dans la première heure de course et accompagnerons les vingt heures suivantes ! Dans ce col tout en pierre instable, nous faisons connaissance avec les concurrents américains qui extériorisent leur satisfaction au travers de cris aigus et se répondent comme par écho. Nous descendons rapidement jusqu’à La Thuile pour entamer la montée sur le Col du Petit Saint Bernard. L’ambiance est bonne, on s’amuse des quelques glissades et chacun prend des relais dans les parties qui lui conviennent le mieux. Avec sagesse, nous adoptons l’allure du moins rapide des trois. La fin du col est superbe avec un lac à longer, une dernière grosse bosse et le public qui nous encourage au sommet. Bienvenue en France et quinze longs kilomètres jusqu’à Bourg Saint Maurice. Damien fait le rythme et Aurel se tord malheureusement méchamment la cheville. Malgré cela, il repart du ravitaillement avec nous au mental (ce n’est qu’un début). J’avais repéré ce passage sur le profil de la course qui est effectivement très compliqué. Nous prenons un rythme régulier jusqu’au Prasseur de Pralognan (soit 1900 D+ en 11 kilomètres). Pendant que les vocalismes de notre ami américain baissent en intensité, nous voyons Damien s’éloigner dans le brouillard ; il s’arrêtera à la tombée de la nuit faute de parvenir à s’alimenter. La descente suivante est rocailleuse et les chemins sont de plus en plus humides.

 Il est 18 heures, nous arrivons au Cormet de Roselend. Nous nous autorisons une pause plus longue : soupe de pâte, coca/tuc et surtout, je me change : vêtements secs en hauts, sur-pantalon de pluie, gants, bonnet : cette anticipation de la nuit était bonne, j’en ai vu plus d’un se changer dans le froid du col de la Sauce. Une fois ce col passé, je m’autorise pour la première fois à envisager le passage de la ligne d’arrivée : ça fait du bien. Pas trop longue quand même l’image positive, il reste 50 kilomètres. Nous traversons des paysages pittoresques près de la Gitte : un névé, un chemin a pic creusé dans la falaise, un ruisseau dopé par les précipitations de la journée. J’avoue, malgré tout, ne pas vraiment me souvenir de ce passage : c’est peut être le début d’une baisse de forme ou la tombée mêlée de la nuit et du brouillard. Nous voilà finalement en direction du Col du Joly sur un chemin roulant et nous avançons à un rythme agréable. Mais les balises du parcours commencent à disparaître du faisceau lumineux de la lampe frontale qui se reflète dans les nappes de brouillard. Je perds une première fois mon acolyte, puis je perds le chemin que je retrouve finalement grâce aux voix de deux italiens dans la même galère. Au ravitaillement suivant, Aurélien n’est cette fois plus là, il sera contraint à l’abandon 6 heures plus tard victime de chevilles récalcitrantes. Merci Aurélien et Damien, pour les blagues échangées, pour les réconforts, pour le vissage des bâtons à Bourg, pour le partage d’expérience de la longue distance, pour les conseils de relance sur le plat, la gestion, le physique, le mental. J ‘espère que vous saurez accepter une part de la satisfaction qui, au petit matin, a vu poindre le panneau routier « Chamonix-Mont Blanc».

