Récit de la course : Ultra Trail du Mont-Blanc 2015, par pierre marion

L'auteur : pierre marion

La course : Ultra Trail du Mont-Blanc

Date : 28/8/2015

Lieu : Chamonix Mont Blanc (Haute-Savoie)

Affichage : 1806 vues

Distance : 168km

Objectif : Pas d'objectif

2 commentaires

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Après la diagonale des fous en 2013 place à l'UTMB en 2015

Nous pensions avoir de l expérience avec la Diagonale des Fous a la Réunion en 2013, mais c est une épreuve très différente que nous avons traversée.

En effet, cet utmb a bien mal commencé pour nous : au bout de 2h/3h de course, j étais trahi par des douleurs au ventre et l un de mes compagnons Tomy baissait les armes. 

Le trio explosait alors et je repartais des Contamines seul et plein de doutes. Heureusement Élise était la pour remotiver les troupes. 

Finalement après avoir retrouver un peu d énergie jusqu a la Balme je serrai les dents sans pouvoir m alimenter et boire correctement dans la montée titanesque de la croix du bonhomme. La descente avalée sans grande difficulté je retrouvais par hasard le 3 eme laron, Benjamin, aux Chapieux. Tant mieux, pour affronter le terrible col de la Seigne, 2ème sommet a plus de 2500m, on est mieux à 2! Et je confirme on respire vraiment moins bien en altitude... 

Heureusement le spectacle fantastique d un lever du soleil sur la face italienne du Mt Blanc nous réchauffa quelque peu (parce que ça pique pas mal sur les cols a 2500!). 

Après une montée/descente (nouvelle sur le tracé) dans des pierriers interminables et avoir réussi à se reposer 10mn dans un refuge, nous avons pu manger un petit déjeuner dantesque au lac combal : soupe de pâtes et coca (un menu très souvent à la carte durant 48h)!

Objectif alors, le ravito de Courmayeur avec la récupération des sacs de survie. Le soleil et la fin des problèmes gastriques (sauf pour l eau) nous redonna du courage pour rejoindre la moitié du parcours. 

Les barrières horaires nous talonnent toujours mais nous nous octroyons 40mn pour passer au stand : podologue pour moi car j ai bêtement cru un vendeur de chaussette qui m avait conseillé de courir avec une paire neuve, résultat: des ampoules depuis le 20ème kilo, et Kine pour benji. 

Avant de repartir nous apprenons que Tomy nous talonne, que faire alors : l attendre et risquer de se faire arrêter au prochain ravito par les barrières horaires ? Ou continuer pour se mettre à l abri et l attendre a Arnuva ? Après avoir tenter de le joindre sans succès, nous partons sur la 2 eme option.

Vous comprenez alors que toute la course fut rythmée par la pression constante de ces barrières horaires fatidiques. Mentalement c est extrêmement dur a tenir.

Nous apprendrons peu après que les barrières horaires de Courmayeur ont eu raison de la superbe remontée de notre ami.

Commence alors l épreuve tant redoutée entre Bretone et Arnuva : affronter quelques 15km dans les pâturages italiens en plein cagnard et quand il est comme pour moi difficile de boire, ça fait peur, surtout que sur la TDS (course de 119km la veille), 35% des coureurs ont abandonné sur un passage similaire ... Heureusement ma bonne vieille saharienne certes au look douteux, et le passage fréquent de ruisseau nous permettent de passer sans encombre. 

A Arnuva, nous commençons alors la stratégie dite de la micro sieste, pour avoir une chance de devenir finisher, soit s allonger 15 mn et tenter de dormir du moins somnoler avec le portable en mode réveil sur l oreille! 

En effet, la terrible 1ère nuit et mes problèmes gastriques m ont pompé trop d énergie... 

C est donc ragaillardi que nous attaquons le plus haut sommet de la course : le grand col Ferret, nous laisserons alors l Italie derrière nous pour arriver en Suisse. 

Tout le monde sait que j aime beaucoup la Suisse mais sur ce coup la je l ai détesté : j ai trop de somnolence pour "accepter" mentalement la victoire, et cette 2ème nuit me fait très peur, à nouveau vos messages et les mots justes de ma chérie me donnent l énergie nécessaire pour continuer. La nuit tombe dans la descente interminable vers La Fouly, il n est même pas 21h et je dors déjà en marchant... Et toujours le même menu soupe / coca pour se refaire une santé au ravito, l heure avancée (pour les suisses !) ne peut pas nous permettre de profiter de l ambiance : il n y en a pas ! D autant plus que ce ravito sent l abandon, la moitié des trailers dorment a même le sol et les visages sont marqués par les plus de 100km parcourus. Nous décidons donc de repartir rapidement, et de nous allonger quelque part pour une nouvelle sieste. Cette fois ci nous jettons notre dévolu sur un balcon de chalet 50 m après le ravito : très mauvais choix , ça caille et des gamins décident à ce moment la  de faire des allers retours dans la rue avec des cloches...

Direction Champex avec toujours peu de marge sur les barrières, on s accroche comme on peut et à nouveau sieste sur ce gros ravito mais cette fois ci on enlève nos chaussures on s enroule dans une couverture et enfin nous arrivons  à nous endormir 6'30" waouhh quel bonheur, c est donc comme de nouveaux hommes que nous attaquons les 3 dernières "bosses" de la course !

Pour ma part nous attaquons ce qui aura été le pire moment de cette 2ème nuit : une interminable montée jusqu a Bovine, ce n est pourtant pas la plus longue sur le papier mais peut être la plus technique. Une longue file de frontale s étend devant nous, et au moment où elles disparaissent pour nous laisser croire que nous avons fini la montée, de nouvelles lumières apparaissent après un virage et nous replonge dans nos doutes. Nous avançons a une allure d escargot, et chaque pas est un calvaire. Personnellement le sommeil devient trop pesant, je pense très sérieusement à abandonner à ce moment la.

Le prochain ravitaillement de Trient est encore loin, et exténués nous décidons de nous allonger dans le chemin à même la terre dans une position ahurissante pour une nouvelle sieste de 10', qui pour ma part sera essentielle : malgré l inconfort j ai vraiment réussi à dormir pour la 2ème fois.

Nous descendons a Trient avec le lever du soleil. Encore un ravito vite expédié et une nouvelle sieste de 10´ au poste de secours, trop de bruit je n arrive pas a m endormir.

On attaque alors l avant dernière ascension, nos commençons alors a réaliser que nous touchons au but, surtout avec la nuit dernière nous, clairement le statut de finisher ne peut plus nous échapper, et nous retrouvons la France et donc vos messages ! (La batterie de mon BlackBerry m a lâché en Suisse et mon iPhone n est pas en mode internationale!).

Ni la montée ni la descente ne nous posent de problème, et en voyant Valorcine, ça tape fort dans nos cœurs mais attention on ne s emballe pas : ça va taper aussi sur les têtes car les températures vont encore être exceptionnelles pour la saison. 

D ailleurs le sommet de notre dernière ascension s appelle la tête au vent ce qui n est pas pour nous rassurer, surtout que la face visible depuis Valorcine ne nous effraie pas mais c était sans compter sur les 300m de D+ caché derrière ! Au sommet, on pense que c est gagné, mais non,  le dernier ravito et point de contrôle est à La Flegere, que nous rejoignons par un long sentier de pierre à découvert qui fait horriblement mal aux jambes, et avec le soleil qui tape très fort, et sans cour d eau pour se rafraîchir l organisation s oblige à monter un ravito "sauvage" qui est la bienvenue! 

Et puis ça y est, Chamonix apparaît et on peut même par moment entendre les clameurs du public et les noms des finishers criés par le speaker, a moins que le manque de sommeil ne me fasse délirer?! Je ne le saurai jamais !

Dans cette longue descente vers Cham, je retrouve un peu de force pour courir et c est tant mieux car je n ai que 25 mn sur les barrières horaires a l arrivée! 

Et puis l émotion vous gagne, les larmes montent aux yeux en pensant au chemin parcouru, aux moments de doute, au manque de sommeil, aux douleurs articulaires, j ai le genou gauche qui coince depuis maintenant trop longtemps...

Et puis je pense a vous, à vos messages, qui m ont tous motivés à leur façon, dont certains m ont vraiment beaucoup touché, et les lames reviennent.

Et puis forcément on se dit -enfin- que ce que l on est entrain d accomplir est hors norme, dingue, surréaliste, pour ne reprendre que quelques expressions que j ai lu, et on est fier de soi. Et les lames reviennent.

Bon en gros je chiale toute la descente !

À Cham, mon pote Benji m attend pour que nous passions la ligne ensemble, on pense forcément alors a Tomy avec beaucoup de frustration...

Mais dans la main, la ferveur du public nous accueille, ça y est, on y est, nous sommes arrivés au bout de ces 170km et 10000m de D+! On voit enfin cette ligne d arrivée, le speaker cite nos noms et personnellement je bloque complètement sur la ligne  en regardant les derniers coureurs arrivés dans la douleur mais tellement heureux! Il est 15h55 et nous aurons mis 45 heures et 55 minutes pour finir cet UTMB 2015. 

Merci encore et rendez vous pour le prochain défi !? ... Pas tout de suite en tout cas pour moi, mais nous avons des idées !

2 commentaires

Commentaire de millénium posté le 03-09-2015 à 12:34:43

émouvant . Bravo pour ta tenacité

Commentaire de tiblam posté le 22-08-2016 à 17:44:04

"La batterie de mon BlackBerry m a lâché en Suisse et mon iPhone n est pas en mode internationale"
T'avais 2 téléphones, t'as pas décroché du taf ... c'est pour ça que les barrières étaient si proches ...
Je déconne, bravo, moi aussi j'ai fait la diag en 2013 - c'était magique -
J'espère ne pas connaitre les memes douleurs que toi cette année, en tous cas, tu l'as très bien géré, car c'est clair que c'est hyper dur psychologiquement d'avoir ces barrières qui brûlent ... surtout quand on est fatigué et qu'on voudrait dormir un peu ...
Bravo encore !!

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