 Au col du Joly, il est 22h15 et le périple s’achèvera donc en solitaire. Le chemin jusqu’à Notre Dame de la Gorge est une longue descente très fatigante pour les muscles des cuisses. A partir de là, je connais le chemin. J’ai la surprise et le bonheur de retrouver mon ami Julien (avec sa fille et ses neveux) aux Contamines. L’instant est génial : je sens dans les regards un peu de rêve et ça me réconforte. Je suis tellement content que je lui pique son t-shirt à manches longues sec et chaud et lui refile en échange mon t-shirt humide et plein de boue. Julien m’informe que je remonte au classement. Je suis très surpris car j’avais l’impression inverse certainement due au grand nombre d’abandon (57%). C’est parti pour la montée aux Chalets du Truc et enfin le col du Tricot. C’est le dernier col mais il est simplement inhumain : d’abord parce qu’il arrive au 100ème kilomètre, ensuite par sa verticalité et aussi parce qu’on le voit dans son intégralité une fois au pied à la faveur des lampes frontales des autres concurrents et de la tente de l’organisation qui nous attend en haut. Je m’attendais à ce passage qui est long, très long, extrêmement long : à force de regarder les coureurs du dessus, les tournants à gauche, les épingles à droite, les concurrents du dessous et cette tente au sommet qui n’arrive  pas. Comme j’avais préparé ce passage délicat, j’avais aussi prévu l’image mentale positive qui va avec : facile c’est à ce moment précis que je fête mon anniversaire. Donc à la faveur du énième virage, je m’autorise un gel au miel et deux bonnes gorgées d’eau fraîche ; un mouton vient participer à la fête ; je l’accueille avec plaisir (je précise au lecteur qui sera arrivé à ce stade du récit qu’il ne s’agit pas là d’une hallucination ni d’une surdose de gel au miel, d’autres coureurs m’ont bien confirmé avoir vu ce dit mouton !)

 Après le col du Tricot, je suis physiquement très entamé mais mentalement je sais que je suis en train de finir. Un joli passage vertigineux en passerelle au dessous du glacier Bionassay vient rompre la monotonie de la descente aux Houches. Les genoux me font très mal et mes pieds souffrent des chocs sur l’avant. Il reste 8 kilomètres dans la vallée que je vais faire à la vitesse stratosphérique de 6 km/h. Et puis les rues de Chamonix sont là, dans la rue centrale les lèves-tôt ou les couches-tard m’applaudissent. Il est 6h, l’objectif est atteint. Un coucou à la caméra du suivi Internet et voilà c’est fait : Finisher en moins de 24h. Au ravitaillement de l’arrivée, je suis dans le vide. Heureusement que Clarisse me réoriente vers l’hôtel. La douche tant attendue se révèle douloureuse : sous la couche de boue apparaissent des plaies insoupçonnées. Le patron, Gilles, est arrivé … en patron : le sourire aux lèvres, plein d’anecdotes de bâtons cassés et retrouvés dans une ferme. Laila termine aussi dans un super temps de 24h50. Je m’accorde une petite sieste et j’allume mon téléphone, les messages affluent : Nathalie et Romain se sont levés tôt pour me voir arriver, je reçois des messages de mes enfants et parents, d’amis, de copains de course et même de mes collègues. Reconnaissons à l’UTMB cette capacité à communiquer autour de l’événement et de ses coureurs, à fédérer au delà du petit monde du trail les émotions de courses exceptionnelles.

 

Voici quelques liens et détails en plus :

Vidéo : Départ, la Gitte, YoulazCol du Joly, … (désolé, il y a des pubs à l’intérieur des vidéos)

Trace GPS (jusqu’au K100) : lien

Le profil du parcours et mes temps de passage :

 

 

 



3 commentaires

Commentaire de didstzach83 posté le 05-09-2012 à 21:24:35

p...g la perf ! bravo pour ta course, tu as su faire l'effort au début et cela t'as réussi ! à biengtot dans le monde des kikous ! envoie ton numéro de dossard dès fois que tu es sur une photo.didier

Commentaire de leptichat posté le 06-09-2012 à 13:48:26

La communauté sera contente de t'accueillir Julien!et en plus kikourou est accessible depuis là où tu bosses! belle manière de décompresser et de rêver de courses entre deux réunions :)
Laila

Commentaire de Insigma posté le 06-09-2012 à 16:00:54

Bravo pour le récit et la perf !
Je crois que ta pointe de vitesse relevée entre les Houches et Chamonix a été quasi la même pour tous les finishers ^^

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